Témoignage de Rand Mittri, 26 ans d’Alep en Syrie lors de la Veillée de prière avec le pape François

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Je m’appelle Rand Mittri. J’ai 26 ans et je viens d’Alep, en Syrie. Comme vous le savez peut-être, notre ville a été détruite, ruinée et brisée. Le sens de notre vie a été anéanti. Nous sommes la ville oubliée.

Cela peut être difficile pour une grande partie d’entre vous de comprendre l’étendue de ce qui se passe maintenant dans mon pays bien-aimé, en Syrie. Il va m’être très difficile de vous donner une image de la vie pleine de douleur en quelques phrases, mais je vais partager avec vous quelques aspects de notre réalité.

Chaque jour, nous vivons entourés de la mort. Mais comme vous, le matin, nous fermons la porte quand nous allons au travail ou à l’école. C’est à ce moment que nous sommes pris par la peur de ne pas pouvoir rentrer pour retrouver nos maisons et nos familles. Peut-être serons- nous tués ce jour. Peut-être nos familles ne seront plus en vie. C’est un sentiment dur et douloureux de savoir que tu es entouré de la mort et de la tuerie, et qu’il n’y a pas de possibilité de s’enfuir : il n’y a personne pour t’aider.

Est-il possible que ce soit la fin et que nous soyons nés pour mourir en souffrance ? Ou bien sommes-nous nés pour vivre, pour vivre la vie le plus pleinement possible ? Mon expérience de cette guerre a été rude et difficile. Mais tout ça a fait que j’ai mûri et j’ai grandi avant mon âge, que je vois les choses d’une perspective différente.

Je travaille dans le centre Don Bosco à Alep. Notre centre reçoit plus de 700 jeunes hommes et femmes qui s’y rendent en espérant de voir un sourire ou entendre un mot d’encouragement. Ils recherchent aussi quelque chose qui manque dans leurs vies : de vrais soins humanitaires. Mais il est très difficile pour moi de donner de la joie et de la foi aux autres quand moi-même je manque de ces choses dans ma vie.

A travers ma maigre expérience de vie, j’ai appris que ma foi en Jésus Christ l’emporte sur les circonstances de la vie. La vérité n’est pas conditionnée par une vie en paix, exempté de souffrance. De plus en plus je crois que Dieu existe malgré toute notre douleur. Je crois que parfois, à travers notre douleur, Il nous enseigne le vrai sens de l’amour. Ma foi en Jésus Christ est la raison de ma joie et de mon espoir. Personne ne sera jamais capable de me voler cette vraie joie.

Je vous remercie tous et je vous demande sincèrement de prier pour mon pays bien-aimé, la Syrie.

Trad. : Alicja Slowik

Homélie du pape François lors de la Messe de la Solennité des saints Pierre et Paul

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Bénédiction des pallia et Messe de la Solennité des saints Pierre et Paul

Lors de la Messe de Solennité des saints Pierre et Paul à 9h30 am dans la basilique vaticane, le pape François a béni les Pallia (du singulier « Pallium ») tiré de la confession de l’apôtre Pierre pour les nouveaux Archevêques métropolitains nommés au cours de la dernière année. Le Pallium sera ensuite imposé sur chacun des archevêques métropolitains par le représentant pontifical dans leur siège métropolitain et pays respectifs.

Après le rite de bénédiction des Pallia, le Pape a présidé à la Messe accompagné des nouveaux archevêques métropolitains. Comme le veux la coutume à l’occasion de la Fête des saints apôtres Pierre et Paul, patrons de la ville de Rome, furent présent lors de la Sainte Messe une délégation du Patriarcat Œcuménique de Constantinople. À la tête de cette délégation se trouvait le Patriarche Bartholomé 1er, Son Éminence Méthodios, Métropolitain de Boston, Son Excellence Job, Archevêque de Telmessos ainsi que le Révérend Diacre Patriarche Nephon Tsimalis.

Vous trouverez ci-dessous le texte complet de l’homélie telle que prononcée par le pape François :

La Parole de Dieu de cette liturgie contient un binôme central : fermeture / ouverture. Nous pouvons rapprocher aussi de cette image le symbole des clefs, que Jésus promet à Simon Pierre pour qu’il puisse ouvrir l’entrée du Royaume des cieux, et certainement pas pour la fermer aux gens, comme le faisaient certains scribes et pharisiens hypocrites que Jésus réprimandait (cf. Mt 23, 13).

La lecture des Actes des Apôtres (12, 1-11) nous présente trois fermetures : celle de Pierre en prison ; celle de la communauté recueillie en prière ; et – dans le contexte immédiat de notre texte – celle de la maison de Marie, mère de Jean surnommé Marc, où Pierre va frapper à la porte après avoir été libéré.

En ce qui concerne les fermetures, la prière apparaît comme la voie de sortie principale : voie de sortie pour la communauté, qui risque de se replier sur elle-même à cause de la persécution et de la peur ; voie de sortie pour Pierre, qui, encore au début de la mission qui lui a été confiée par le Seigneur, est jeté en prison par Hérode et risque la condamnation à mort. Et tandis que Pierre était en prison, « l’Église priait Dieu pour lui incessamment » (Ac 12, 5). Et le Seigneur répond à la prière et envoie son ange le libérer, ‘‘en l’arrachant aux mains d’Hérode’’ (cf. v. 11). La prière, en tant qu’humble abandon à Dieu et à sa sainte volonté, est toujours la voie de sortie de nos fermetures personnelles et communautaires. C’est la grande voie de sortie des fermetures.

De même Paul, en écrivant à Timothée, parle de son expérience de libération, de sortie du danger d’être lui aussi condamné à mort ; au contraire, le Seigneur lui a été proche et lui a donné la force de pouvoir porter à son achèvement son œuvre d’évangélisation des peuples (cf. 2 Tm 4, 17). Mais Paul parle d’une ‘‘ouverture’’ bien plus grande, vers un horizon infiniment plus vaste : celui de la vie éternelle, qui l’attend à la fin de sa ‘‘course’’ terrestre. Il est beau alors de voir la vie de l’Apôtre toute ‘‘en sortie’’ grâce àCapture d’écran 2016-06-29 à 10.12.16 l’Évangile : toute projetée en avant, d’abord pour porter le Christ à ceux qui ne le connaissent pas, et ensuite pour se jeter, pour ainsi dire, dans ses bras, et être conduit par lui, sain et sauf au ciel, dans son Royaume (cf. v. 18).

