Le monde de Romero

Mgr Romero marche avec une foule comme il arrive pour célébrer la messe à San Antonio de Los Ranchos de Chalatenango, au Salvador en 1979. Il a été détenu par des soldats, pendant 20 minutes, avant d’être autorisé à poursuivre sa tournée pastorale. Photo de CNS / Octavio Duran

Le monde de Romero par Kevin Clarke

Quel genre de société le bienheureux Oscar Romero avait-il sous les yeux quand il accepta le lourd fardeau de diriger l’église du Salvador en 1977 ? Son archidiocèse de San Salvador formait l’épicentre politique d’un pays gravement ébranlé.

En 1977, le Salvador allait atteindre un sommet historique de pauvreté et de désespoir, alimenté par plusieurs décennies d’inégalité et de répression visant à étouffer le ressentiment de la majorité de la population qui se trouvait appauvrie, affamée et sans espoir de changement pacifique. On ne saurait exagérer la misère des pauvres du Salvador à cette époque. La malnutrition frappait 75 % des enfants du Salvador et la mortalité infantile dépassait les 60 %.
« Il est affligeant de lire qu’au Salvador les deux premières causes de mortalité sont, premièrement, la diarrhée et, deuxièmement, les meurtres », disait le bienheureux Oscar Romero en évoquant le double spectre de la pauvreté et de la violence qui hantait son pays. Nombre de ces meurtres, déplorait-il, étaient de nature politique, fruits d’une histoire complexe de répression économique et politique.

La souffrance au sein de la société salvadorienne remontait aux efforts faits au 19e siècle pour « moderniser » l’économie du pays. La propriété collective des terres, qui avait caractérisé l’agriculture de subsistance des collectivités indigènes et métisses du Salvador, fut proscrite, ce qui déclencha un processus de délocalisation des pauvres, qui se prolongea pendant des décennies. Les petits producteurs vivriers furent chassés de la terre et condamnés à l’existence précaire de travailleurs journaliers et saisonniers tandis qu’on restructurait l’économie autour du commerce du café, ce qui concentrait la richesse et le pouvoir entre les mains d’une petite élite. On en vint à appeler ce puissant cartel « les quatorze familles » (elles étaient plus nombreuses, en réalité). La situation provoqua un petit soulèvement en 1932, qui allait peser lourdement sur l’âme et la conscience du pays.

Un groupe de paysans emboîta le pas au leader communiste Agustin Farabundo Marti et déclencha une rébellion aussi courte que mal conçue, qui fut écrasée en quelques jours. Mais le soulèvement servit de prétexte à des représailles san-glantes qui se prolongèrent pendant des semaines : un véritable carnage qui aurait coûté la vie à près de 40 000 personnes. Quiconque pouvait avoir l’air indien (par ses traits, ses vêtements, sa façon de parler) était ciblé par la Guardia rural et les cadavres s’accumulaient dans les fossés. C’est ce qu’on a appelé la Matanza, le massacre.
Mais dans la mémoire de la nation, les victimes et les bourreaux de la Matanza en vinrent à changer de rôle, si bien qu’à l’époque où le bienheureux Oscar Romero devint archevêque, bien des membres de l’élite voyaient dans les grands propriétaires et la Guardia de 1932 les victimes apeurées de la violence, denier rempart du « progrès » contre la fureur meurtrière et anarchique des paysans. Cette mémoire biaisée allait servir de matrice, du temps de Romero, à la répression brutale des forces sociales qui avaient commencé par plaider pacifiquement pour le changement au Salvador.

Après la Matanza, les cycles de l’exploitation et de la répression s’étaient poursuivis et de plus en plus de terres, de richesses et de pouvoirs politiques avaient été arrachés aux autochtones du pays, qui se mirent à abandonner une culture et une langue qui les destinaient à subir la violence.

