Vivre sa joie!

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Écrit par Stephanie Manseau , coordonnatrice des communications pour la Congrégation de Notre-Dame .

Il y a, au cœur de Montréal, une maison bien particulière, qui porte le joli nom de « communauté Vita-Joie ». Quand les sœurs de la Congrégation de Notre-Dame s’y sont installées en 2009, c’était pour accueillir deux nouvelles candidates, Andrée Maheu et Violaine Paradis. La vocation de la maison a évolué pour suivre le cheminement des jeunes sœurs et elle est devenue noviciat. Maintenant qu’Andrée et Violaine sont professes temporaires, la mission de Vita-Joie s’adapte une fois de plus pour devenir communauté interculturelle et intergénérationnelle. Sept sœurs y vivent, partageant les joies et les défis du quotidien, des horaires particulièrement chargés et une extraordinaire vitalité!

Vie communautaire et engagement

Ce groupe communautaire est composé de cinq sœurs d’origine canadienne (Francine, Sheila, Louise, Andrée et Violaine), d’une sœur camerounaise (Brigitte) et d’une hondurienne (Mariana). On parle surtout le français à la maison, dans le but avoué d’aider sœur Mariana à améliorer sa connaissance de cette langue, mais l’anglais et l’espagnol résonnent aussi entre les murs.

La maison est grande et l’espace suffisant pour accommoder tout le monde mais une vie communautaire harmonieuse exige de l’organisation et parfois, quelques compromis. Les sept sœurs se répartissent les tâches : chacune prépare le souper à tour de rôle, selon un horaire établi. Si l’une d’elle ne peut être présente quand c’est son tour, elle apprête le repas d’avance et s’entend avec une consœur qui le réchauffera au moment de servir. Toutes tentent de se retrouver pour prier et partager au moins le repas du soir mais ce n’est pas toujours possible de réunir tout le groupe : le lundi est la seule journée de la semaine où elles arrivent à être sept présentes autour d’une même table… ou plus, car elles accueillent chaleureusement, avec cette hospitalité si caractéristique des sœurs de la Congrégation de Notre-Dame, les gens qui les visitent! [Read more…]

À la recherche du cœur de Marguerite

Atsuko

Je suis une sœur de la Congrégation de Notre-Dame (CND). Le 1er avril 2013, j’ai quitté le Japon pour entreprendre un mandat d’un an comme membre de la communauté internationale de la Maison mère à Montréal.

J’aimerais d’abord vous raconter brièvement l’histoire de la CND au Japon. En 1932, à la requête d’un évêque canadien dominicain responsable de l’Église catholique dans le district de Tohoku au Japon, cinq sœurs canadiennes traversent l’océan Pacifique et mettent sur pied une mission à Fukushima, une petite ville agricole située à 240 kilomètres au nord-est de Tokyo. Même si les sœurs francophones ne peuvent guère communiquer avec la population locale, elles sont accueillies chaleureusement par le petit groupe de catholiques de la paroisse ainsi que par les non-catholiques, peu importe leurs croyances religieuses.

L’œuvre missionnaire des sœurs se poursuit à Fukushima; elles construisent un nouveau couvent et ouvrent un jardin d’enfants. Toutefois, les nuages de la guerre commencent à s’amonceler au-dessus du Japon.

En 1942, la Guerre du Pacifique éclate. L’armée japonaise confisque le couvent, le convertissant en camp d’internement pour les nationaux étrangers. Quelques sœurs canadiennes retournent dans leur pays tandis que d’autres sont assignées à résidence et envoyées dans la région d’Aizu, dans l’arrière-pays de la préfecture de Fukushima. Dépourvues de moyens de communication avec le monde extérieur et réduites à vivre dans la pauvreté, elles sont sauvées par trois postulantes japonaises qui ont refusé de quitter la Congrégation malgré les conseils répétés de prêtres japonais. Elles restent avec les sœurs canadiennes, leur procurant en secret la nourriture et les autres produits de première nécessité. Ensemble, elles prient et attendent que la paix se rétablisse. La guerre, commencée le jour de la fête de l’Immaculée Conception, se termine finalement en 1945, le jour de la fête de l’Assomption de la Bienheureuse Vierge Marie. Maintenant libres, les sœurs canadiennes internées à Aizu retournent à Fukushima où elles prennent des orphelins de guerre sous leur protection. L’année suivante, elles ouvrent une école primaire; parmi les élèves figurent les orphelins de guerre.

