Audience Générale du pape Léon XIV – Mercredi 12 novembre 2025

Photo par Tacho Dimas sur Cathopic

Lors de son audience générale hebdomadaire, le pape Léon XIV continue sa catéchèse dans le cadre du Jubilé de l’Espérance 2025 et invite les fidèles à puiser dans la résurrection du Christ une spiritualité pascale vivante, fondée sur la fraternité, capable de traverser les divisions du monde contemporain et de transformer nos relations.

Lisez le texte intégral de son discours ci-dessous. Vous pourrez suivre l’intégralité de l’émission sur Sel + Lumière TV ce soir à 19h00 HE, 16h00 HP et sur slmedia.org/fr/endirect.

Chers frères et sœurs, bonjour et bienvenue!

Croire en la mort et la résurrection du Christ et vivre la spiritualité pascale alimente l’espérance dans la vie et encourage à investir dans le bien. En particulier, cela nous aide à aimer et à nourrir la fraternité, qui est sans aucun doute l’un des grands défis de l’humanité contemporaine, comme l’a clairement vu le pape François.

La fraternité naît d’une donnée profondément humaine. Nous sommes capables de relations et, si nous le voulons, nous savons construire des liens authentiques entre nous. Sans relations, qui nous soutiennent et nous enrichissent depuis le début de notre vie, nous ne pourrions pas survivre, grandir, apprendre. Elles sont multiples, différentes par leurs modalités et leur profondeur. Mais il est certain que notre humanité s’épanouit pleinement lorsque nous sommes et vivons ensemble, lorsque nous parvenons à expérimenter des liens authentiques, non formels, avec les personnes qui nous entourent. Si nous sommes repliés sur nous-mêmes, nous risquons de tomber malades de solitude, et même d’un narcissisme qui ne se soucie des autres que par intérêt. L’autre est alors réduit à quelqu’un dont on peut tirer profit, sans que nous ne soyons jamais vraiment disposés à donner, à nous donner nous-mêmes.

Nous savons bien qu’aujourd’hui encore, la fraternité ne va pas de soi, elle n’est pas immédiate. De nombreux conflits, de nombreuses guerres à travers le monde, des tensions sociales et des sentiments de haine semblent au contraire prouver le contraire. Cependant, la fraternité n’est pas un beau rêve impossible, ce n’est pas le désir de quelques illusionnés. Mais pour surmonter les ombres qui la menacent, il faut aller aux sources, et surtout puiser lumière et force auprès de Celui qui seul nous libère du poison de l’inimitié.

Le mot “frère” vient d’une racine très ancienne qui signifie prendre soin, avoir à cœur, soutenir et nourrir. Appliqué à chaque personne humaine, il devient un appel, une invitation. Nous pensons souvent que le rôle de frère ou de sœur renvoie à la parenté, au fait d’être apparentés, de faire partie de la même famille. En vérité, nous savons bien à quel point les désaccords, les fractures, parfois même la haine, peuvent dévaster les relations entre parents, et pas seulement entre étrangers.

Cela démontre la nécessité, aujourd’hui plus que jamais urgente, de repenser la salutation que saint François d’Assise adressait à tous, indépendamment de leur origine géographique, culturelle, religieuse ou doctrinale : omnes fratres était la manière inclusive dont Saint François plaçait tous les êtres humains sur un pied d’égalité, précisément parce qu’il les reconnaissait dans leur destin commun de dignité, de dialogue, d’accueil et de salut. Le pape François a repris cette approche du Poverello d’Assise, en valorisant son actualité après 800 ans, dans l’encyclique Fratelli tutti.

Ce “tous”, qui signifiait pour saint François le signe accueillant d’une fraternité universelle, exprime un trait essentiel du christianisme, qui depuis le début a été l’annonce de la Bonne Nouvelle destinée au salut de tous, jamais sous une forme exclusive ou privée. Cette fraternité se fonde sur le commandement de Jésus, qui est nouveau en ce qu’il est réalisé par Lui-même, accomplissement surabondant de la volonté du Père : grâce à Lui, qui nous a aimés et s’est donné lui-même pour nous, nous pouvons à notre tour nous aimer et donner notre vie pour les autres, comme enfants de l’unique Père et véritables frères en Jésus-Christ.

