L’Église et les jeunes: un discernement à double sens

CNS photo/Max Rossi, Reuters

Il y a quelques semaines, le Secrétariat de la 15e Assemblée générale ordinaire du Synode des évêques publiait un document préparatoire ainsi qu’un questionnaire sur le thème « les jeunes, la foi et le discernement vocationnel » pour les diocèses du monde entier. Suivant la même méthodologie que les précédents synodes sur la famille, ce document a pour but d’amorcer la réflexion en vue des discussions qui auront lieu à Rome en octobre prochain. Ce texte subdivisé en trois parties manifeste non seulement la richesse doctrinale, humaine et pastorale qui fait de l’Église, selon les mots du bienheureux Paul VI, une « experte en humanité » (no 13) mais également sa volonté d’inclure les jeunes dans cette démarche de réflexion qui vise à mieux les accompagner dans leur processus de discernement vocationnel. Ainsi donc, la conversion demandée à toute l’Église est déjà mise en pratique dans le processus même du synode !

À chacun sa vocation

Tout être humain a une vocation, c’est-à-dire un appel à l’amour qui prend « une forme concrète dans la vie quotidienne à travers une série de choix, qui allie état de vie (mariage, ministère ordonné, vie consacrée, etc.), profession, modalité d’engagement social et politique, style de vie, gestion du temps et de l’argent, etc. » (Intro). L’Homme étant un être social, il ne pourra découvrir le sens de sa vie que par l’entremise d’autres personnes qui l’aideront à déployer son plein potentiel tout au long de sa vie. La qualité de ce « parcours “ réflexif ” » (no3) dépendra donc énormément du milieu dans lequel les jeunes évoluent, d’où l’importance d’une approche adaptée à notre monde et à leur destinée intemporelle.

Un double discernement

Pour être en mesure d’aider les jeunes à grandir, à gagner en maturité et à faire les choix qui s’imposent dans tout discernement vocationnel, l’Église doit se mettre à leur portée dans un processus d’accompagnement qui tient compte du monde dans lequel ces jeunes vivent. Pour ce faire, une réflexion profonde sur les grandes dynamiques actuelles qui sont également opportunités et défis doit avoir lieu.

L’une des constatations du document est que la jeunesse ne représente pas un bloc monolithique. Nous avons affaire à « une pluralité de mondes des jeunes (no 1), ce qui demande une attention particulière aux subtilités culturelles, économiques, sociales, politiques, artistiques et j’en passe. Loin de vouloir faire une analyse exhaustive de ces différences, le document cherche à souligner quelques grands courants qui influencent les jeunes de toute société.

Par exemple, on souligne cette énergie de la jeunesse à vouloir s’impliquer, « sa disponibilité à participer et à se mobiliser pour des actions concrètes, où l’apport personnel de chacun peut être une occasion de reconnaissance identitaire ». Elle pourra trouver en l’Église le catalyseur de cette volonté d’engagement total tout en la préservant des différentes dérives de notre temps, qu’elles soient consuméristes ou idéologiques.

Cependant, l’Église doit se départir des attitudes qui pourraient infantiliser les jeunes et les porter à cette « insatisfaction envers des milieux où les jeunes ressentent, à tort ou à raison, qu’ils ne trouvent pas leur place ou dont ils ne reçoivent pas de stimuli ». Ainsi, une transformation missionnaire « d’une Église qui accompagne » (Evangelii Gaudium, no 24) les jeunes dans leur discernement lui permettra également d’exercer un examen de conscience sur ses propres pratiques. En ce sens, lorsque le Pape affirme : « Je préfère une Église accidentée, blessée et sale pour être sortie par les chemins, plutôt qu’une Église malade de la fermeture et du confort de s’accrocher à ses propres sécurités. », cela signifie aussi donner des responsabilités aux jeunes sachant que, comme tout le monde, ils feront des erreurs mais qu’au bout du compte, ils seront à la hauteur des responsabilités que nous leur confierons.

La semaine prochaine, nous continuerons l’analyse de ce document important sur le processus de transformation missionnaire de l’Église tel que voulu par le pape François.

 

Église en sortie 27 mai 2016

Cette semaine à Église en sortie, nous vous présentons une entrevue avec Mgr Raymond Poisson, évêque de Joliette et membre de la Commission Justice & Paix de la Conférence des évêques catholiques du Canada. Il nous parle des relations de l’Église catholique avec les autochtones. Nous nous rendons à la Marche Nationale pour la vie 2016 à Ottawa, le 12 mai dernier. Enfin, dans la troisième partie de l’émission nous nous entretenons avec Charles Le Bourgeois qui nous parle de son expérience à l’intérieur des deux synodes sur la famille au Vatican ainsi que de sa série documentaire « Charité Sans Frontières ».

Église en sortie 20 mai 2016

Cette semaine à Église en sortie, nous vous présentons une entrevue avec Sr. Marie-Paule Sansfaçon et Sr. Nicole Joly qui nous présente la revue « Le Précurseur » ainsi que leur communauté : Les sœurs Missionnaires de l’Immaculée Conception. Dans la deuxième partie, nous assistons à la conférence de presse du diocèse de Québec suite à la publication de l’exhortation apostolique post-synodale « Amoris Laetitia ». Enfin, ans la dernière partie nous rencontrons l’abbé Jean-Philippe Auger, prêtre de l’archidiocèse de Québec et auteur du livre « Comment Jésus a coaché douze personnes ordinaires pour en faire des leaders extraordinaires ».