Depuis, le nombre de nos écoles au Japon a augmenté : un jardin d’enfants, une école primaire, une école secondaire et un collège offrant un programme de deux ans à Fukushima; un jardin d’enfants et une résidence pour filles à Tokyo; une école primaire, une école secondaire de premier cycle et une école secondaire de deuxième cycle à Kita-Kyushu. Actuellement, on compte soixante-dix sœurs de la Congrégation de Notre-Dame, incluant sept sœurs canadiennes, engagées dans des activités éducatives et apostoliques.

Née de parents catholiques, j’ai été baptisée peu après ma naissance, fait assez inhabituel puisque la majorité des Japonais se déclarent à la fois shintoïstes et bouddhistes. J’ai étudié douze ans dans une école de la Congrégation à Kita-Kyushu, et quatre autres années dans une université de Tokyo tout en vivant à Chofu dans une résidence de la CND pour étudiantes. C’est à l’école primaire, à l’âge de six ans, que j’ai fait ma première rencontre avec Marguerite Bourgeoys. Mon souvenir le plus marquant de mes années d’école est le sourire d’une sœur canadienne d’origine irlandaise. Jamais je n’oublierai jamais le doux et lumineux sourire qui ne quittait jamais son visage.

Pendant mon noviciat, l’une des cinq sœurs pionnières de 1932 m’a appris l’histoire de la Congrégation de Notre-Dame ainsi que la musique. Même si elle n’a pas insisté sur les désagréments et les difficultés dont elle avait fait l’expérience à son arrivée et spécialement pendant la guerre, je pouvais sentir la raison pour laquelle elle est restée au Japon : son amour profond de Jésus, de Marie et de notre fondatrice. Elle est demeurée au Japon parce que c’était la volonté de Dieu; parce que Marie était avec elle; et parce que Marguerite aurait agi de la même façon. Lorsque je réfléchis sur la vie de cette sœur à la lumière de celle de Marguerite, il me semble mieux comprendre Marguerite et ce qui fait sa grandeur. Cette sœur est décdée un an et deux mois après mes premiers vœux, et l’on m’a donné sa croix de profession.

Après mes vœux perpétuels, devenue professeure, j’ai enseigné le japonais dans les écoles secondaires de Fukushima et de Kita-Kyushu. Malgré mon emploi du temps très chargé, l’interaction avec mes jeunes étudiants se révélait une expérience très enrichissante. Certains de nos nouveaux étudiants avaient le cœur brisé à la suite d’un échec aux examens d’entrée à d’autres écoles. Toutefois, ils recevaient un accueil chaleureux dans les écoles de la CND. C’est là qu’ils ont appris : tu comptes beaucoup à mes yeux, tu as du prix et je t’aime (Isaïe 43,4). Rien ne m’a procuré autant de joie que de les voir retrouver leur estime de soi et retomber sur leurs pieds.

Cependant, je me posais parfois des questions. Avant mon entrée dans la vie religieuse, j’ai enseigné dans une école protestante où j’ai rencontré plusieurs professeurs laïcs dévoués. Le matin, pendant le culte, ils prêchaient la parole de Dieu et ensuite, ils se rendaient en classe pour enseigner et guider les étudiants. Quelle était la différence entre eux et une enseignante comme moi, une sœur? Cette question me préoccupait. Lorsque l’on m’a offert un mandat d’un an à Montréal, j’ai pensé que cela pourrait être l’occasion de prendre du recul par rapport à ma vie d’enseignante et de réfléchir sur cette question.