Jésus nous a aimés jusqu’au bout, dit l’Évangile de Jean (cf. 13, 1). Lorsque la passion approche, le Maître sait bien que son temps historique touche à sa fin. Il craint ce qui va arriver, il éprouve le supplice le plus terrible et l’abandon. Sa Résurrection, au troisième jour, est le début d’une histoire nouvelle. Et les disciples deviennent pleinement frères, après avoir vécu longtemps ensemble, non seulement lorsqu’ils vivent la douleur de la mort de Jésus, mais surtout lorsqu’ils le reconnaissent comme le Ressuscité, reçoivent le don de l’Esprit et en deviennent les témoins.

Les frères et sœurs se soutiennent mutuellement dans les épreuves, ils ne tournent pas le dos à ceux qui sont dans le besoin : ils pleurent et se réjouissent ensemble dans la perspective active de l’unité, de la confiance, de l’abandon mutuel. La dynamique est celle que Jésus lui-même nous transmet : “Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés” (cf. Jn 15, 12). La fraternité donnée par le Christ mort et ressuscité nous libère des logiques négatives de l’égoïsme, des divisions, des abus de pouvoir, et nous ramène à notre vocation originelle, au nom d’un amour et d’une espérance qui se renouvellent chaque jour. Le Ressuscité nous a montré le chemin à suivre avec Lui, pour nous sentir frères, pour être “tous frères”.

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

Consultez tous nos articles et la couverture du pape Léon XIV sur notre page :  slmedia.org/fr/pape-leon-xiv

Où se trouve le bon Samaritain à Gaza ? La situation à la lumière de l’Évangile

Crédit photo : IStock

La parabole du bon Samaritain est racontée par Jésus en réponse à une question posée par un docteur de la Loi : « Qui est mon prochain ? » Jésus termine ce récit émouvant en posant une question à son tour : « Lequel de ces trois, à ton avis – le prêtre, le lévite ou le Samaritain –, a été le prochain de l’homme tombé aux mains des bandits ? » Dévoilant la morale de l’histoire, le docteur de la Loi répond : « Celui qui a fait preuve de miséricorde envers lui ». Jésus répondit : « Va, et toi aussi, fais de même » (Luc 10, 25-37).

Cette parabole est une boussole pour nos relations avec tous nos frères et sœurs dans la grande famille humaine, et en particulier ceux et celles qui souffrent. En voyant l’homme qui a été roué de coups et laissé à moitié mort dans le fossé, le prêtre et le lévite, des membres respectés de la société, tenus en haute estime, passent de l’autre côté de la route, détournant le regard comme s’ils ne l’avaient pas remarqué. Au contraire, le Samaritain, méprisé à l’époque comme un idolâtre, s’arrête, et, pris de compassion pour l’homme, l’emmène à l’auberge pour prendre soin de lui.

Jésus souhaite que cette parabole soit une leçon très forte, non seulement pour le docteur de la Loi qui l’interroge, mais également aujourd’hui, pour nous. 

Dans sa lettre encyclique sur la fraternité humaine et l’amitié sociale, intitulée Fratelli tutti (‘Tous frères et sœurs’), le Pape François a souligné l’importance de la parabole du bon Samaritain dans le monde aujourd’hui :

« Cette parabole est une icône éclairante, capable de mettre en évidence l’option de base que nous devons faire pour reconstruire ce monde qui nous fait mal. Face à tant de douleur, face à tant de blessures, la seule issue, c’est d’être comme le bon Samaritain. Toute autre option conduit soit aux côtés des brigands, soit aux côtés de ceux qui passent outre sans compatir avec la souffrance du blessé gisant sur le chemin. La parabole nous montre par quelles initiatives une communauté peut être reconstruite grâce à des hommes et des femmes qui s’approprient la fragilité des autres, qui ne permettent pas qu’émerge une société d’exclusion mais qui se font proches et relèvent puis réhabilitent celui qui est à terre, pour que le bien soit commun. En même temps, la parabole nous met en garde contre certaines attitudes de ceux qui ne se soucient que d’eux-mêmes et ne prennent pas en charge les exigences incontournables de la réalité humaine » (Fratelli tutti, no. 67).

Laissons ces paroles pénétrer notre esprit et notre cœur alors que nous sommes témoins des guerres, des atrocités et des tragédies qui se déroulent dans le monde entier. Demandons-nous : où est le bon Samaritain à Gaza ? Et en Ukraine, au Yémen, au Soudan, en Éthiopie, au Myanmar, en République démocratique du Congo ? Il y a tant d’endroits qui ont besoin de la miséricorde dont fait preuve le bon Samaritain.