Nombre de gens dans la société salvadorienne et dans l’Église avaient commencé de s’interroger sur la persistance de cette inégalité et de ce désastre humain, année après année, décennie après décennie, génération après génération. Le bienheureux Oscar Romero avait pu observer de son vivant la répétition de ces cycles de pauvreté et il avait compris qu’il y avait quelque chose de brisé dans la société salvadorienne, qu’il fallait un changement. Son expérience comme évêque à Santiago de María, en 1974, et la profonde douleur que lui causa l’assassinat de son ami le jésuite Rutilio Grande, en 1977, le résolurent à rechercher ce changement.

On peut dire que les quelques années où Oscar Romero a été le pasteur du Salvador marquent un tournant dans l’histoire de l’Église latino-américaine. À l’époque de Romero, sauf pour quelques pasteurs marginaux, on peut affirmer que les églises nationales en Amérique latine cherchaient à protéger l’intérêt de l’Église en préservant une alliance informelle avec les pouvoirs politiques en place, même si ces pouvoirs s’exerçaient parfois de manière férocement autoritaire. Un congrès des évêques latino-américains à Medellin (Colombie) en septembre 1968 amorça toutefois un réalignement des intérêts de l’Église dans le sens d’une « option préférentielle pour les pauvres ».

En inversant les priorités de l’Église et en réfutant les attentes des puissants, le bienheureux Oscar Romero fut l’un des premiers prélats latino-américains à tenter de traduire ces beaux discours en une campagne sociale concrète de changement et de conversion pacifique ; cela lui coûta la vie.

_____
Kevin Clarke est rédacteur principal et correspondant en chef d’America Media; il a écrit Oscar Romero: Love Must Win Out (Liturgical Press).

Cet extrait provient du magazine Sel et Lumière édition hiver 2015

Église en sortie 16 mars 2018

Cette semaine à Église en sortie, Francis Denis reçoit Delphine Collin-Vézina Ph.D, Directrice du Centre de recherche sur la famille et l’enfance de l’Université McGill sur le Centre pour la Protection des mineurs de l’Université Grégorienne de Rome. On vous présente un reportage sur l’apostolat des jésuites américains « America Media ». Dans la troisième partie d’émission, on parle du Groupe Sainte-Marthe avec Mgr Raymond Poisson, président du Comission épiscopale pour la Justice et la Paix de la Conférence des évêques catholiques du Canada.

Échos du Vatican

Revivez dans cette émission l’élection du pape François il y a 5 ans, le 13 mars 2013. L’ancien archevêque de Buenos Aires devenait alors le premier Pape sud-américain et le premier Pape jésuite de l’histoire.

Église en sortie 9 mars 2018

Cette semaine à Église en sortie, Francis Denis reçoit l’auteur et théologien Jacques Gauthier sur son tout dernier livre « Les saints, ces fous admirables ». On vous présente la chronique des actualités de la rue avec l’abbé Claude Paradis. Dans la troisième partie de l’émission, on s’entretient avec Mgr Yvon-Joseph Moreau sur son livre « Respirer Dieu ».

Homélie du Pape lors de la célébration pénitentielle

 

Voici le texte de l’homélie prononcée par le pape François à l’occasion de le célébration pénitentielle, en la basilique Saint-Pierre, ce vendredi 9 mars 2018.

Chers frères et sœurs,

Quelle grande joie et quelle consolation nous sont offertes par les paroles de saint Jean que nous avons entendues : l’amour de Dieu est tel qu’il a fait de nous ses enfants, et quand nous pourrons le voir face à face nous découvrirons encore plus la grandeur de cet amour (cf. 1Jn 3, 1- 10.19-22). Mais pas seulement. L’amour de Dieu est toujours plus grand que ce que nous pouvons imaginer, et il s’étend même au-delà de tous les péchés que notre conscience peut nous reprocher.

