Homélie du Saint-Père sur le front de mer de Beyrouth

Photo Crédit: Vatican Media

Pape Léon XIV, lors de son homélie de la messe offerte sur le front de mer de Beyrouth en présence de plus de 150 000 personnes : « En ce front de mer où se rejoignent la beauté et les blessures du Liban, nous nous rassemblons pour confier au Seigneur nos épreuves et notre espérance. Que cette célébration ravive en nous le désir de paix, de réconciliation et de fraternité pour tout le peuple libanais. ».

Lisez le texte intégral de son discours ci-dessous. Pour en savoir plus sur le voyage apostolique du pape Léon XIV en Turquie et au Liban, rendez-vous sur slmedia.org/fr/turquie-liban.

Chers frères et sœurs,

au terme de ces journées intenses que nous avons partagées dans la joie, nous rendons grâce au Seigneur pour les nombreux dons de sa bonté, pour la manière dont Il se rend présent au milieu de nous, pour la Parole qu’Il nous offre en abondance et pour ce qu’Il nous a donné de vivre ensemble.

Jésus aussi – comme nous venons de l’entendre dans l’Évangile –a des paroles de gratitude envers le Père et, s’adressant à Lui, Il prie en disant : « Père, Seigneur du ciel et de la terre, je proclame ta louange » (Lc 10, 21).

Cependant, la louange ne trouve pas toujours sa place en nous. Parfois, accablés par les difficultés de la vie, préoccupés par les nombreux problèmes qui nous entourent, paralysés par l’impuissance face au mal et opprimés par tant de situations difficiles, nous sommes davantage portés à la résignation et à la plainte qu’à l’émerveillement du cœur et à l’action de grâce.

C’est à vous, cher peuple libanais, que j’adresse cette invitation à cultiver toujours des attitudes de louange et de gratitude. À vous qui êtes les destinataires d’une beauté rare dont le Seigneur a enrichi votre terre et qui, en même temps, êtes les spectateurs et les victimes de la manière dont le mal, sous de multiples formes, peut obscurcir cette magnificence.

Depuis cette esplanade qui surplombe la mer, je peux moi aussi contempler la beauté du Liban chantée dans les Écritures. Le Seigneur y a planté ses hauts cèdres, les nourrissant et les rassasiant (cf. Ps 103, 16), Il a parfumé les vêtements de l’épouse du Cantique des Cantiques avec le parfum de cette terre (cf. Ct 4, 11), et à Jérusalem, ville sainte revêtue de lumière pour la venue du Messie, Il a annoncé : « La gloire du Liban viendra chez toi : cyprès, orme et mélèze ensemble, pour faire resplendir le lieu de mon sanctuaire ; et ce lieu où je pose mes pieds, je le glorifierai » (Is 60, 13).

Mais en même temps, cette beauté est assombrie par la pauvreté et les souffrances, par les blessures qui ont marqué votre histoire – je viens de me rendre sur le lieu de l’explosion, au port, pour prier – ; elle est assombrie par les nombreux problèmes qui vous affligent, par un contexte politique fragile et souvent instable, par la crise économique dramatique qui vous oppresse, par la violence et les conflits qui ont réveillé d’anciennes peurs.

Dans un tel contexte, la gratitude cède facilement la place au désenchantement, le chant de louange ne trouve pas sa place dans la désolation du cœur, la source de l’espérance est asséchée par l’incertitude et la désorientation.

La Parole du Seigneur, cependant, nous invite à trouver les petites lumières qui brillent au cœur de la nuit, pour nous ouvrir à la gratitude et pour nous inciter à nous engager ensemble en faveur de cette terre.

Comme nous l’avons entendu, Jésus ne rend pas grâce au Père en raison des œuvres extraordinaires, mais parce qu’Il révèle sa grandeur précisément aux petits et aux humbles, à ceux qui n’attirent pas l’attention, qui semblent compter peu ou pas du tout, ceux qui n’ont pas de voix. Le Royaume que Jésus vient inaugurer a en effet cette caractéristique dont nous a parlé le prophète Isaïe : il est un germe, un petit rameau qui pousse sur un tronc (cf. Is 11, 1), une petite espérance qui promet la renaissance quand tout semble mourir. C’est ainsi que le Messie est annoncé et, venant dans la petitesse d’un germe, il ne peut être reconnu que par les petits, par ceux qui, sans grandes prétentions, savent reconnaître les détails cachés, les traces de Dieu dans une histoire apparemment perdue.

Cela est aussi une indication pour nous, afin que nous puissions avoir le regard assez clairvoyant pour reconnaître la petitesse du germe qui pousse et grandit même au sein d’une histoire douloureuse. Les petites lumières qui brillent dans la nuit, les petites pousses qui apparaissent, les petites graines plantées dans le jardin aride de cette époque, nous pouvons les voir nous aussi, ici aussi, aujourd’hui aussi. Je pense à votre foi simple et authentique, enracinée dans vos familles et nourrie par les écoles chrétiennes ; je pense au travail constant des paroisses, des congrégations et des mouvements pour répondre aux demandes et besoins des gens ; je pense aux nombreux prêtres et religieux qui se dépensent dans leur mission au milieu de multiples difficultés ; je pense aux laïcs, engagés dans le domaine de la charité et de la promotion de l’Évangile dans la société. Pour ces lumières qui tentent avec peine d’éclairer l’obscurité de la nuit, pour ces petits germes invisibles qui ouvrent cependant l’espérance en l’avenir, nous devons aujourd’hui dire comme Jésus : “Nous te louons, ô Père!”. Nous te remercions d’être avec nous et de ne pas nous laisser vaciller.

En même temps, cette gratitude ne doit pas être une consolation intimiste et illusoire. Elle doit nous conduire à la transformation du cœur, à la conversion de la vie, à considérer que c’est précisément dans la lumière de la foi, dans la promesse de l’espérance et dans la joie de la charité que Dieu a pensé notre vie. C’est pourquoi nous sommes tous appelés à cultiver ces germes, à ne pas nous décourager, à ne pas céder à la logique de la violence et à l’idolâtrie de l’argent, à ne pas nous résigner face au mal qui se répand.

Chacun doit faire sa part et nous devons tous unir nos efforts pour que cette terre retrouve sa splendeur. Et nous n’avons qu’un seul moyen de le faire : désarmons nos cœurs, faisons tomber les armures de nos fermetures ethniques et politiques, ouvrons nos confessions religieuses à la rencontre réciproque, réveillons au plus profond de nous-mêmes le rêve d’un Liban uni, où triomphent la paix et la justice, où tous puissent se reconnaître frères et sœurs et où, enfin, puisse se réaliser ce que nous décrit le prophète Isaïe : «  Le loup habitera avec l’agneau, le léopard se couchera près du chevreau, le veau et le lionceau seront nourris ensemble » (Is 11, 6).

Tel est le rêve qui vous est confié ; c’est ce que le Dieu de la paix met entre vos mains : Liban, relève-toi ! Sois une maison de justice et de fraternité ! Sois une prophétie de paix pour tout le Levant !

Frères et sœurs, je voudrais moi aussi répéter les paroles de Jésus : “Je proclame ta louange ô Père”. Je rends grâce au Seigneur de m’avoir permis de partager ces journées avec vous, tout en portant dans mon cœur vos souffrances et vos espérances. Je prie pour vous, afin que cette terre du Levant soit toujours éclairée par la foi en Jésus-Christ, soleil de justice, et que grâce à Lui, elle garde l’espérance qui ne passe pas.

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Appel du Saint-Père

Chers frères et sœurs,

au cours de ces journées de mon premier Voyage Apostolique, entrepris en cette Année Jubilaire, j’ai voulu venir en pèlerin d’espérance au Moyen-Orient, implorant Dieu d’accorder la paix à cette terre bien-aimée, marquée par l’instabilité, les guerres et la douleur.

Chers chrétiens du Levant, lorsque les résultats de vos efforts pour la paix tardent à venir, je vous invite à lever les yeux vers le Seigneur qui    vient ! Regardons-le avec espérance et courage, en invitant chacun à s’engager sur la voie de la coexistence, de la fraternité et de la paix. Soyez des artisans de paix, des annonciateurs de paix, des témoins de paix !