Retournons à Pierre. Le récit évangélique (Mt 16, 13-19) de sa confession de foi et de la mission qui lui a été confiée ensuite par Jésus nous montre que la vie de Simon, pêcheur galiléen, – comme la vie de chacun de nous – s’ouvre, s’épanouit pleinement lorsqu’elle accueille de Dieu le Père la grâce de la foi. Alors Simon se met en route – une route longue et dure – qui le conduira à sortir de lui-même, de ses sécurités humaines, surtout de son orgueil mêlé de courage et d’altruisme généreux. Dans ce parcours de libération, la prière de Jésus est décisive : « J’ai prié pour toi [Simon] afin que ta foi ne défaille pas » (Lc 22, 32). Et également décisif est le regard plein de compassion du Seigneur après que Pierre l’a eu renié trois fois : un regard qui touche le cœur et fait sécher les larmes de repentir (cf. Lc 22, 61-62). Alors Simon Pierre a été libéré de la prison de son moi orgueilleux, de son moi peureux, et il a surmonté la tentation de se fermer à l’appel de Jésus à le suivre sur la voie de la croix.

Comme je le disais, dans le contexte immédiat du passage des Actes des Apôtres il y a un détail qu’il peut nous faire du bien de noter (cf. 12, 12-17). Lorsque Pierre se retrouve miraculeusement libre, hors de la prison d’Hérode, il se rend dans la maison de la mère de Jean surnommé Marc. Il frappe à la porte, et de l’intérieur répond une domestique du nom de Rhodè, qui, ayant reconnu la voix de Pierre, au lieu d’ouvrir la porte, à la fois incrédule et pleine de joie, court rapporter la chose à sa patronne. Le récit, qui peut sembler comique – et qui peut donner origine au soi-disant “complexe de Rhodè”-, nous fait percevoir le climat de peur dans lequel se trouvait la communauté chrétienne, qui demeurait enfermée à la maison, et fermée aussi aux surprises de Dieu. Pierre frappe à la porte. “Regarde !”. Il y a de la joie, il y a de la peur… “Nous ouvrons, nous n’ouvrons pas ?…”. Et lui est en danger, parce que la police peut le prendre. Mais la peur nous arrête, elle nous arrête toujours ; elle nous ferme, elle nous ferme aux surprises de Dieu. Ce détail nous parle de la tentation qui existe toujours pour l’Église : celle de se replier sur elle-même, face aux dangers. Mais il y a aussi ici la spirale à travers laquelle peut passer l’action de Dieu : Luc dit que dans cette maison « se trouvaient rassemblés un certain nombre de personnes qui priaient » (v. 12). La prière permet à la grâce d’ouvrir une voie de sortie : de la fermeture vers l’ouverture, de la peur vers le courage, de la tristesse vers la joie. Et nous pouvons ajouter : de la division vers l’unité. Oui, nous le disons aujourd’hui, confiants, avec nos frères de la Délégation envoyée par le cher Patriarche Œcuménique Bartholomée, pour participer à la fête des Saints Patrons de Rome. Une fête de communion pour toute l’Église, comme le met aussi en évidence la présence des Archevêques Métropolitains venus pour la bénédiction des Palliums, qui leur seront imposés par mes Représentants dans leurs Sièges respectifs.

Que les saints Pierre et Paul intercèdent pour nous, afin que nous puissions parcourir avec joie ce chemin, faire l’expérience de l’action libératrice de Dieu et en témoigner à tous.

[01119-FR.02] [Texte original: Italien]

Église en sortie 3 juin 2016

Cette semaine à Église en sortie, nous vous présentons une entrevue avec l’abbé Louis-André Naud, prêtre du diocèse de Québec et directeur de l’Office national de liturgie à la CECC. On participe à la procession de la Fête-Dieu dans les rues de Montréal.  Enfin, dans la troisième partie de l’émission nous rencontrons Mgr Yvon Joseph Moreau, évêque du diocèse de Sainte-Anne-de-la-Pocatière au Québec et président de la Commission épiscopale pour la liturgie et les sacrements de la CECC pour le secteur francophone qui nous entretient de l’importance de la liturgie dans la vie missionnaire de l’Église.

Les saints et le combat de la prière

A woman prays in 2015 as Pope Francis celebrates Mass in Manila, Philippines. The prayers of the faithful, not the pope, bishops, priests or nuns, have the power to make miracles happen in the most impossible situations, Pope Francis said at his morning Mass. (CNS photo/Dennis M. Sabangan, EPA) See POPE-MASS-PRAYER Jan. 12, 2016.

Les saints ont été les premiers à soutenir que la prière est un combat. Mais un combat contre qui ou contre quoi? Souvent contre eux-mêmes et tout ce qui détourne de Dieu. « Les grands priants de l’Ancienne Alliance avant le Christ, comme la Mère de Dieu et les saints avec Lui nous l’apprennent : la prière est un combat » (CÉC 2725). C’est pourquoi, la prière « suppose un effort constant … Le ‘combat spirituel’ de la vie nouvelle du chrétien est inséparable du combat de la prière » (ibid.).

Tout en sachant cela, on peut quand même se décourager rapidement. Il est facile d’oublier que la prière ne vient pas seulement de nos propres efforts mais surgit grâce à l’Esprit Saint, tel que Saint Paul nous l’explique dans l’une de ses lettres aux Romains : « l’Esprit Saint vient au secours de notre faiblesse, car nous ne savons pas prier comme il faut » (Romains 8, 26). Les saints sont pour nous des modèles, non pas à cause de leur vie exemplaire mais en raison de leur persévérance lorsque les choses allaient mal.  Ils peuvent nous encourager lorsque notre prière semble vide, lorsqu’on arrête de prier, lorsqu’on n’y trouve plus le réconfort et qu’elle n’est plus source de joie mais de tristesse. Les saints ont tous fait face à cela.

Voici, donc, quelques exemples d’hommes et de femmes qui ont connu des défis dans leur vie spirituelle. Certaines anecdotes vous surprendront peut-être, mais en y regardant de plus près, nous constatons que les obstacles à la prière exigent au fond une plus grande confiance en Dieu !

