Top 10 de l’actualité catholique 2018 (1ère partie)

CNS photo/Paul Haring

C’est maintenant une tradition, depuis trois ans, je fais mon palmarès personnel des évènements marquants de l’actualité de l’Église durant l’année. Quel bilan tirer des faits saillants de cette année qui se termine ? Une année en dents de scie, un peu comme la Bourse, l’Église semble avoir eu des très hauts et des très bas. De quoi donner le vertige! Une petite précision avant de commencer, les événements suivants ne sont pas présenter par ordre d’importance mais chronologique (autant que possible).

  1. Victoire des évêques contre le gouvernement fédéral

C’est un euphémisme de dire que l’année 2018 a commencé du mauvais pied en ce qui a trait aux relations entre l’Église et l’État fédéral. On s’en rappelle, Ottawa avait décidé arbitrairement de « modifier les règles d’admissibilité aux subventions pour les emplois d’été au gouvernement fédéral ». La consternation généralisée autant du côté des leaders religieux que des défenseurs des libertés civiles fondamentales ne semblait pas ébranler le gouvernement, convaincu de sa supériorité morale et de la légitimé de sa politique. Devant une telle arrogance, les évêques de partout au Canada se sont levés pour dénoncer la mesure unilatérale.

Notre propre télévision catholique nationale S+L a dû avoir recours à une « demande d’urgence » pour faire face à la crise. Un grand merci à tous les généreux donateurs qui nous ont soutenu durant cette période difficile. En effet, suite à cette mesure, le gouvernement « a refusé douze fois plus de demandes » que les années précédentes. Cette augmentation de 1200 % est révélateur de l’énorme travail des organisations religieuses dans l’emploi des jeunes durant la période estivale!

Finalement, il semble que cette atteinte évidente aux droits fondamentaux des Canadiens fut l’objet d’un examen de conscience de la part du gouvernement Trudeau, qui semble finalement reconnaître qu’il est allé trop loin.  Ce « recul » du Fédéral, qui n’exigera plus aux organismes d’être officiellement pro-avortement, peut donc être considéré comme une victoire pour les évêques du Canada. Reste encore à savoir si les organismes qui furent injustement exclus pourront récupérer rétroactivement les sommes perdues.

  1. Publication de l’exhortation « Gaudete et exultate »

Le 9 avril était publié l’exhortation apostolique « Gaudete et exultate » sur « L’appel à la sainteté dans le monde actuel ». D’une trentaine de pages, ce texte du pape François a suscité un très grand intérêt dans les communautés chrétiennes partout au Canada. Ici et là, des groupes de réflexion et d’approfondissement de la foi ont vu le jour afin de mieux comprendre cet appel universel à la sainteté tel que prononcé lors du Concile Vatican II. J’invite évidemment tous ceux qui ne l’ont pas fait à lire ce document. J’attire cependant votre attention sur les passages concernant « les petits détails de la vie quotidienne » (no 144-145). Il est intéressant de constater comment, pour l’évêque de Rome, « par un don de l’amour du Seigneur, au milieu de ces petits détails, s’offrent à nous des expériences consolantes de Dieu » (no144) Cherchons donc, dans notre vie de tous les jours, cette touche divine qui se présente à nous sous cette forme trop « habituelle » pour que nous y portions attention et cherchons à faire de même par un travail bien fait jusque dans les petits détails.

  1. 15 ans de télévision catholique au Canada

Il ne fait aucun doute que se déroule devant nos yeux une révolution médiatique et numérique qui risque d’avoir autant, sinon plus, de conséquences sur l’histoire de l’humanité que l’invention de l’imprimerie. En effet, sur une décennie, nous avons assisté à une véritable révolution des communications. L’Église, qui accompagne l’humanité sur son chemin de l’histoire des hommes doit donc être présente sur ce nouveau continent numérique. Comment ne pas voir dans l’intuition de Télévision Sel et Lumière, il y a 15 ans, l’héritage pastoral le plus important de saint Jean-Paul II pour le Canada. J’ai déjà fait une énumération des raisons d’aimer et de soutenir votre télévision catholique canadienne mais il me semble que, vu les récents développements mondiaux et l’omniprésence des écrans dans nos vies, Télévision Sel et Lumière est vraiment une lueur d’espérance pour l’ensemble de notre monde médiatique. D’où l’aspect incontournable d’un tel anniversaire dans la vie de l’Église et cette présence dans ce présent palmarès…. Longue vie à Sel et Lumière!