L’Église est communicatrice depuis les origines

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On le sait, l’Église est communicatrice depuis ses origines. Dans notre tradition chrétienne, nous savons que la Révélation de Dieu s’est inscrite dans l’histoire du peuple d’Israël jusqu’à se faire chair par l’Incarnation du Verbe de Dieu en Jésus-Christ. Cette Révélation de Dieu dans l’histoire allait cependant faire siens les instruments que les hommes utilisent pour communiquer. C’est le cas de l’écriture qui, à travers les siècles, a permis de composer ce que nous appelons la Bible ou les Saintes Écritures. Dans la Bible, nous trouvons plusieurs genres littéraires et plusieurs niveaux de langage qui nécessitent parfois une interprétation vigilante. De son côté, l’Église a elle aussi utilisé l’écriture pour transmettre son message à l’intérieur comme à l’extérieur de ses murs. De l’homélie à l’encyclique en passant par les conciles et les proclamations Ex Cathedra, l’Église sait qu’elle ne peut limiter sa prise de parole à un seul niveau de langage.

Si l’Église désire être fidèle à cette tradition de transmission de son message à partir de divers niveaux de langage, elle comprendra qu’aujourd’hui, la manière la plus à même d’accomplir cette mission est le dialogue et la rencontre personnel. Comme il l’affirmait dans un discours de commémoration du 50e anniversaire de l’Institution du Synode des évêques : « le sensus fidei empêche que l’on sépare d’une manière rigide « l’Église enseignante » de « l’Église enseignée » puisque les fidèles eux-mêmes ont leur propre « flair » pour discerner les nouvelles voies que le Seigneur ouvre à son Église »[1]. En effet, il est essentiel aujourd’hui de prendre en compte l’individualité des personnes dans le discernement de la Volonté de Dieu celle-ci. De plus, seule cette attention personnelle est en mesure de manifester que les Enseignements de l’Église ne sont pas des principes extérieurs « parachutés » sur la vie des gens mais une loi intérieure qui se trouve déjà en eux et qui seule peut les rendre heureux.

Pour ce faire, chaque chrétien doit développer ce que j’appelle l’excellence du jugement et c’est en ce sens que peuvent être comprise l’exhortation du Pape lors de la rencontre avec les catéchistes et enseignement de Kampala en Ouganda lorsqu’il demandait : « aux évêques et aux prêtres de vous aider par une formation doctrinale, spirituelle et pastorale, en mesure de vous rendre toujours plus efficaces dans votre œuvre »[2]. En d’autres termes, notre siècle demande plus que jamais une formation solide des consciences à la doctrine chrétienne complétée par l’exercice de toutes les vertus, en un mot, la sainteté ! L’excellence du jugement et le défi de la formation me semblent donc les pierres angulaires de cette révolution de la tendresse si chère au pape François.

Discours de conclusion du pape François aux pères synodaux

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Vous trouverez ci-dessous le texte complet du discours du Saint-Père :

Chères Béatitudes, Éminences, Excellences, Chers frères et soeurs,

Je voudrais tout d’abord remercier le Seigneur qui a guidé notre chemin synodal au cours de ces années avec l’Esprit Saint dont le soutien ne manque jamais à l’Église.

Je remercie vraiment de tout coeur Son Eminence le Cardinal Lorenzo Baldisseri, Secrétaire général du Synode, S.E. Mgr Fabio Fabene, Sous-secrétaire, et avec eux je remercie le Relateur Son Eminence le Cardinal Peter Erdő et le Secrétaire spécial S.E. Mgr Bruno Forte, les Présidents délégués, les secrétaires, les consulteurs, les traducteurs et tous ceux qui ont travaillé infatigablement et avec un total dévouement à l’Église : merci de tout coeur !

Je vous remercie tous, chers Pères synodaux, Délégués fraternels, Auditeurs, Auditrices et Assesseurs, curés et familles pour votre participation active et fructueuse.

Je remercie aussi les « anonymes » et toutes les personnes qui ont travaillé en silence contribuant généreusement aux travaux de ce Synode.

Soyez tous sûrs de ma prière afin que le Seigneur vous récompense de l’abondance des dons de sa grâce !

Alors que je suivais les travaux du Synode, je me suis demandé : que signifiera pour l’Église de conclure ce Synode consacré à la famille ?

Il ne signifie certainement pas avoir achevé tous les thèmes inhérents à la famille, mais avoir cherché à les éclairer par la lumière de l’Évangile, de la tradition et de l’histoire bimillénaire de l’Église, infusant en eux la joie de l’espérance sans tomber dans la facile répétition de ce qui est indiscutable ou le déjà dit.

Il ne signifie sûrement pas avoir trouvé des solutions exhaustives à toutes les difficultés et aux doutes qui défient et menacent la famille, mais avoir mis ces difficultés et ces doutes sous la lumière de la Foi, les avoir examinés attentivement, les avoir affrontés sans peur et sans se cacher la tête dans le sable.

Il signifie avoir incité tout le monde à comprendre l’importance de l’institution de la famille et du mariage entre un homme et une femme, fondée sur l’unité et sur l’indissolubilité et à l’apprécier comme base fondamentale de la société et de la vie humaine.

Il signifie avoir écouté et fait écouter les voix des familles et des pasteurs de l’Église qui sont venus à Rome en portant sur leurs épaules les poids et les espérances, les richesses et les défis des familles de toutes les parties du monde.