Après mon arrivée au Canada, dès que j’avais un moment de libre, je parcourais Montréal une carte à la main. J’ai ainsi visité églises et musées en commençant par la chapelle Notre-Dame-de-Bon-Secours. Je me suis promenée dans le Vieux-Montréal où notre fondatrice a ouvert la première école de la ville. J’ai aussi contemplé les vieilles tours du Grand Séminaire dans lesquelles nos sœurs ont enseigné aux Amérindiennes. J’ai vu des portraits et des statues de Marguerite dans un grand nombre d’églises et observé que beaucoup d’endroits portaient le nom de notre fondatrice. Tout ce que j’ai vu et entendu porte témoignage de l’affection que lui voue la population de Montréal.

Mon investigation historique et archéologique m’a fait comprendre toute la difficulté de la vie de Marguerite aux premiers jours de Montréal. Le 16 novembre, jour de l’arrivée de Marguerite à Ville-Marie il y a près de quatre siècles, je me suis rendue dans le Vieux-Montréal. Le temps était déjà froid. Avec ses arbres presque tous dénudés, le port paraissait désert. Peu après allait s’installer un hiver des plus rigoureux!

CNDConvent

J’ai relu les écrits et biographies de Marguerite. Entre les lignes je pouvais sentir sa solitude et sa peur de l’inconnu. Dans sa France natale, elle avait prononcé des vœux privés, vécu une vie consacrée et poursuivi un engagement bénévole. Cependant, elle a choisi de sortir de sa zone de confort et trouvé le courage de s’aventurer dans un monde nouveau. Fidèle au plan de Dieu, elle s’est consacrée au service des autres et à l’enseignement de la Bonne Nouvelle, l’Évangile. Elle a recruté des compagnes et elle a fondé une communauté religieuse apostolique. En jetant un regard sur Ville-Marie du point de vue d’aujourd’hui, j’ai été touchée plus que jamais par le courage et l’accomplissement extraordinaire de Marguerite.

Partout dans le monde, nombre de gens remarquables ont édifié un pays. Toutefois la grandeur de Marguerite ne réside pas tant dans sa contribution à la construction de Ville-Marie que dans sa fondation d’une communauté religieuse féminine non cloîtrée vouée à l’éducation

Dans ses Écrits, Marguerite parle de l’amour d’amant. Elle aimait Jésus de cet amour et désirait demeure[r] toujours en la présence de Dieu comme une mère qui est passionnée pour son enfant ne [le] perd point de vue[1]. Elle a donc naturellement choisi la vie consacrée comme mode de vie. À l’imitation de la Vierge Marie conversante avec le prochain, Marie a vécu avec des femmes partageant le même désir : être au service d’autrui et répandre la parole de Dieu. Je pense qu’elle voulait que sa communauté soit un modèle de communauté humaine et un témoignage vivant en ce monde. Elle désirait profondément que les commandements de l’amour soient gravés dans son cœur et dans celui de ses sœurs : Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit […] Tu aimeras ton prochain comme toi-même (Matthieu 22,37-39).

Mes rencontres avec des sœurs impliquées dans diverses formes d’engagement apostolique et éducatif m’ont aidée à approfondir ma compréhension de notre fondatrice. J’ai appris que vivre son charisme est pour les sœurs de la plus grande importance dans leur processus de discernement, de découverte de leur vocation et de leur ministère. Nous devons discerner où nous sommes et où nous sommes appelées en dialogue avec nous-mêmes, avec nos supérieures, avec Jésus et avec Marguerite. Il nous est demandé de grandir personnellement et de croître spirituellement dans la vie religieuse, de comprendre le charisme et de le vivre avec passion.

