Homélie du pape Léon XIV pour le dimanche de la Pentecôte 2025

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Le dimanche 8 juin 2025, le pape Léon XIV a célébré la messe du jubilé des mouvements, associations et communautés nouvelles et a évoqué la manière dont l’Esprit Saint aide les apôtres à surmonter « leur peur, brise leurs chaînes intérieures, guérit leurs blessures, les oint de force et leur donne le courage d’aller vers tous et d’annoncer les œuvres puissantes de Dieu ».

Lisez le texte intégral de son discours ci-dessous. Vous pourrez suivre l’intégralité de l’émission sur Sel + Lumière TV jeudi soir à 19h00 HE, 16h00 HP.

Frères et sœurs,

« Le jour où […] le Seigneur Jésus-Christ, glorifié par son ascension au ciel après sa résurrection, a envoyé le Saint-Esprit, nous apparaît comme un jour heureux » (St Augustin, Discours 271, 1). Et aujourd’hui encore, ce qui s’est passé au Cénacle revit : le don de l’Esprit Saint descend sur nous comme un vent impétueux qui nous secoue, comme un bruit qui nous réveille, comme un feu qui nous éclaire (cf. Ac 2, 1-11).

Comme nous l’avons entendu dans la première Lecture, l’Esprit accomplit quelque chose d’extraordinaire dans la vie des Apôtres. Après la mort de Jésus, ils s’étaient enfermés dans la peur et la tristesse, mais maintenant ils reçoivent enfin un regard nouveau et une intelligence du cœur qui les aident à interpréter les événements qui se sont produits et à faire l’expérience intime de la présence du Ressuscité : l’Esprit Saint vainc leur peur, brise leurs chaînes intérieures, apaise leurs blessures, les oint de force et leur donne le courage d’aller à la rencontre de chacun pour annoncer les œuvres de Dieu.

Le passage des Actes des Apôtres nous dit qu’à Jérusalem, à ce moment-là, il y avait une multitude de personnes de diverses origines, et pourtant « chacun d’eux les entendait dans son propre dialecte » (v. 6). C’est alors qu’à la Pentecôte, les portes du Cénacle s’ouvrent parce que l’Esprit ouvre les frontières. Comme l’affirme Benoît XVI : « L’Esprit Saint leur donne de comprendre. En surmontant la rupture initiale de Babel – la confusion des cœurs, qui nous élève les uns contre les autres – l’Esprit ouvre les frontières. […] L’Église doit toujours redevenir ce qu’elle est déjà:  elle doit ouvrir les frontières entre les peuples et abattre les barrières entre les classes et les races. En son sein, il ne peut y avoir de personnes oubliées ou méprisées. Dans l’Eglise, il n’y a que des frères et des sœurs de Jésus Christ libres » (Homélie de Pentecôte, 15 mai 2005).

Voici une image éloquente de la Pentecôte sur laquelle j’aimerais m’arrêter avec vous pour méditer.

L’Esprit ouvre les frontières avant tout en nous. C’est le Don qui ouvre notre vie à l’amour. Et cette présence du Seigneur dissout nos duretés, nos fermetures, nos égoïsmes, les peurs qui nous bloquent, les narcissismes qui nous font tourner uniquement autour de nous-mêmes. Le Saint-Esprit vient défier en nous le risque d’une vie qui s’atrophie, aspirée par l’individualisme. Il est triste de constater que dans un monde où les occasions de socialiser se multiplient, nous risquons paradoxalement d’être davantage seuls, toujours connectés mais incapables de “créer des réseaux”, toujours immergés dans la foule mais restant des voyageurs désorientés et solitaires.

Au contraire, l’Esprit de Dieu nous fait découvrir une nouvelle façon de voir et de vivre la vie : il nous ouvre à la rencontre avec nous-mêmes au-delà des masques que nous portons ; il nous conduit à la rencontre avec le Seigneur en nous éduquant à faire l’expérience de sa joie ; il nous convainc – selon les paroles mêmes de Jésus que nous venons de proclamer – que ce n’est qu’en restant dans l’amour que nous recevons aussi la force d’observer sa Parole et donc d’en être transformés. Il ouvre les frontières en nous, afin que notre vie devienne un espace accueillant.

L’Esprit ouvre également les frontières dans nos relations. En effet, Jésus dit que ce Don c’est l’amour entre Lui et le Père qui vient habiter en nous. Et lorsque l’amour de Dieu habite en nous, nous devenons capables de nous ouvrir à nos frères, de vaincre nos rigidités, de surmonter la peur de ceux qui sont différents, d’éduquer les passions qui s’agitent en nous. Mais l’Esprit transforme aussi les dangers les plus cachés qui polluent nos relations, comme les malentendus, les préjugés, les instrumentalisations. Je pense aussi – avec beaucoup de douleur – lorsqu’une relation est infestée par la volonté de dominer l’autre, une attitude qui débouche souvent sur la violence, comme le montrent malheureusement les nombreux cas récents de féminicide.

Le Saint-Esprit, quant à lui, fait mûrir en nous les fruits qui nous aident à vivre des relations authentiques et bonnes : « Amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maîtrise de soi » (Ga 5, 22-23). De cette manière, l’Esprit élargit les frontières de nos relations avec les autres et nous ouvre à la joie de la fraternité. Et cela est également un critère décisif pour l’Église : nous ne sommes vraiment l’Église du Ressuscité et les disciples de la Pentecôte que s’il n’y a ni frontières ni divisions entre nous, si, dans l’Église, nous savons dialoguer et nous accueillir mutuellement en intégrant nos différences ; si, en tant qu’Église, nous devenons un espace accueillant et hospitalier pour tous.

Enfin, l’Esprit ouvre également les frontières entre les peuples. À la Pentecôte, les Apôtres parlent la langue de ceux qu’ils rencontrent et le chaos de Babel est enfin apaisé par l’harmonie produite par l’Esprit. Lorsque le Souffle divin unit nos cœurs et nous fait voir dans l’autre le visage d’un frère, les différences ne deviennent plus une occasion de division et de conflit, mais un patrimoine commun dont nous pouvons tous tirer parti et qui nous met tous en chemin, ensemble, dans la fraternité.

L’Esprit brise les frontières et abat les murs de l’indifférence et de la haine, car “il nous enseigne tout” et “nous rappelle les paroles de Jésus” (cf. Jn 14,26) ; et, par conséquent, il enseigne, rappelle et grave avant tout dans nos cœurs le commandement de l’amour, que le Seigneur a placé au centre et au sommet de tout. Et là où il y a l’amour, il n’y a pas de place pour les préjugés, pour les distances de sécurité qui nous éloignent de notre prochain, pour la logique d’exclusion que nous voyons malheureusement émerger aussi dans les nationalismes politiques.

C’est précisément en célébrant la Pentecôte que le Pape François a fait remarquer qu’« aujourd’hui dans le monde, il y a beaucoup de discorde, beaucoup de divisions. Nous sommes tous reliés et pourtant nous nous trouvons déconnectés les uns des autres, anesthésiés par l’indifférence et opprimés par la solitude » (Homélie, 28 mai 2023). Les guerres qui agitent notre planète sont un signe tragique de tout cela. Invoquons l’Esprit d’amour et de paix, afin qu’il ouvre les frontières, abatte les murs, dissolve la haine et nous aide à vivre comme des enfants du seul Père qui est aux cieux.

Frères et sœurs, c’est la Pentecôte qui renouvelle l’Église et le monde ! Que le vent puissant de l’Esprit vienne sur nous et en nous, ouvre les frontières de notre cœur, nous donne la grâce de la rencontre avec Dieu, élargisse les horizons de l’amour et soutienne nos efforts pour construire un monde où règne la paix.

Que Marie Très Sainte, Femme de la Pentecôte, Vierge visitée par l’Esprit, Mère pleine de grâce, nous accompagne et intercède pour nous.

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

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Homélie du pape Léon XIV pour le Jubilé des Familles, des Enfants, des Grands-Parents

Photo Crédit : Vatican Media.

Dans son homélie, dimanche du Jubilé des familles, des enfants, des grands-parents et des personnes âgées, le pape Léon XIV nous invite à redécouvrir la beauté de la famille comme lieu de tendresse, de transmission et de foi. Dans son homélie, il rappelle que chaque génération a un rôle unique à jouer pour bâtir une société plus fraternelle, enracinée dans l’amour de Dieu.

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Jubilé Des Familles, Des Enfants, Des Grands-Parents

Et Des Personnes Âgées

HOMÉLIE DU PAPE LÉON XIV

Place Saint-Pierre
VIIe dimanche de Pâques – Dimanche 1er juin 2025

 

Lire le texte intégral de l’homélie du Saint-Père ci-dessous. :

L’Évangile qui vient d’être proclamé nous montre Jésus qui, lors de la dernière Cène, prie pour nous (cf. Jn 17, 20) : le Verbe de Dieu fait homme, désormais proche de la fin de sa vie terrestre, pense à nous, ses frères, se faisant bénédiction, supplication et louange au Père, avec la force de l’Esprit Saint. Et nous aussi, alors que nous entrons, remplis d’émerveillement et de confiance, dans la prière de Jésus, nous sommes impliqués par son amour dans un grand projet qui concerne toute l’humanité.

Le Christ demande en effet que nous soyons tous « un » (v. 21). Il s’agit là du plus grand bien que l’on puisse désirer, car cette union universelle réalise entre les créatures la communion éternelle d’amour dans laquelle s’identifie Dieu lui-même, comme le Père qui donne la vie, le Fils qui la reçoit et l’Esprit qui la partage.