C’est un amour sans limites et qui n’a pas de frontières ; il n’a d’obstacles que ceux que nous, au contraire, avons l’habitude de poser devant une personne par peur qu’elle vienne nous priver de notre liberté. Nous savons que l’état de péché a comme conséquence l’éloignement de Dieu. Et en effet, le péché est une modalité par laquelle nous nous éloignons de lui. Mais cela ne signifie pas que lui s’éloigne de nous. L’état de faiblesse et de confusion dans lequel le péché nous met est une raison de plus pour Dieu de rester proche de nous.

Cette certitude doit toujours nous accompagner dans notre vie. La parole de l’Apôtre est une confirmation qui rassure notre cœur en ayant toujours une confiance indestructible dans l’amour du Père : « Si notre cœur nous accuse, Dieu est plus grand que notre cœur » (v. 20). Sa grâce continue à travailler en nous pour rendre plus forte l’espérance que nous ne serons jamais privés de son amour, malgré tous les péchés que nous pourrions avoir commis en refusant sa présence dans notre vie. Voilà cette espérance qui nous pousse à prendre conscience de la mauvaise orientation que prend souvent notre existence, comme cela est arrivé à Pierre dans le récit évangélique que nous  avons entendu : « Et aussitôt un coq chanta.

Alors Pierre se souvint de la parole que Jésus lui avait dite : “Avant que le coq chante, tu m’auras renié trois fois”. Il sortit et, dehors, pleura amèrement » (Mt 26, 74-75). L’évangéliste est très sobre. Le chant du coq semble saisir un homme encore confus, puis il se rappelle les paroles de Jésus et enfin le voile se déchire et Pierre commence à entrevoir dans les larmes que Dieu se révèle dans le Christ giflé, insulté, renié par lui mais qui, pour lui, va mourir. Pierre qui aurait voulu mourir pour Jésus comprend maintenant qu’il doit laisser Jésus mourir pour lui.

Pierre voulait enseigner son Maître, il voulait le précéder ; au contraire c’est Jésus qui va mourir pour Pierre ; et Pierre ne l’avait pas compris, il n’avait pas voulu le comprendre. Pierre est confronté maintenant à la charité du Seigneur et il comprend enfin que lui l’aime et lui demande de se laisser aimer. Pierre se rend compte qu’il avait toujours refusé de se laisser aimer, qu’il avait toujours refusé de se laisser sauver pleinement par Jésus, et qu’il ne voulait donc pas que Jésus l’aime totalement.

Comme il est difficile de se laisser vraiment aimer ! Nous voudrions toujours qu’il y ait quelque chose de nous qui ne soit pas lié par la reconnaissance, alors qu’en réalité nous sommes débiteurs de tout, car Dieu est le premier et il nous sauve totalement, par amour.

Demandons maintenant au Seigneur la grâce de nous faire connaître la grandeur de son amour qui efface tous nos péchés. Laissons-nous purifier par l’amour pour reconnaître le véritable amour !

Échos du vatican

Retour dans cette émission sur les évènements de ces derniers jours au Vatican : célébrations pontificales, discours du Pape, rencontres diplomatiques etc…

Église en sortie 2 mars 2018

Cette à Église en sortie, Francis Denis s’entretient avec l’historien et auteur Guy Laperrière sur son tout dernier livre Benoît Lacroix: un dominicain dans le siècle. On vous présente un reportage sur le 350e anniversaire de l’enseignement de la théologie à Québec. Dans la troisième partie de l’émission, on parle de musique liturgique avec le musicologue et professeur retraité de l’Université Laval Paul Cadrin.

Échos du Vatican

Retour dans cette émission sur l’émouvante journée du 28 février 2013, lorsque Benoît XVI quittait le Siège de Pierre pour devenir un « simple pèlerin ».

Échos du Vatican

Retour dans cette émission sur le pré-synode consacré aux jeunes, et sur l’entrée en carême.

Réflexion de carême – semaine 1

Réflexion de carême, inspirée de l’évangile de ce 1er dimanche de carême.

Secured By miniOrange