Le Moyen-Orient a besoin de nouvelles attitudes, pour rejeter la logique de la vengeance et de la violence, pour surmonter les divisions politiques, sociales et religieuses, pour ouvrir de nouveaux chapitres sous le signe de la réconciliation et de la paix. La voie de l’hostilité réciproque et de la destruction, dans l’horreur de la guerre, a été trop longtemps empruntée, avec les résultats déplorables que tout le monde peut constater. Il faut changer de voie, il faut éduquer le cœur à la paix.

Depuis cette place, je prie pour le Moyen-Orient et tous les peuples qui souffrent à cause de la guerre. Je prie également pour la Guinée-Bissau, en espérant une solution pacifique aux conflits politiques. Je n’oublie pas non plus les victimes de l’incendie survenu à Hong Kong et leurs chères familles.

Je prie tout particulièrement pour le Liban bien-aimé ! Je demande une fois encore à la communauté internationale de ne ménager aucun effort pour promouvoir les processus de dialogue et de réconciliation. Je lance un appel pressant à tous ceux qui détiennent une autorité politique et sociale, ici et dans tous les pays en proie à la guerre et à la violence : écoutez le cri de vos peuples qui implorent la paix ! Mettons-nous tous au service de la vie, du bien commun et du développement intégral des personnes.

Enfin, à vous, chrétiens du Levant, citoyens à part entière de ces terres, je répète : courage ! Toute l’Église vous regarde avec affection et admiration. Que la Bienheureuse Vierge Marie, Notre-Dame de Harissa, vous protège toujours.

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

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Audience Générale du pape Léon XIV – Mercredi 26 novembre 2025

Photo de Vidal Balielo Jr. sur Pexels.

Lors de son audience générale hebdomadaire, le pape Léon XIV a poursuivi son cycle de catéchèse sur le mystère pascal, dans le cadre du Jubilé de l’Espérance 2025. Il a réfléchi sur la manière dont l’espérance de la résurrection peut inspirer les couples à engendrer une nouvelle vie, affirmant que « le courage de vivre et d’engendrer la vie, de témoigner que Dieu est l’« amoureux de la vie » par excellence, comme l’affirme le Livre de la Sagesse (11, 26), est aujourd’hui plus urgent que jamais ».

Lisez le texte intégral de son discours ci-dessous. Vous pourrez suivre l’intégralité de l’émission sur Sel + Lumière TV ce soir à 19h00 HE, 16h00 HP et sur slmedia.org/fr/endirect.

Chers frères et sœurs, bonjour, bienvenu !

Chers frères et sœurs, bonjour, et bienvenue !

La Pâque du Christ éclaire le mystère de la vie et nous permet de le regarder avec espérance. Cela n’est pas toujours facile ni évident. Partout dans le monde, beaucoup de vies semblent difficiles, douloureuses, pleines de problèmes et d’obstacles à surmonter. Et pourtant, l’être humain reçoit la vie comme un don : il ne la demande pas, il ne la choisit pas, il en fait l’expérience dans son mystère, du premier jour jusqu’au dernier. La vie a une spécificité extraordinaire : elle nous est offerte, nous ne pouvons pas nous la donner nous-mêmes, mais elle doit être nourrie constamment : il faut un soin qui la maintienne, la dynamise, la préserve, la relance.

On peut dire que la question de la vie est l’une des questions abyssales du cœur humain. Nous sommes entrés dans l’existence sans avoir rien fait pour le décider. De cette évidence jaillissent comme un fleuve en crue les questions de tous les temps : qui sommes-nous ? D’où venons-nous ? Où allons-nous ? Quel est le sens ultime de tout ce voyage ?

Vivre, en effet, implique un sens, une direction, une espérance. Et l’espérance agit comme une force profonde qui nous fait avancer dans les difficultés, qui nous empêche d’abandonner dans la fatigue du voyage, qui nous rend certains que le pèlerinage de l’existence nous conduit à la maison. Sans l’espérance, la vie risque d’apparaître comme une parenthèse entre deux nuits éternelles, une brève pause entre l’avant et l’après de notre passage sur terre. Espérer dans la vie, c’est plutôt anticiper le but, croire comme certain ce que nous ne voyons ni ne touchons encore, faire confiance et nous en remettre à l’amour d’un Père qui nous a créés parce qu’il nous a voulus avec amour et qu’il nous veut heureux.

Très chers amis, il existe dans le monde une maladie répandue : le manque de confiance dans la vie. Comme si l’on s’était résigné à une fatalité négative, à un renoncement. La vie risque de ne plus représenter une opportunité reçue en don, mais une inconnue, presque une menace dont il faut se préserver pour ne pas être déçu. C’est pourquoi le courage de vivre et de générer la vie, de témoigner que Dieu est par excellence « l’amant de la vie », comme l’affirme le Livre de la Sagesse (11, 26), est aujourd’hui un appel plus que jamais urgent.

Dans l’Évangile, Jésus confirme constamment sa diligence à guérir les malades, à soigner les corps et les esprits blessés, à redonner vie aux morts. Ce faisant, le Fils incarné révèle le Père : il restitue leur dignité aux pécheurs, accorde la rémission des péchés et inclut tout le monde, spécialement les désespérés, les exclus, les éloignés, dans sa promesse de salut.

Engendré par le Père, Christ est la vie et il a engendré la vie sans compter jusqu’à nous donner la sienne, et il nous invite également à donner notre vie. Engendrer signifie donner la vie à quelqu’un d’autre. L’univers des vivants s’est étendu grâce à cette loi qui, dans la symphonie des créatures, connaît un admirable “crescendo” culminant dans le duo de l’homme et de la femme : Dieu les a créés à son image et leur a confié la mission de donner la vie à son image, c’est-à-dire par amour et dans l’amour.

Dès le début, l’Écriture Sainte nous révèle que la vie, dans sa forme la plus élevée, celle de l’être humain, reçoit le don de la liberté et devient un drame. Ainsi, les relations humaines sont également marquées par la contradiction, jusqu’au fratricide. Caïn perçoit son frère Abel comme un concurrent, une menace, et dans sa frustration, il ne se sent pas capable de l’aimer et de l’estimer. Et voilà la jalousie, l’envie, le sang (Gn 4, 1-16). La logique de Dieu, en revanche, est tout autre. Dieu reste fidèle pour toujours à son dessein d’amour et de vie ; il ne se lasse pas de soutenir l’humanité même lorsque, à l’instar de Caïn, elle obéit à l’instinct aveugle de la violence dans les guerres, les discriminations, les racismes, les multiples formes d’esclavage.

Donner la vie signifie donc faire confiance au Dieu de la vie et promouvoir l’humain dans toutes ses expressions : tout d’abord dans la merveilleuse aventure de la maternité et de la paternité, même dans des contextes sociaux où les familles ont du mal à supporter le poids du quotidien, souvent freinées dans leurs projets et leurs rêves. Dans cette même logique, donner la vie signifie s’engager pour une économie solidaire, rechercher le bien commun dont tous puissent profiter équitablement, respecter et prendre soin de la création, offrir du réconfort par l’écoute, la présence, l’aide concrète et désintéressée.

Frères et sœurs, la Résurrection de Jésus-Christ est la force qui nous soutient dans cette épreuve, même lorsque les ténèbres du mal obscurcissent notre cœur et notre esprit. Lorsque la vie semble s’être éteinte, bloquée, voici que le Seigneur Ressuscité passe encore, jusqu’à la fin des temps, et marche avec nous et pour nous. Il est notre espérance.

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

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Audience Générale du pape Léon XIV – Mercredi 19 novembre 2025

Photo par Fei Wang sur Pexels

Lors de l’audience générale du mercredi 19 novembre 2025, le Pape François a poursuivi son cycle de catéchèse dans le cadre du Jubilé de l’Espérance 2025 sur le thème « Jésus-Christ notre espérance », s’arrêtant sur la résurrection du Christ et sa portée dans le monde contemporain. Il a invité les fidèles à considérer la Résurrection non seulement comme un événement passé, mais comme un appel à vivre une spiritualité de l’écologie intégrale, transformant notre regard sur la création, sur nos frères et sœurs, et sur notre tâche de « gardiens du jardin ».

Lisez le texte intégral de son discours ci-dessous. Vous pourrez suivre l’intégralité de l’émission sur Sel + Lumière TV ce soir à 19h00 HE, 16h00 HP et sur slmedia.org/fr/endirect.