Le Seigneur ne veut pas que nous nous unissions pour former une masse indistincte, comme un bloc anonyme, mais il souhaite que nous soyons un : « Comme toi, Père, tu es en moi, et moi en toi. Qu’ils soient un en nous, eux aussi » (v. 21). L’unité pour laquelle Jésus prie est donc une communion fondée sur l’amour même dont Dieu aime, d’où viennent la vie et le salut. En tant que telle, elle est avant tout un don que Jésus vient apporter. C’est en effet, du fond de son cœur d’homme que le Fils de Dieu s’adresse au Père en disant : « moi en eux, et toi en moi. Qu’ils deviennent ainsi parfaitement un, afin que le monde sache que tu m’as envoyé, et que tu les as aimés comme tu m’as aimé » (v. 23).

Écoutons avec admiration ces paroles : Jésus nous révèle que Dieu nous aime comme Il s’aime Lui-même. Le Père ne nous aime pas moins qu’Il n’aime son Fils unique, c’est-à-dire infiniment. Dieu n’aime pas moins, parce qu’Il aime d’abord, Il aime le premier ! Le Christ Lui-même en témoigne lorsqu’Il dit au Père : « Tu m’as aimé avant la fondation du monde » (v. 24). Et il en est ainsi : dans sa miséricorde, Dieu veut depuis toujours rassembler tous les hommes auprès de lui, et c’est sa vie, donnée pour nous dans le Christ, qui nous rend un, qui nous unit entre nous.

Écouter aujourd’hui cet Évangile, pendant le Jubilé des familles et des enfants, des grands-parents et des personnes âgées, nous comble de joie.

Très chers amis, nous avons reçu la vie avant même de la vouloir. Comme l’enseignait le pape François, « tous les hommes sont des enfants, mais aucun de nous n’a choisi de naître » (Angelus, 1er janvier 2025). Mais ce n’est pas tout. Dès notre naissance, nous avons eu besoin des autres pour vivre, seuls nous n’y serions pas y arriver : c’est quelqu’un d’autre qui nous a sauvés, en prenant soin de nous, de notre corps comme de notre esprit. Nous vivons donc tous grâce à une relation, c’est-à-dire à un lien libre et libérateur d’humanité et de soin mutuel.

Il est vrai que parfois cette humanité est trahie. Par exemple, chaque fois que l’on invoque la liberté non pour donner la vie, mais pour la retirer, non pour secourir, mais pour offenser. Cependant, même face au mal qui s’oppose et tue, Jésus continue de prier le Père pour nous, et sa prière agit comme un baume sur nos blessures, devenant pour tous une annonce de pardon et de réconciliation. Cette prière du Seigneur donne pleinement un sens aux moments lumineux de notre amour les uns pour les autres, en tant que parents, grands-parents, fils et filles. Et c’est cela que nous voulons annoncer au monde : nous sommes ici pour être “un” comme le Seigneur veut que nous soyons “un”, dans nos familles et là où nous vivons, travaillons et étudions : différents, mais un, nombreux, mais un, toujours, en toutes circonstances et à tous les âges de la vie.

Mes très chers amis, si nous nous aimons ainsi, sur le fondement du Christ, qui est « l’alpha et l’oméga », « le commencement et la fin » (cf. Ap 22, 13), nous serons un signe de paix pour tous, dans la société et dans le monde. Et n’oublions pas : c’est dans les familles que se construit l’avenir des peuples.

Au cours des dernières décennies, nous avons reçu un signe qui nous remplit de joie et qui nous fait réfléchir : je veux parler du fait que des couples mariés ont été proclamés bienheureux et saints, non pas séparément, mais ensemble, en tant que couples mariés. Je pense à Louis et Zélie Martin, les parents de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus ; et j’aime rappeler les bienheureux Luigi et Maria Beltrame Quattrocchi, dont la vie familiale s’est déroulée à Rome au siècle dernier. Et n’oublions pas la famille polonaise Ulma : parents et enfants unis dans l’amour et dans me martyre. Je disais que c’est un signe qui fait réfléchir. Oui : en désignant comme témoins exemplaires des époux, l’Église nous dit que le monde d’aujourd’hui a besoin de l’alliance conjugale pour connaître et accueillir l’amour de Dieu et surmonter, par sa force qui unifie et réconcilie, les forces qui désagrègent les relations et les sociétés.

C’est pourquoi, le cœur plein de reconnaissance et d’espérance, je vous dis, à vous les époux : le mariage n’est pas un idéal, mais la norme du véritable amour entre l’homme et la femme : un amour total, fidèle, fécond (cf. Saint Paul VI, Lettre encyclique Humanae vitae, 9). Tout en vous transformant en une seule chair, cet amour vous rend capables, à l’image de Dieu, de donner la vie.

C’est pourquoi je vous encourage à être, pour vos enfants, des exemples de cohérence, en vous comportant comme vous voulez qu’ils se comportent, en les éduquant à la liberté par l’obéissance, en recherchant toujours en eux le bien et les moyens de le faire grandir. Et vous, enfants, soyez reconnaissants envers vos parents : dire “merci” pour le don de la vie et pour tout ce qui nous est donné chaque jour avec elle, c’est la première manière d’honorer son père et sa mère (cf. Ex 20, 12). Enfin, à vous, chers grands-parents et personnes âgées, je recommande de veiller sur ceux que vous aimez, avec sagesse et compassion, avec l’humilité et la patience que les années enseignent.

Dans la famille, la foi se transmet avec la vie, de génération en génération : elle est partagée comme la nourriture sur la table et les affections du cœur. Cela en fait un lieu privilégié pour rencontrer Jésus, qui nous aime et veut notre bien, toujours.

Et j’aimerais ajouter une dernière chose. La prière du Fils de Dieu, qui nous donne l’espérance tout au long du chemin, nous rappelle aussi qu’un jour nous serons tous unum (cf. saint Augustin, Sermo super Ps. 127) : une seule chose dans l’unique Sauveur, étreints par l’amour éternel de Dieu. Non seulement nous, mais aussi nos pères et nos mères, nos grands-mères et nos grands-pères, nos frères, nos sœurs et nos enfants qui nous ont déjà précédés dans la lumière de sa Pâque éternelle, et que nous sentons présents ici, avec nous, en ce moment de fête.

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

Homélie du pape Léon XIV lors de la messe et de l’installation sur la cathèdre romaine

Photo Credit : Vatican Media

Le dimanche 25 mai 2025, le pape Léon XIV a été officiellement installé sur la cathèdre du diocèse de Rome lors d’une messe dans la basilique Saint-Jean-de-Latran. Dans son homélie, il déclare que « la communion se construit d’abord “à genoux”, par la prière et l’engagement constant dans la conversion ».

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Messe et installation sur la cathèdre romaine

HOMÉLIE DU PAPE LÉON XIV

Basilique Saint-Jean-de-Latran
25 mai 2025

 

Lire le texte intégral de l’homélie du Saint-Père ci-dessous. :

Je salue cordialement les Cardinaux présents, en particulier le Cardinal Vicaire, les évêques auxiliaires et tous les évêques, les très chers prêtres – curés, vicaires et tous ceux qui, à divers titres, collaborent à la pastorale dans nos communautés – ; ainsi que les diacres, les religieux, les religieuses, les Autorités et vous tous, très chers fidèles.

L’Église de Rome est l’héritière d’une grande histoire, enracinée dans le témoignage de Pierre, de Paul et d’innombrables martyrs, et elle a une mission unique, bien indiquée par ce qui est écrit sur la façade de cette Cathédrale : être Mater omnium Ecclesiarum, Mère de toutes les Églises.

Le Pape François nous a souvent invités à réfléchir sur la dimension maternelle de l’Église (cf. Exhort. ap.Evangelii gaudium, nn. 46-49 ,  139-141Catéchèse, 13 janvier 2016) et sur ses caractéristiques propres : la tendresse, la disponibilité au sacrifice et cette capacité d’écoute qui permet non seulement de venir en aide, mais souvent aussi d’anticiper les besoins et les attentes, avant même qu’ils ne soient exprimés. Ce sont là des traits que nous souhaitons voir grandir partout dans le peuple de Dieu, ici aussi, dans notre grande famille diocésaine : chez les fidèles, chez les pasteurs, chez moi le premier. Les lectures que nous avons écoutées peuvent nous aider à y réfléchir.

Dans les Actes des Apôtres (cf. 15, 1-2.22-29), en particulier, il est raconté comment la communauté des origines a affronté le défi de l’ouverture au monde païen dans l’annonce de l’Évangile. Cela n’a pas été un processus facile : cela a demandé beaucoup de patience et d’écoute mutuelle ; cela s’est produit tout d’abord au sein de la communauté d’Antioche, où les frères, en dialoguant – même en discutant – sont parvenus à définir ensemble la question. Mais ensuite, Paul et Barnabé sont montés à Jérusalem. Ils n’ont pas décidé de leur propre chef : ils ont cherché la communion avec l’Église mère et s’y sont rendus avec humilité.

Pierre et les Apôtres les ont écoutés. Ainsi s’est engagé le dialogue qui a finalement conduit à la bonne décision : reconnaissant et considérant la difficulté des néophytes, il a été convenu de ne pas leur imposer de charges excessives, mais de se limiter à leur demander l’essentiel (cf. Ac 15, 28-29). Ainsi, ce qui pouvait sembler un problème est devenu pour tous une occasion de réfléchir et de grandir.

Le texte biblique, cependant, nous en dit davantage, allant au-delà de la riche et intéressante dynamique humaine de l’événement.

C’est ce que révèlent les paroles que les frères de Jérusalem adressent par lettre à ceux d’Antioche, leur communiquant les décisions prises. Ils écrivent : « L’Esprit Saint et nous-mêmes » (Ac 15, 28). Ils soulignent, en effet, que dans toute cette histoire, l’écoute la plus importante, celle qui a rendu tout le reste possible, a été celle de la voix de Dieu. Ils nous rappellent ainsi que la communion se construit avant tout “à genoux”, dans la prière et dans un engagement continu de conversion. Ce n’est que dans cette tension, en effet, que chacun peut entendre en lui la voix de l’Esprit qui crie : « Abba ! Père ! » (Ga 4, 6) et, par conséquent, écouter et comprendre les autres comme des frères.