Il signifie avoir donné la preuve de la vivacité de l’Église catholique qui n’a pas peur de secouer les consciences anesthésiées ou de se salir les mains en discutant de la famille d’une façon animée et franche.

Il signifie avoir cherché à regarder et à lire la réalité, ou plutôt les réalités, d’aujourd’hui avec les yeux de Dieu, pour allumer et pour éclairer avec la flamme de la foi les coeurs des hommes, en un moment historique de découragement et de crise sociale, économique, morale et de négativité dominante.

Il signifie avoir témoigné à tous que l’Évangile demeure pour l’Église la source vive d’éternelle nouveauté, contre qui veut « l’endoctriner » en pierres mortes à lancer contre les autres.

Il signifie encore avoir mis à nu les coeurs fermés qui souvent se cachent jusque derrière les enseignements de l’Église ou derrière les bonnes intentions pour s’asseoir sur la cathèdre de Moïse et juger, quelquefois avec supériorité et superficialité, les cas difficiles et les familles blessées.

Il signifie avoir affirmé que l’Église est Église des pauvres en esprit et des pécheurs en recherche du pardon et pas seulement des justes et des saints, ou plutôt des justes et des saints quand ils se sentent pauvres et pécheurs.

Il signifie avoir cherché à ouvrir les horizons pour dépasser toute herméneutique de conspiration ou fermeture de perspective pour défendre et pour répandre la liberté des enfants de Dieu, pour transmettre la beauté de la Nouveauté chrétienne, quelquefois recouverte par la rouille d’un langage archaïque ou simplement incompréhensible.

Sur le chemin de ce Synode les diverses opinions qui se sont exprimées librement – et malheureusement parfois avec des méthodes pas du tout bienveillantes – ont certainement enrichi et animé le dialogue, offrant une image vivante d’une Église qui n’utilise pas « des formulaires préparés d’avance », mais qui puise à la source inépuisable de sa foi une eau vive pour désaltérer les coeurs desséchés.

Et, au-delà des questions dogmatiques bien définies par le Magistère de l’Église, nous avons vu aussi que ce qui semble normal pour un évêque d’un continent, peut se révéler étrange, presque comme un scandale, pour l’évêque d’un autre continent ; ce qui est considéré violation d’un droit dans une société, peut être requis évident et intangible dans une autre ; ce qui pour certains est liberté de conscience, pour d’autres peut être seulement confusion. En réalité, les cultures sont très diverses entre elles et chaque principe général a besoin d’être inculturé, s’il veut être observé et appliqué. Le Synode de 1985, qui célébrait le vingtième anniversaire de la conclusion du Concile Vatican II, a parlé de l’inculturation comme de l’« intime transformation des authentiques valeurs culturelles par leur intégration dans le christianisme, et l’enracinement du christianisme dans les diverses cultures humaines ». L’inculturation n’affaiblit par les vraies valeurs mais démontre leur véritable force et leur authenticité, puisqu’elles s’adaptent sans se transformer, mais au contraire elles transforment pacifiquement et graduellement les différentes cultures.

Nous avons vu, également à travers la richesse de notre diversité, que le défi que nous avons devant nous est toujours le même : annoncer l’Évangile à l’homme d’aujourd’hui, en défendant la famille de toutes les attaques idéologiques et individualistes.

Et sans jamais tomber dans le danger du relativisme ou du fait de diaboliser les autres, nous avons cherché à embrasser pleinement et courageusement la bonté et la miséricorde de Dieu qui surpasse nos calculs humains et qui ne désire rien d’autre que « tous les hommes soient sauvés » (1 Tm 2, 4), pour insérer et pour vivre ce Synode dans le contexte de l’Année extraordinaire de la Miséricorde que l’Église est appelée à vivre.

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Le message, c’est le Synode !

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Photo: Courtoisie Catholic News Service

En 1964 le Professeur Marshall McLuhan affirmait « Le medium, c’est le message ». Par cette formule qui allait le rendre célèbre, ce professeur de l’université de Toronto signifiait que les instruments de communication ont une grande influence sur la transmission d’un message. Pour McLuhan, les moyens de communications sont loin d’être neutres. Par exemple, l’attention que nous avons envers un livre imprimé est beaucoup plus grande que celle que l’on accorde à un blogue. Dans le même sens, un reportage à la télévision nous semble, de prime abord, beaucoup plus crédible que celui d’une vidéo sur YouTube. Ainsi, cette influence qu’a le média sur le contenu du message transmis est une donnée importante que nous ne pouvons négliger.

Comment donc communiquer l’enseignement de l’Église dans notre monde ? Si, comme le dit McLuhan « le medium, c’est le message », quel niveau de langage sera le plus approprié pour évangéliser aujourd’hui ? La réponse du Pape est la suivante : la « parresia » ou « la liberté et le courage (parresia) du Saint Esprit » et l’institution qui lui correspond le mieux : le Synode des évêques. Dès le premier synode sur la famille, le Pape a demandé aux évêques de s’exprimer librement, sans peur ni gêne d’où les nombreux contrechocs qui ont nourri certains médias aguerris à faire une polémique du moindre désaccord. Toutefois, cette communication franche et ouverte possède plusieurs avantages pour la Nouvelle Évangélisation. J’en veux pour preuve l’attention sans précédent que tous manifestent pour ce procédé. La réalité et l’importance de la famille pour les personnes et la société ne sont-ils pas au centre de nombreux échanges actuellement et qui n’aurait jamais eu lieu sans cette nouvelle approche communicationnelle ? Ainsi, une Église «toute synodale » serait donc plus efficace pour transmettre son message.