Chers frères et sœurs, bonjour, bienvenu !

En cette année jubilaire consacrée à l’espérance, nous réfléchissons à la relation entre la Résurrection du Christ et les défis du monde actuel, c’est-à-dire nos défis. Parfois, Jésus, le Vivant, veut aussi nous demander : « Pourquoi pleures-tu ? Qui cherches-tu ? ». En effet, on ne peut pas relever seul les défis, et les larmes sont un don de vie lorsqu’elles purifient nos yeux et libèrent notre regard.

L’évangéliste Jean attire notre attention sur un détail que nous ne trouvons pas dans les autres Évangiles : en pleurant près du tombeau vide, Marie-Madeleine ne reconnut pas immédiatement Jésus ressuscité, mais pensa qu’il s’agissait du gardien du jardin. En effet, dès le récit de l’enterrement de Jésus, au coucher du soleil du Vendredi saint, le texte était très précis : « À l’endroit où Jésus avait été crucifié, il y avait un jardin et, dans ce jardin, un tombeau neuf dans lequel on n’avait encore déposé personne. À cause de la Préparation de la Pâque juive, et comme ce tombeau était proche, c’est là qu’ils déposèrent Jésus. » (Jn 19, 40-4141-42).

C’est ainsi que s’achève, dans la paix du sabbat et la beauté d’un jardin, la lutte dramatique entre les ténèbres et la lumière qui s’est déclenchée avec la trahison, l’arrestation, l’abandon, la condamnation, l’humiliation et la mise à mort du Fils, qui « ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout » (Jn 13, 1). Cultiver et garder le jardin est la tâche originelle (cf. Gn 2, 15) que Jésus a porté à son accomplissement. Ses dernières paroles sur la croix – « Tout est accompli » (Jn 19, 30) – invitent chacun à retrouver cette même tâche, sa tâche. C’est pourquoi, « inclinant la tête, il rendit l’esprit » (v. 30).

Chers frères et sœurs, Marie-Madeleine n’eut donc pas tout à fait tort croyant rencontrer le gardien du jardin ! Elle devait en effet réentendre son nom et comprendre sa tâche de la part de l’Homme nouveau, celui qui, dans un autre texte de Jean, dit : « Voici, je fais toutes choses nouvelles » (Ap 21, 5). Le pape François, dans l’encyclique Laudato sì, nous a montré l’extrême nécessité d’un regard contemplatif : s’il n’est pas le gardien du jardin, l’être humain en devient le destructeur. L’espérance chrétienne répond donc aux défis auxquels l’humanité tout entière est aujourd’hui confrontée en s’arrêtant dans le jardin où le Crucifié a été déposé comme une semence, pour ressusciter et porter beaucoup de fruits.

Le Paradis n’est pas perdu, mais retrouvé. La mort et la résurrection de Jésus sont ainsi le fondement d’une spiritualité de l’écologie intégrale, en dehors de laquelle les paroles de la foi restent sans prise sur la réalité et les paroles des sciences restent en dehors du cœur. « La culture écologique ne peut pas se réduire à une série de réponses urgentes et partielles aux problèmes qui sont en train d’apparaître par rapport à la dégradation de l’environnement, à l’épuisement des réserves naturelles et à la pollution. Elle devrait être un regard différent, une pensée, une politique, un programme éducatif, un style de vie et une spiritualité qui constitueraient une résistance » (Laudato sì, 111).

C’est pourquoi nous parlons d’une conversion écologique, que les chrétiens ne peuvent séparer du changement de cap que leur demande de suivre Jésus. Le revirement de Marie, en ce matin de Pâques, en est le signe : ce n’est que par la conversion dans la conversion que nous passons de cette vallée de larmes à la nouvelle Jérusalem. Ce passage, qui commence dans le cœur et qui est spirituel, modifie l’histoire, nous engage publiquement, active la solidarité qui, dès à présent, protège les personnes et les créatures de la convoitise des loups, au nom et par la force de l’Agneau Pasteur.

Ainsi, les fils et les filles de l’Église peuvent aujourd’hui rencontrer des millions de jeunes et d’autres hommes et femmes de bonne volonté qui ont entendu le cri des pauvres et de la terre en laissant leur cœur s’en émouvoir. Nombreux sont également ceux qui souhaitent, à travers une relation plus directe avec la création, une nouvelle harmonie qui les conduise au-delà de tant de déchirures. D’autre part, « Les cieux proclament la gloire de Dieu, le firmament raconte l’ouvrage de ses mains. Le jour au jour en livre le récit et la nuit à la nuit en donne connaissance. Pas de paroles dans ce récit, pas de voix qui s’entende ; mais sur toute la terre en paraît le message et la nouvelle, aux limites du monde » (Ps 18, 1-45).

Que l’Esprit nous donne la capacité d’écouter la voix de ceux qui n’ont pas de voix. Nous verrons alors ce que nos yeux ne voient pas encore : ce jardin, ou Paradis, vers lequel nous allons seulement en accueillant et en accomplissant chacun sa propre tâche.

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

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Audience Générale du pape Léon XIV – Mercredi 12 novembre 2025

Photo par Tacho Dimas sur Cathopic

Lors de son audience générale hebdomadaire, le pape Léon XIV continue sa catéchèse dans le cadre du Jubilé de l’Espérance 2025 et invite les fidèles à puiser dans la résurrection du Christ une spiritualité pascale vivante, fondée sur la fraternité, capable de traverser les divisions du monde contemporain et de transformer nos relations.

Lisez le texte intégral de son discours ci-dessous. Vous pourrez suivre l’intégralité de l’émission sur Sel + Lumière TV ce soir à 19h00 HE, 16h00 HP et sur slmedia.org/fr/endirect.

Chers frères et sœurs, bonjour et bienvenue!

Croire en la mort et la résurrection du Christ et vivre la spiritualité pascale alimente l’espérance dans la vie et encourage à investir dans le bien. En particulier, cela nous aide à aimer et à nourrir la fraternité, qui est sans aucun doute l’un des grands défis de l’humanité contemporaine, comme l’a clairement vu le pape François.

La fraternité naît d’une donnée profondément humaine. Nous sommes capables de relations et, si nous le voulons, nous savons construire des liens authentiques entre nous. Sans relations, qui nous soutiennent et nous enrichissent depuis le début de notre vie, nous ne pourrions pas survivre, grandir, apprendre. Elles sont multiples, différentes par leurs modalités et leur profondeur. Mais il est certain que notre humanité s’épanouit pleinement lorsque nous sommes et vivons ensemble, lorsque nous parvenons à expérimenter des liens authentiques, non formels, avec les personnes qui nous entourent. Si nous sommes repliés sur nous-mêmes, nous risquons de tomber malades de solitude, et même d’un narcissisme qui ne se soucie des autres que par intérêt. L’autre est alors réduit à quelqu’un dont on peut tirer profit, sans que nous ne soyons jamais vraiment disposés à donner, à nous donner nous-mêmes.

Nous savons bien qu’aujourd’hui encore, la fraternité ne va pas de soi, elle n’est pas immédiate. De nombreux conflits, de nombreuses guerres à travers le monde, des tensions sociales et des sentiments de haine semblent au contraire prouver le contraire. Cependant, la fraternité n’est pas un beau rêve impossible, ce n’est pas le désir de quelques illusionnés. Mais pour surmonter les ombres qui la menacent, il faut aller aux sources, et surtout puiser lumière et force auprès de Celui qui seul nous libère du poison de l’inimitié.

Le mot “frère” vient d’une racine très ancienne qui signifie prendre soin, avoir à cœur, soutenir et nourrir. Appliqué à chaque personne humaine, il devient un appel, une invitation. Nous pensons souvent que le rôle de frère ou de sœur renvoie à la parenté, au fait d’être apparentés, de faire partie de la même famille. En vérité, nous savons bien à quel point les désaccords, les fractures, parfois même la haine, peuvent dévaster les relations entre parents, et pas seulement entre étrangers.