L’Évangile nous réaffirme également ce message (cf. Jn 14, 23-29), en nous disant que nous ne sommes pas seuls dans les choix de vie. L’Esprit nous soutient et nous montre le chemin à suivre, en nous “enseignant” et en nous “rappelant” tout ce que Jésus nous a dit (cf. Jn 14, 26).

Tout d’abord, l’Esprit nous enseigne les paroles du Seigneur en les imprimant profondément en nous, selon l’image biblique de la loi écrite non plus sur des tables de pierre, mais dans nos cœurs (cf. Jr 31, 33) ; un don qui nous aide à grandir jusqu’à devenir “lettre du Christ” (cf. 2 Co 3, 3) les uns pour les autres. Et il en est ainsi : nous sommes d’autant plus capables d’annoncer l’Évangile que nous nous laissons conquérir et transformer, en permettant à la puissance de l’Esprit de nous purifier au plus profond de nous-mêmes, de rendre nos paroles simples, nos désirs honnêtes et limpides, nos actions généreuses.

Et c’est là qu’intervient l’autre verbe : “rappeler”, c’est-à-dire ramener l’attention du cœur vers ce que nous avons vécu et appris, afin d’en pénétrer plus profondément le sens et d’en savourer la beauté.

Je pense à cet égard au chemin exigeant que le diocèse de Rome parcourt depuis quelques années, articulé à différents niveaux d’écoute : vers le monde environnant, pour en accueillir les défis, et au sein des communautés, pour en comprendre les besoins et promouvoir des sages et prophétiques initiatives d’évangélisation et de charité. C’est un chemin difficile, encore en cours, qui cherche à embrasser une réalité très riche, mais aussi très complexe. Il est toutefois digne de l’histoire de cette Église qui a si souvent démontré sa capacité à voir “grand”, en s’investissant sans réserve dans des projets courageux et s’impliquant même face à des scénarios nouveaux et exigeants.

En témoigne le travail considérable accompli ces jours-ci par l’ensemble du diocèse en vue du Jubilé, dans l’accueil et l’accompagnement des pèlerins et à travers d’innombrables autres initiatives. Grâce à ces nombreux efforts, la ville apparaît à ceux qui y arrivent, parfois de très loin, comme une grande maison ouverte et accueillante, et surtout comme un foyer de foi.

Pour ma part, j’exprime le désir et l’engagement d’entrer dans ce chantier si vaste en me mettant, autant que possible, à l’écoute de tous, pour apprendre, comprendre et décider ensemble : “chrétien avec vous et pour vous évêque ”, comme le disait saint Augustin (cf. Discours 340, 1). Je vous demande de m’aider à le faire dans un effort commun de prière et de charité, en rappelant les paroles de saint Léon le Grand : « Tout le bien que nous accomplissons dans l’exercice de notre ministère est l’œuvre du Christ ; et non pas la nôtre, car nous ne pouvons rien sans lui, mais nous nous glorifions en lui, de qui vient toute l’efficacité de notre action » (Serm. 5, de natali ipsius, 4).

À ces paroles je voudrais joindre, en concluant, celles du Bienheureux Jean-Paul Ier, qui le 23 septembre 1978, avec le visage radieux et serein qui lui avait déjà valu l’appellation de “Pape du sourire”, saluait ainsi sa nouvelle famille diocésaine : « Devenant Patriarche à Venise, Saint Pie X s’était exclamé à St-Marc : “Qu’en serait-il de moi, Vénitiens, si je ne vous aimais pas ?”. Aux Romains, je dirai quelque chose de semblable ; je puis vous assurer que je vous aime, que je désire seulement entrer à votre service et mettre à votre disposition, toutes mes pauvres forces, le peu que j’ai et le peu que je suis » (Homélie à l’occasion de la Prise de Possession de la Cathedra Romana, 23 septembre 1978).

Je vous exprime également toute mon affection, avec le désir de partager avec vous, sur notre chemin commun, les joies et les peines, les difficultés et les espoirs. Je vous offre moi aussi “le peu que j’ai et que je suis”, et je le confie à l’intercession des saints Pierre et Paul et de tant d’autres frères et sœurs dont la sainteté a illuminé l’histoire de cette Église et les rues de cette ville. Que la Vierge Marie nous accompagne et intercède pour nous.

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

Première bénédiction URBI et ORBI du Saint-Père Léon XIV

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Le 8 mai 2025, depuis la loggia de la basilique Saint-Pierre, le pape Léon XIV a prononcé sa première bénédiction « Urbi et Orbi ». Dans ce message empreint de paix et d’humilité, il a appelé à l’unité, au dialogue et à la solidarité, en s’inspirant de l’héritage de saint Augustin et en rendant hommage à son prédécesseur, le pape François. Il a également adressé une salutation particulière à son ancien diocèse de Chiclayo, au Pérou.

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Lire le texte intégral de la bénédiction du Saint-Père ci-dessous. :

PREMIÈRE BÉNÉDICTION URBI ET ORBI
DU SAINT-PÈRE LÉON XIV

Loggia des bénédictions de la basilique Saint-Pierre
Jeudi 8 mai 2025

Que la paix soit avec vous tous !

Très chers frères et sœurs, telle est la première salutation du Christ ressuscité, le Bon Pasteur qui a donné sa vie pour le troupeau de Dieu. Moi aussi, je voudrais que ce salut de paix entre dans votre cœur, atteigne vos familles, toutes les personnes, où qu’elles se trouvent, tous les peuples, toute la terre. Que la paix soit avec vous !

C’est la paix du Christ ressuscité, une paix désarmée et désarmante, humble et persévérante. Elle vient de Dieu, Dieu qui nous aime tous inconditionnellement.

Nous avons encore dans nos oreilles cette voix faible mais toujours courageuse du Pape François qui bénissait Rome ! Le Pape qui bénissait Rome donnait sa bénédiction au monde, au monde entier, en ce matin de Pâques. Permettez-moi de reprendre cette même bénédiction : Dieu nous aime, Dieu vous aime tous, et le mal ne prévaudra pas ! Nous sommes tous entre les mains de Dieu. Alors, sans crainte, unis main dans la main avec Dieu et entre nous, allons de l’avant. Nous sommes disciples du Christ. Le Christ nous précède. Le monde a besoin de sa lumière. L’humanité a besoin de Lui comme pont pour être rejoint par Dieu et par son amour. Aidez-nous vous aussi, puis aidez-vous les uns les autres à construire des ponts, par le dialogue, par la rencontre, en nous unissant tous pour être un seul peuple toujours en paix. Merci au Pape François !

Je tiens également à remercier tous mes frères Cardinaux qui m’ont choisi pour être le Successeur de Pierre et marcher avec vous, en tant qu’Église unie, toujours à la recherche de la paix, de la justice, toujours en essayant de travailler comme des hommes et des femmes fidèles à Jésus-Christ, sans crainte, pour proclamer l’Évangile, pour être missionnaires.

Je suis un fils de saint Augustin, augustinien, qui a dit : « Avec vous, je suis chrétien, et pour vous, je suis évêque ». En ce sens, nous pouvons tous marcher ensemble vers la patrie que Dieu nous a préparée.

À l’Église de Rome, un salut particulier! [applaudissements] Nous devons chercher ensemble comment être une Église missionnaire, une Église qui construit les ponts, le dialogue, toujours prête à accueillir comme cette place avec les bras ouverts. Tous, tous ceux qui ont besoin de notre charité, de notre présence, de dialogue et d’amour.

Et si vous me permettez un mot, je salue tout le monde, en particulier mon cher diocèse de Chiclayo, au Pérou, où un peuple fidèle a accompagné son évêque, a partagé sa foi et a donné beaucoup, beaucoup pour continuer à être une Église fidèle à Jésus-Christ.

À vous tous, frères et sœurs de Rome, d’Italie, du monde entier, nous voulons être une Église synodale, une Église qui marche, une Église qui recherche toujours la paix, qui recherche toujours la charité, qui cherche toujours à être proche, en particulier de ceux qui souffrent.

Aujourd’hui, c’est le jour de la Supplique à Notre-Dame de Pompéi. Notre Mère Marie veut toujours marcher avec nous, être proche de nous, nous aider par son intercession et son amour.

Je voudrais donc prier avec vous. Prions ensemble pour cette nouvelle mission, pour toute l’Église, pour la paix dans le monde et demandons cette grâce spéciale à Marie, notre Mère.

Ave Maria…

 

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

Homélie du pape Léon XIV – Messe avec les cardinaux électeurs

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Le 9 mai 2025, le pape Léon XIV a célébré une messe pro Ecclesia avec les cardinaux électeurs dans la chapelle Sixtine. Dans son homélie, il a invité les fidèles à reconnaître les merveilles accomplies par le Seigneur et à s’engager dans l’annonce de l’Évangile. S’appuyant sur la profession de foi de Pierre, il a souligné l’importance de la mission apostolique confiée à l’Église. Le pape a également évoqué les défis du monde contemporain, appelant à une Église rayonnante par la sainteté de ses membres.

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Lisez le texte intégral de l’homélie du pape Léon XIV ci-dessous :

HOMÉLIE DU PAPE LÉON XIV

Chapelle Sixtine
Vendredi 9 mai 2025

Je commencerai par quelques mots en anglais, puis je poursuivrai en italien.

Mais je voudrais répéter les paroles du psaume responsorial : « Je chanterai un cantique nouveau au Seigneur, car il a fait des merveilles  ».

Et en effet, pas seulement pour moi, mais pour nous tous. Mes frères cardinaux, alors que nous célébrons ce matin, je vous invite à reconnaître les merveilles que le Seigneur a accomplies, les bénédictions que le Seigneur continue de répandre sur nous tous à travers le ministère de Pierre.