  1. 50 ans pour l’encyclique Humanae vitae et canonisation de Paul VI

Le 25 juillet dernier, était célébré le 50e anniversaire de la publication de la célèbre encyclique de saint Paul VI « Humanae vitae » sur « le mariage et la régulation des naissances ». Quelques mois plus tard, le 14 octobre, celui qui en avait tenu la plume était canonisé par le pape François en la place Saint-Pierre de Rome. Cela fait déjà quelques années, et les plus jeunes n’étaient pas encore nés, mais les années de pontificat de Paul VI ne furent pas une partie de plaisir. En effet, l’ancien patriarche de Venise devenu successeur de Pierre devait prendre le relais et poursuivre le Concile Vatican II. Les documents écrits n’étaient pas encore signés que différents groupes étaient déjà engagés dans des querelles sur l’interprétation du texte. Ajoutez à cela les contestations universitaires de mai 68 en Europe, la désaffection massive du clergé, des religieux et religieuses, et des bouleversements politiques, particulièrement violents en Italie et vous aurez une bonne idée des difficultés que le saint Pape a dû affronter. Devant cette canonisation et ce 50e anniversaire, nous ne pouvons qu’être admiratifs devant la stature extraordinaire de cet homme d’Église et de son profond zèle apostolique en tant qu’écrivain d’ « Evangelii Nuntiandi ». Comment ne pas voir le traitement similaire subi cette année par le pape François de part et d’autre.  À l’image de ce Pape nouvellement canonisé, gardons l’espérance et la joie de l’évangélisation qui, avec la Grâce de Dieu, nous rendent capables de surmonter toutes les épreuves.

  1. Crise mondiale des abus sexuels

Parlant d’épreuve, l’une des périodes les plus troublantes de cette année 2018 fut sans aucun doute l’explosion de la crise des abus sexuels aux États-Unis et dans le monde. Suivant les révélations sur l’ancien cardinal américain McCarrick qui ont suivi la publication d’un rapport du Grand Jury de Pennsylvanie dans lequel se trouvent des récits plus accablants les uns que les autres. Ont suivi une consternation généralisée et des débats au sein de l’Église sur la manière la plus appropriée de faire face à la situation. L’extrême gravité des gestes commis et la complexité de la problématique montrent que nous devrons traiter cette question en profondeur et, donc, que nous en entendrons encore parler dans les années à venir. Toutefois, à ce chapitre, la Conférence des évêques catholiques du Canada a publié cette année un document important sur le sujet. Intitulé « Protection des personnes mineures contre les abus sexuels » , ce texte historique ne se complait cependant pas dans la repentance inactive mais tente plutôt d’offrir des directives claires pour que les réformes attendues se mettent en place tant dans les consciences du Peuple de Dieu que dans les structures institutionnelles. Riche d’une prise de conscience et de propositions d’applications concrètes dans les diocèses, nul doute que ce document aura une influence considérable sur le traitement des abus sexuels dans l’Église.

Message du pape François pour la béatification des martyrs d’Algérie

Vous trouverez ci-dessous le Message du pape François pour la béatification des martyrs Mgr Pierre Claverie, O.P., Évêque d’Oran et de ses 18 compagnons (religieux et religieuse) en Algérie:

Chers frères et sœurs,
ce samedi 8 décembre, l’Église en Algérie célèbre dans la joie la béatification de dix-neuf religieux et religieuses martyrs. Je m’associe à votre action de grâce pour ces vies totalement données par amour de Dieu, du pays et de tous ses habitants dont vous partagez l’humble quotidien dans un esprit de fraternité, d’amitié, de service. Recevez ici mes encouragements fraternels pour que cette célébration aide à panser les blessures du passé et crée une dynamique nouvelle de la rencontre et du vivre ensemble à la suite de nos bienheureux.

Je suis très reconnaissant à Monsieur le Président de la République Algérienne Démocratique et Populaire, Monsieur Abdelaziz Bouteflika, et à ses collaborateurs, d’avoir facilité la célébration en terre algérienne de la béatification de Mgr Pierre Claverie et de ses dix-huit compagnons et compagnes, martyrs du plus grand amour. Je veux ainsi exprimer toute mon affection pour le peuple algérien qui a connu de grandes souffrances durant la crise de société dont il a été victime dans les dernières années du siècle passé.

En faisant mémoire de la mort en Algérie de ces dix-neuf victimes chrétiennes, les catholiques d’Algérie et du monde veulent célébrer la fidélité de ces martyrs au projet de Paix que Dieu inspire à tous les hommes. Ils veulent, en même temps, prendre dans leur prière tous les fils et filles de l‘Algérie qui ont été, comme eux, victimes de la même violence pour avoir vécu, avec fidélité et respect de l’autre, leurs devoirs de croyants et de citoyens sur cette terre bénie. C’est pour eux aussi que nous adressons notre prière et exprimons notre hommage reconnaissant.