La synodalité, ou mode de fonctionnement avec parresia, présente un visage plus humain de l’Église. Ce qui la rapproche grandement des gens, qui lui font ainsi davantage confiance. Beaucoup de personnes sentent que l’Église et les hommes et les femmes qui la composent sont des êtres humains normaux qui partagent les mêmes expériences. Par exemple, dans le cas de la famille, l’expérience du Cardinal Shönborn face au divorce de ses parents a touché beaucoup de gens qui voient ainsi que l’Église comprend leur réalité. Les enseignements ne sont donc plus vus comme des normes imposées de l’extérieur mais comme des propositions, bien que l’assentiment soit toujours nécessaire. Comme le disait le bienheureux Paul VI : « L’homme contemporain écoute plus volontiers les témoins que les maîtres ou s’il écoute les maîtres, c’est parce qu’ils sont des témoins » (no 41).

Loin de voir le Synode comme « un parlement » nous voyons que ce dialogue franc prendra de plus en plus de place dans le mode de fonctionnement de l’Église. Comme le dit le Pape, nous ne sommes « qu’à la moitié du chemin ». Cette plus grande attention à la dimension synodale de l’Église semble déjà susciter l’attention de nombreux acteurs qui sentent l’Église plus ouverte au dialogue. En ce sens, les enseignements et préoccupations de l’Église pourront trouver davantage d’interlocuteurs. Ce qui aidera grandement à la transmission du message de l’Église. [Read more…]

Mot de bienvenue du Cardinal André Vingt-Trois pour l’ouverture des travaux du Synode 2015

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Très Saint-Père,

J’ai l’honneur et la joie de vous adresser les salutations respectueuses et cordiales de tous les

participants à cette session ordinaire du synode des évêques. Ce sont les évêques, les auditeurs, les experts et tous les participants qui vous expriment par ma voix leur intention et leur résolution de travailler sous votre conduite pour que l’Église soit toujours plus fidèle à sa mission pastorale.

Votre décision de tenir deux sessions du synode des évêques sur la mission de la famille dans le monde contemporain a porté ses fruits. Nous en avons été les témoins. Nos églises particulières se sont efforcées d’apporter leur contribution au travail commun en répondant au questionnaire qui devait alimenter l’Instrumentum Laboris. Notre synode est porté par l’Église.Le Motu Proprio Mitis Iudex Dominus Iesus par lequel vous avez réformé les procédures concernant les procès canoniques sur la validité sacramentelle des mariages donne une indication précieuse sur l’esprit dans lequel nous abordons cette phase du travail.

Sans mettre en doute la tradition sacramentelle de notre Église ni sa doctrine sur l’indissolubilité du mariage, vous nous invitez à partager nos expériences pastorales et à mieux mettre en œuvre les chemins de la miséricorde par lesquels le Seigneur invite tous ceux qui le souhaitent et qui le peuvent à entrer dans une démarche de conversion en vue du pardon.

L’année de la Miséricorde que vous avez promulguée pour toute l’Église est déjà sans aucun doute un signe d’espérance pour ceux qui sont accablés par la vie et qui aspirent à connaître une véritable libération. Déjà nos diocèses se réjouissent d’être renouvelés dans leur mission d’annoncer la Bonne Nouvelle : Jésus est venu appeler et sauver les pécheurs et il a été jusqu’à l’extrême de l’amour pour que les chemins de la grâce soient ouverts à tous ceux qui se tournent vers lui et qui s’avancent humblement vers les conditions d’une vie nouvelle.

Pour chacun d’entre nous, ces trois semaines de travail intense seront une expérience d’Église importante: chercher avec conviction et humilité à faire grandir la communion. Malgré nos différences, nous ne voulons pas vivre ce temps comme une épreuve de force dont les micros et les caméras seraient les arbitres. Nous voulons le vivre comme un temps de conversion commune dans la force de la communion dont vous êtes, Très Saint Père, le gardien et le serviteur.

Par l’intercession de la Sainte Famille, nous prions l’Esprit du Seigneur de nous éclairer et de nous donner la force de désirer ce qui plaît à Dieu.

[01633-FR.01] [Texte original: Français]

Homélie du pape François lors de la messe pour l’ouverture du Synode sur la famille 2015

Pope Francis waves as he arrives to lead his weekly audience in St. Peter's Square at the Vatican Sept. 30. (CNS photo/Max Rossi, Reuters) See POPE-AUDIENCE-CUBA-US Sept. 30, 2015.

Vous trouvez ci-dessous l’homélie du pape François lors de la messe pour l’ouverture de la XIVe Assemblée générale ordinaire du Synode des évêques à la basilique vaticane (dimanche 4 octobre 2015):

« Si nous nous aimons les uns les autres, Dieu demeure en nous, et, en nous, son amour atteint la perfection » (1Jn 4, 12).

Les lectures bibliques de ce dimanche semblent choisies spécialement pour l’événement de grâce que l’Eglise est en train de vivre, c’est-à-dire l’Assemblée Ordinaire du Synode des Évêques sur le thème de la famille, qui est inauguré par cette célébration eucharistique.

Elles sont centrées sur trois thèmes : le drame de la solitude, l’amour entre l’homme et la femme, et la famille.

La solitude

Adam, comme nous l’avons lu dans la première lecture, vivait dans le Paradis, il donnait leur nom aux autres créatures, exerçant une maîtrise qui montrait son indiscutable et incomparable supériorité ; mais, malgré cela, il se sentait seul parce qu’ « il ne trouva aucune aide qui lui corresponde » (Gn 2, 20), et il faisait l’expérience de la solitude.