Vous m’avez appelé à porter cette croix et à être béni par cette mission, et je sais que je peux compter sur chacun d’entre vous pour marcher à mes côtés, alors que nous continuons à être une Église, une communauté d’amis de Jésus, des croyants qui annoncent la Bonne Nouvelle, qui annoncent l’Évangile.

« Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant » (Mt 16, 16). Par ces paroles, Pierre, interrogé avec les autres disciples par le Maître sur la foi qu’il a en Lui, exprime en synthèse le patrimoine que l’Église, à travers la succession apostolique, garde, approfondit et transmet depuis deux mille ans.

Jésus est le Christ, le Fils du Dieu vivant, c’est-à-dire l’unique Sauveur et le révélateur du visage du Père.

En Lui, Dieu, pour se faire proche et accessible aux hommes, s’est révélé à nous dans les yeux confiants d’un enfant, dans l’esprit éveillé d’un adolescent, dans les traits mûrs d’un homme (cf. Conc. Vat. II, Const. Past. Gaudium et spes, n. 22), jusqu’à apparaître aux siens, après sa résurrection, dans son corps glorieux. Il nous a ainsi montré un modèle d’humanité sainte que nous pouvons tous imiter, avec la promesse d’une destinée éternelle qui dépasse toutes nos limites et toutes nos capacités.

Dans sa réponse, Pierre saisit ces deux aspects : le don de Dieu et le chemin à parcourir pour se laisser transformer, dimensions indissociables du salut, confiées à l’Église afin qu’elle les annonce pour le bien du genre humain. Confiés à nous, choisis par Lui avant même que nous ayons été formés dans le sein de notre mère (cf. Jr 1, 5), régénérés dans l’eau du Baptême et, au-delà de nos limites et sans aucun mérite de notre part, conduits ici et envoyés d’ici, afin que l’Évangile soit annoncé à toute créature (cf. Mc 16, 15).

En particulier, Dieu, en m’appelant par votre vote à succéder au Premier des Apôtres, me confie ce trésor afin que, avec son aide, j’en sois le fidèle administrateur (cf. 1 Co 4, 2) au profit de tout le Corps mystique de l’Église, de sorte qu’elle soit toujours plus la ville placée sur la montagne (cf. Ap 21, 10), l’arche du salut qui navigue sur les flots de l’histoire, phare qui éclaire les nuits du monde. Et cela, non pas tant grâce à la magnificence de ses structures ou à la grandeur de ses constructions – comme les édifices dans lesquels nous nous trouvons –, mais à travers la sainteté de ses membres, de ce « peuple que Dieu s’est acquis pour proclamer les œuvres admirables de celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière » (1 P 2, 9).

Cependant, en amont de la conversation où Pierre fait sa profession de foi, il y a aussi une autre question : « Au dire des gens, qui est le Fils de l’homme ? » (Mt 16, 13). Ce n’est pas une question anodine, elle touche en effet à un aspect important de notre ministère : la réalité dans laquelle nous vivons, avec ses limites et ses potentialités, ses questions et ses convictions.

« Au dire des gens, qui est le Fils de l’homme ?» (Mt 16, 13). En pensant à la scène sur laquelle nous réfléchissons, nous pourrions trouver deux réponses possibles à cette question qui dessinent deux attitudes différentes.

Il y a tout d’abord la réponse du monde. Matthieu souligne que la conversation entre Jésus et ses disciples sur son identité se déroule dans la belle ville de Césarée de Philippe, riche en palais luxueux, nichée dans un cadre naturel enchanteur, au pied de l’Hermon, mais aussi siège de cercles de pouvoir cruels et théâtre de trahisons et d’infidélités. Cette image nous parle d’un monde qui considère Jésus comme une personne totalement insignifiante, tout au plus un personnage curieux, qui peut susciter l’émerveillement par sa manière inhabituelle de parler et d’agir. Ainsi, lorsque sa présence deviendra gênante en raison de son exigence d’honnêteté et de moralité, ce « monde » n’hésitera pas à le rejeter et à l’éliminer.

Il y a ensuite une autre réponse possible à la question de Jésus : celle du peuple. Pour lui, le Nazaréen n’est pas un « charlatan » : c’est un homme droit, courageux, qui parle bien et dit des choses justes, comme d’autres grands prophètes de l’histoire d’Israël. C’est pourquoi il le suit, du moins tant qu’il peut le faire sans trop de risques ni d’inconvénients. Mais ce n’est qu’un homme, et donc, au moment du danger, lors de la Passion, il l’abandonne et s’en va, déçu.

Ce qui frappe dans ces deux attitudes, c’est leur actualité. Elles incarnent en effet des idées que l’on pourrait facilement retrouver – peut-être exprimées dans un langage différent, mais identiques dans leur substance – dans la bouche de nombreux hommes et femmes de notre temps.

Aujourd’hui encore, nombreux sont les contextes où la foi chrétienne est considérée comme absurde, réservée aux personnes faibles et peu intelligentes ; des contextes où on lui préfère d’autres certitudes, comme la technologie, l’argent, le succès, le pouvoir, le plaisir.

Il s’agit d’environnements où il n’est pas facile de témoigner et d’annoncer l’Évangile, et où ceux qui croient sont ridiculisés, persécutés, méprisés ou, au mieux, tolérés et pris en pitié. Et pourtant, c’est précisément pour cette raison que la mission est urgente en ces lieux, car le manque de foi entraîne souvent des drames tels que la perte du sens de la vie, l’oubli de la miséricorde, la violation de la dignité de la personne sous ses formes les plus dramatiques, la crise de la famille et tant d’autres blessures dont notre société souffre considérablement.

Aujourd’hui encore, il existe des contextes où Jésus, bien qu’apprécié en tant qu’homme, est réduit à une sorte de leader charismatique ou de super-homme, et cela non seulement chez les non-croyants, mais aussi chez nombre de baptisés qui finissent ainsi par vivre, à ce niveau, dans un athéisme de fait.

Tel est le monde qui nous est confié, dans lequel, comme nous l’a enseigné à maintes reprises le Pape François, nous sommes appelés à témoigner de la foi joyeuse en Christ Sauveur. C’est pourquoi, pour nous aussi, il est essentiel de répéter : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant » (Mt 16, 16).

Il est essentiel de le faire avant tout dans notre relation personnelle avec Lui, dans l’engagement d’un chemin quotidien de conversion. Mais aussi, en tant qu’Église, en vivant ensemble notre appartenance au Seigneur et en apportant à tous la Bonne Nouvelle (cf. Conc. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 1).

Je le dis tout d’abord pour moi-même, en tant que Successeur de Pierre, alors que je commence cette mission d’Évêque de l’Église qui est à Rome, appelée à présider dans la charité l’Église universelle, selon la célèbre expression de S. Ignace d’Antioche (cf. Lettre aux Romains, Prologue). Conduit enchaîné vers cette ville, lieu de son sacrifice imminent, il écrivait aux chrétiens qui s’y trouvaient : « Alors je serai vraiment disciple de Jésus-Christ, quand le monde ne verra plus mon corps » (Lettre aux Romains, IV, 1). Il faisait référence au fait d’être dévoré par les bêtes sauvages dans le cirque – et c’est ce qui arriva –, mais ses paroles renvoient de manière plus générale à un engagement inconditionnel pour quiconque exerce un ministère d’autorité dans l’Église : disparaître pour que le Christ demeure, se faire petit pour qu’Il soit connu et glorifié (cf. Jn 3, 30), se dépenser jusqu’au bout pour que personne ne manque l’occasion de Le connaître et de L’aimer.

Que Dieu m’accorde cette grâce, aujourd’hui et toujours, avec l’aide de la très tendre intercession de Marie, Mère de l’Église.

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

 

Homélie Du Cardinal Giovanni Battista Re – Messe pour l’élection du Pontife romain

La messe pour l’eléction du Pontife Romain de la Basilique Saint-Pierre au Vatican. Droits réservés à Sel + Lumière Médias

Ce mercredi 7 mai 2025, alors que le conclave s’apprête à élire le 267ᵉ successeur de saint Pierre, le cardinal Giovanni Battista Re, doyen du Collège des cardinaux, a présidé la messe solennelle « Pro Eligendo Romano Pontifice » en la basilique Saint-Pierre. Dans son homélie, il a appelé les cardinaux électeurs à invoquer l’Esprit Saint avec ferveur, soulignant que « prier, en invoquant l’Esprit Saint, est la seule attitude juste qui convienne » face à cette responsabilité exceptionnelle.

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Lisez le texte intégral de l’homélie du cardinal Battista Re ci-dessous :

HOMÉLIE DU CARDINAL GIOVANNI BATTISTA RE
DOYEN DU COLLÈGE CARDINALICE

Basilique Saint-Pierre
Mercredi 7 mai 2025

 

On lit dans les Actes des Apôtres qu’après l’Ascension du Christ au ciel, et dans l’attente de la Pentecôte, tous étaient assidus à la prière avec Marie, la Mère de Jésus (cf. Ac 1, 14).

C’est exactement ce que nous faisons nous aussi, peu avant le début du Conclave, sous le regard de la Vierge Marie placée à côté de l’autel, en cette Basilique qui s’élève sur la tombe de l’Apôtre Pierre.

Nous sentons que tout le peuple de Dieu est uni à nous, avec sa foi, son amour pour le Pape et son attente confiante.

Nous sommes ici pour invoquer l’aide de l’Esprit Saint, pour implorer sa lumière et sa force afin que soit élu le Pape dont l’Église et l’humanité ont besoin en ce tournant si difficile et si complexe de l’histoire.