Cela démontre la nécessité, aujourd’hui plus que jamais urgente, de repenser la salutation que saint François d’Assise adressait à tous, indépendamment de leur origine géographique, culturelle, religieuse ou doctrinale : omnes fratres était la manière inclusive dont Saint François plaçait tous les êtres humains sur un pied d’égalité, précisément parce qu’il les reconnaissait dans leur destin commun de dignité, de dialogue, d’accueil et de salut. Le pape François a repris cette approche du Poverello d’Assise, en valorisant son actualité après 800 ans, dans l’encyclique Fratelli tutti.

Ce “tous”, qui signifiait pour saint François le signe accueillant d’une fraternité universelle, exprime un trait essentiel du christianisme, qui depuis le début a été l’annonce de la Bonne Nouvelle destinée au salut de tous, jamais sous une forme exclusive ou privée. Cette fraternité se fonde sur le commandement de Jésus, qui est nouveau en ce qu’il est réalisé par Lui-même, accomplissement surabondant de la volonté du Père : grâce à Lui, qui nous a aimés et s’est donné lui-même pour nous, nous pouvons à notre tour nous aimer et donner notre vie pour les autres, comme enfants de l’unique Père et véritables frères en Jésus-Christ.

Jésus nous a aimés jusqu’au bout, dit l’Évangile de Jean (cf. 13, 1). Lorsque la passion approche, le Maître sait bien que son temps historique touche à sa fin. Il craint ce qui va arriver, il éprouve le supplice le plus terrible et l’abandon. Sa Résurrection, au troisième jour, est le début d’une histoire nouvelle. Et les disciples deviennent pleinement frères, après avoir vécu longtemps ensemble, non seulement lorsqu’ils vivent la douleur de la mort de Jésus, mais surtout lorsqu’ils le reconnaissent comme le Ressuscité, reçoivent le don de l’Esprit et en deviennent les témoins.

Les frères et sœurs se soutiennent mutuellement dans les épreuves, ils ne tournent pas le dos à ceux qui sont dans le besoin : ils pleurent et se réjouissent ensemble dans la perspective active de l’unité, de la confiance, de l’abandon mutuel. La dynamique est celle que Jésus lui-même nous transmet : “Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés” (cf. Jn 15, 12). La fraternité donnée par le Christ mort et ressuscité nous libère des logiques négatives de l’égoïsme, des divisions, des abus de pouvoir, et nous ramène à notre vocation originelle, au nom d’un amour et d’une espérance qui se renouvellent chaque jour. Le Ressuscité nous a montré le chemin à suivre avec Lui, pour nous sentir frères, pour être “tous frères”.

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

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Audience Générale du pape Léon XIV – Mercredi 5 novembre 2025

Crédit photo : Coffee with Damian sur Cathopic.

Lors de son audience générale hebdomadaire, le pape Léon XIV a repris son cycle de catéchèse sur le mystère pascal, dans le cadre du Jubilé de l’Espérance 2025. Il réfléchit sur le sens profond de la résurrection du Christ, source de lumière et d’espérance pour chaque croyant. Il invite les fidèles à accueillir cette vérité non comme un souvenir du passé, mais comme une présence vivante qui transforme la vie quotidienne.

Lisez le texte intégral de son discours ci-dessous. Vous pourrez suivre l’intégralité de l’émission sur Sel + Lumière TV ce soir à 19h00 HE, 16h00 HP et sur slmedia.org/fr/endirect.

Chers frères et sœurs, bonjour, bienvenu !

La Pâque de Jésus n’est pas un événement appartenant à un passé lointain, désormais ancré dans la tradition comme tant d’autres épisodes de l’histoire humaine. L’Église nous enseigne à actualiser la mémoire de la Résurrection chaque année, le dimanche de Pâques, et chaque jour, lors de la célébration eucharistique, au cours de laquelle s’accomplit pleinement la promesse du Seigneur ressuscité : « Et moi, je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la fin du monde » (Mt 28, 20).

C’est pourquoi le mystère pascal constitue le pivot de la vie chrétienne, autour duquel gravitent tous les autres événements. Nous pouvons donc dire, sans irénisme ni sentimentalisme, que chaque jour est Pâques. Comment ?

Nous vivons heure après heure tant d’expériences différentes : douleur, souffrance, tristesse, mêlées de joie, d’émerveillement, de sérénité. Mais à travers chaque situation, le cœur humain aspire à la plénitude, à un bonheur profond. Une grande philosophe du XXe siècle, sainte Thérèse-Bénédicte de la Croix, née Edith Stein, qui a beaucoup exploré le mystère de la personne humaine, nous rappelle cette dynamique de recherche constante de l’accomplissement.

« L’être humain – écrit-elle – aspire toujours à recevoir à nouveau le don de l’être, afin de pouvoir puiser ce que l’instant lui donne et lui enlève en même temps » (Essere finito ed Essere eterno. Per una elevazione al senso dell’essere, Rome 1998, 387). Nous sommes plongés dans la limite, mais aussi portés à la dépasser.

L’annonce pascale est la nouvelle la plus belle, la plus joyeuse et la plus bouleversante qui ait jamais résonné au cours de l’histoire. Elle est l’“Évangile” par excellence, qui atteste la victoire de l’amour sur le péché et de la vie sur la mort, et c’est pourquoi elle est la seule capable de satisfaire la demande de sens qui trouble notre esprit et notre cœur. L’être humain est animé par un mouvement intérieur, tendu vers un au-delà qui l’attire constamment. Aucune réalité contingente ne le satisfait. Nous tendons vers l’infini et l’éternel. Cela contraste avec l’expérience de la mort, anticipée par les souffrances, les pertes, les échecs. De la mort, « nul homme vivant ne peut échapper », chante saint François (cf. Cantique de frère Soleil).

Tout change grâce à ce matin où les femmes, venues au tombeau pour oindre le corps du Seigneur, l’ont trouvé vide. La question posée par les mages venus d’Orient à Jérusalem : « Où est le roi des Juifs qui vient de naître ? » (Mt 2,1-2), trouve sa réponse définitive dans les paroles du mystérieux jeune homme vêtu de blanc qui s’adresse aux femmes à l’aube de Pâques : « Vous cherchez Jésus de Nazareth, le Crucifié ? Il est ressuscité : il n’est pas ici » (Mc 16,6).

Depuis ce matin-là jusqu’à aujourd’hui, chaque jour, Jésus portera également ce titre : le Vivant, comme il se présente lui-même dans l’Apocalypse : « Moi, je suis le Premier et le Dernier, le Vivant : j’étais mort, et me voilà vivant pour les siècles des siècles » (Ap 1,17-18). Et en Lui, nous avons la certitude de pouvoir toujours trouver l’étoile polaire vers laquelle orienter notre vie apparemment chaotique, marquée par des événements qui nous semblent souvent confus, inacceptables, incompréhensibles : le mal, sous ses multiples facettes, la souffrance, la mort, des événements qui concernent tout le monde et chacun d’entre nous. En méditant sur le mystère de la Résurrection, nous trouvons la réponse à notre soif de sens.

Face à notre fragile humanité, l’annonce pascale devient soin et guérison, elle nourrit l’espoir face aux défis effrayants que la vie nous pose chaque jour, tant au niveau personnel que planétaire. Dans la perspective de Pâques, la Via Crucis – le Chemin de Croix se transforme en Chemin de Lumière – Via Lucis. Nous avons besoin de savourer et de méditer la joie après la douleur, de revivre dans une lumière nouvelle toutes les étapes qui ont précédé la Résurrection.

Pâques n’élimine pas la croix, mais la vainc dans le duel prodigieux qui a changé l’histoire humaine. Notre époque également, marquée par tant de croix, invoque l’aube de l’espérance pascale. La Résurrection du Christ n’est pas une idée, une théorie, mais l’Événement qui est à la base de la foi. Lui, le Ressuscité, par l’Esprit Saint, continue de nous le rappeler, afin que nous puissions être ses témoins même là où l’histoire humaine ne voit pas la lumière à l’horizon. L’espérance pascale ne déçoit pas. Croire vraiment en la Pâques à travers le cheminement quotidien signifie révolutionner notre vie, être transformés pour transformer le monde avec la force douce et courageuse de l’espérance chrétienne.

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

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Audience Générale du pape Léon XIV – Mercredi 29 octobre 2025

« Jésus et la femme au puits ». Musée d’art métropolitain . Wikimedia Commons.