La solitude, le drame qui, encore aujourd’hui, afflige tant d’hommes et de femmes. Je pense aux personnes âgées, abandonnées même de leurs êtres chers et de leurs propres enfants ; aux veufs et aux veuves ; à tant d’hommes et de femmes laissés par leur épouse ou par leur mari ; à tant de personnes qui, de fait, se sentent seules, incomprises, pas écoutées ; aux migrants et aux réfugiés qui fuient les guerres et les persécutions ; et à tant de jeunes victimes de la culture de la consommation, de l’utilise et jette, et de la culture du déchet.

Aujourd’hui se vit le paradoxe d’un monde globalisé, où nous voyons beaucoup d’habitations luxueuses et de gratte ciels, mais de moins en moins de chaleur de la maison et de la famille ; beaucoup de projets ambitieux, mais peu de temps pour vivre ce qui a été réalisé ; beaucoup de moyens sophistiqués de divertissement, mais de plus en plus un vide profond dans le cœur ; beaucoup de plaisirs, mais peu d’amour ; beaucoup de liberté mais peu d’autonomie… Les personnes qui se sentent seules sont de plus en plus nombreuses, mais aussi celles qui se renferment dans l’égoïsme, dans la mélancolie, dans la violence destructrice et dans l’esclavage du plaisir et du dieu argent.

Nous vivons aujourd’hui, dans un certain sens, la même expérience qu’Adam : beaucoup de puissance, accompagnée de beaucoup de solitude et de vulnérabilité ; et la famille en est l’icône. De moins en moins de sérieux pour faire progresser un rapport d’amour solide et fécond : dans la santé comme dans la maladie, dans la richesse comme dans la pauvreté, dans la bonne comme dans la mauvaise fortune. L’amour durable, fidèle, consciencieux, stable, fécond est de plus en plus moqué et regardé comme s’il était une affaire de l’antiquité. Il semblerait que les sociétés les plus avancées soient justement celles qui ont le taux le plus bas de natalité et le taux le plus élevé d’avortements, de divorces, de suicides et de pollution environnementale et sociale.

L’amour entre l’homme et la femme

Nous lisons encore dans la première lecture que le cœur de Dieu est resté comme douloureux devant la vision de la solitude d’Adam, et il a dit : « il n’est pas bon que l’homme soit seul. Je vais lui faire une aide qui lui correspondra » (Gn 2, 18).  Ces paroles montrent que rien ne rend heureux le cœur de l’homme qu’un cœur qui lui ressemble, qui lui corresponde, qui l’aime et qui le tire de la solitude et du sentiment d’être seul. Elles montrent aussi que Dieu n’a pas créé l’être humain pour vivre dans la tristesse ni pour rester seul, mais pour le bonheur, pour partager son chemin avec une autre personne qui lui soit complémentaire, pour vivre l’étonnante expérience de l’amour, c’est-à-dire aimer et être aimé, et pour voir la fécondité de son amour dans les enfants, comme le dit le Psaume de ce jour (cf. Ps 128).

Voilà le rêve de Dieu pour sa créature bien-aimée : la voir se réaliser dans l’union d’amour entre l’homme et la femme ; heureuse sur le chemin commun, féconde dans le don réciproque. C’est le même dessein que Jésus, dans l’Évangile de ce jour, résume par ces paroles : « Au commencement de la création, Dieu les fit homme et femme. A cause de cela, l’homme quittera son père et sa mère, il s’attachera à sa femme, et tous deux deviendront une seule chair. Ainsi, ils ne sont plus deux mais une seule chair » (Mc 10, 6-8) ; (cf. Gn 1, 27 ; 2, 24).

Jésus, face à la demande rhétorique qui lui est faite – probablement comme un piège, pour le faire devenir tout à coup antipathique à la foule qui le suivait et qui pratiquait le divorce comme réalité enracinée et intangible –, répond de manière franche et inattendue : il fait tout remonter à l’origine de la création, pour nous apprendre que Dieu bénit l’amour humain, que c’est lui qui unit les cœurs de deux personnes qui s’aiment et qui les unit dans l’unité et l’indissolubilité. Cela signifie que le but de la vie conjugale n’est pas seulement de vivre ensemble pour toujours, mais de s’aimer pour toujours ! Jésus rétablit ainsi l’ordre qui était à l’origine et qui est origine.

La famille

« Donc, ce que Dieu a uni, que l’homme ne le sépare pas » (Mc 10,9). C’est une exhortation aux croyants à dépasser toute forme d’individualisme et de légalisme, qui cache un égoïsme mesquin et une peur de rallier la signification authentique du couple et de la sexualité humaine selon le projet de Dieu.

En effet, c’est seulement à la lumière de la folie de la gratuité de l’amour pascal de Jésus que la folie de la gratuité d’un amour conjugal unique et jusqu’à la mort apparaîtra compréhensible.

Pour Dieu, le mariage n’est pas une utopie propre à l’adolescence, mais un rêve sans lequel sa créature sera destinée à la solitude ! En effet, la peur d’adhérer ce projet paralyse le cœur humain.

Paradoxalement aussi, l’homme d’aujourd’hui – qui ridiculise souvent ce dessein – reste attiré et fasciné par tout amour authentique, par tout amour solide, par tout amour fécond, par tout amour fidèle et perpétuel. Nous le voyons suivre les amours temporaires, mais il rêve de l’amour authentique ; il court derrière les plaisirs de la chair, mais il désire la donation totale.