Prier, en invoquant l’Esprit Saint, est la seule attitude juste qui convienne, alors que les Cardinaux électeurs se préparent à un acte de la plus haute responsabilité humaine et ecclésiale, et à un choix d’une importance exceptionnelle ; un acte humain pour lequel toute considération personnelle doit être abandonnée, en n’ayant que le Dieu de Jésus-Christ et le bien de l’Église et de l’humanité dans l’esprit et dans le cœur.

Dans l’Évangile qui a été proclamé, résonnent des paroles qui nous conduisent au cœur du message suprême, le testament de Jésus, remis à ses apôtres le soir de la Cèn au Cénacle : « Mon commandement, le voici : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés » (Jn 15, 12). Afin de préciser ce « comme je vous ai aimés » et indiquer jusqu’où doit aller notre amour, Jésus ajoute : « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime » (Jn 15, 13).

C’est le message d’amour que Jésus définit comme un “nouveau” commandement. Nouveau parce qu’il transforme en positif et élargit considérablement l’avertissement de l’Ancien Testament qui disait : « Ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu’on te fasse ».

L’amour que Jésus révèle ne connaît pas de limites et doit caractériser les pensées et l’action de tous ses disciples qui doivent toujours, dans leur comportement, manifester un amour authentique et s’engager à construire une nouvelle civilisation, celle que Paul VI a appelée “civilisation de l’amour”. L’amour est la seule force capable de changer le monde.

Jésus nous a donné l’exemple de cet amour au début de la dernière Cène par un geste surprenant : Il s’est abaissé au service des autres, lavant les pieds des apôtres, sans discrimination, n’excluant pas Judas qui allait le trahir.

Ce message de Jésus fait écho à ce que nous avons entendu dans la première lecture de la messe, où le Prophète Isaïe nous a rappelé que la qualité fondamentale des pasteurs est l’amour jusqu’au don total de soi.

Les textes liturgiques de cette célébration eucharistique nous invitent donc à l’amour fraternel, à l’aide mutuelle et à l’engagement en faveur de la communion ecclésiale et de la fraternité humaine universelle. Parmi les tâches de chaque successeur de Pierre, il y a celle de faire grandir la communion : communion de tous les chrétiens avec le Christ ; communion des évêques avec le Pape ; communion des évêques entre eux. Il ne s’agit pas d’une communion autoréférentielle mais tendue vers la communion entre les personnes, les peuples et les cultures, soucieuse que l’Église soit toujours “maison et école de communion”.

L’appel est fort à maintenir l’unité de l’Église dans la voie tracée par le Christ aux Apôtres. L’unité de l’Église est voulue par le Christ ; une unité qui ne signifie pas uniformité, mais une communion solide et profonde dans la diversité, à condition de rester dans la pleine fidélité à l’Évangile.

Chaque Pape continue d’incarner Pierre et sa mission et représente ainsi le Christ sur terre ; il est le roc sur lequel l’Église est édifiée (cf. Mt 16, 18).

L’élection du nouveau Pape n’est pas une simple succession de personnes, mais c’est toujours l’Apôtre Pierre qui revient.

Les Cardinaux électeurs exprimeront leur vote dans la Chapelle Sixtine où, comme le dit la Constitution apostolique Universi dominici gregis, « tout concourt à nourrir la conscience de la présence de Dieu, devant lequel chacun devra un jour se présenter pour être jugé ».

Dans le Triptyque romain, le Pape Jean-Paul II souhaitait que, au moment de la grande décision à travers le vote, l’image imposante de Jésus Juge rappelle à chacun la grandeur de la responsabilité de remettre les “clés suprêmes” (Dante) entre de bonnes mains.

Prions pour que l’Esprit Saint, qui nous a donné au cours des cent dernières années une série de Pontifes vraiment saints et grands, nous donne un nouveau Pape selon le cœur de Dieu, pour le bien de l’Église et de l’humanité.

Prions pour que Dieu accorde à l’Église le Pape qui saura le mieux réveiller les consciences de tous ainsi que les énergies morales et spirituelles dans la société actuelle, caractérisée par de grands progrès technologiques mais qui tend à oublier Dieu.

Le monde d’aujourd’hui attend beaucoup de l’Église pour la sauvegarde de ces valeurs fondamentales, humaines et spirituelles, sans lesquelles la coexistence humaine ne pourra s’améliorer ni porter du bien aux générations futures.

Que la Bienheureuse Vierge Marie, Mère de l’Église, intervienne par sa maternelle intercession, afin que l’Esprit Saint éclaire l’esprit des Cardinaux électeurs et les rende unanimes dans l’élection du Pape dont notre temps a besoin.

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

Homélie du cardinal Parolin pour le deuxième jour du Novendiali

Crédit photo : Vatican Media

Le dimanche de la Divine Miséricorde, 27 avril 2025, le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’État du pape François, a présidé la messe et prononcé l’homélie pour le deuxième jour des Novendiali et le Jubilé des adolescents. Il a déclaré que le pape François « nous a rappelé que la “miséricorde” est le nom même de Dieu et que, par conséquent, personne ne peut mettre une limite à son amour miséricordieux avec lequel il veut nous élever et faire de nous des personnes nouvelles ».

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Lisez le texte intégral de l’homélie du cardinal Parolin ci-dessous :

Homélie de Son Éminence le Card. Pietro Parolin
Dimance de la Divine Miséricorde, 27 avril 2025

Chers frères et sœurs,

Jésus ressuscité apparaît à ses disciples, alors qu’ils se trouvent dans le cénacle où ils se sont enfermés par peur, les portes verrouillées (Cf. Jn 20, 19). Leur état d’esprit est troublé et leur cœur est triste, car le Maître et le Pasteur qu’ils avaient suivi en abandonnant tout a été cloué sur la croix. Ils ont vécu des choses terribles et se sentent orphelins, seuls, perdus, menacés et sans défense.

L’image initiale que l’Évangile nous offre en ce dimanche peut aussi bien représenter l’état d’esprit de chacun de nous, de l’Église et du monde entier. Le Pasteur que le Seigneur a donné à son peuple, le pape François, a terminé sa vie terrestre et nous a quittés. La douleur de son départ, le sentiment de tristesse qui nous assaille, le trouble que nous ressentons dans notre cœur, le sentiment de désorientation : nous vivons tout cela, comme les apôtres affligés par la mort de Jésus.

Pourtant, l’Évangile nous dit que c’est précisément dans ces moments d’obscurité que le Seigneur vient à nous avec la lumière de la résurrection, pour éclairer nos cœurs. Le pape François nous l’a rappelé dès son élection et nous l’a répété souvent, en plaçant au centre de son pontificat cette joie de l’Évangile qui, comme il l’écrit dans Evangelii gaudium, « remplit le cœur et toute la vie de ceux qui rencontrent Jésus. Ceux qui se laissent sauver par lui sont libérés du péché, de la tristesse, du vide intérieur, de l’isolement. Avec Jésus Christ la joie naît et renaît toujours » (n° 1).

La joie pascale, qui nous soutient à l’heure de l’épreuve et de la tristesse, est aujourd’hui quelque chose que l’on peut presque toucher sur cette place ; elle est surtout imprimée sur vos visages, chers jeunes et adolescents venus du monde entier pour célébrer le Jubilé. Vous venez de partout : de tous les diocèses d’Italie, d’Europe, des États-Unis, d’Amérique latine, d’Afrique, d’Asie, des Émirats arabes… Avec vous, le monde entier est vraiment présent !

Je vous adresse un salut particulier, avec le souhait que vous ressentiez l’étreinte de l’Église et l’affection du pape François, qui aurait tant souhaité vous rencontrer, vous regarder dans les yeux, passer parmi vous pour vous saluer.

Face aux nombreux défis auxquels vous êtes appelés à faire face – je pense, par exemple, à celui de la technologie et de l’intelligence artificielle qui caractérise particulièrement notre époque –, n’oubliez jamais d’alimenter votre vie avec la véritable espérance qui a le visage de Jésus Christ. Avec lui, rien ne sera trop grand ni trop difficile ! Avec lui, vous ne serez jamais seuls ni abandonnés à vous-mêmes, même dans les moments les plus difficiles ! Il vient à votre rencontre là où vous êtes, pour vous donner le courage de vivre, de partager vos expériences, vos pensées, vos dons, vos rêves, de voir dans le visage de ceux qui sont proches ou lointains un frère et une sœur à aimer, à qui vous avez tant à donner et tant à recevoir, pour vous aider à être généreux, fidèles et responsables dans la vie qui vous attend, pour vous faire comprendre ce qui a le plus de valeur dans la vie : l’amour qui comprend tout et espère tout (cf. 1 Co 13, 7).

Aujourd’hui, deuxième dimanche de Pâques, dimanche in Albis, nous célébrons la fête de la Miséricorde.

C’est précisément la miséricorde du Père, plus grande que nos limites et nos calculs, qui a caractérisé le magistère du pape François et son intense activité apostolique, ainsi que son désir ardent de l’annoncer et de la partager avec tous – l’annonce de la Bonne Nouvelle, l’évangélisation – qui a été le programme de son pontificat. Il nous a rappelé que “miséricorde” est le nom même de Dieu et que, par conséquent, personne ne peut mettre une limite à son amour miséricordieux par lequel Il veut nous relever et faire de nous des personnes nouvelles.

Il est important d’accueillir comme un trésor précieux cette indication sur laquelle le pape François a tant insisté. Et – permettez-moi de le dire – notre affection pour lui, qui se manifeste en ces heures, ne doit pas rester une simple émotion du moment ; nous devons accueillir son héritage et le faire devenir vie vécue, en nous ouvrant à la miséricorde de Dieu et en devenant nous aussi miséricordieux les uns envers les autres.