Lors de son audience générale hebdomadaire, le pape Léon XIV a célébré le 60e anniversaire, le 28 octobre, de la déclaration du concile Vatican II sur la liberté religieuse, Nostra Aetate . Il a déclaré : « Ce document lumineux nous enseigne à rencontrer les adeptes d’autres religions non pas comme des étrangers, mais comme des compagnons de route sur le chemin de la vérité ; à honorer les différences en affirmant notre humanité commune ; et à discerner, dans chaque recherche religieuse sincère, un reflet du mystère divin unique qui embrasse toute la création. »

Lisez le texte intégral de son discours ci-dessous. Vous pourrez suivre l’intégralité de l’émission sur Sel + Lumière TV ce soir à 19h00 HE, 16h00 HP et sur slmedia.org/fr/endirect.

Catéchèse à l’occasion du 60e anniversaire de la Déclaration conciliaire Nostra aetate

Chers frères et sœurs, pèlerins de la foi et représentants des différentes traditions religieuses, bonjour, bienvenu !

Au centre de la réflexion d’aujourd’hui, en cette Audience Générale consacrée au dialogue interreligieux, je voudrais m’appuyer sur les paroles du Seigneur Jésus à la Samaritaine : « Dieu est esprit, et ceux qui l’adorent, c’est en esprit et vérité qu’ils doivent l’adorer » (Jn 4, 24). Dans l’Évangile, cette rencontre révèle l’essence de l’authentique dialogue religieux : un échange qui a lieu lorsque les personnes s’ouvrent l’une à l’autre avec sincérité, écoute attentive et enrichissement mutuel. C’est un dialogue qui naît de la soif : la soif de Dieu pour le cœur de l’homme et la soif de l’homme pour Dieu. Au puits de Sicar, Jésus franchit les barrières de la culture, du sexe et de la religion. Il invite la Samaritaine à une nouvelle compréhension du culte, qui n’est pas limité à un lieu particulier – « ni sur cette montagne, ni à Jérusalem » – mais qui se réalise en Esprit et en vérité. Ce moment capture le cœur même du dialogue interreligieux : la découverte de la présence de Dieu au-delà de toutes les frontières et l’invitation à le chercher ensemble avec révérence et humilité.

Il y a soixante ans, le 28 octobre 1965, le Concile Vatican II, en promulguant la Déclaration Nostra Aetate, ouvrit un nouvel horizon de rencontre, de respect et d’hospitalité spirituelle. Ce lumineux Document nous enseigne à rencontrer les adeptes d’autres religions non pas comme des étrangers, mais comme des compagnons de route sur le chemin de la vérité ; à honorer les différences en affirmant notre humanité commune ; et à discerner, dans toute quête religieuse sincère, un reflet de l’unique Mystère divin qui englobe toute la création.

En particulier, il ne faut pas oublier que la première orientation de Nostra Aetate allait vers le monde juif, avec lequel saint Jean XXIII entendait refonder le rapport originel. Ainsi, pour la première fois dans l’histoire de l’Église, un traité doctrinal sur les racines juives du christianisme allait prendre forme, ce qui, sur le plan biblique et théologique, représentait un point de non-retour. « Le peuple du Nouveau Testament est spirituellement lié à la lignée d’Abraham. En effet, l’Église du Christ reconnaît que les prémices de sa foi et de son élection se trouvent déjà, selon le mystère divin du salut, dans les patriarches, Moïse et les prophètes » (NA, 4). Ainsi, l’Église, « consciente de l’héritage qu’elle a en commun avec les juifs, et poussée non par des motifs politiques mais par une charité religieuse évangélique, déplore les haines, les persécutions et toutes les manifestations d’antisémitisme dirigées contre les juifs en tout temps et par quiconque » (ibid.). Depuis lors, tous mes prédécesseurs ont condamné l’antisémitisme en des termes clairs. Je confirme donc moi aussi que l’Église ne tolère pas l’antisémitisme et qu’elle le combat, en raison de l’Évangile lui-même.

Aujourd’hui, nous pouvons regarder avec gratitude tout ce qui a été accompli dans le dialogue judéo-catholique au cours de ces six décennies. Cela n’est pas seulement dû à l’effort humain, mais aussi à l’assistance de notre Dieu qui, selon la conviction chrétienne, est lui-même dans le dialogue. Nous ne pouvons nier qu’au cours de cette période, il y a eu des malentendus, des difficultés et des conflits, mais ceux-ci n’ont jamais empêché la poursuite du dialogue. Aujourd’hui encore, nous ne devons pas laisser les circonstances politiques et les injustices de certains nous détourner de l’amitié, d’autant plus que nous avons beaucoup progressé jusqu’à présent.

L’esprit de Nostra Aetate continue d’éclairer le chemin de l’Église. Elle reconnaît que toutes les religions peuvent refléter « un rayon de la vérité qui éclaire tous les hommes » (n° 2) et cherchent des réponses aux grands mystères de l’existence humaine, de sorte que le dialogue ne doit pas être seulement intellectuel, mais profondément spirituel. La Déclaration invite tous les catholiques – évêques, clergé, personnes consacrées et fidèles laïcs – à s’engager sincèrement dans le dialogue et la collaboration avec les adeptes des autres religions, en reconnaissant et en promouvant tout ce qui est bon, vrai et saint dans leurs traditions (cf. ibid.). Cela est nécessaire aujourd’hui dans pratiquement toutes les villes du monde où, en raison de la mobilité humaine, nos diversités et nos appartenances spirituelles sont appelées à se rencontrer et à vivre ensemble fraternellement. Nostra Aetate nous rappelle que le vrai dialogue s’enracine dans l’amour, unique fondement de la paix, de la justice et de la réconciliation, tout en rejetant fermement toute forme de discrimination ou de persécution, affirmant l’égale dignité de chaque être humain (cf. NA, 5).

Ainsi, chers frères et sœurs, soixante ans après Nostra Aetate, nous pouvons nous demander : que pouvons-nous faire ensemble ? La réponse est simple : agissons ensemble. Plus que jamais, notre monde a besoin de notre unité, de notre amitié et de notre collaboration. Chacune de nos religions peut contribuer à atténuer la souffrance humaine et à prendre soin de notre maison commune, notre planète Terre. Nos traditions respectives enseignent la vérité, la compassion, la réconciliation, la justice et la paix. Nous devons réaffirmer notre service à l’humanité, à tout moment. Ensemble, nous devons être vigilants face à l’utilisation abusive du nom de Dieu, de la religion et du dialogue lui-même, et face aux dangers posés par le fondamentalisme et l’extrémisme religieux. Nous devons également nous pencher sur le développement responsable de l’intelligence artificielle, car si elle est conçue comme une alternative à l’humain, elle peut gravement violer son infinie dignité et neutraliser ses responsabilités fondamentales. Nos traditions ont une immense contribution à apporter à l’humanisation de la technologie et donc à inspirer sa régulation, pour protéger les droits humains fondamentaux.

Comme nous le savons tous, nos religions enseignent que la paix commence dans le cœur de l’homme. En ce sens, la religion peut jouer un rôle fondamental. Nous devons ramener l’espérance dans nos vies personnelles, dans nos familles, nos quartiers, nos écoles, nos villages, nos pays et dans notre monde. Cette espérance se fonde sur nos convictions religieuses, sur la croyance qu’un monde nouveau est possible.

Nostra Aetate, il y a soixante ans, a apporté l’espérance au monde de l’après-guerre. Aujourd’hui, nous sommes appelés à refonder cette espérance dans notre monde dévasté par la guerre et dans notre environnement naturel dégradé. Collaborons, car si nous sommes unis, tout est possible. Veillons à ce que rien ne nous divise. C’est dans cet esprit que je souhaite vous exprimer une nouvelle fois ma gratitude pour votre présence et votre amitié. Transmettons également cet esprit d’amitié et de collaboration à la future génération, car c’est le véritable pilier du dialogue.

Et maintenant, arrêtons-nous un instant dans une prière silencieuse : la prière a le pouvoir de transformer nos attitudes, nos pensées, nos paroles et nos actions.

* * *

Je salue les pèlerins de langue française, en particulier les personnes venues du Cameroun, de Belgique, de la Principauté de Monaco et de France. Demandons à l’Esprit-Saint d’inspirer notre dialogue en toute vérité et toute charité afin d’aimer à la manière du Seigneur Jésus tous nos frères. Que Dieu vous bénisse.