Saint Bernard de Clairvaux, cistercien

J’ai découvert que saint Bernard avait de la difficulté à prier grâce au site web Word on Fire (un ministère d’évangélisation par les médias créé par Mgr Robert Barron, évêque auxiliaire de Los Angeles). Saint Bernard savait ce que voulait dire être distrait pendant son temps de prière. On donne comme exemple l’histoire de sa rencontre, un jour, avec un fermier…

Alors qu’il voyageait à cheval, Bernard s’arrête près d’un fermier qui travaille la terre. Le fermier lève la tête et lui dit qu’il a de la chance de passer sa vie à prier. Mais saint Bernard fait la remarque que la prière peut s’avérer encore plus difficile que labourer la terre. « Je doute bien que ce soit vrai » lui répond le fermier, « vous avez un beau cheval et une selle splendide, que savez-vous de l’épreuve? ». Saint Bernard dit alors au fermier que s’il arrive à prier le Notre Père sans interruption, il lui donnera son cheval. Le fermier accepte le défi et se met à prier, « Notre Père, qui est aux cieux, que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne, que ta volonté soit faite… – tu me donnes la selle, aussi? ».

Je crois que Saint Bernard a bien illustré son objectif et est reparti avec et son cheval et sa selle. Les distractions et les combats dans la prière font partie de la vie spirituelle du chrétien. Les autres saints qui m’ont aidée à construire ce blogue, nous montrent de manière concrète à quoi ressemblait ce combat pour eux. J’espère qu’ils seront source d’encouragement pour vous aussi !

Sainte Thérèse d’Avila, carmélite

Sainte Thérèse d’Avila est devenue la première femme Docteur de l’Église, après avoir réformé l’Ordre des Carmélites, fondé des couvents un peu partout en Espagne, puis écrit quelques-uns des ouvrages spirituels les plus connus dans la littérature catholique. Mais avant d’en arriver là, la grande Thérèse a connu une vie intérieure houleuse.

Elle est rentrée au couvent à l’âge de 20 ans au grand déplaisir de son père. Au moment de son entrée, le couvent était alors un endroit prestigieux. Ainsi, lors de grandes réceptions tenues au couvent, Thérèse était au cœur de la fête. Par conséquent, sa vie spirituelle était tiède. Pendant ses temps de prière, elle était facilement distraite et voulait rarement prier. Elle attendait avec impatience la fin de son heure de prière. Elle raconte dans ses ouvrages qu’elle aurait pratiqué les plus dures pénitences au lieu de forcer l’oraison.

Elle menait en quelque sorte une double vie jusqu’au jour où elle tombe sur un texte de Saint Augustin. Elle se convertit (une deuxième fois, dit-elle) à l’âge de quarante ans et tombe amoureuse de Jésus. Sa vie change complètement. Nourrie par l’oraison, elle commence à exhorter le reste de ses consœurs de mener une vie digne de la vocation à laquelle elles ont été appelées.

Malgré son amour de Dieu, qui l’habite désormais, elle parle des défis qu’elle continue de rencontrer dans sa vie intérieure. Dans son livre Le Château intérieur, elle écrit : « Toutes les épreuves que nous devons endurer ne peuvent se comparer à la lutte intérieure … mais ne croyez pas qu’il s’agisse de ne pas penser à autre chose et que si vous êtes un peu distrait, tout est ‘perdu’… ces distractions sont comme des nuages qui passent dans le ciel et détournent notre regard un seul instant du Soleil de Justice ».

Saint Jean de la Croix, carme

Alors que sainte Thérèse change le visage de la vie religieuse en Espagne, saint Jean de la Croix se lie d’amitié avec elle. Elle sera éventuellement comme sa « mère spirituelle ». Attiré par son feu il devient carme déchaux et l’aidera à établir d’autres couvents carmélites. Il sera, lui aussi, nommé Docteur de l’Église.

Saint Jean a forgé l’expression la « nuit obscure de l’âme ». Il s’en est servi pour décrire l’expérience que nous vivons parfois lorsque nous sommes éprouvés dans la prière. Il nous dit que cette épreuve de la foi se manifeste à nous par la sécheresse, le sentiment d’abandon ou de l’absence de Dieu, alors qu’en vérité, il ne nous abandonne jamais. Au contraire, cette « nuit » est permise par Dieu pour que, petit à petit, nous arrivions à nous détacher de tout ce qui prend Sa place, dans notre prière mais aussi dans notre vie comme les plaisirs, les appétits, les loisirs, les pensées, les idées, etc. Ces choses peuvent être belles et bonnes mais ne devraient pas être des obstacles à la grâce; elles devraient plutôt nous aider à aller vers Dieu.

Sans jamais forcer notre liberté, Dieu nous invite simplement à collaborer au travail de la grâce en nous. Il est en train d’enlever les mauvaises herbes. Saint Jean nous montre qu’il ne faut pas craindre ces moments d’incertitude et de vide. C’est dans ces instants de « purification » que nous voyons notre grand besoin de Dieu et que nous pouvons nous abandonner plus à Sa miséricorde.

Mère Térésa de Calcutta, missionnaire de la charité

On la connaît très bien pour son immense œuvre auprès des pauvres. Mais Mère Térésa de Calcutta (bientôt sainte Mère Térésa) a fondé les Missionnaires de la charité alors qu’elle se sentait complètement abandonnée par Dieu. Sa prière, avant le début de sa mission en Inde, était remplie de la présence de Dieu. Elle voyait Jésus, lui parlait et entendait sa voix… Elle lui demandait de connaître un jour la souffrance du Christ en croix et de partager sa solitude. C’est cette prière qui lui a permis d’entendre Dieu l’appeler comme missionnaire auprès des plus démunis.

Mais, dès son arrivée à Calcutta, tout a changé. Dieu s’est tu. Elle n’avait plus de grandes visions et ne ressentait plus Son amour, Sa proximité. « J’appelle, je m’accroche, je désire, mais il n’y a personne pour me répondre ». Elle vécut comme cela pendant quarante ans. Pourtant, elle persévérait tout de même dans sa prière et dans son travail auprès des marginalisés. « Je ne fais que regarder Jésus souffrant et je répète : laisse-moi prendre part à ta douleur! Si cette douleur et cette souffrance … ne te donnent qu’une seule goutte de consolation, mon Jésus, fais de moi ce qu’il te plaira ». Quelle confiance ! On disait d’elle, qu’elle était une personne joyeuse et radieuse.