Parce que je m’étais trop habituée à ma vie d’enseignante dans l’environnement protecteur des écoles CND, j’ai peut-être perdu de vue la raison pour laquelle j’ai été « envoyée pour la mission ». Ma mission est de suivre Jésus et de partager par mes paroles et mes actions la Bonne Nouvelle : « Vous comptez beaucoup aux yeux de Dieu. Dieu vous aime. Vous avez une immense valeur à ses yeux. » Tel que le souhaitait Marguerite, ma mission consiste à répandre le commandement de l’amour en construisant des relations chaleureuses avec mes compagnes et mes collègues. Ma mission consiste en un engagement sans réserve à la vie consacrée – ce que les premières missionnaires ont tenté de transmettre aux générations futures au risque de leur vie.

Les premières missionnaires ont beaucoup donné au Japon : la parole de Dieu, la spiritualité de Marguerite Bourgeoys, l’éducation, la vie religieuse… Je sais que j’ai beaucoup reçu pendant mon séjour au Canada. Toutefois, je m’interroge au sujet de ce que j’y ai accompli. Une chose est certaine : j’ai parlé de Fukushima.

Le 11 mars 2011, un tremblement de terre et un tsunami dévastaient la côte nord-est du Japon; le séisme détruisait complètement le couvent bâti par les sœurs missionnaires en 1935.

Cette catastrophe sans précédent a sévèrement endommagé la centrale nucléaire de Fukushima. La contamination radioactive causée par la fusion du réacteur nucléaire a entraîné des effets dévastateurs à long terme sur la santé de la population de Fukushima. Plusieurs familles ont quitté Fukushima afin de protéger leurs enfants contre l’exposition aux radiations. En fait, le nombre des étudiants des écoles CND a beaucoup diminué. Ainsi, pour ne considérer que notre jardin d’enfants, 40 % des enfants l’ayant fréquenté ont quitté Fukushima. S’étant demandé ce que Marguerite aurait fait dans cette situation désastreuse, nos sœurs ont lancé plusieurs initiatives. D’abord, elles ont créé un programme de bourses pour aider les enfants touchés par le désastre. Elles ont rebâti le jardin d’enfants qui comprend maintenant un terrain de jeux entouré de murs de verre. Ainsi, les enfants peuvent jouer à l’intérieur sans être exposés à l’air contaminé. En collaboration avec quelques diocèses, quelques sœurs ont conçu le projet d’éloigner les enfants des radiations en les envoyant passer l’été dans un camp de vacances. D’autres sœurs rendent visite régulièrement aux victimes vivant encore dans des logements provisoires pour être à l’écoute de leurs problèmes et de leurs préoccupations, ou tout simplement pour manifester une présence. Récemment, un groupe de personnes bénévoles se sont jointes à ces sœurs. Elles offrent un soutien affectif à des femmes faisant face à un avenir incertain, surtout lorsqu’elles doivent élever des enfants dans des circonstances aussi difficiles.

L’été dernier, j’ai participé comme représentante de la province japonaise à la rencontre du Réseau de justice sociale de la Congrégation de Notre-Dame. À l’aide d’une présentation PowerPoint préparée par les sœurs de Fukushima, j’ai eu l’occasion de faire connaître la situation qui y règne actuellement et la façon dont les sœurs remédient aux difficultés.

Les sœurs et personnes associées de la province américaine de la CND ont lancé le « projet de solidarité de Blessed Sacrament avec Fukushima », un soutien moral et financier considérable pour nos sœurs japonaises. Nos sœurs américaines ont fait preuve d’un véritable sentiment de compassion, à l’imitation de Marguerite. Elles m’ont rappelé que je suis membre à part entière de la famille internationale de la CND.

En avril, je retournerai au Japon où j’exercerai un mandat à Fukushima. J’aimerais beaucoup continuer à jouer le rôle de personne-lien entre Fukushima et mes sœurs nord-américaines. Je rentre chez moi en emportant le cœur de Marguerite que j’ai trouvé à Montréal.

[1] Les textes en italique sont extraits des Écrits de Mère Bourgeoys.

Ce message a été écrit par Sr. Atsuko Nakamoto, CND en Mars 2013. Elle vit actuellement et oeuvre à Fukushima, au Japon.