_____________

APPEL

Ces derniers jours, l’ouragan « Melissa », une tempête d’une puissance catastrophique, s’est abattu sur la Jamaïque, provoquant de violentes inondations. Il traverse actuellement Cuba avec la même force dévastatrice. Des milliers de personnes ont été déplacées, tandis que des maisons, des infrastructures et plusieurs hôpitaux ont été endommagés. Je vous assure de ma proximité, en priant pour ceux qui ont perdu la vie, pour ceux qui ont fui et pour les populations qui, dans l’attente de l’évolution de la tempête, vivent des heures d’angoisse et d’inquiétude. J’encourage les autorités civiles à faire tout leur possible et je remercie les communautés chrétiennes, ainsi que les organisations bénévoles, pour l’aide qu’elles apportent.

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

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Audience Générale du pape Léon XIV – Mercredi 22 octobre 2025

Peinture de Jésus avec un halo jaune, assis à une table, deux hommes debout à sa gauche et un autre assis à sa droite.

Rembrandt, « La Cène à Emmaüs ». Wikimedia Commons.

En ce temps du Jubilé 2025, le Saint-Père nous invite à contempler l’apparition de Jésus aux disciples d’Emmaüs, et « la manière dont la résurrection du Christ peut guérir l’une des maladies de notre temps : la tristesse » . Il a dit que « Le geste du pain rompu rouvre les yeux du cœur, illumine à nouveau la vue obscurcie par le désespoir…. Aussitôt, la joie se ravive, l’énergie circule à nouveau dans les membres fatigués, la mémoire devient gratitude. Et tous deux se hâtent de retourner à Jérusalem, pour tout raconter aux autres » .

Lisez le texte intégral de son discours ci-dessous. Vous pourrez suivre l’intégralité de l’émission sur Sel + Lumière TV ce soir à 19h00 HE, 16h00 HP et sur slmedia.org/fr/endirect.

Chers frères et sœurs, bonjour ! Et bienvenu à tous !

La résurrection de Jésus-Christ est un événement que l’on ne cesse jamais de contempler et de méditer, et plus on l’approfondit, plus on s’émerveille, plus on est attiré, comme par une lumière insoutenable mais fascinante. C’est une explosion de vie et de joie qui a changé le sens de toute la réalité, du négatif au positif ; cependant, elle ne s’est pas produite de manière retentissante, encore moins violente, mais douce, cachée, on pourrait dire humble.

Aujourd’hui, nous réfléchirons à la manière dont la résurrection du Christ peut guérir l’une des maladies de notre temps : la tristesse. Envahissante et répandue, la tristesse accompagne les journées de tant de personnes. C’est un sentiment de précarité, parfois de profond désespoir, qui envahit l’espace intérieur et semble l’emporter sur tout élan de joie.

La tristesse enlève sens et vigueur à la vie, qui devient comme un voyage sans direction ni signification. Cette expérience très actuelle nous renvoie à la célèbre histoire des deux disciples d’Emmaüs dans l’Évangile de Luc (24, 13-29). Déçus et découragés, ils quittent Jérusalem, laissant derrière eux les espoirs placés en Jésus, crucifié et enseveli. Dans les premières lignes, cet épisode montre un paradigme de la tristesse humaine : la fin de l’objectif sur lequel on a investi tant d’énergie, la destruction de ce qui semblait être l’essentiel de la vie. L’espoir s’est évanoui, la désolation s’est emparée du cœur. Tout a implosé en très peu de temps, entre le vendredi et le samedi, dans une dramatique succession d’événements.

Le paradoxe est vraiment emblématique : ce triste parcours de défaite et de retour à l’ordinaire se déroule le même jour que la victoire de la lumière, de la Pâque pleinement consommée. Les deux hommes tournent le dos au Golgotha, à la terrible scène de la croix encore gravée dans leurs yeux et dans leurs cœurs. Tout semble perdu. Il faut retourner à sa vie d’avant, en faisant profil bas, en espérant ne pas être reconnu.

À un moment donné, un voyageur rejoint les deux disciples, peut-être l’un des nombreux pèlerins qui se sont rendus à Jérusalem pour Pâques. C’est Jésus ressuscité, mais ils ne le reconnaissent pas. La tristesse voile leur regard, annihile la promesse que le Maître a faite à plusieurs reprises : qu’il serait tué et que le troisième jour il ressusciterait. L’inconnu s’approche et s’intéresse à ce qu’ils disent. Le texte dit que les deux « s’arrêtèrent, le visage triste » (Lc 24,17). L’adjectif grec utilisé décrit une tristesse intégrale : sur leurs visages transparaît la paralysie de l’âme.

Jésus les écoute, les laisse exprimer leur déception. Puis, avec une grande franchise, il leur reproche d’être « sans intelligence et lents de cœur à croire à tout ce qu’ont dit les prophètes » (v. 25) et, à travers les Écritures, il montre que le Christ devait souffrir, mourir et ressusciter. Dans le cœur des deux disciples, la chaleur de l’espérance se rallume et, alors que le soir tombe et qu’ils arrivent à destination, ils invitent leur mystérieux compagnon à rester avec eux.

Jésus accepte et se met à table avec eux. Il prend le pain, le rompt et l’offre. À ce moment-là, les deux disciples le reconnaissent… mais il disparaît immédiatement de leur vue (v. 30-31). Le geste du pain rompu rouvre les yeux du cœur, illumine à nouveau la vue obscurcie par le désespoir. Et alors tout devient clair : le chemin partagé, la parole tendre et forte, la lumière de la vérité… Aussitôt, la joie se ravive, l’énergie circule à nouveau dans les membres fatigués, la mémoire devient gratitude. Et tous deux se hâtent de retourner à Jérusalem, pour tout raconter aux autres.

« Le Seigneur est vraiment ressuscité » (cf. v. 34). Dans cet adverbe, vraiment, s’accomplit sûrement notre histoire d’êtres humains. Ce n’est pas un hasard si c’est la salutation que les chrétiens échangent le jour de Pâques. Jésus n’est pas ressuscité avec des paroles, mais avec des faits, avec son corps qui conserve les marques de la passion, le sceau éternel de son amour pour nous. La victoire de la vie n’est pas un vain mot, mais un fait réel et concret.

Que la joie inattendue des disciples d’Emmaüs soit pour nous un doux rappel dans les moments difficiles. C’est le Ressuscité qui change radicalement la perspective, répandant l’espérance qui remplit le vide de la tristesse. Sur les sentiers du cœur, le Ressuscité marche avec nous et pour nous. Il témoigne de la défaite de la mort, il affirme la victoire de la vie, malgré les ténèbres du Calvaire. L’histoire a encore beaucoup à espérer en bien.

Reconnaître la Résurrection signifie changer notre regard sur le monde : revenir à la lumière pour reconnaître la Vérité qui nous a sauvés et qui nous sauve. Sœurs et frères, restons vigilants chaque jour dans l’émerveillement de la Pâque de Jésus ressuscité. Lui seul rend possible l’impossible !

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

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Audience Générale du pape Léon XIV – Mercredi 15 octobre 2025

Vitrail de Jésus ressuscité devant un fond bleu.

Photo de Cathopic.

En ce temps du Jubilé 2025, le Saint-Père nous invite à contempler la Pâque du Christ, source de notre espérance. Il a dit que « Jésus Ressuscité … est la source qui satisfait notre soif, la soif infinie de plénitude que l’Esprit Saint répands dans nos cœurs » .

Lisez le texte intégral de son discours ci-dessous. Vous pourrez suivre l’intégralité de l’émission sur Sel + Lumière TV ce soir à 19h00 HE, 16h00 HP et sur slmedia.org/fr/endirect.

Chers frères et sœurs, bonjour !

Dans les catéchèses de l’Année jubilaire, nous avons jusqu’à présent retracé la vie de Jésus en suivant les Évangiles, de sa naissance à sa mort et à sa résurrection. Ce faisant, notre pèlerinage dans l’espérance a trouvé son fondement solide, son chemin sûr. Maintenant, dans la dernière partie de notre cheminement, nous laisserons le mystère du Christ, culminant dans la Résurrection, répandre sa lumière de salut au contact de la réalité humaine et historique actuelle, avec ses questions et ses défis.