Puis, demandons-nous aussi : où est Jésus, le véritable bon Samaritain ? S’identifiant aux plus petits de ses frères et sœurs, Jésus pleure avec ceux et celles qui pleurent la perte tragique de leurs proches, en particulier de leurs enfants. De même, Jésus souffre de la faim avec ceux et celles qui n’ont rien à manger. Jésus agonise avec ceux et celles dont les maisons et les moyens de subsistance ont été détruits. Jésus cherche la paix et espère qu’elle finira par arriver. 

Jésus nous appelle tous à suivre l’exemple du bon Samaritain, chacun et chacune à sa manière, sans fermer les yeux ni passer à côté, mais en se laissant travailler par la miséricorde et en faisant tout notre possible pour aider les autres. Nous pouvons nous demander : quelle est ma réponse face aux souffrances à Gaza, en Ukraine et dans le monde entier ? Que puis-je faire pour rendre concrète ma compassion et ma solidarité envers les victimes de la guerre, de la violence et de la famine ?

Jésus, Prince de la Paix, montre ton amour et ta tendresse à nos frères et sœurs qui souffrent, et apprends-nous à faire de même. Amen.

Conférence des États parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP28): discours du Saint-Père

Le samedi 2 décembre 2023, le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’État du Vatican, a prononcé le discours du pape François lors de la conférence COP28 à Dubaï (Émirats Arabes Unis). Le Saint-Père a affirmé que « c’est à cette génération d’écouter le cri des peuples, des jeunes et des enfants, et de jeter les bases d’un nouveau multilatéralisme. Pourquoi ne pas commencer précisément à partir de notre maison commune ? Le changement climatique signale la nécessité d’un changement politique. Sortons de l’étroitesse de l’intérêt personnel et du nationalisme ; ce sont des approches qui appartiennent au passé. Unissons-nous autour d’une vision alternative : cela contribuera à une conversion écologique. »

Voici le texte intégral:

Monsieur le Président,
Monsieur le Secrétaire Général des Nations Unies,
Illustres Chefs d’État et de Gouvernement,
Mesdames et Messieurs,

Je ne peux malheureusement pas être présent parmi vous comme je l’aurais voulu, mais je suis avec vous parce que l’heure est grave. Je suis avec vous parce que, aujourd’hui plus que jamais, l’avenir de tous dépend du présent que nous choisissons. Je suis avec vous parce que la dévastation de la création est une offense à Dieu, un péché non seulement personnel mais aussi structurel qui se répercute sur l’être humain, en particulier sur les plus faibles, un grave danger qui pèse sur chacun et risque de déclencher un conflit entre les générations. Je suis avec vous parce que le changement climatique est « un problème social global qui est intimement lié à la dignité de la vie humaine » (Exhort. ap. Laudate Deum, n. 3). Je suis avec vous pour poser la question à laquelle nous sommes appelés à répondre à présent : œuvrons-nous pour une culture de la vie ou bien de la mort ? Je vous le demande de manière pressante : choisissons la vie, choisissons l’avenir ! Écoutons le gémissement de la terre, prêtons attention au cri des pauvres, tendons l’oreille aux espérances des jeunes et aux rêves des enfants ! Nous avons une grande responsabilité : faire en sorte que leur avenir ne soit pas refusé.

Il est avéré que les changements climatiques en cours résultent du réchauffement de la planète, causé principalement par l’augmentation des gaz à effet de serre dans l’atmosphère, provoquée elle-même par l’activité humaine qui est devenue insoutenable pour l’écosystème au cours des dernières décennies. La volonté de produire et de posséder s’est transformée en obsession et a conduit à une avidité sans limite qui a fait de l’environnement l’objet d’une exploitation effrénée. Le climat devenu fou sonne comme une alarme pour stopper ce délire de toute-puissance. Reconnaissons de nouveau avec humilité et courage notre limite comme unique voie pour vivre en plénitude.

Qu’est-ce qui fait obstacle à ce chemin ? Les divisions qui existent entre nous. Mais un monde entièrement connecté, comme celui d’aujourd’hui, ne peut pas être déconnecté de ceux qui le gouvernent, avec des négociations internationales qui « ne peuvent pas avancer de manière significative en raison de la position des pays qui mettent leurs intérêts nationaux au-dessus du bien commun général » (Lett. enc. Laudato sì’, n. 169). Nous assistons à des positions rigides, voire inflexibles, qui tendent à protéger des revenus de particuliers et ceux de leurs entreprises, en se justifiant parfois sur la base de ce que d’autres ont fait dans le passé, avec des renvois périodiques de responsabilité. Mais le devoir auquel nous sommes appelés aujourd’hui ne concerne pas le passé, mais l’avenir ; un avenir qui, qu’on le veuille ou non, sera à tous ou ne sera pas.