La miséricorde nous ramène au cœur de la foi. Elle nous rappelle que nous ne devons pas interpréter notre relation avec Dieu et notre appartenance à l’Église selon des catégories humaines ou mondaines, car la bonne nouvelle de l’Évangile est avant tout la découverte d’être aimé par un Dieu qui a des entrailles de compassion et de tendresse pour chacun de nous, indépendamment de nos mérites ; elle nous rappelle également que notre vie est tissée de miséricorde : nous ne pouvons nous relever après nos chutes et regarder vers l’avenir que si nous avons quelqu’un qui nous aime sans limites et qui nous pardonne. C’est pourquoi nous sommes appelés à nous engager à vivre nos relations non plus selon des critères calculateurs ou aveuglés par l’égoïsme, mais en nous ouvrant au dialogue avec l’autre, en accueillant ceux que nous rencontrons sur notre chemin et en pardonnant leurs faiblesses et leurs erreurs. Seule la miséricorde guérit et crée un monde nouveau, éteignant les feux de la méfiance, de la haine et de la violence : c’est le grand enseignement du pape François.

Jésus nous montre ce visage miséricordieux de Dieu dans sa prédication et dans les gestes qu’il accomplit ; et, comme nous l’avons entendu, en se présentant dans le Cénacle après sa résurrection, il offre le don de la paix et dit : « À qui vous remettrez ses péchés, ils seront remis ; à qui vous maintiendrez ses péchés, ils seront maintenus » (Jn 20, 23). Ainsi, le Seigneur ressuscité établit que ses disciples, son Église, sont des instruments de miséricorde pour l’humanité, pour ceux qui désirent accueillir l’amour et le pardon de Dieu. Le pape François a été un témoin lumineux d’une Église qui se penche avec tendresse vers ceux qui sont blessés et les guérit avec le baume de la miséricorde ; et il nous a rappelé qu’il ne peut y avoir de paix sans la reconnaissance de l’autre, sans l’attention aux plus faibles et, surtout, il ne peut jamais y avoir de paix si nous n’apprenons pas à nous pardonner mutuellement, en utilisant entre nous la même miséricorde que Dieu a pour notre vie.

Frères et sœurs, en ce dimanche de la miséricorde, nous nous souvenons avec affection de notre bien-aimé Pape François. Ce souvenir est particulièrement vivant parmi les employés et les fidèles de la Cité du Vatican, dont beaucoup sont ici présents, et que je tiens à remercier pour le service qu’ils accomplissent chaque jour. À vous, à nous tous, au monde entier, le Pape François adresse son étreinte depuis le Ciel.

Nous nous confions à la Bienheureuse Vierge Marie, à laquelle Il était si pieusement attaché qu’Il a choisi de reposer dans la basilique Sainte-Marie-Majeure. Qu’Elle nous protège, intercède pour nous, veille sur l’Église, soutienne le cheminement de l’humanité dans la paix et la fraternité. Amen.

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

Homélie lors la messe de funérailles du pape François

La messe de funérailles du pape François présidée par Son Éminence le cardinal Giovanni Battista Re, Doyen du Collège des cardinaux, sur la place Saint-Pierre. Crédit photo : Vatican Media

Le texte ci-dessous est publié tel qu’il a été communiqué par le Service de presse du Saint-Siège, sans modification, y compris l’homélie prononcée lors de la messe des funérailles du pape François.

Messe de funérailles du Pape François
Homélie de Son Éminence le Card. Giovanni Battista Re
Samedi, 26 avril 2025

Sur cette majestueuse place Saint-Pierre, où le pape François a célébré tant de fois l’Eucharistie et présidé de grandes rencontres au cours de ces 12 années, nous sommes rassemblés en prière autour de sa dépouille mortelle, le cœur triste, mais soutenus par les certitudes de la foi, qui nous assure que l’existence humaine ne s’achève pas dans la tombe, mais dans la maison du Père, dans une vie de bonheur qui ne connaîtra pas de crépuscule. 

Au nom du Collège des Cardinaux, je remercie cordialement chacun d’entre vous pour votre présence. Avec une profonde émotion, j’adresse un salut respectueux et mes vifs remerciements aux chefs d’État, aux chefs de gouvernement et aux délégations officielles venus de nombreux pays pour exprimer leur affection, leur vénération et leur estime envers le Pape qui nous a quittés. 

Le plébiscite des manifestations d’affection et de participation, que nous avons vu ces derniers jours après son passage de cette terre vers l’éternité, nous montre à quel point le pontificat intense du pape François a touché les esprits et les cœurs. 

Sa dernière image, qui restera gravée dans nos yeux et dans nos cœurs, est celle de dimanche dernier, jour de la solennité de Pâques, lorsque le pape François, malgré ses graves problèmes de santé, a voulu nous donner la bénédiction depuis le balcon de la basilique Saint-Pierre, puis est descendu sur cette place pour saluer depuis la papamobile découverte toute la foule venue assister à la messe de Pâques. 

Par notre prière, nous voulons maintenant confier l’âme du bien-aimé Pontife à Dieu, afin qu’Il lui accorde la félicité éternelle dans l’horizon lumineux et glorieux de son immense amour. La page de l’Évangile, où résonne la voix même du Christ interpellant le premier des Apôtres, nous éclaire et nous guide : “Pierre, m’aimes-tu plus que ceux-ci ?”. Et la réponse de Pierre fut immédiate et sincère : “Seigneur, tu sais tout, tu sais que je t’aime”. Et Jésus lui confia la grande mission : “Pais mes brebis”.  Ce sera là la tâche constante de Pierre et de ses successeurs, un service d’amour à la suite du Maître et Seigneur Jésus-Christ qui « n’est pas venu pour être servi, mais pour servir, et donner sa vie en rançon pour la multitude » (Mc 10, 45). 

Malgré sa fragilité dernière et sa souffrance, le pape François a choisi de suivre cette voie du don jusqu’au dernier jour de sa vie terrestre. Il a suivi les traces de son Seigneur, le bon Pasteur, qui a aimé ses brebis jusqu’à donner sa vie pour elles. Et il l’a fait avec force et sérénité, proche de son troupeau, l’Église de Dieu, en se souvenant de la phrase de Jésus citée par l’apôtre Paul : « Il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir » (Ac 20, 35). 

Lorsque le Cardinal Bergoglio a été élu le 13 mars 2013 par le Conclave pour succéder au pape Benoît XVI, il avait derrière lui des années de vie religieuse dans la Compagnie de Jésus et surtout il était enrichi par l’expérience de 21 ans de ministère pastoral dans l’archidiocèse de Buenos Aires, d’abord comme auxiliaire, puis comme coadjuteur et enfin, surtout, comme archevêque. 

La décision de prendre le nom de François est immédiatement apparue comme le choix d’un programme et d’un style sur lesquels il souhaitait fonder son pontificat, en cherchant à s’inspirer de l’esprit de saint François d’Assise. 

 Il a conservé son tempérament et sa manière de guider son troupeau, et a immédiatement imprimé sa forte personnalité dans la gouvernance de l’Église, en établissant un contact direct avec les individus et les populations, désireux d’être proche de tous, avec une attention particulière pour les personnes en difficulté, se dépensant sans compter, en particulier pour les plus démunis, les exclus. 

Il a été un pape parmi les gens, avec un cœur ouvert à tous. Il a également été un pape attentif à ce qui émergeait de nouveau dans la société et à ce que l’Esprit Saint suscitait dans l’Église. Avec son vocabulaire caractéristique et son langage riche en images et en métaphores, il a toujours cherché à éclairer les problèmes de notre temps par la sagesse de l’Évangile, en offrant une réponse à la lumière de la foi et en encourageant à vivre en chrétiens les défis et les contradictions de ces années de changements, qu’il aimait qualifier de “changement d’époque”. Il avait une grande spontanéité et une manière informelle de s’adresser à chacun, même aux personnes éloignées de l’Église. 

Riche de chaleur humaine et profondément sensible aux drames actuels, le pape François a véritablement partagé les angoisses, les souffrances et les espoirs de notre époque de mondialisation, et s’est dépensé pour réconforter et encourager chacun par un message capable de toucher le cœur des gens de manière directe et immédiate. 

Son charisme de l’accueil et de l’écoute, unis à une manière d’être en phase avec la sensibilité d’aujourd’hui, a touché les cœurs, cherchant à réveiller les énergies morales et spirituelles. 

Le primat de l’évangélisation a été le guide de son pontificat, diffusant, avec une empreinte missionnaire évidente, la joie de l’Évangile, qui a été le titre de sa première exhortation apostolique Evangelii gaudium. Une joie qui remplit de confiance et d’espérance le cœur de tous ceux qui se confient à Dieu. 

Le fil conducteur de sa mission a également été la conviction que l’Église est une maison pour tous, une maison dont les portes sont toujours ouvertes. Il a souvent utilisé l’image de l’Église comme “hôpital de campagne” après une bataille qui a fait de nombreux blessés ; une Église désireuse de prendre en charge avec détermination les problèmes des personnes et les grandes souffrances qui déchirent le monde contemporain ; une Église capable de se pencher sur chaque homme, au-delà de toute croyance ou condition, pour soigner ses blessures. 

Ses gestes et ses exhortations en faveur des réfugiés et des personnes déplacées sont innombrables. Son insistance à œuvrer en faveur des pauvres a également été constante. Il est significatif que le premier voyage du pape François ait été celui à Lampedusa, île symbole du drame de l’émigration avec des milliers de personnes noyées en mer. Dans la même ligne, il y a eu également le voyage à Lesbos, avec le patriarche œcuménique et l’archevêque d’Athènes, ainsi que la célébration d’une messe à la frontière entre le Mexique et les États-Unis, à l’occasion de son voyage au Mexique. 

Parmi ses 47 voyages apostoliques intenses, celui qu’il a effectué en Irak en 2021, au péril de sa vie, restera particulièrement gravé dans les mémoires. Cette difficile visite apostolique a été un baume sur les plaies ouvertes du peuple irakien, qui a tant souffert des actes inhumains de Daech. 