On ne pourrait parler de Mère Térésa sans reconnaître ce combat bien réel qu’elle a mené. Ce qui fait d’elle une sainte, ce n’est pas uniquement son travail auprès des pauvres mais aussi sa fidélité à sa vocation et à sa mission malgré sa « nuit obscure de l’âme ».

Nous comprendrons, à travers ces quelques exemples, que le combat de la prière est commun à tous les chrétiens – et même aux plus grands saints ! Mais, cette bataille intérieure n’est pas livrée pour rien !  C’est l’occasion pour Dieu de nous montrer ce que nous sommes, nous montrer les mauvaises herbes, les péchés ou les blessures qui ont encore de l’emprise sur nous. Finalement, c’est l’occasion de nous raccrocher à Lui en toute confiance, pour qu’Il nous redise Son amour et Sa miséricorde.

5 conseils pour prier chaque jour

SebastianPrayerPrier chaque jour parait peut être ambitieux. C’est une pratique réservée à ceux et celles qui ont du temps : les sœurs, les religieux, les prêtres… ou les grands-mamans. Pourtant l’Église nous dit que nous sommes tous appelés à la sainteté. Un jour nous le serons grand-maman! Ou grand-papa! La sainteté se construit dans l’amitié avec Dieu. C’est pourquoi les saints et les saintes sont les plus grands priants. Ils ont appris à connaitre Celui à qui ils veulent le plus ressembler un peu chaque jour. Dom Chautard, un moine trappiste, disait que pour sanctifier le monde, il faut d’abord se sanctifier soi-même. Selon lui, ce qui peut nous donner un coup de main est la prière personnelle. Je ne prétends pas tout savoir sur la prière – et encore très peu sur ce que cela veut dire être saint! – mais je voulais partager quelques astuces qui m’ont aidé dans mon cheminement. Ce blogue est le fruit de plusieurs conversations entre amis(es) ou avec des prêtres, puisque nous désirons tous nous rapprocher du Christ et nous avons tous, un jour ou l’autre, rencontré des défis dans la prière.

  1. Désirer prier

Cela semble une évidence. Pour d’abord prendre du temps pour prier il faut le vouloir. Il faut avoir le goût de s’arrêter dans la journée pour parler à Dieu et l’écouter. Cette tâche est simple et pourtant c’est la première à prendre le bord quand notre horaire est surchargé (moi, coupable!). Ce n’est pas pour rien que dans le Catéchisme de l’Église catholique, on nous dit que la prière est un « combat ». Et pour gagner ce combat, nous pouvons nous tourner vers l’Esprit Saint car il « vient au secours de notre faiblesse » (Romains 8, 26). Nous pouvons donc lui demander de nous donner le désir de prier avant même de commencer à prier.

  1. Connaitre Celui à qui et avec qui nous prions

« L’oraison mentale n’est, à mon avis, qu’un commerce intime d’amitié où l’on s’entretient souvent seul à seul avec ce Dieu dont on se sait aimé » (Sainte Thérèse d’Avila). Prier ne devrait pas être laborieux. C’est du temps gratuit que l’on donne comme lorsqu’on apprend à connaitre un ami ou un amoureux. Si je ne prenais pas le temps d’appeler ou d’aller voir mes amis, je ne pourrais jamais prétendre les connaitre réellement. Je n’oserais même pas dire que nous sommes amis. C’est comme ça avec Dieu. Saint Augustin nous dit que le « Christ est le premier à nous chercher et c’est lui qui demande à boire. Jésus a soif, sa demande vient des profondeurs de Dieu qui désire. La prière, que nous le sachions ou non, est la rencontre de la soif de Dieu et de la nôtre. Dieu a soif que nous ayons soif de lui ».

  1. Choisir l’heure

C’est l’un des plus grands défis dans la prière. C’est facile de se dire, « Je vais prier quand j’ai le temps » mais toutes ces fois où je n’ai pas fixé d’heure dans ma journée pour prier, j’avais mille et une raisons pour ne pas m’arrêter un petit instant et prier. Certains choisissent de prier à la même heure chaque jour. C’est ce qui fonctionne le mieux dans mon style de vie. Me réveiller le matin pour prier m’aide à bien me préparer pour la journée. Mais c’est un énorme défi chaque jour lorsque sonne mon réveil. C’est ce que Saint Josemaria Escriva appelait la minute héroïque.

« Triomphe chaque jour de toi-même dès le premier instant, en te levant ponctuellement à l’heure fixe, sans [accorder] une seule minute à la paresse. Si, avec l’aide de Dieu, tu te [domines], tu auras pris beaucoup d’avance pour le reste de la journée. Il est si démoralisant de se sentir battu [au premier combat]! …La minute héroïque. — C’est l’heure précise de te lever. Sans hésitation : une pensée surnaturelle et… debout ! — La minute héroïque : tu as là une mortification qui renforce ta volonté et n’affaiblit pas ta nature. (Chemin, 191-206)

Mais pour la personne qui n’est pas matinale, prier le matin n’est peut-être pas pour vous! Demandez-vous s’il y a un moment dans la journée où vous êtes le mieux disposé à la prière. Le soir? À l’heure du midi? Si vous allez à la messe régulièrement, vous pourriez arriver un peu plus tôt ou rester un peu plus tard pour avoir ce temps seul à seul avec Dieu. Et si vous ne pouvez pas garder la même heure chaque jour, choisissez dès le début de votre journée à quel moment vous pourrez le faire. On m’a aussi souvent recommandé d’être consistante dans la durée choisie. Si c’est 10, 15, 30 minutes ou plus, soyez fidèle au temps et à la durée que vous vous êtes donné. Comme si vous fixiez un rendez-vous avec un ami! « Ayez la joie dans l’espérance, tenez bon dans l’épreuve, soyez assidus à la prière » (Romains 12, 12).

  1. Choisir le lieu

Trouver un lieu pour prier est une tâche bien plus facile. Il n’y a pas qu’une église ou une chapelle qui soient propices à la prière. Il m’est déjà arrivé de prier dans l’autobus, en prenant l’avion, ou en plein milieu de la cafétéria de mon campus universitaire. Les églises et les chapelles ne se trouvent pas toujours au bout des doigts (même si j’aimerais qu’elles le soient!).  Il faut faire avec ce que nous avons là où nous sommes. Que ce soit sur le canapé ou assied à son bureau dans sa chambre. Ça peut se faire en prenant un café. Je suis assez distraite donc je préfère me retrouver dans un lieu calme où je peux faire silence. Ce qui n’est pas évident quand on habite au centre-ville l’été et les fenêtres restent ouvertes… Mais il ne faut pas attendre les conditions parfaites. Elles ne le seront jamais car même s’il y avait un silence complet autour de nous, les distractions surgiraient de l’intérieur. Une amie me demandait un jour, « l’heure et le lieu que tu choisis pour prier, que disent-il sur ta relation avec Dieu? ».