Les tentatives de faire retomber la responsabilité sur les nombreux pauvres et sur le nombre de naissances sont particulièrement frappantes. Ce sont des tabous auxquels il faut absolument mettre fin. Ce n’est pas la faute des pauvres puisque près de la moitié du monde la plus pauvre n’est responsable que de 10 % à peine des émissions polluantes, alors que l’écart entre les quelques riches et les nombreux démunis n’a jamais été aussi abyssal. Ces derniers sont en fait les victimes de ce qui se passe : pensons aux populations autochtones, à la déforestation, au drame de la faim, à l’insécurité en eau et alimentaire, aux flux migratoires induits. Les naissances ne sont pas un problème, mais une ressource : elles ne sont pas contre la vie, mais pour la vie, alors que certains modèles idéologiques et utilitaristes, imposés avec des gants de velours aux familles et aux populations, représentent de véritables colonisations. Il ne faut pas pénaliser le développement de nombre pays, déjà chargés de lourdes dettes économiques, mais considérer l’impact de quelques nations, responsables d’une dette écologique inquiétante envers tant d’autres (cf. ibid., nn. 51-52). Il conviendrait de trouver les moyens appropriés pour supprimer les dettes financières qui pèsent sur divers peuples, à la lumière également de la dette écologique qui leur est due.

Mesdames et Messieurs, je me permets de m’adresser à vous, au nom de la maison commune que nous habitons, comme à des frères et sœurs, pour nous poser la question suivante : quelle est la porte de sortie ? Celle que vous emprunter ces jours-ci : la voie qui consiste à être ensemble, le multilatéralisme. En effet, « le monde devient tellement multipolaire, et en même temps tellement complexe, qu’un cadre différent pour une coopération efficace est nécessaire. Il ne suffit pas de penser aux rapports de force […]. Il s’agit d’établir des règles globales et efficaces » (Laudate Deum, n. 42). Il est préoccupant, en ce sens, que le réchauffement de la planète s’accompagne d’un refroidissement général du multilatéralisme, d’une défiance croissante à l’égard de la Communauté internationale, d’une perte de la « conscience commune d’être […] une famille de nations » (S. Jean-Paul II, Discours à la 50ème Assemblée Générale de l’Organisation des Nations Unies, New York, 5 octobre 1995, 14). Il est essentiel de rétablir la confiance, fondement du multilatéralisme.

Cela vaut tant pour la protection de la création que pour la paix : ce sont les questions les plus urgentes et elles sont liées. Combien d’énergie l’humanité gaspille-t-elle dans les si nombreuses guerres en cours, comme en Israël et en Palestine, en Ukraine et en beaucoup d’autres régions du monde : des conflits qui ne résoudront pas les problèmes mais les accroîtront ! Combien de ressources sont-elles gaspillées en armements, qui détruisent des vies et ruinent la maison commune ! Je renouvelle une proposition : « Avec les ressources financières consacrées aux armes ainsi qu’à d’autres dépenses militaires, créons un Fonds mondial, en vue d’éradiquer une bonne fois pour toutes la faim » (Lett. enc. Fratelli tutti, n. 262 ; cf. saint Paul VI, Lett. Enc. Populorum Progressio, n. 51) et mettre en œuvre des activités qui favorisent le développement durable des pays les plus pauvres, en luttant contre le changement climatique.

Il appartient à cette génération de prêter l’oreille aux peuples, aux jeunes et aux enfants pour jeter les bases d’un nouveau multilatéralisme. Pourquoi ne pas commencer par la maison commune ? Les changements climatiques mettent en évidence la nécessité d’un changement politique. Sortons des ornières des particularismes et des nationalismes, ce sont des modèles du passé. Adoptons une vision alternative et commune : elle permettra une conversion écologique, car « il n’y a pas de changement durable sans changement culturel » (Laudate Deum, n. 70). J’assure en cela l’engagement et le soutien de l’Église catholique, active en particulier dans l’éducation et la sensibilisation à la participation commune, ainsi que dans la promotion des styles de vie, car la responsabilité est celle de tous, et celle de chacun est fondamentale.