Une Église en dialogue: 50 ans d’oecuménisme au Canada

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Image: Courtoisie de CNS

Récemment, la Conférence des évêques catholiques du Canada a publié un document intitulé Une Église en dialogue : Vers la restauration de l’unité entre les chrétiens à l’occasion du 50e anniversaire du décret sur l’œcuménisme du Concile Vatican II (1964-2014). Il s’agit d’un magnifique instrument qui présente les critères d’un dialogue authentique et décrit l’état de situation non seulement de l’Église au Canada mais également de l’Église universelle. Bien qu’exigeant au point de vue de la lecture, le document me semble incontournable pour bien comprendre l’histoire du mouvement œcuménique au Canada et tracer des perspectives d’avenir.

Dans un premier temps, on y retrouve une synthèse très dense des différents principes qui doivent guider le dialogue entre les chrétiens de sorte qu’il soit efficace et véritablement orienté vers la restauration de l’unité de tous les chrétiens. Dans un deuxième temps, on y manifeste bien comment l’unité entre les hommes trouve ses racines dans la Communion des Personnes (Père, Fils et Esprit Saint) dans la Trinité. En effet, puisque nous prenons part à la communion des saints, « nous sommes appelés à être une Église en dialogue parce que le Dieu Trinité est entré en dialogue avec nous et a partagé avec nous la mission du Verbe incarné dans le monde » (p.2).

Devant cette réalité spirituelle de la communion des saints à laquelle tous les chrétiens appartiennent réellement bien que, jusqu’à la Résurrection, elle ne soit pas encore réalisée parfaitement, nous avons le devoir de travailler à la manifester cette unité fondamentale par le dialogue entre chrétiens. Ce dialogue sera caractérisé par « la clarté, la douceur, la confiance, la prudence pédagogique […] Le dialogue ne peut advenir que dans un climat d’amitié, de respect et de service, ouvert à toutes et à tous; jamais il ne transige avec la vérité; il exige sagesse, savoir, discernement; toujours guidé par l’espérance et l’amour, il se construit sur la liberté »[2]. Ce qui me frappe le plus dans la première partie de ce document, c’est l’importance qu’il accorde à la bonne attitude pour qu’un authentique dialogue soit possible. Ce qu’il appelle  « l’exigence qu’on fasse de la place au point de vue de l’autre; qu’on écoute vraiment […] en souhaitant et même en escomptant apprendre de l’autre »[3] est selon moi l’un des grandes amélioration des cinquante dernières années. Par exemple, un de mes oncles me disait que lorsqu’il était jeune on lui avait dit de ne pas parler aux enfants d’une des familles de sa rue parce qu’ils étaient protestants. Le contraste avec ce que nous considérons aujourd’hui acceptable et comme reflétant une attitude véritablement chrétienne montre bien le chemin qui s’est fait depuis ce temps. Sans le Concile Vatican II, un tel changement n’aurait pas été possible. [Read more…]

L’Évangile de la joie face au terrorisme

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Image: Courtoisie de CNS

La semaine dernière, deux attentats terroristes perpétrés contre des militaires canadiens faisaient deux morts et allaient mettre en état de choc le pays tout entier. Il est maintenant établi que ces actes ignobles ont été commis au nom de l’idéologie islamiste. Devant une telle tragédie, plusieurs réactions sont possibles. L’Église, comme une Mère attentive à nos besoins, nous offre quelques pistes et critères pour orienter notre réflexion. Je vous invite donc à revisiter avec moi l’exhortation apostolique du pape François « Evangelii Gaudium » qui nous éclaire sur deux points fondamentaux et pertinents devant les événements que nous avons vécus.