  1. Trouver un « outil » de prière

Maintenant pour le comment de la prière. Comment s’y prendre? Par où commencer? Parfois je me sens un peu « inutile » quand je me mets à prier. Je dois me rappeler que la prière peut être simple et que je n’ai pas besoin d’être utile pour discuter avec Dieu. La seule condition requise à la prière est de se mettre à sa disposition dans l’humilité. Un Notre Père pourrait suffire pour lancer la conversation.

« [Jésus] leur répondit : Quand vous priez, dites : Père, que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne. Donne-nous le pain dont nous avons besoin pour chaque jour. Pardonne-nous nos péchés, car nous-mêmes, nous pardonnons aussi à tous ceux qui nous ont des torts envers nous. Et ne nous laisse pas entrer en tentation » (Luc 11, 2-4).

De plus, l’Église nous offre mille moyens pour se rapprocher de Dieu. Il y a, par exemple, la Liturgie des heures, les Écritures Saintes et les Sacrements (recevoir l’Eucharistie à la Messe ou l’Adoration du Saint Sacrement), le Rosaire, la Lectio Divina (la lecture divine de la Parole), ou le livret du Prions en Église. Il faut faire attention de ne pas transformer notre temps de prière en une liste de tâches à accomplir et meubler tout son temps de prière. C’est une conversation dans laquelle il y a un temps pour parler, un temps pour écouter et un temps pour faire silence. Il se peut aussi qu’à certains moments, la prière soit déserte, où la Parole ne nous « parle » pas, il semble y avoir un vide entre nous et Dieu. Mais Saint Paul nous dit de persévérer. Notre disponibilité suffit.

« L’Esprit Saint vient au secours de notre faiblesse, car nous ne savons pas prier comme il faut. L’Esprit lui-même intercède pour nous par des gémissements inexplicables. Et Dieu, qui scrute les cœurs, connait les intentions de l’Esprit puisque c’est selon Dieu que l’Esprit intercède pour les fidèles » (Romains 8, 26-27)

Amoris Laetitia ou la famille sur la voie de la charité

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Aujourd’hui même à midi heure de Rome, le pape François a publié sa très attendue exhortation apostolique intitulée Amoris Laetitia sur le thème de l’amour dans la famille. Ce document de 258 pages pour l’édition française est le fruit des travaux des deux synodes sur la famille qui ont eu lieu au Vatican en 2014 et 2015. Bien que, dès les premières pages du texte, le Pape « ne recommande pas une lecture générale hâtive » (no 7), la rédaction de ce premier article nécessitait que je le lise dans son entièreté assez rapidement… Toutefois, n’ayez crainte, nous aurons l’occasion d’en reparler dans une série d’articles dans lesquels nous nous arrêterons plus longuement sur les nombreux thèmes abordés. Je vous propose aujourd’hui mes premières impressions suite à ma lecture d’Amoris Laetitia, espérant que dans notre prochain rendez-vous, vous aurez eu l’occasion de parcourir cet important document vous-mêmes.

La première chose qui me vient à l’esprit après la lecture d’Amoris Laetitia c’est que ce texte respire la préoccupation de l’Église et du pape François pour les familles d’aujourd’hui. Conscient de sa mission d’accompagner tous les fidèles et tous les humains, on perçoit avec quelle intensité le présent Pape souhaite que tous puissent découvrir la grandeur de cette vocation humaine. Pour cela, le Pape souhaite que l’on redécouvre l’essence de l’attitude de l’Église qui consiste en ce qu’il appelle la « via caritatis » (no 306) qui signifie en français la voie de la charité. En effet, on a souvent taxé l’Église d’être dogmatique et d’avoir un enseignement qui n’est plus en accord avec notre monde d’aujourd’hui. Il me semble que ce document répond magnifiquement à cette critique, à la fois, en manifestant que l’Église est non seulement parfaitement consciente et à l’écoute de la réalité contemporaine mais aussi qu’elle est capable d’un esprit critique envers elle-même et face au monde, esprit qu’elle puise à la lumière de la Révélation d’amour accomplie en Jésus-Christ.

En ce sens, les deux précédents synodes l’ont démontré : l’Église n’est pas cette institution fermée et rétrograde mais bien une communauté d’hommes et de femmes qui marchent ensemble à la suite du Christ; une communauté universelle qui s’interroge sur les meilleurs chemins à prendre pour rester le plus fidèle possible à l’amour qui repose en leur être depuis le baptême. Comment donc réaliser ce projet de Dieu sur nous dans nos familles aujourd’hui? C’est la question fondamentale à laquelle ce texte tente d’apporter sa contribution.

Pour ce faire, le pape manifeste que le dessein de Dieu sur la famille n’est pas un idéal abstrait mais une réalité concrète. C’est pourquoi, on ne doit jamais se décourager de nous-mêmes ou des situations dans lesquelles nous nous trouvons. Nous ne sommes pas parfaits et la perfection à laquelle nous sommes destinés n’est pas de ce monde. Les chutes et les échecs sur le chemin sont pour Dieu et pour nous des occasions de réconciliation dont le but sublime est de manifester la grandeur de la Miséricorde de Dieu.

C’est le deuxième point qui a attiré mon attention : ce souci de montrer que la miséricorde est la clé de compréhension de tout l’enseignement et de la pratique de l’Église. En effet, la miséricorde « n’est pas seulement l’agir du Père, mais elle devient le critère pour comprendre qui sont ses véritables enfants. En résumé, nous sommes invités à vivre de miséricorde parce qu’il nous a d’abord été fait miséricorde » (no 310). Selon moi, tout le texte tient à revisiter cet enseignement sur la famille si incompris par bon nombre de personnes aujourd’hui; parmi lesquelles on retrouve malheureusement beaucoup de catholiques. Que ce soit dans la présentation des enseignements bibliques et magistériels sur la famille (chapitre 1 et 3), dans l’analyse des défis contemporains auxquels toutes les familles font face dans leur volonté (consciente ou non) de réaliser leurs plus grandes aspirations (chapitre 2 et 5), dans la présentation de la beauté et de l’héroïcité nécessaires à la mise en pratique des exigences de l’amour véritable (chapitre 4 et 7) ou de l’approche pastorale nécessaire pour accompagner les familles dans la réalisation de leur vocation universelle à la sainteté (chapitre 6 et 8), l’ensemble du document semble être orienté vers la proximité avec Dieu qui se trouve aux côtés de chacun d’entre nous et qui nous invite à le connaître et l’aimer par l’entremise de nos relations familiales « où se reflète, par grâce, le mystère de la Sainte Trinité » ( no 86).