Sœurs et frères, un changement de rythme qui ne soit pas une modification partielle de cap, mais une nouvelle façon de procéder ensemble, est essentiel. Si sur le chemin de la lutte contre le changement climatique, ouvert à Rio de Janeiro en 1992, l’Accord de Paris a marqué « un nouveau départ » (ibid., n. 47), il faut maintenant relancer la marche. Il est nécessaire de donner un signe d’espoir concret. Que cette COP soit un tournant : qu’elle manifeste une volonté politique claire et tangible, conduisant à une accélération décisive de la transition écologique, à travers des formes qui aient trois caractéristiques : qu’elles soient « efficaces, contraignantes et facilement contrôlables » (ibid., n. 59). Qu’elles soient mises en œuvre dans quatre domaines : l’efficacité énergétique, les sources renouvelables, l’élimination des combustibles fossiles et l’éducation à des modes de vie moins dépendants de ces derniers.

S’il vous plaît : allons de l’avant, ne revenons pas en arrière. Il est bien connu que divers accords et engagements pris « n’ont été que peu mis en œuvre parce qu’aucun mécanisme adéquat de contrôle, de révision périodique et de sanction en cas de manquement, n’avait été établi » (Laudato si’, n. 167). Il s’agit ici de ne plus reporter mais de mettre en œuvre, et de ne pas seulement souhaiter, le bien de vos enfants, de vos citoyens, de vos pays, de notre monde. Soyez les artisans d’une politique qui donne des réponses concrètes et cohérentes, en démontrant la noblesse du rôle que vous jouez, la dignité du service que vous accomplissez. Car c’est à cela que sert le pouvoir, à servir. Il ne sert à rien de préserver aujourd’hui une autorité dont on se souviendra demain que pour son incapacité à intervenir quand cela était urgent et nécessaire (cf. ibid., n. 57). L’histoire vous en sera reconnaissante. De même que les sociétés dans lesquelles vous vivez, au sein desquelles règne une division néfaste entre “supporters” : entre les catastrophistes et les indifférents, entre les écologistes radicaux et les négationnistes du climat… Il ne sert à rien d’entrer dans des factions ; dans ce cas, comme pour la cause de la paix, cela ne mène à aucune solution. C’est la bonne politique qui est la solution : si le sommet donne un exemple concret de cohésion, la base en profitera, là où de très nombreuses personnes, en particulier des jeunes, s’impliquent déjà dans la promotion du soin de la maison commune.

Que 2024 marque un tournant. J’aimerais qu’un événement survenu en 1224, soit de bon augure. Cette année-là, François d’Assise composa le Cantique des créatures. Il le fit après une nuit passée dans la douleur physique, devenu complètement aveugle. Après cette nuit de lutte, porté dans son âme par une expérience spirituelle, il voulut louer le Très-Haut pour ces créatures qu’il ne pouvait plus voir, mais qu’il sentait être ses frères et sœurs, parce que provenant d’un même Père et partagées avec les autres hommes et femmes. Un sentiment inspiré de fraternité le conduisit à transformer la douleur en louange et la peine en engagement. Peu après, il ajouta un verset dans lequel il louait Dieu pour ceux qui pardonnent, et il le fit pour régler – avec succès ! – une querelle scandaleuse entre l’Autorité du lieu et l’évêque. Moi aussi je porte le nom de François, avec un ton vibrant d’une prière, je voudrais vous dire : laissons de côté les divisions et unissons nos forces ! Et, avec l’aide de Dieu, sortons de la nuit des guerres et des dévastations environnementales pour transformer l’avenir commun en une aube de lumière. Merci.

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

 

Église en Sortie 23 novembre 2020

Cette semaine à Église en Sortie, Francis Denis reçoit le ministre provincial des Franciscains du Canada Pierre Charland o.f.m. pour parler de l’encyclique du Pape François « Fratelli tutti ». On vous présente la chronique des actualités de la rue avec l’abbé Claude Paradis. Dans la troisième partie de l’émission, on parle de la vie religieuse en ce temps de COVID-19 avec la supérieure provinciale de la Congrégation Notre-Dame, Sr. Francine Landreville CND.

La liberté d’expression selon le pape François

(photo: courtoisie Pixabay) Nos sociétés sont traversées par des bouleversements : globalisation politique, révolution des communications, transformation du monde du travail et pandémie mondiale.  Les défis auxquels nous faisons face demandent plus que jamais l’engagement de tous au processus démocratique. Or, la condition sine qua non à toute démocratie est la liberté d’expression. En effet, ce n’est qu’en permettant le débat ouvert, l’affrontement et le choc des idées que nous pourrons trouver des solutions aux problèmes auxquels nous sommes confrontés. L’encyclique « Fratelli tutti » du pape François est plus qu’éclairante à ce sujet.