Notre vie est ponctuée d’innombrables événements, remplis de nuances et d’expériences différentes. Parfois nous nous sentons joyeux, parfois tristes, ou encore comblés, ou stressés, gratifiés, démotivés. Nous vivons occupés, nous nous concentrons pour obtenir des résultats, nous atteignons même des objectifs élevés et prestigieux. À l’inverse, nous restons suspendus, précaires, dans l’attente de succès et de reconnaissances qui tardent à arriver ou qui n’arrivent pas du tout. En somme, nous expérimentons une situation paradoxale : nous voudrions être heureux, mais il est très difficile de l’être continuellement et sans ombres. Nous devons accepter nos limites et, en même temps, avec l’envie irrépressible d’essayer de les dépasser. Nous sentons au fond de nous qu’il nous manque toujours quelque chose.

En vérité, nous n’avons pas été créés pour le manque, mais pour la plénitude, pour jouir de la vie et de la vie en abondance, selon l’expression de Jésus dans l’Évangile de Jean (cf. 10,10).

Ce désir infini de notre cœur peut trouver sa réponse ultime non pas dans les rôles, non pas dans le pouvoir, non pas dans l’avoir, mais dans la certitude qu’il y a quelqu’un qui est le garant de cet élan constitutif de notre nature humaine ; dans l’assurance que cette attente ne sera pas déçue ou anéantie. Cette certitude coïncide avec l’espérance. Il ne s’agit pas de penser de manière optimiste : souvent l’optimisme nous déçoit, voit nos attentes imploser, tandis que l’espérance promet et tient.

Sœurs et frères, Jésus Ressuscité est la garantie de cet abri sûr ! Il est la source qui satisfait notre soif, la soif infinie de plénitude que l’Esprit Saint répands dans nos cœurs. En effet, la résurrection du Christ n’est pas un simple événement dans l’histoire humaine, mais l’événement qui l’a transformée de l’intérieur.

Pensons à une source d’eau. Quelles sont ses caractéristiques ? Elle désaltère et rafraîchit les créatures, elle irrigue la terre, les plantes, elle rend fertile et vivant ce qui autrement resterait aride. Elle rafraîchit le voyageur fatigué en lui offrant la joie d’une oasis de fraîcheur. Une source apparaît comme un don gratuit pour la nature, pour les créatures, pour les êtres humains. Sans eau, on ne peut pas vivre.

Le Ressuscité est la source vive qui ne se tarit pas et ne s’altère pas. Elle reste toujours pure et préparée pour celui qui a soif. Et plus nous goûtons au mystère de Dieu, plus nous sommes attirés par lui, sans jamais être complètement rassasiés. Saint Augustin, dans le dixième livre des Confessions, saisit précisément cette aspiration inépuisable de notre cœur et l’exprime dans le célèbre Hymne à la beauté : « Tu as exhalé ton parfum, j’ai respiré et j’aspire à toi, j’ai goûté, j’ai faim et soif ; tu m’as touché, et j’ai brûlé du désir de ta paix » (X, 27, 38).

Jésus, par sa Résurrection, nous a assuré une source de vie permanente : Il est le Vivant (cf. Ap 1,18), celui qui aime la vie, le vainqueur de toute mort. Il est donc en mesure de nous procurer le repos dans notre parcours terrestre et de nous assurer une tranquillité parfaite dans l’éternité. Seul Jésus, mort et ressuscité, répond aux questions les plus profondes de notre cœur : y a-t-il vraiment une fin pour nous ? Notre existence a-t-elle un sens ? Et comment la souffrance de tant d’innocents pourra-t-elle être rachetée ?

Jésus Ressuscité ne fait pas tomber une réponse « d’en haut », mais il se fait notre compagnon dans ce voyage souvent fatigant, douloureux, mystérieux. Lui seul peut remplir notre gourde vide, quand la soif devient insupportable.

Et il est aussi le point d’arrivée de notre marche. Sans son amour, le voyage de la vie deviendrait une errance sans but, une erreur tragique sans destination. Nous sommes des créatures fragiles. L’erreur fait partie de notre humanité, c’est la blessure du péché qui nous fait tomber, abandonner, désespérer. Ressusciter, en revanche, signifie se relever et se mettre debout. Le Ressuscité nous garantit un abri sûr, il nous ramène à la maison, où nous sommes attendus, aimés, sauvés. Faire le voyage avec Lui à nos côtés signifie expérimenter que nous sommes soutenus malgré tout, désaltérés et rafraîchis dans les épreuves et les labeurs qui, comme de lourdes pierres, menacent de bloquer ou de dévier notre histoire.

Bien-aimés, de la Résurrection du Christ jaillit l’espérance qui nous fait déjà goûter, malgré les difficultés de la vie, un calme profond et joyeux : cette paix que Lui seul nous donnera à la fin, sans fin.

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Audience Générale du pape Léon XIV – Mercredi 8 octobre 2025

Caravage, « Le repas à Emmaüs ». Wikimedia Commons

En ce temps du Jubilé 2025, le Saint-Père nous invite à contempler la Pâque du Christ, source de notre espérance. À travers les disciples d’Emmaüs, il nous rappelle que le Ressuscité marche à nos côtés, souvent dans le silence, pour raviver en nous la flamme du cœur.

Lisez le texte intégral de son discours ci-dessous. Vous pourrez suivre l’intégralité de l’émission sur Sel + Lumière TV ce soir à 19h00 HE, 16h00 HP et sur slmedia.org/fr/endirect.

Chers frères et sœurs, bonjour !

Aujourd’hui, je voudrais vous inviter à réfléchir sur un aspect surprenant de la Résurrection du Christ : son humilité. Si nous réexaminons les récits évangéliques, nous réalisons que le Seigneur ressuscité ne fait rien de spectaculaire pour s’imposer à la foi de ses disciples. Il ne se présente pas avec une armée d’anges, il ne fait pas de gestes d’éclat, il ne prononce pas de discours solennels pour révéler les secrets de l’univers. Au contraire, il s’approche avec discrétion, comme un simple passant, comme un homme affamé qui demande à partager un peu de pain (cf. Lc 24, 15.41).

Marie de Magdala le prend pour un jardinier (cf. Jn 20, 15). Les disciples d’Emmaüs le prennent pour un étranger (cf. Lc 24, 18). Pierre et les autres pêcheurs le prennent pour un simple passant (cf. Jn 21, 4). Nous aurions attendu des effets spéciaux, des signes de puissance, des preuves flagrantes. Mais le Seigneur ne cherche pas cela : il préfère le langage de la proximité, de la normalité, de la table partagée.

Frères et sœurs, il y a là un message précieux : la Résurrection n’est pas un coup de théâtre, c’est une transformation silencieuse qui remplit de sens chaque geste humain. Jésus ressuscité mange une portion de poisson devant ses disciples : ce n’est pas un détail marginal, c’est la confirmation que notre corps, notre histoire, nos relations ne sont pas un emballage à jeter. Ils sont destinés à la plénitude de la vie. Ressusciter ne signifie pas devenir des esprits évanescents, mais entrer dans une communion plus profonde avec Dieu et avec nos frères, dans une humanité transfigurée par l’amour.

Dans la Pâque du Christ, tout peut devenir grâce. Même les choses les plus ordinaires : manger, travailler, attendre, s’occuper de la maison, soutenir un ami. La Résurrection ne soustrait pas la vie au temps et à l’effort, mais elle en change le sens, la « saveur ». Chaque geste accompli dans la gratitude et dans la communion anticipe le Règne de Dieu.

Cependant, un obstacle nous empêche souvent de reconnaître cette présence du Christ au quotidien : l’allégation que la joie devrait être sans blessures. Les disciples d’Emmaüs marchent tristement parce qu’ils espéraient une autre fin, un Messie qui ne connaitrait pas la croix. Bien qu’ils aient appris que le tombeau est vide, ils ne parviennent pas à sourire. Mais Jésus se tient à côté d’eux et les aide patiemment à comprendre que la douleur n’est pas la négation de la promesse, mais le chemin à travers lequel Dieu a manifesté la mesure de son amour (cf. Lc 24, 13-27).

Lorsqu’ils s’assoient enfin à table avec Lui et rompent le pain, les yeux s’ouvrent. Et ils se rendent compte que leur cœur était déjà brûlant, même s’ils ne le savaient pas (cf. Lc 24, 28-32). C’est la plus grande surprise : découvrir que sous la cendre du désenchantement et de la lassitude, il y a toujours une braise vivante, qui attend seulement d’être ravivée.