Nous reviendrons, dans les prochaines semaines, sur les différents thèmes abordés dans cette exhortation apostolique qui, des plus polémiques aux plus apparemment anodins, auront sans doute eu l’occasion de faire surface ici et là dans l’actualité. Entre temps, je vous recommande fortement la lecture de ce document qui saura réchauffer le cœur de tous les lecteurs qui forcément sentiront l’immense trésor de sagesse dont l’Église est dépositaire et dont elle nous fait part gratuitement s’appuyant sur ce don ultime de Dieu par son Fils sur la Croix.

Église en sortie 18 mars 2016

Cette semaine à l’émission Église en Sortie, Francis Denis reçoit Antoine Malenfant, rédacteur en chef à la revue Le Verbe dans un reportage sur le lancement du dernier numéro de ce magazine consacré à l’histoire. Dans la deuxième partie de l’émission, nous vous présentons une entrevue avec Diane Poirier, directrice de la revue Signes. Elle nous parle de cette revue d’inspiration ignatienne qui a plus de 50 ans.

Église en sortie 19 février 2016

Cette semaine à l’émission Église en Sortie, Francis Denis reçoit Mme Marie-Astrid Dubant, directrice régionale d’Alpha Québec qui nous présente la Série Alpha-Jeunes. À travers cette entrevue, vous découvrirez une série de séances interactives explorant les fondements de la foi chrétienne sur les thèmes de la vie, Jésus, la Croix, la foi, la prière, la Bible, etc. Dans la deuxième partie de l’émission, nous vous présentons une entrevue réalisée avec Mme Anne-Laure Dolliee, auteur, compositeur interprète engagée qui s’est arrêtée à notre studio de Montréal alors qu’elle fait le tour du monde à la rencontre des missionnaires des quatre coins de la planète.

Homélie du pape François lors de la Messe au Centre d’Études de Ecatepec, Mexique

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Vous trouverez ci-dessous le texte de l’homélie du pape François lors de la Messe au Centre d’Études de Ecatepec au Mexique:

Mercredi dernier nous avons commencé le temps liturgique du Carême où l’Église nous invite à nous préparer à célébrer la grande fête de Pâques. C’est un temps spécial pour rappeler le don de notre baptême, lorsque nous avons été faits enfants de Dieu. L’Église nous invite à raviver le don qui nous a été fait, pour ne pas le laisser endormi comme une chose du passé, ou dans quelque « tiroir aux souvenirs ». Ce temps du Carême est un moment favorable pour retrouver la joie et l’espérance que nous ressentons du fait d’être enfants aimés du Père. Ce Père qui nous attend pour nous enlever les vêtements de la fatigue, de l’apathie, de la méfiance, et nous revêtir de la dignité que seuls un vrai père ou une vraie mère savent donner à leurs enfants, les vêtements qui naissent de la tendresse et de l’amour.

Notre Père est le Père d’une grande famille, il est notre Père. Il sait nourrir un amour unique mais ne sait engendrer ni éduquer des « fils uniques ». C’est un Dieu qui sait ce qu’est le foyer, la fraternité, le pain rompu et partagé. Il est le Dieu du « Notre Père », non pas du « Mon Père », ni du « Votre Père ». 

En chacun de nous se trouve, vit ce rêve de Dieu qu’à chaque Pâques, dans chaque Eucharistie nous célébrons de nouveau : nous sommes enfants de Dieu. Rêve que beaucoup de nos frères ont vécu tout au long de l’histoire. Rêve dont ont témoigné beaucoup de martyrs d’hier et Capture d’écran 2016-02-14 à 12.55.13d’aujourd’hui, en versant leur sang. 

Le Carême est un temps de conversion parce que nous faisons quotidiennement l’expérience dans notre vie de la façon dont ce rêve est sans cesse menacé par le père du mensonge, par celui qui cherche à nous séparer, en créant une société divisée et qui s’affronte. Une société d’un petit nombre et pour un petit nombre. Que de fois ne faisons-nous l’expérience dans notre chair, ou dans notre famille, à travers nos amis ou nos voisins, de la douleur qui naît de ne pas voir reconnue cette dignité que nous portons tous en nous ! Que de fois n’avons-nous pas dû pleurer et regretter de ne nous être pas rendu compte que nous n’avons pas reconnu cette dignité dans les autres ! Que de fois  – et je le dis avec douleur – ne sommes-nous pas aveugles et insensibles devant le manque de reconnaissance de notre propre dignité et de celle d’autrui ! 

Le Carême est un temps pour ajuster les sens, ouvrir les yeux devant tant d’injustices qui portent atteinte directement au rêve et au projet de Dieu. C’est un temps pour démasquer ces trois grandes formes de tentations qui brisent, divisent l’image que Dieu a voulu former.

Trois tentations du Christ…

Trois tentations du chrétien qui essayent de détruire la vérité à laquelle nous avons été appelés.

Trois tentations qui cherchent à dégrader et à nous dégrader.

  1. La richesse, en nous appropriant de biens qui ont été donnés à tous, les utilisant seulement pour moi ou ‘‘pour les miens’’. C’est avoir le « pain » à la sueur du front de l’autre, voire au prix de sa vie. Cette richesse, qui est un pain au goût de douleur, d’amertume, de souffrance. Dans une famille ou une société corrompue, c’est le pain que l’on donne à manger à ses propres enfants. 
  2. La vanité ; elle est la recherche de prestige sur la base de la disqualification continuelle et constante de ceux qui « ne sont pas comme nous ». La recherche exacerbée de ces cinq minutes de gloire, qui ne supporte pas la « gloire » des autres. « Transformant l’arbre tombé en bois de chauffage», elle conduit  à la troisièmetentation :
  3. L’orgueil ; c’est-à-dire se mettre sur un plan de supériorité en tout genre, sentant qu’on ne partage pas ‘‘la vie du commun des mortels’’, et prier tous les jours : « Merci Seigneur parce que tu ne m’as pas fait comme eux ». 