En effet, « maintenant que nous avons pleinement savouré les promesses de la liberté sans limite, nous commençons à comprendre de nouveau l’expression ‘’ tristesse de ce monde’’. Les plaisirs interdits ont perdu leur attrait dès qu’ils ont cessé d’être interdits. Même s’ils sont poussés à l’extrême et s’ils sont renouvelés indéfiniment, ils restent insipides parce qu’ils sont des choses finies, et nous, au contraire, nous avons soif d’infini » (Joseph Ratzinger, Auf Christus schauen. Einübung in Glaube, Hoffnung, Liebe, Freiburg 1989, p. 73).

Dans ce contexte social et matrimonial très difficile, l’Église est appelée à vivre sa mission dans la fidélité, dans la vérité et dans la charité.

Vivre sa mission dans la fidélité à son Maître comme une voix qui crie dans le désert, pour défendre l’amour fidèle, et encourager les très nombreuses familles qui vivent leur mariage comme un espace où se manifeste l’amour divin ; pour défendre la sacralité de la vie, de toute vie ; pour défendre l’unité et l’indissolubilité du lien conjugal comme signe de la grâce de Dieu et de la capacité de l’homme d’aimer sérieusement.

Vivre sa mission dans la vérité, qui ne change pas selon les modes passagères et les opinions dominantes. La vérité qui protège l’homme et l’humanité des tentations de l’autoréférentialité et de la transformation de l’amour fécond en égoïsme stérile, l’union fidèle en liens passagers. « Dépourvu de vérité, l’amour bascule dans le sentimentalisme. L’amour devient une coque vide susceptible d’être arbitrairement rempli. C’est le risque mortifère qu’affronte l’amour dans une culture sans vérité » (Benoît XVI, Enc. Caritas in veritate, n. 3).

Vivre sa mission dans la charité, qui ne pointe pas du doigt pour juger les autres, mais – fidèle à sa nature de mère – se sent le devoir de chercher et de soigner les couples blessés avec l’huile de l’accueil et de la miséricorde ; d’être ‘’hôpital de campagne’’ aux portes ouvertes pour accueillir quiconque frappe pour demander aide et soutien ; de sortir de son propre enclos vers les autres avec un amour vrai, pour marcher avec l’humanité blessée, pour l’inclure et la conduire à la source du salut.

Une Église qui enseigne et défend les valeurs fondamentales, sans oublier que « Le sabbat a été fait pour l’homme, et non pas l’homme pour le sabbat » (Mc 2, 27) ; et que Jésus a dit aussi : « Ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin du médecin, mais les malades. Je ne suis pas venu appeler les justes mais les pécheurs » (Mc 2, 17). Une Église qui éduque à l’amour authentique, capable de tirer de la solitude, sans oublier sa mission de bon samaritain de l’humanité blessée.

Je me souviens de Saint Jean Paul II quand il disait : « L’erreur et le mal doivent toujours être condamnés et combattus ; mais l’homme qui tombe ou se trompe doit être compris et aimé […] Nous devons aimer notre temps et aider l’homme de notre temps » (Discours à l’Action Catholique Italienne, 30 décembre 1978 : Insegnamenti I [1978], 450). Et l’Église doit le chercher, l’accueillir et l’accompagner, parce qu’une Église aux portes closes  se trahit elle-même et trahit sa mission, et au lieu d’être un pont devient une barrière : « Celui qui sanctifie, et ceux qui sont sanctifiés, doivent tous avoir la même origine ; pour cette raison, Jésus n’a pas honte de les appeler ses frères » (He 2, 11).

Dans cet esprit demandons au Seigneur de nous accompagner dans le Synode et de guider son Église, par l’intercession de la Bienheureuse Vierge Marie et de Saint Joseph, son très chaste époux.

L’expérience personnelle d’un Père synodal

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Corriveau John 1L’expérience personnelle d’un père du Synode

Par Révérend John Corriveau, OFM Cap.
Évêque de Nelson, Colombie-Britannique

Entre 1994 et 2012, j’ai eu le privilège de participer à cinq Assemblées du Synode des évêques. Ces cinq Synodes ont représenté une grande variété de défis pour l’Église : Le rôle de la vie consacrée dans l’Église et le monde (1994), l’Assemblée spéciale pour l’Amérique (1997), l’Assemblée spéciale pour l’Océanie (1998), L’Eucharistie, Source et Sommet de la vie et de la mission de l’Église (2005) et le Synode sur la Nouvelle Évangélisation et la transmission de la foi (2012).

Le Synode de 1994 a été inauguré par le pape Paul VI pour donner une expression concrète à la nature collégiale de la gouvernance dans l’Église. Ce fut certainement mon expérience. Pour quatre de ces cinq synodes, je n’étais pas encore évêque. Ce qui signifie que j’étais perché tout en haut de la Salle du Synode d’où je pouvais voir tous les délégués réunis en provenance des quatre coins du monde, le vrai visage de notre humanité. Ce fut une grâce pour moi que de faire l’expérience de la diversité et de l’unité palpable comme il est dit dans les Actes des apôtres : « tous nous les entendons parler dans nos langues des merveilles de Dieu. » (Acts 2,11). Le pape Paul VI voyait aussi dans le Synode l’instrument privilégié pour continuer l’esprit réformateur du Concile Vatican II. En effet, Vatican II avait mis en branle la plus profonde reconsidération de l’identité de l’Église depuis le Concile de Trente : « l’Église universelle apparaît comme un « peuple qui tire son unité de l’unité du Père et du Fils et de l’Esprit Saint » (LG, 4). La théologie de communion est le fil conducteur de tous les Synodes. Pour moi, le Synode manifeste son fondement trinitaire par la communion de l’Église en soulignant le fait que la communion n’est pas simplement une conséquence sociologique de la Foi mais un élément constitutif de la Foi elle-même. Être Église signifie être immergé dans cette dynamique qu’est la relation toujours créative de l’amour du Père, du Fils et de l’Esprit Saint. [Read more…]

Un message au Peuple de Dieu

SynodFathers

Les Pères synodaux un bref message pastoral, à la cloture du Synode extraordinare des évêques sur la famille, le dimanche 19 octobre 2014.