Frères et sœurs, la résurrection du Christ nous enseigne qu’il n’y a pas d’histoire si marquée par la déception ou le péché qu’elle ne puisse être visitée par l’espérance. Aucune chute n’est définitive, aucune nuit n’est éternelle, aucune blessure n’est destinée à rester ouverte pour toujours. Aussi éloignés, perdus ou indignes que nous puissions nous sentir, aucune distance ne peut éteindre la force indéfectible de l’amour de Dieu.

Nous pensons parfois que le Seigneur ne vient nous visiter que dans les moments de recueillement ou de ferveur spirituelle, quand nous nous sentons à la hauteur, quand notre vie semble ordonnée et lumineuse. Au contraire, le Ressuscité se fait proche précisément dans les endroits les plus obscurs : dans nos échecs, dans les relations détériorées, dans les labeurs quotidiens qui pèsent sur nos épaules, dans les doutes qui nous découragent. Rien de ce que nous sommes, aucun fragment de notre existence ne lui est étranger.

Aujourd’hui, le Seigneur ressuscité vient à côté de chacun de nous, exactement sur nos chemins – ceux du travail et de l’engagement, mais aussi ceux de la souffrance et de la solitude – et, avec une infinie délicatesse, il nous demande de nous laisser réchauffer le cœur. Il ne s’impose pas avec clameur, il n’a pas la prétention d’être reconnu immédiatement. Avec patience, il attend le moment où nos yeux s’ouvriront pour voir son visage amical, capable de transformer la déception en attente confiante, la tristesse en gratitude, la résignation en espérance.

Le Ressuscité veut seulement manifester sa présence, se faire notre compagnon de route et allumer en nous la certitude que sa vie est plus forte que toute mort. Demandons donc la grâce de reconnaître sa présence humble et discrète, de ne pas prétendre à une vie sans épreuves, de découvrir que toute douleur, si elle est habitée par l’amour, peut devenir un lieu de communion.

Ainsi, comme les disciples d’Emmaüs, nous retournions nous aussi dans nos maisons, le cœur brûlant de joie. Une joie simple, qui n’efface pas les blessures mais les illumine. Une joie qui nait de la certitude que le Seigneur est vivant, marche avec nous et nous donne à chaque instant la possibilité de recommencer.

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

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Audience Générale du pape Léon XIV – Mercredi 1er octobre 2025

Statue du Christ Rédempteur dans un ciel bleu clair. Rio de Janeiro, Brésil. Photo Pexel.

Lors de son Audience générale hebdomadaire, le Pape Léon XIV a poursuivi son cycle de catéchèse sur « Jésus-Christ notre Espérance » dans le cadre du Jubilé 2025. Il a réfléchi sur l’apparition du Christ ressuscité aux disciples au Cénacle, en disant que « Jésus, après être descendu dans les abîmes de la mort pour libérer ceux qui y étaient emprisonnés, entre dans la chambre fermée de ceux qui sont paralysés par la peur, leur apportant un cadeau que personne n’aurait osé espérer : la paix. »

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Chers frères et sœurs, bonjour !

Le centre de notre foi et le cœur de notre espérance sont fermement enracinés dans la résurrection du Christ. En lisant attentivement les Évangiles, nous réalisons que ce mystère est surprenant non seulement parce qu’un homme – le Fils de Dieu – est ressuscité des morts, mais aussi pour la manière choisie pour le faire. En effet, la résurrection de Jésus n’est pas un triomphe pompeux, ce n’est pas une revanche ou une vengeance contre ses ennemis. C’est le merveilleux témoignage de la capacité de l’amour à se relever après une grande défaite pour continuer son irrépressible chemin.

Lorsque nous nous relevons après un traumatisme causé par d’autres, la première réaction est souvent la colère, le désir de faire payer à quelqu’un ce que nous avons subi. Le Ressuscité ne réagit pas ainsi. Sorti des enfers de la mort, Jésus ne se venge pas. Il ne revient pas avec des gestes de puissance, mais manifeste avec douceur la joie d’un amour plus grand que toute blessure et plus fort que toute trahison.

Le Ressuscité n’éprouve aucun besoin de rétablir ou d’affirmer sa supériorité. Il apparaît à ses amis – les disciples – et il le fait avec une extrême discrétion, sans les forcer leur capacité à l’accepter. Son unique désir est d’être à nouveau en communion avec eux en les aidant à surmonter leur sentiment de culpabilité. Nous le voyons très bien au cénacle, où le Seigneur apparaît à ses amis enfermés dans la peur. C’est un moment qui exprime une force extraordinaire : Jésus, après être descendu dans les abîmes de la mort pour libérer ceux qui y étaient emprisonnés, entre dans la chambre fermée de qui est paralysé par la peur, en apportant un don que personne n’aurait osé espérer : la paix.

Sa salutation est simple, presque ordinaire : « La paix soit avec vous ! » (Jn 20,19). Mais elle s’accompagne d’un geste si beau qu’il en est presque inconvenant : Jésus montre aux disciples ses mains et son côté avec les marques de sa passion. Pourquoi dévoiler ces blessures devant qui, en ces heures dramatiques, l’a renié et abandonné ? Pourquoi ne pas cacher ces signes de douleur et éviter de rouvrir la blessure de la honte ?

Pourtant, l’Évangile dit que, voyant le Seigneur, les disciples se réjouirent (cf. Jn 20, 20). La raison en est profonde : Jésus est maintenant pleinement réconcilié avec tout ce qu’il a souffert. Il n’y a pas d’ombre de rancœur. Les blessures ne servent pas à faire des reproches, mais à confirmer un amour plus fort que toute infidélité. Elles sont la preuve qu’au moment même de notre échec, Dieu n’a pas reculé. Il ne nous a pas abandonnés.

Ainsi, le Seigneur se montre nu et désarmé. Il n’exige rien, il ne fait pas de chantage. C’est un amour qui n’humilie pas, c’est la paix de celui qui a souffert par amour et qui peut finalement affirmer que cela en valait la peine.

Nous, en revanche, nous masquons souvent nos blessures par orgueil ou par crainte de paraître faibles. Nous disons « ce n’est pas grave », « c’est du passé », mais nous ne sommes pas vraiment en paix avec les trahisons qui nous ont blessés. Parfois, nous préférons cacher notre lutte pour pardonner pour ne pas paraître vulnérables ou risquer de souffrir à nouveau. Ce n’est pas le cas de Jésus. Il offre ses blessures comme une garantie de pardon. Et il montre que la résurrection n’est pas l’effacement du passé, mais sa transfiguration en une espérance de miséricorde.

Ensuite, le Seigneur répète : « La paix soit avec vous ! » Et il ajoute : « Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie » (v. 21). Par ces paroles, il confie aux apôtres une tâche qui n’est pas tant un pouvoir qu’une responsabilité : être dans le monde des instruments de réconciliation. Comme s’il disait : « Qui pourra annoncer le visage miséricordieux du Père, sinon vous, qui avez fait l’expérience de l’échec et du pardon ? »

Jésus souffle sur eux et leur donne l’Esprit Saint (v. 22). C’est le même Esprit qui l’a soutenu dans l’obéissance au Père et dans l’amour jusqu’à la croix. Dès lors, les apôtres ne pourront plus taire ce qu’ils ont vu et entendu : Dieu pardonne, relève, redonne confiance.

Tel est le cœur de la mission de l’Église : non pas administrer un pouvoir sur les autres, mais communiquer la joie de qui a été aimé alors qu’il ne le méritait pas. C’est cette force qui a fait naître et grandir la communauté chrétienne : des hommes et des femmes qui ont découvert la beauté du retour à la vie pour pouvoir la donner aux autres.

Chers frères et sœurs, nous aussi nous sommes envoyés. À nous aussi, le Seigneur montre ses blessures et dit : La paix soit avec vous. N’ayez pas peur de montrer vos blessures guéries par la miséricorde. N’ayez pas peur de vous approcher de ceux qui sont enfermés dans la peur ou la culpabilité. Que le souffle de l’Esprit fasse aussi de nous des témoins de cette paix et de cet amour plus fort que toutes les défaites.

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

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