Capture d’écran 2016-02-14 à 12.54.54Trois tentations du Christ…

Trois tentations que le chrétien affronte tous les jours.

Trois tentations qui cherchent à dégrader, détruire et ôter la joie ainsi que la fraîcheur de l’Évangile ; qui nous enferment dans un cercle de destruction et de péché.

Il vaut donc la peine de nous demander :

Jusqu’à quel point sommes-nous conscients de ces tentations dans notre personne, en nous-mêmes ? Jusqu’à quel point sommes-nous habitués à un style de vie qui pense que dans la richesse, dans la vanité et dans l’orgueil se trouvent la source et la force de la vie ? Jusqu’à quel point croyons-nous que l’attention à l’autre, notre souci  et occupation pour le pain, pour le nom et pour la dignité des autres sont source de joie et d’espérance ?

Nous avons choisi Jésus et non le démon, nous voulons suivre ses traces, mais nous savons que ce n’est pas facile. Nous savons ce que signifie être séduit par l’argent, la gloire et le pouvoir. C’est pourquoi l’Église nous offre ce temps, elle nous invite à la conversion avec une seule certitude : Lui nous attend et il veut guérir nos cœurs de tout ce qui le dégrade, en étant dégradé ou en dégradant. Il est le Dieu qui porte un nom : miséricorde. Son nom est notre richesse, son nom est notre gloire, son nom est notre pouvoir et en son nom, une fois de plus, nous redisons avec le Psaume : « Tu es mon Dieu, en toi j’ai mis ma confiance ». Nous pouvons le répéter ensemble « Tu es mon Dieu, en toi j’ai mis ma confiance ».

Qu’en cette Eucharistie le Saint Esprit renouvelle en nous la certitude que son Nom est miséricorde et qu’il nous fasse expérimenter chaque jour que « la joie de l’Évangile remplit le cœur et toute la vie de ceux qui rencontrent Jésus… Avec Jésus-Christ la joie naît et renaît toujours » (Evangelii gaudium, n. 1).

Message du pape François pour le Carême 2016

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«C’est la miséricorde que je veux, et non les sacrifices»(Mt 9,13) Les œuvres de miséricorde dans le parcours jubilaire

1. Marie, icône d’une Eglise qui évangélise parce qu’elle a été évangélisée

Dans la Bulle d’indiction du Jubilé, j’ai invité à faire en sorte que « le Carême de cette Année Jubilaire [soit] vécu plus intensément comme un temps fort pour célébrer et expérimenter la miséricorde de Dieu » ( Misericordiae vultus, n. 17). Par le rappel de l’écoute de la Parole de Dieu et l’initiative « 24 heures pour le Seigneur », j’ai voulu souligner la primauté de l’écoute priante de la Parole, plus particulièrement de la Parole prophétique. La miséricorde de Dieu est certes une annonce faite au monde: cependant chaque chrétien est appelé à en faire l’expérience personnellement. C’est pourquoi, en ce temps de Carême, j’enverrai les Missionnaires de la

Miséricorde afin qu’ils soient pour tous un signe concret de la proximité et du pardon de Dieu. Parce qu’elle a accueilli la Bonne Nouvelle annoncée par l’archange Gabriel, Marie chante prophétiquement dans son Magnificat la miséricorde par laquelle Dieu l’a choisie. La Vierge de Nazareth, promise comme épouse à Joseph, devient ainsi l’icône parfaite de l’Eglise qui évangélise car elle a été et demeure constamment évangélisée par l’œuvre de l’Esprit Saint qui a fécondé son sein virginal. Dans la tradition prophétique – et déjà au niveau étymologique – la miséricorde est étroitement liée aux entrailles maternelles (rahamim) et à une bonté généreuse, fidèle et compatissante (hesed) qui s’exerce dans les relations conjugales et parentales.

2. L’alliance de Dieu avec les hommes : une histoire de miséricorde

Le mystère de la miséricorde divine se dévoile au cours de l’histoire de l’alliance entre Dieu et son peuple Israël. Dieu, en effet, se montre toujours riche en miséricorde, prêt à reverser sur lui en toutes circonstances une tendresse et une compassion viscérales, particulièrement dans les moments les plus dramatiques, lorsque l’infidélité brise le lien du pacte et que l’alliance requiert d’être ratifiée de façon plus stable dans la justice et dans la vérité. Nous nous trouvons ici face à un véritable drame d’amour où Dieu joue le rôle du père et du mari trompé, et Israël celui du fils ou de la fille, et de l’épouse infidèles. Ce sont les images familières, comme nous le voyons avec Osée (cf. Os 1-2), qui expriment jusqu’à quel point Dieu veut se lier à son peuple.

Ce drame d’amour atteint son point culminant dans le Fils qui s’est fait homme. Dieu répand en lui sa miséricorde sans limites, au point d’en faire la « Miséricorde incarnée » (Misericordiae Vultus, n. 8). En tant qu’homme, Jésus de Nazareth est fils d’Israël dans le plein sens du terme. Il l’est au point d’incarner cette écoute parfaite de Dieu demandée à tout Juif par le Shemà qui constitue, aujourd’hui encore, le cœur de l’alliance de Dieu avec Israël : « Ecoute, Israël : le Seigneur notre Dieu est le seul Seigneur. Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de toutes tes forces » (Dt 6, 4-5). Le Fils de Dieu est l’Epoux qui met tout en œuvre pour conquérir l’amour de son Epouse. Il lui est lié par son amour inconditionnel qui se manifeste dans les noces éternelles avec elle.

Ceci constitue le cœur vibrant du kérygme apostolique où la miséricorde divine tient une place centrale et fondamentale. Il est « la beauté de l’amour salvifique de Dieu manifesté en Jésus-Christ, mort et ressuscité » (Exhort. apost. Evangelii gaudium, n. 36), cette première annonce « que l’on doit toujours écouter de nouveau de différentes façons, et que l’on doit toujours annoncer de nouveau durant la catéchèse » (Ibid., n. 164). La miséricorde alors « illustre le comportement de Dieu envers le pécheur, lui offrant une nouvelle possibilité de se repentir, de se convertir et de croire » (Misericordiae vultus, n. 21), restaurant vraiment ainsi la relation avec Lui. En Jésus Crucifié, Dieu veut rejoindre l’homme pécheur jusque dans son éloignement le plus extrême, précisément là où il s’est égaré et éloigné de Lui. Et ceci, il le fait dans l’espoir de réussir finalement à toucher le cœur endurci de son Épouse.