Le devoir de rencontre

Dans ce document, le pape François reconnaît que les relations « avec les croyants de l’Islam acquièrent à notre époque une grande importance »[2]. Pour nous catholiques, qui sommes appelés à vivre une conversion missionnaire, il est important de comprendre que nous ne pouvons exclure personne de cette mission qui nous incombe de « prêcher l’Évangile à toutes créatures » (Mc 16, 16). En effet, cette nouvelle ouverture s’adresse à tous. Pour ce faire, nous devons entreprendre un travail sur nous-mêmes. Pour le pape François, ce travail se situe d’abord dans la perspective d’une meilleure compréhension de soi et de l’autre. De fait, un examen rapide montre bien la proximité des musulmans avec la foi chrétienne. Le Concile Vatican II affirme, qu’avec nous ils : « professent avoir la foi d’Abraham, adorent avec nous le Dieu unique, miséricordieux, futur juge des hommes au dernier jour » (no.16). En ce sens, nous pouvons nous compter chanceux d’avoir des concitoyens capables de nous rappeler des éléments de notre propre identité que nous avons peut-être oubliée. Par exemple, quelle joie devrions-nous ressentir d’être encourager, à l’exemple des musulmans, à « consacrer du temps chaque jour à la prière, et de participer fidèlement à leurs rites religieux » (no 252) ? Sans se voiler la face devant la menace réelle que représente une certaine résurgence d’un l’Islam politique, cette mission d’évangélisation par le dialogue avec l’Islam peut aussi nous aider à combattre la tentation des raccourcis intellectuels menant à « d’odieuses généralisations ». [Read more…]

Deux cadeaux du ciel pour notre Québec !

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Le dimanche 12 octobre dernier, le pape François présidait une Messe d’action de grâce pour la canonisation de deux saints de chez nous : Mgr de Laval et Marie de l’Incarnation. Pour l’occasion, une délégation du diocèse de Québec comprenant des pèlerins du monde entier s’était déplacée pour célébrer cet événement historique pour l’église particulière du Québec. En effet, cette reconnaissance du pouvoir d’intercession de la part de l’Église universelle allait avoir une triple dimension que je propose d’analyser brièvement.

Dans un premier temps, l’accueil de l’église du Québec autour du tombeau de Saint Pierre en compagnie de son successeur le pape François, avait pour but d’intensifier et d’approfondir la communion avec Dieu en demandant l’intercession de ces deux nouveaux saints. Cela se découvre plus amplement lorsque nous considérons le lien organique entre la foi en la communion des saints et la communion avec Dieu. Plus l’union avec Dieu le Père par l’humanité du Christ s’intensifie, plus nous sommes unie avec nos frères et sœurs en humanité et, plus particulièrement, avec la communauté des baptisés. Ainsi, puisque l’Église a reconnue la présence de deux membres de notre église du Québec auprès de Dieu, nous pouvons vivre plus pleinement dans l’espérance d’être écoutée et ainsi s’attendre à ce « que le Québec revienne sur ce chemin de la fécondité ». Durant son homélie, le pape François a fait référence à deux conséquences que cette canonisation peut avoir sur nos vies.  [Read more…]

Saint Jean-Paul II: Pour une guérison de la mémoire

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Le 13 septembre dernier, l’Observatoire Justice et paix, en collaboration avec télévision Sel et Lumière, organisait, à Québec, le Colloque Jean-Paul II : Pour une guérison de la mémoire afin de souligner le 30e anniversaire de sa visite en 1984. Pour l’occasion, plusieurs invités de marque se sont exprimés sur l’impact de cette visite sur les relations entre foi et culture au Québec. Le thème du Colloque  « Pour une guérison de la mémoire » faisait référence à ce que certains ont retenu comme étant un élément central du message de Jean-Paul II dans son homélie faite à l’Université Laval, il y a 30 ans. En effet, l’homélie en question exhortait les Québécois à « ne pas accepter le divorce entre foi et culture » (no6). Les différents conférenciers ont donc pu s’exprimer sur ce sujet délicat en l’éclairant de leur vision selon leur domaine d’expertise.