Nous, Pères synodaux réunis à Rome autour du Pape François pour l’Assemblée générale extraordinaire du Synode des évêques, nous nous adressons à toutes les familles des divers continents, et en particulier à celles qui suivent le Christ, Chemin, Vérité et Vie. Nous manifestons notre admiration et notre gratitude pour le témoignage quotidien que vous nous offrez, ainsi qu’au monde, par votre fidélité, votre foi, votre espérance et votre amour.

Nous aussi, pasteurs de l’Église, nous sommes nés et avons grandi dans des familles aux histoires et vicissitudes les plus diverses. En tant que prêtres et évêques, nous avons rencontré et avons vécu aux côtés de familles qui nous ont raconté en parole et révélé en actes toute une série de merveilles mais aussi de difficultés.

La préparation même de cette assemblée synodale, à partir des réponses au questionnaire envoyé aux Églises du monde entier, nous a permis de nous mettre à l’écoute de nombreuses expériences familiales. Notre dialogue durant les jours du Synode nous a ainsi enrichis mutuellement, nous aidant à regarder la réalité vivante et complexe dans laquelle évoluent les familles.

À vous, nous proposons cette parole du Christ : « Voici que je me tiens à la porte, et je frappe. Si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui ; je prendrai mon repas avec lui, et lui avec moi. » (Ap 3, 20). Comme il le faisait durant ses pérégrinations sur les routes de la Terre Sainte, entrant dans les maisons des villages, Jésus continue à passer aussi aujourd’hui par les rues de nos villes. Dans vos foyers, vous faites l’expérience d’ombres et de lumières, de défis exaltants, mais parfois aussi d’épreuves dramatiques. L’obscurité se fait encore plus épaisse, jusqu’à devenir ténèbres, lorsque le mal et le péché s’insinuent au cœur même de la famille.

Il y a, avant tout, le grand défi de la fidélité dans l’amour conjugal. L’affaiblissement de la foi et des valeurs, l’individualisme, l’appauvrissement des relations, le stress d’une frénésie qui empêche la réflexion marquent aussi la vie familiale. On assiste alors à de nombreuses crises matrimoniales, affrontées souvent de façon expéditive, sans avoir le courage de la patience, de la remise en question, du pardon mutuel, de la réconciliation et même du sacrifice. Ces échecs sont ainsi à l’origine de nouvelles relations, de nouveaux couples, de nouvelles unions et de nouveaux mariages, qui créent des situations familiales complexes et problématiques quant au choix de la vie chrétienne.

Parmi ces défis, nous souhaitons ensuite évoquer les épreuves de l’existence même. Pensons à la souffrance qui peut apparaître lorsque qu’un enfant est handicapé, lors d’une grave maladie, lors de la dégénérescence neurologique due à la vieillesse, lors de la mort d’une personne chère. La fidélité généreuse de tant de familles qui vivent ces épreuves avec courage, foi et amour est admirable, lorsqu’elles les considèrent non comme quelque chose qui leur a été arrachée ou imposée, mais comme quelque chose qui leur a été donné et qu’ils offrent à leur tour, voyant en toutes ces personnes éprouvées le Christ souffrant lui-même.

Nous pensons aux difficultés économiques causées par des systèmes pervers, par le « fétichisme de l’argent » et par « la dictature de l’économie sans visage et sans un but véritablement humain » (Evangelii gaudium, 55) qui humilie la dignité de la personne. Nous pensons aux pères et aux mères sans emploi, impuissants face aux besoins les plus élémentaires de leur famille ; et à ces jeunes qui se trouvent devant des journées désœuvrées et sans espérance, proies potentielles des dérives de la drogue et de la criminalité.

Nous pensons enfin à la foule des familles pauvres, à celles qui s’agrippent à une barque pour atteindre des moyens de survie, aux familles de réfugiés qui émigrent sans espoir à travers des déserts, à celles qui sont persécutées simplement à cause de leur foi et de leurs valeurs spirituelles et humaines, à celles qui sont frappées par la brutalité des guerres et des oppressions. Nous pensons aussi aux femmes qui subissent la violence et sont soumises à l’exploitation, à la traite des personnes, aux enfants et aux jeunes victimes d’abus même de la part de ceux qui devraient en prendre soin et les faire grandir en confiance, aux membres de tant de familles humiliées et en difficulté. «La culture du bien-être nous anesthésie et […] toutes ces vies brisées par manque de possibilités nous semblent un simple spectacle qui ne nous trouble en aucune façon. (Evangelii gaudium, 54). Nous faisons appel aux gouvernements et aux organisations internationales pour promouvoir les droits de la famille en vue du bien commun.