Ce voyage a également été important pour le dialogue interreligieux, autre dimension importante de son œuvre pastorale. Avec sa visite apostolique de 2024 dans quatre pays d’Asie-Océanie, le pape a atteint “la périphérie la plus périphérique du monde”. 

Le pape François a toujours mis au centre l’Évangile de la miséricorde, soulignant à plusieurs reprises que Dieu ne se lasse pas de nous pardonner : Il pardonne toujours, quelle que soit la situation de celui qui demande pardon et revient sur le droit chemin. 

Il a voulu le Jubilé extraordinaire de la Miséricorde, afin de mettre en évidence que la miséricorde est “le cœur de l’Évangile”. 

Miséricorde et joie de l’Évangile sont deux mots clés du pape François. 

En opposition à ce qu’il a défini comme “la culture du déchet”, il a parlé de la culture de la rencontre et de la solidarité. Le thème de la fraternité a traversé tout son pontificat avec des accents vibrants. Dans la lettre encyclique Fratelli tutti, il a voulu faire renaître une aspiration mondiale à la fraternité, car nous sommes tous enfants du même Père qui est aux cieux. Il a souvent rappelé avec force que nous appartenons tous à la même famille humaine. 

En 2019, lors de son voyage aux Émirats arabes unis, le pape François a signé un document sur la “Fraternité humaine pour la paix mondiale et la coexistence commune”, rappelant la paternité commune de Dieu. 

S’adressant aux hommes et aux femmes du monde entier, la lettre encyclique Laudato si’ a attiré l’attention sur les devoirs et la coresponsabilité envers notre maison commune. “Personne ne peut se sauver seul”. 

Face à la fureur des nombreuses guerres de ces dernières années, avec leurs horreurs inhumaines, leurs innombrables morts et destructions, le pape François n’a cessé d’élever la voix pour implorer la paix et appeler à la raison, à des négociations honnêtes afin de trouver les solutions possibles, car la guerre, disait-il, n’est que mort d’êtres humains, destruction de maisons, d’hôpitaux et d’écoles. La guerre laisse toujours le monde pire qu’il n’était auparavant : elle est toujours une défaite douloureuse et tragique pour tous. 

“Construire des ponts et non des murs” est une exhortation qu’il a répétée à plusieurs reprises et son service de foi en tant que Successeur de l’Apôtre Pierre a toujours été lié au service de l’homme dans toutes ses dimensions. 

En union spirituelle avec toute la Chrétienté, nous sommes nombreux ici à prier pour le pape François afin que Dieu l’accueille dans l’immensité de son amour. 

Le pape François avait l’habitude de conclure ses discours et ses rencontres en disant : “N’oubliez pas de prier pour moi”. 

Cher Pape François, nous te demandons maintenant de prier pour nous et que, du ciel, tu bénisses l’Église, bénisses Rome, bénisses le monde entier, comme tu l’as fait dimanche dernier depuis le balcon de cette basilique, dans une dernière étreinte avec tout le peuple de Dieu, mais aussi, idéalement, avec l’humanité qui cherche la vérité avec un cœur sincère et qui tient haut le flambeau de l’espérance. 

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Audience générale du pape François – mercredi 4 décembre 2024

Jean Chrysostome d’Antioche, qui reste l’un des prédicateurs les plus célèbres de l’histoire chrétienne. Son homélie de Pâques est particulièrement remarquable. Mosaïque provenant de Sainte-Sophie. Image de Wikimedia Commons.

Dans sa catéchèse hebdomadaire, le pape François a réfléchi à la puissance de l’Esprit Saint dans l’évangélisation et la prédication. Il a déclaré que « prêcher avec l’onction de l’Esprit Saint signifie transmettre, en même temps que les idées et la doctrine, la vie et la conviction de notre foi ».

Lisez le texte intégral ci-dessous. Vous pouvez également regarder l’intégralité de l’émission ce soir à 19h30 HE soit 16h30 HP sur Sel + Lumière TV et sur Sel + Lumière Plus.

Chers frères et sœurs, bonjour !

Après avoir réfléchi sur l’action sanctifiante et charismatique de l’Esprit, nous consacrons cette catéchèse à un autre aspect : l’œuvre évangélisatrice de l’Esprit Saint, c’est-à-dire à son rôle dans la prédication de l’Église.

La Première Lettre de Saint Pierre définit les apôtres comme “ceux qui ont annoncé l’Évangile par l’Esprit Saint” (cf. 1,12). Dans cette expression, nous trouvons les deux éléments constitutifs de la prédication chrétienne : son contenu, qui est l’Évangile, et son vecteur, qui est l’Esprit Saint. Parlons de l’un et de l’autre.

Dans le Nouveau Testament, le mot “Évangile” a deux significations principales. Il peut se référer à l’un des quatre Évangiles canoniques : Matthieu, Marc, Luc et Jean, et dans ce sens, l’Évangile signifie la bonne nouvelle proclamée par Jésus durant sa vie terrestre. Après Pâques, le mot “Évangile” prend le sens nouveau de bonne nouvelle concernant Jésus, à savoir le mystère pascal de la mort et de la résurrection du Seigneur. C’est ce que l’Apôtre appelle “Évangile” lorsqu’il écrit : « Je n’ai pas honte de l’Évangile, car c’est la puissance de Dieu pour le salut de quiconque croit » (Rm 1,16).

La prédication de Jésus, et plus tard celle des Apôtres, contient également tous les devoirs moraux qui découlent de l’Évangile, en commençant par les dix commandements et en terminant par le commandement “nouveau” de l’amour. Mais si nous ne voulons pas retomber dans l’erreur dénoncée par l’apôtre Paul de faire passer la loi avant la grâce et les œuvres avant la foi, nous devons toujours repartir de la proclamation de ce que le Christ a fait pour nous. C’est pourquoi l’Exhortation apostolique Evangelii gaudium, insiste tant sur la première des deux, c’est-à-dire sur le kerygme, ou “proclamation”, dont dépend toute application morale.

En effet, « dans la catéchèse, la première annonce ou “kérygme” a un rôle fondamental, qui doit être au centre de l’activité évangélisatrice et de tout objectif de renouveau ecclésial. […] Quand nous disons que cette annonce est “la première”, cela ne veut pas dire qu’elle se trouve au début et qu’après elle est oubliée ou remplacée par d’autres contenus qui la dépassent. Elle est première au sens qualitatif, parce qu’elle est l’annonce principale, celle que l’on doit toujours écouter de nouveau de différentes façons et que l’on doit toujours annoncer de nouveau durant la catéchèse sous une forme ou une autre, à toutes ses étapes et ses moments. […] On ne doit pas penser que dans la catéchèse le kérygme soit abandonné en faveur d’une formation qui prétendrait être plus “solide”. Il n’y a rien de plus solide, de plus profond, de plus sûr, de plus consistant et de plus sage que cette annonce » (nn. 164-165) c’est-à-dire du kérygme.

Jusqu’à présent, nous avons vu le contenu de la prédication chrétienne. Cependant, nous devons également garder à l’esprit le vecteur de l’annonce. L’Évangile doit être prêché « par l’Esprit Saint » (1 P 1,12). L’Église doit faire exactement ce que Jésus a dit au début de son ministère public : « L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres » (Lc 4,18). Prêcher avec l’onction de l’Esprit Saint signifie transmettre, en même temps que les idées et la doctrine, la vie et la conviction de notre foi. Cela signifie s’appuyer non pas sur « les discours persuasifs de sagesse, mais sur la manifestation de l’Esprit et de sa puissance » (1 Co 2,4), comme l’écrivait Saint Paul.

Facile à dire – pourrait-on objecter – mais comment le mettre en pratique si cela ne dépend pas de nous, mais de la venue de l’Esprit Saint ? En fait, il y a une chose qui dépend de nous, en fait deux, et je vais les mentionner brièvement. La première est la prière. L’Esprit Saint vient sur ceux qui prient, parce que le Père céleste – c’est écrit – « donne l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent » (Lc 11,13), surtout quand on le lui demande pour annoncer l’Évangile de son Fils ! Quel malheur de prêcher sans prier ! On devient ce que l’Apôtre appelle « un cuivre qui résonne, une cymbale retentissante » (cf. 1 Co 13, 1).

Par conséquent, la première chose qui dépend de nous est de prier. Afin que vienne l’Esprit-Saint. La seconde est de ne pas vouloir nous prêcher nous-mêmes, mais Jésus le Seigneur (cf. 2 Co 4,5).

Cela concerne la prédication. Il y a parfois de longs sermons, 20 minutes, 30 minutes… Mais s’il vous plaît, les prédicateurs doivent prêcher une idée, une émotion et une incitation à l’action. Au-delà de huit minutes, la prédication s’estompe, elle n’est pas comprise. Et cela, je le dis aux prédicateurs… [applaudissements] Je vois que vous aimez entendre cela ! Nous voyons parfois des hommes qui, lorsque le sermon commence, sortent fumer une cigarette et reviennent ensuite. S’il vous plaît, le sermon doit être une idée, une émotion et une proposition d’action. Et ne dépassez jamais dix minutes. C’est très important.

La deuxième chose – je vous le disais – c’est de ne pas nous prêcher nous-mêmes, mais de prêcher le Seigneur. Il n’est pas nécessaire d’insister sur ce point, car toute personne engagée dans l’évangélisation sait bien ce que signifie concrètement ne pas se prêcher soi-même. Je me limiterai à une application particulière de cette exigence. Ne pas vouloir se prêcher soi-même implique aussi de ne pas toujours privilégier les initiatives pastorales promues par nous et liées à notre propre nom, mais de collaborer volontiers, si on nous le demande, à des initiatives communautaires, ou qui nous sont confiées ainsi par obéissance.