Ce divorce entre foi et culture au Québec est un phénomène récent qui remonte aux années 1960. C’est à ce moment que la forme que prenait alors le catholicisme au Québec a été rejetée en bloc par une grande partie de la population. Sans énumérer ici les causes de cet état de fait, nous pouvons toutefois examiner les différentes caractéristiques de l’image que les Québécois se font généralement de leur passé religieux. Dans son intervention, monsieur Gilles Routhier, doyen de la faculté de théologie de l’Université Laval, a bien montré comment l’imaginaire québécois actuel réduit souvent l’histoire catholique au Québec aux seules années 1940-1950. Durant cette période, l’institution ecclésiale a souvent dû suppléer au manque d’engagement de l’État. C’est ainsi que l’on reproche souvent à l’Église d’avoir été trop près du pouvoir politique. Cependant, l’histoire des relations entre foi et culture au Québec ne peut légitimement se réduire à cette période qui, comme le disait M. Routhier, porte avec elle son lot de misères mais également de grandeurs. Face à cela, deux questions se posent : 1) comment ouvrir de nouveau la mémoire québécoise à l’entièreté de l’histoire religieuse du Québec ? Et 2) comment transmettre ce riche patrimoine pour qu’il puisse faire sens aujourd’hui ? [Read more…]

Messe pour le 30e anniversaire de la Fondation du Grand Séminaire de Montréal

Cathédrale Marie-Reine-du-Monde de Montréal

Ce vendredi, 26 septembre 2014, en la fête des saints martyrs canadiens,  une messe solennelle sera célébrée en la cathédrale Marie-Reine-du-Monde, pour le 30ème anniversaire de la fondation du Grand Séminaire de Montréal. La célébration sera présidée par l’archevêque de Montréal, Mgr Christian Lépine, à 19h30, et diffusée en direct sur Sel et Lumière.

Claude Ryan ou le visage politique de la Foi

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(Photo: Courtoisie Centre Newman McGill)

Les 13 et 14 février derniers se tenait un colloque sur la vie du journaliste et politicien Claude Ryan (1925–2004). Plusieurs collaborateurs, politiciens et journalistes, amis et membres de la famille se sont exprimés sur la personne qu’ils avaient eu la chance de côtoyer à un moment ou à un autre de leur vie. L’image qui s’en est dégagée est conforme à ce que l’on pourrait s’attendre d’un homme aussi diversifié dans ses activités que dans les thèmes sur lesquels il a dû s’exprimer ou même décider. J’utilise ici le verbe « devoir » puisque c’est un concept qui émerge de toutes les interventions qui se sont succédé durant ces deux journées de conférence.

Rigueur intellectuelle, civilité dans les débats, respect des autres, intégrité politique, engagement social ne sont que quelques-unes des qualités qui caractérisaient Claude Ryan selon John Parisella, ancien directeur général du Parti Libéral (1986-1988) et ancien chef de cabinet des premiers ministres Robert Bourassa et Daniel Johnson (1989-1994). Cet homme, parfois qualifié de bourreau de travail, a dû accompagner de sa plume, lorsqu’il était rédacteur en chef du journal Le Devoir, un Québec en pleine transformation; un peuple, pour ainsi dire, en pleine crise d’adolescence puisqu’en recherche de repères stables pour faire face à ce nouveau monde globalisé qui était en train de naître. En ce sens, nous pouvons nous demander ce qui a permis à cet homme de garder une telle crédibilité  « même de la part de ces opposants politiques » comme l’affirmait Guy Lachapelle, professeur de science politique à l’Université Concordia. Le secret derrière cette influence qui faisait dire à Bryan Mulroney qu’il était une « autorité morale et l’un des plus grands Québécois de l’histoire moderne » se trouve dans ce que Jean-Pierre Proulx, ancien président du Conseil supérieur de l’éducation, appelle « la théologie de Ryan ». [Read more…]

«Les personnes gravement malades et en fin de vie occupent nos pensées et nos cœurs »

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Message de l’Archevêque de Montréal aux fidèles du diocèse concernant le projet de loi 52 visant à légaliser l’euthanasie. 2014-02-05