Le Christ a voulu que son Église soit une maison avec la porte toujours ouverte et accueillante, sans exclure personne. Nous sommes ainsi reconnaissants envers les pasteurs, les fidèles et les communautés prêts à accompagner et à porter les déchirures internes et sociales des couples et des familles.

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Cependant, il y a également la lumière qui brille le soir derrière les fenêtres dans les maisons des villes, dans les modestes résidences des périphéries ou dans les villages et même dans les baraquements : celle-ci brille et réchauffe les corps et les âmes. Cette lumière, dans les vicissitudes de la vie nuptiale des conjoints, s’allume grâce à une rencontre : il s’agit d’un don, d’une grâce qui s’exprime -comme le dit la Genèse (2,18)- quand deux visages se retrouvent chacun l’un « en face » de l’autre, comme une «aide qui lui corresponde », c’est-à-dire à la fois semblable et complémentaire. L’amour de l’homme et de la femme nous enseigne que chacun des deux a besoin de l’autre pour être soi-même, chacun demeurant pourtant différent de l’autre dans son identité qui s’ouvre et se révèle dans le don réciproque. C’est ce qu’exprime de façon suggestive la femme du Cantique des Cantiques : « Mon bien-aimé est à moi, et moi, je suis à lui […] Je suis à mon bien-aimé, mon bien-aimé est à moi » (Ct 2, 16 ; 6,3).

Pour que cette rencontre soit authentique, le cheminement commence avec le temps des fiançailles, temps de l’attente et de la préparation. Il s’actualise pleinement dans le sacrement du mariage où Dieu appose son sceau, sa présence et sa grâce. Ce chemin passe aussi par la sexualité, la tendresse, la beauté, qui perdurent même au-delà de la vigueur et de la fraîcheur de la jeunesse. De par sa nature, l’amour tend à rimer avec toujours, jusqu’à donner sa vie pour la personne qu’on aime (cf. Jn 15,13). À cette lumière, l’amour conjugal, unique et indissoluble, persiste malgré les nombreuses difficultés des limites humaines ; c’est l’un des plus beaux miracles, bien qu’il soit aussi le plus commun.

Cet amour se déploie au travers de la fécondité et de la générativité qui ne sont pas seulement procréation mais aussi don de la vie divine dans le baptême, éducation et catéchèse des enfants. Il s’agit aussi d’une capacité à offrir la vie, de l’affection et des valeurs. Cette expérience est possible même pour ceux qui n’ont pu avoir d’enfant. Les familles qui vivent cette aventure lumineuse deviennent pour tous un témoignage, en particulier pour les jeunes.

Durant ce cheminement, qui s’avère parfois un sentier ardu avec ses difficultés et ses chutes, on retrouve toujours la présence et l’accompagnement de Dieu. La famille en fait l’expérience dans l’affection mutuelle et le dialogue entre époux et épouse, entre parents et enfants, entres frères et sœurs. Elle le vit aussi en se mettant ensemble à l’écoute de la Parole de Dieu et en partageant la prière commune : petite oasis spirituelle à mettre en place à un moment chaque jour. Il y a aussi l’engagement quotidien de l’éducation à la foi, à la beauté de la vie évangélique et à la sainteté. Ce devoir est souvent partagé et exercé avec beaucoup d’affection et de dévouement aussi par les grands-parents. Ainsi la famille se présente comme une authentique Église domestique, qui s’ouvre sur cette famille de familles qu’est la communauté ecclésiale. Les époux chrétiens sont alors appelés à devenir des maîtres dans la foi et dans l’amour également auprès des jeunes couples.

Il y a ensuite une autre expression de la communion fraternelle, celle de la charité, du don, de la proximité auprès des laissés pour compte, des marginalisés, des pauvres, des personnes seules, des malades, des étrangers, des familles en crise, gardant en mémoire la parole du Seigneur : « Il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir » (Ac 20,35). Il s’agit d’un don de biens partagés, de présence, d’amour et de miséricorde et aussi d’un témoignage de vérité, de lumière, de sens donné à la vie.

Le sommet qui recueille et récapitule tous ces liens de la communion avec Dieu et le prochain est l’Eucharistie dominicale, lorsque, avec toute l’Église, la famille prend place à la table du Seigneur. Lui-même se donne à nous tous, pèlerins de l’histoire en route vers la rencontre ultime lorsque le «Christ sera tout en tous» (Col 3,11). Pour cela, dans la première étape de notre chemin synodal, nous avons réfléchi à l’accompagnement pastoral et à la question de l’accès aux sacrements des personnes divorcées-remariées.

Nous, pères synodaux, vous demandons de cheminer avec nous vers le prochain synode.

Que demeure sur vous la présence de la famille de Jésus, Marie et Joseph réunis dans leur modeste maison. Ensemble, tournés vers la Famille de Nazareth, faisons monter vers notre Père à tous notre invocation pour les familles de la terre.

Père, donne à toutes les familles la présence d’époux courageux et remplis de sagesse, qui soient source d’une famille libre et unie.

Père, donne aux parents d’avoir une maison où vivre dans la paix avec leur famille.

Père, donne aux enfants d’être signes de confiance et d’espérance, et aux jeunes le courage de l’engagement stable et fidèle.

Père, donne à tous de pouvoir gagner leur pain de leurs propres mains, de jouir de la sérénité d’esprit et de garder allumé le flambeau de la foi même dans les moments d’obscurité.

Père, donne-nous de voir fleurir une Église toujours plus fidèle et crédible, une cité juste et humaine, un monde qui aime la vérité, la justice et la miséricorde.

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