Que l’Esprit Saint nous aide, nous accompagne et enseigne à l’Église à prêcher ainsi l’Évangile aux hommes et aux femmes de ce temps ! Je vous remercie.

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

 

 

Homélie du pape François lors de la messe d’ouverture du Synode 2023

L’Assemblée générale 2023 du Synode sur la synodalité a débuté par la Sainte Messe le 4 octobre, en la fête de Saint François d’Assise. Dans son homélie, le pape François a affirmé que « le Synode sert à nous rappeler ceci : notre Mère l’Église a toujours besoin d’être purifiée, d’être « réparée », car nous sommes un peuple composé de pécheurs pardonnés – les deux éléments : pécheurs pardonnés – qui ont toujours besoin de revenir à la source qu’est Jésus et de se remettre sur les chemins de l’Esprit pour atteindre tout le monde avec son Évangile. »

Messe avec les nouveaux cardinaux et le Collège des cardinaux
Ouverture de l’Assemblée générale ordinaire du Synode des évêques
Homélie de Sa Sainteté
Place Saint-Pierre
Mercredi 4 octobre 2023

Voici le texte intégral:

L’Évangile que nous venons d’entendre est précédé par le récit d’un moment difficile de la mission de Jésus, que nous pourrions définir comme un moment de “désolation pastorale” : Jean Baptiste doute qu’il soit vraiment le Messie ; de nombreuses villes qu’il a traversées, malgré les miracles accomplis, ne se sont pas converties ; les gens l’accusent d’être un glouton et un ivrogne, alors qu’un peu plus tôt ils s’étaient plaints du Baptiste parce qu’il était trop austère (cf. Mt 11, 2-24). Cependant, nous voyons que Jésus ne se laisse pas abattre par la tristesse, mais il lève les yeux vers le ciel et bénit le Père parce qu’il a révélé aux simples les mystères du Royaume de Dieu : « Père, Seigneur du ciel et de la terre, je proclame ta louange : ce que tu as caché aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout-petits » (Mt 11, 25). Au moment de la désolation, Jésus a donc un regard capable de voir au-delà: il loue la sagesse du Père et il est capable de discerner le bien caché qui grandit, la semence de la Parole accueillie par les simples, la lumière du Royaume de Dieu qui se fraye un chemin même dans la nuit. 

Chers frères cardinaux, frères évêques, sœurs et frères, nous sommes à l’ouverture de l’Assemblée synodale. Et nous n’avons pas besoin d’un regard immanent, fait de stratégies humaines, de calculs politiques ou de batailles idéologiques. Nous ne sommes pas ici pour mener une réunion parlementaire ou un plan de réforme. Non. Nous sommes ici pour marcher ensemble sous le regard de Jésus, qui bénit le Père et accueille tous ceux qui sont fatigués et opprimés. Partons donc du regard de Jésus, un regard qui bénit et qui accueille.

1. C’est avant tout un regard qui bénit. Bien qu’il ait fait l’expérience du rejet et qu’il ait vu tant de dureté de cœur autour de lui, le Christ ne se laisse pas emprisonner par la déception, il ne devient pas amer, il n’éteint pas la louange ; son cœur, enraciné dans le primat du Père, reste serein même dans la tempête. 

Ce regard qui bénit du Seigneur nous invite aussi à être une Église qui, avec un esprit joyeux, contemple l’action de Dieu et discerne le présent. Et qui, au milieu des vagues parfois agitées de notre temps, ne se décourage pas, ne cherche pas d’échappatoires idéologiques, ne se barricade pas derrière des convictions acquises, ne cède pas aux solutions faciles, ne se laisse pas dicter son agenda par le monde. Telle est la sagesse spirituelle de l’Église, résumée avec sérénité par saint Jean XXIII : « Il est nécessaire avant tout que l’Église ne détourne jamais son regard de l’héritage sacré de vérité qu’elle a reçu des anciens. Mais il faut aussi qu’elle se tourne vers les temps présents, qui entraînent de nouvelles situations, de nouvelles formes de vie et ouvrent de nouvelles voies à l’apostolat » (Discours pour l’ouverture solennelle du Concile œcuménique Vatican II, 11 octobre 1962). 

Le regard qui bénit de Jésus nous invite à être une Église qui n’affronte pas les défis et les problèmes d’aujourd’hui avec un esprit de division et de conflit, mais qui, au contraire, tourne les yeux vers Dieu qui est communion et, avec crainte et humilité, le bénit et l’adore, le reconnaissant comme son unique Seigneur. Nous Lui appartenons et – ne l’oublions pas – nous n’existons que pour Le 

porter au monde. Comme nous l’a dit l’apôtre Paul, « la croix de notre Seigneur Jésus Christ reste notre seule fierté » (Ga 6, 14). Cela nous suffit, Il nous suffit. Nous ne voulons pas de gloires terrestres, nous ne voulons pas paraitre beaux aux yeux du monde, mais le rejoindre avec la consolation de l’Évangile, pour mieux témoigner, à tous, de l’amour infini de Dieu. En effet, comme l’a dit Benoît XVI en s’adressant à une Assemblée synodale, « La question pour nous est la suivante : Dieu a parlé, Il a vraiment rompu le grand silence, Il s’est montré, mais comment pouvons-nous faire arriver cette réalité à l’homme d’aujourd’hui afin qu’elle devienne salut? » (Méditation au cours de la 1ère Congrégation générale de la XIIIe Assemblée Générale Ordinaire du Synode des Évêques, 8 octobre 2012). Telle est la question fondamentale. Et c’est la tâche première du Synode : recentrer notre regard sur Dieu, pour être une Église qui regarde l’humanité avec miséricorde. Une Église unie et fraternelle, qui écoute et dialogue ; une Église qui bénit et encourage, qui aide ceux qui cherchent le Seigneur, qui secoue avec bienveillance les indifférents, qui ouvre des chemins pour initier les personnes à la beauté de la foi. Une Église qui a Dieu en son centre et qui, par conséquent, ne se divise pas à l’intérieur et n’est jamais dure à l’extérieur. C’est ainsi que Jésus veut l’Église, son Épouse.

2. Après le regard qui bénit, nous contemplons le regard du Christ qui accueille. Alors que ceux qui se croient sages ne reconnaissent pas l’œuvre de Dieu, lui se réjouit dans le Père parce qu’il se révèle aux petits, aux simples, aux pauvres en esprit. Ainsi, tout au long de sa vie, il adopte ce regard hospitalier envers les plus faibles, les souffrants, les laissés-pour-compte. C’est vers eux, en particulier, qu’il se tourne, en disant ce que nous avons entendu : « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos » (Mt 11, 28).

Ce regard accueillant de Jésus nous invite également à être une Église hospitalière. Dans une époque complexe comme la nôtre, de nouveaux défis culturels et pastoraux apparaissent, qui requièrent une attitude intérieure cordiale et douce, afin que nous puissions nous confronter sans crainte. Dans le dialogue synodal, dans cette belle “marche dans l’Esprit Saint” que nous entreprenons ensemble en tant que Peuple de Dieu, nous pouvons grandir dans l’unité et l’amitié avec le Seigneur pour regarder les défis d’aujourd’hui avec son regard ; pour devenir, selon une belle expression de saint Paul VI, une Église qui « se fait conversation » (Lett. enc. Ecclesiam suam, n. 67). Une Église dont “le joug est doux” (cf. Mt 11, 30), qui n’impose pas de fardeaux et qui répète à chacun : “Venez, vous qui êtes fatigués et opprimés, venez, vous qui vous êtes égarés ou qui vous sentez loin, venez, vous qui avez fermé les portes de l’espérance : l’Église est là pour vous”.

3. Frères et sœurs, Peuple saint de Dieu, face aux difficultés et aux défis qui nous attendent, le regard qui accueille et bénit Jésus nous empêche de tomber dans certaines tentations dangereuses : être une Église rigide, qui s’arme contre le monde et regarde en arrière ; être une Église tiède, qui se soumet aux modes du monde ; être une Église fatiguée, repliée sur elle-même. Marchons ensemble, humbles, ardents et joyeux. Marchons sur les traces de saint François d’Assise, le saint de la pauvreté et de la paix, le “fou de Dieu” qui a porté dans son corps les stigmates de Jésus et s’est dépouillé de tout pour se revêtir de Lui. Saint Bonaventure raconte que, tandis qu’il priait, le Crucifié lui dit : « Va et répare mon église » (Legenda maior, II, 1). Le Synode sert à nous rappeler ceci : notre Mère l’Église a toujours besoin d’être purifiée, d’être “réparée”, parce que tous nous sommes un Peuple de pécheurs pardonnés, qui ont toujours besoin de revenir à la source qu’est Jésus et de se remettre sur les chemins de l’Esprit pour rejoindre tout le monde avec son Évangile. François d’Assise, à une époque de grandes luttes et de divisions entre les pouvoirs temporel et religieux, entre l’Église institutionnelle et les courants hérétiques, entre les chrétiens et les autres croyants, n’a critiqué ni critiqué personne, mais il a pris à bras le corps les armes de l’Évangile : l’humilité et l’unité, la prière et la charité. Faisons de même !

Et si le saint Peuple de Dieu, et ses pasteurs, partout dans le monde, nourrit des attentes, des espoirs et même quelques craintes à l’égard du Synode que nous commençons, souvenons-nous qu’il ne s’agit non pas d’un rassemblement politique, mais d’une convocation dans l’Esprit ; non pas d’un parlement polarisé, mais d’un lieu de grâce et de communion. L’Esprit Saint brise souvent nos attentes pour créer quelque chose de nouveau qui dépasse nos prédictions et notre négativité. Ouvrons-nous à Lui et invoquons-Le, Lui le protagoniste, l’Esprit Saint. Et avec Lui, marchons, dans la confiance et la joie. 

 

 

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