Fragilité et valeur de la vie

Les questions d’accompagnement des personnes gravement malades et en fin de vie occupent nos pensées et nos cœurs depuis quelques décennies. Les soins palliatifs se sont développés pour répondre à la souffrance et à la douleur, tout en évitant l’acharnement thérapeutique. Au Québec, nos députés s’apprêtent à voter très bientôt sur le Projet de loi 52, « Loi concernant les soins de fin de vie », qui rendrait possible l’euthanasie sous l’appellation d’ « aide médicale à mourir ». Or, devancer la mort ce n’est pas aider à mourir mais faire mourir. C’est pourquoi j’estime important de vous faire part d’une réflexion sur le choix inconditionnel du respect de la vie, quel que soit l’état de faiblesse d’une personne, invitant à tenir ensemble fragilité et valeur de la vie, compassion et espérance.

« Pourquoi Dieu donne-t-il la lumière à un malheureux, la vie à ceux qui sont pleins d’amertume, qui aspirent à la mort sans qu’elle vienne, qui la recherchent plus avidement qu’un trésor ? » (Job 3, 20-21). La prière de Job exprime ici que son angoisse est telle qu’il ne veut plus vivre. Il s’en remet pourtant à Dieu qui « tient en son pouvoir l’âme de tout vivant et le souffle de toute chair d’homme » (Job, 12, 10) en disant dans la confiance et l’espérance : «  Je sais que tu peux tout et que nul projet pour toi n’est impossible. » (Job 42, 2). [Read more…]

L’Évangélisation au Canada, réfléchissons avec les évêques (2e partie)

blog_1391223981Un passage de la lettre des évêques canadiens sur l’évangélisation doit particulièrement attirer notre attention. De fait, comme nous en avons déjà fait mention, la nouvelle évangélisation doit se faire près de la réalité de ceux qui se sont éloignés du Christ ou qui n’ont parfois pas plus de connaissances religieuses que ce que les médias présentent. C’est pourquoi, il est très important de bien connaître les traits caractéristiques de la société dans laquelle le Seigneur nous envoie. En ce sens, le § 10 de la lettre est tout spécialement pertinent puisqu’il affirme que :

« S’il y a une chose que le monde d’aujourd’hui recherche, c’est l’authenticité. […] il a besoin de témoins, c’est-à-dire de personnes qui sont habitées par une rencontre, celle de Jésus, qui leur a ouvert des horizons nouveaux et qui a donné un sens à leur vie »[1].

Qu’est-ce donc que l’authenticité? Pourquoi notre société la recherche-t-elle à ce point? Comment notre prédication de l’Évangile pourra-t-elle être plus authentique? Voilà quelques questions qui peuvent susciter notre étonnement et stimuler nos efforts intellectuels.

Au niveau fondamental, et nous pourrions dire « métaphysique », l’authenticité signifie qu’un être est vrai. Que l’apparence extérieure manifeste exactement ce qui est à l’intérieur d’un être, ce qui ne se voit pas au premier coup d’oeil. Un être est authentique en tant qu’il correspond à sa propre définition. Par exemple, nous parlons d’un authentique tableau de Rubens lorsque la peinture à laquelle nous faisons référence est véritablement peinte par Rubens lui-même. S’il s’agissait d’une copie, la peinture perdrait de son authenticité. L’idée et le dessin peuvent être de Rubens et, en tant que tels, être authentiquement de Rubens. Cependant, nous ne pourrions parler de la sorte pour la peinture elle-même. Nous parlerions d’elle comme d’une « copie de l’originale ». De plus, la valeur de cette peinture dépend de son authenticité. Par exemple, une même copie peut avoir une valeur plus ou moins grande selon qu’elle s’approche ou s’éloigne de l’originale. C’est donc que la valeur que l’on accorde à une réalité dépend de son degré de véracité ou, en d’autres termes, de son authenticité. Peut-être cette soif d’authenticité vient-elle d’un transfert des mécanismes économiques aux relations sociales? Cependant là n’est pas l’objet de notre réflexion. [Read more…]

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