Trop c’est comme pas assez

L’encyclique « Fratelli tutti » est d’abord très pertinente en ce qui a trait aux différents risques qui menacent aujourd’hui la liberté d’expression nécessaire à tout débat public fructueux. Le Pape manifeste un premier risque lorsqu’il écrit : « L’accumulation écrasante d’informations qui nous inondent n’est pas synonyme de plus de sagesse. La sagesse ne se forge pas avec des recherches anxieuses sur internet, ni avec une somme d’informations dont la véracité n’est pas assurée… » (no 50). Soyons clair : loin d’inciter à ne pas s’informer, le Pape invite plutôt à exercer un jugement critique face à notre propre appétit d’informations à la lumière d’une vision de la fraternité apte à distinguer le pertinent de ce qui ne l’est pas. C’est en gardant toujours à l’esprit, à la fois, le bien commun et ce qui relève de ma responsabilité que nous saurons consommer la juste quantité d’information.

Disqualifier n’est pas dialoguer

Lorsqu’on considère le climat politique de nos démocraties occidentales, il est difficile de ne pas voir que nous sommes face à plusieurs impasses. La crise de la covid-19 n’a pas manqué de révéler plusieurs lacunes dans nos délibérations démocratiques. Parmi celles-ci, on trouve une augmentation de la partisannerie. Loin d’être le lieu de mise en commun des idées au service de l’innovation et de la mise en marche de grands projets en faveur du bien commun, les débats se réduisent trop souvent à « Uniquement des recettes de marketing visant des résultats immédiats qui trouvent dans la destruction de l’autre le moyen le plus efficace. Dans ce jeu mesquin de disqualifications, le débat est détourné pour créer une situation permanente de controverse et d’opposition » (no 15).

Alors que nous aurions besoin de riches discussions puisées aux plus récentes découvertes de nos universités, au patrimoine local et aux apports et découvertes des autres pays, le dialogue social se perd trop souvent dans ce qui revient à la loi du plus fort. Pourtant, force politique n’équivaut que très rarement à sagesse sociale. Ainsi, l’appel du Pape à la fraternité pourrait nous inspirer une attitude d’ouverture au dialogue et, ainsi, renouveler notre démocratie.

Des interlocuteurs bien enracinés

Un autre risque menaçant le dialogue public est l’uniformisation constante des cultures, laissant de moins en moins de place à la diversité des histoires, des langues, des cultures, etc. On a souvent parlé de l’impérialisme culturel américain. Or aujourd’hui, et cela a aussi des effets positifs, la globalisation a multiplié les pays qui s’affrontent sur ce terrain. Dans ce contexte, les plus petits peuples et cultures qui ne disposent pas de grands moyens sont grandement menacés. Or, comme le dit le Pape :

« Tout comme il n’est pas de dialogue avec l’autre sans une identité personnelle, de même il n’y a d’ouverture entre les peuples qu’à partir de l’amour de sa terre, de son peuple, de ses traits culturels. Je ne rencontre pas l’autre si je ne possède pas un substrat dans lequel je suis ancré et enraciné (no 143).

Développer une meilleure connaissance et cultiver l’amour que nous avons pour notre propre identité est donc une priorité démocratique dont l’urgence ne devrait pas être sous-estimée.

Un Pape bien informé

Dans cette encyclique, le pape François fait preuve d’une très grande lucidité devant les enjeux qui nous concernent. À travers son diagnostic des logiques malsaines et néfastes qui éloignent nos démocraties de leurs fondements, nous sommes tous invités à redécouvrir les attitudes essentielles pour faire face aux défis qui sont les nôtres. Ainsi, par l’amitié sociale, nous pourrons continuer sur ce « chemin de fraternité, local et universel, [qui]ne peut être parcouru que par des esprits libres et prêts pour de vraies rencontres (no 50).

L’encyclique « Fratelli tutti » avec Jean-Marc Barreau PhD.

Cette semaine dans le cadre de son balado « Parrêsia », Francis Denis s’entretient de la plus récente encyclique du Pape François « Fratelli tutti » avec le prêtre, théologien et professeur adjoint à temps plein à l’Université de Montréal Jean-Marc Barreau PhD. Dans ce dialogue 1h23 min, seront notamment abordés les questions de la politique, l’économie, la spiritualité et des principes centraux à la réalisation de sociétés justes et inclusives. Jean-Marc Barreau est notamment l’auteur d’un livre sur le présent pontificat : François et la miséricorde publié chez Médiaspaul 

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