3. Les œuvres de miséricorde

La miséricorde de Dieu transforme le cœur de l’homme et lui fait expérimenter un amour fidèle qui le rend capable d’être, à son tour, miséricordieux. C’est à chaque fois un miracle que la miséricorde divine puisse se répandre dans la vie de chacun de nous, en nous incitant à l’amour du prochain et en suscitant ce que la tradition de l’Eglise nomme les œuvres de miséricorde corporelles et spirituelles. Elles nous rappellent que notre foi se traduit par des actes concrets et quotidiens, destinés à aider notre prochain corporellement et spirituellement, et sur lesquels nous serons jugés : le nourrir, le visiter, le réconforter, l’éduquer. C’est pourquoi j’ai souhaité que « le peuple chrétien réfléchisse durant le Jubilé sur les œuvres de miséricorde corporelles et spirituelles. Ce sera une façon de réveiller notre conscience souvent endormie face au drame de la pauvreté, et de pénétrer toujours davantage le cœur de l’Evangile, où les pauvres sont les destinataires privilégiés de la miséricorde divine » (Ibid., n. 15). Dans la personne du pauvre, en effet, la chair du Christ « devient de nouveau visible en tant que corps torturé, blessé, flagellé, affamé, égaré… pour être reconnu par nous, touché et assisté avec soin » (Ibid.). Inouï et scandaleux mystère qui prolonge dans l’Histoire la souffrance de l’Agneau innocent, buisson ardent brûlant d’un amour gratuit, et devant lequel nous ne pouvons, à la suite de Moïse, qu’ôter nos sandales (cf. Ex 3,5) ; et ceci plus encore quand ce pauvre est notre frère ou notre sœur en Christ qui souffre à cause de sa foi.

Face à cet amour, fort comme la mort (cf. Ct 8,6), le pauvre le plus misérable est celui qui n’accepte pas de se reconnaître comme tel. Il croit être riche mais, en réalité, il est le plus pauvre des pauvres. Et s’il est tel, c’est parce qu’il est esclave du péché qui le pousse à user de la richesse et du pouvoir non pas pour servir Dieu et les autres, mais pour étouffer en lui l’intime conviction de n’être, lui aussi, rien d’autre qu’un pauvre mendiant. D’autant plus grands sont le pouvoir et les richesses dont il dispose, d’autant plus grand est le risque que cet aveuglement devienne mensonger. Il en vient à ne même plus vouloir voir le pauvre Lazare qui mendie à la porte de sa maison (cf. Lc 16, 20-21), figure du Christ qui, dans les pauvres, mendie notre conversion. Lazare est cette opportunité de nous convertir que Dieu nous offre et que peut-être nous ne voyons pas. Cet aveuglement est accompagné d’un délire orgueilleux de toute-puissance, dans lequel résonne, de manière sinistre, ce démoniaque « vous serez comme des dieux » (Gn 3,5), qui est à la racine de tout péché. Un tel délire peut également devenir un phénomène social et politique, comme l’ont montré les totalitarismes du XXème siècle, et comme le montrent actuellement les idéologies de la pensée unique et celles de la technoscience qui prétendent réduire Dieu à l’insignifiance et les hommes à des masses qu’on peut manipuler. Ceci, de nos jours, peut être également illustré par les structures de péché liées à un modèle erroné de développement fondé sur l’idolâtrie de l’argent qui rend indifférentes au destin des pauvres les personnes et les sociétés les plus riches, qui leur ferment les portes, refusant même de les voir.

Pour tous, le Carême de cette Année jubilaire est donc un temps favorable qui permet finalement de sortir de notre aliénation existentielle grâce à l’écoute de la Parole et aux œuvres de miséricorde. Si à travers les œuvres corporelles nous touchons la chair du Christ dans nos frères et nos sœurs qui ont besoin d’être nourris, vêtus, hébergés, visités, les œuvres spirituelles, quant à elles, – conseiller, enseigner, pardonner, avertir, prier – touchent plus directement notre condition de pécheurs. C’est pourquoi les œuvres corporelles et les œuvres spirituelles ne doivent jamais être séparées. En effet, c’est justement en touchant la chair de Jésus Crucifié dans le plus nécessiteux que le pécheur peut recevoir en don la conscience de ne se savoir lui-même rien d’autre qu’un pauvre mendiant. Grâce à cette voie, « les hommes au cœur superbe », « les puissants » et « les riches », dont parle le Magnificat ont la possibilité de reconnaître qu’ils sont, eux aussi, aimés de façon imméritée par le Christ Crucifié, mort et ressuscité également pour eux. Cet amour constitue la seule réponse à cette soif de bonheur et d’amour infinis que l’homme croit à tort pouvoir combler au moyen des idoles du savoir, du pouvoir et de l’avoir. Mais il existe toujours le danger qu’à cause d’une fermeture toujours plus hermétique à l’égard du Christ, qui dans la personne du pauvre continue à frapper à la porte de leur cœur, les hommes au cœur superbe, les riches et les puissants finissent par se condamner eux-mêmes à sombrer dans cet abîme éternel de solitude qu’est l’enfer. C’est alors que résonnent à nouveau, pour eux comme pour nous tous, les paroles ardentes d’Abraham : « Ils ont Moïse et les Prophètes, qu’ils les écoutent ! » (Lc 16,29). Cette écoute agissante nous préparera le mieux à fêter la victoire définitive sur le péché et sur la mort de l’Epoux qui est désormais ressuscité, et qui désire purifier sa future Épouse dans l’attente de son retour.

Ne laissons pas passer en vain ce temps de Carême favorable à la conversion ! Nous le demandons par l’intercession maternelle de la Vierge Marie, qui, la première, face à la grandeur de la miséricorde divine dont elle a bénéficié gratuitement, a reconnu sa propre petitesse (cf. Lc 1,48) en se reconnaissant comme l’humble Servante du Seigneur (cf. Lc 1,38).

FRANCISCUS

Du Vatican, 4 octobre 2015

Fête de Saint-François d’Assise

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