L’Eglise catholique en Algérie se sait l’héritière, avec toute la nation algérienne, du grand message d’amour proposé par l’un des nombreux maîtres spirituels de votre terre, Saint Augustin d’Hippone. Elle désire servir ce même message, en ces temps où tous les peuples cherchent à faire progresser leur aspiration à « Vivre ensemble dans la paix ».

Par la béatification de nos dix-neuf frères et sœurs, l’Eglise veut témoigner de son désir de continuer d’œuvrer pour le dialogue, la concorde et l’amitié. Nous croyons que cet événement inédit dans votre pays dessinera un grand signe de fraternité dans le ciel algérien à destination du monde entier.

Nous sommes heureux que cette célébration puisse se vivre dans un sanctuaire dédié à la Vierge Marie qui est particulièrement présente dans nos deux traditions religieuses. Que le regard maternel de la Bienheureuse Vierge Marie, pleine de grâce, toute belle et toute pure, vous protège et vous garde.

Au Vatican, le 2 décembre 2018.

[01994-FR.01] [Texte original: Français] [B0915-XX.01]

FRANÇOIS

Homélie de béatification des 19 martyrs d’Algérie

Vous trouverez ci-dessous le texte complet de l’homélie du Cardinal Giovanni Angelo Becciu, Préfet de la Congrégation de la Cause des Saints et envoyé spécial du Saint-Père, tel que prononcée lors de la célébration de la béatification des 19 martyrs d’Algérie au Sanctuaire Notre-Dame de Santa Cruz d’Oran:

Chers frères et sœurs !
Le passage de l’Apocalypse (Ap 7, 9-17), proclamé dans la deuxième lecture, nous présente

la « foule immense » (v.9) de ceux qui ont déjà atteint le but du salut éternel vers lequel nous sommes tous en route : le royaume de l’espérance, le royaume de ceux qui voient Dieu comme il est. L’Apôtre Jean dans sa vision riche en symboles les voit debout, devant le trône de Dieu, « vêtus de robes blanches », couleur de la lumière divine et de la gloire pascale. Mais la blancheur des robes est obtenue en les plongeant dans le sang rouge du Christ : ces élus ont fait l’expérience de la « grande épreuve ; ils ont lavé leurs robes, ils les ont blanchies par le sang de l’Agneau » (v.14). La splendeur est atteinte à travers le creuset de la souffrance, du don de soi, de la croix. En participant à la passion et à la mort de Jésus, le roi des martyrs, on atteint la lumière : per crucem ad lucem (par la croix jusqu’à la lumière) dit l’antique adage chrétien. De cette façon « ce qui reste à souffrir des épreuves du Christ dans ma propre chair, je l’accomplis pour son corps qui est l’Eglise » (Col 1, 24) souligne saint Paul.

Ces sauvés serrent dans leurs mains une palme, qui dans l’Ancien Testament est le signe du triomphe et de l’acclamation ; la souffrance, l’engagement rigoureux du témoignage, le renoncement à soi-même ne conduisent pas à la mort mais introduisent dans la gloire ; ils ne produisent pas l’échec mais la vie et le bonheur. La scène de l’Apocalypse montre ensuite le chœur puissant des saints qui chantent d’une voix forte : « Le salut appartient à notre Dieu qui siège sur le trône et à l’Agneau » (Ap 7, 10).

Le texte de l’Apocalypse nous a ainsi retracé le portrait du bienheureux et du saint : il appartient seulement à Dieu, il paraît en tout point de la terre et à toute époque de l’histoire, il vit avec fidélité même dans l’épreuve en parcourant le chemin de la croix, il atteint le but glorieux de l’éternité où il vivra pour toujours dans la joie, dans les chants, dans la gloire, dans cet infini tourbillon de lumière et de paix qu’est Dieu.

Dans la foule immense de ceux qui ont atteint un destin de gloire, l’Eglise désire appeler aujourd’hui par leur nom 19 nouveaux Bienheureux, tués entre 1994 et 1996 dans des lieux et des temps différents mais dans le même contexte agité. Sur cette terre, ici en Algérie, ils ont annoncé l’amour inconditionnel du Seigneur envers les pauvres et les exclus, en témoignant de leur appartenance au Christ et à l’Eglise jusqu’au martyre. Il est beau de penser maintenant qu’ils se trouvent parmi ceux qui sont passés à travers « la grande épreuve et qui ont lavé leurs robes et les ont blanchies par le sang de l’Agneau » (v. 14). Provenant de huit Instituts différents, nos frères et nos sœurs vivaient dans ce pays où ils accomplissaient diverses missions ; ils furent forts et persévérants dans leur service de l’Evangile et de la population, malgré le climat menaçant de violence et d’oppression qui les entourait. En lisant leurs biographies on demeure frappés d’apprendre comment tous, bien conscients du risque qu’ils courraient, décidèrent courageusement de rester sur place jusqu’au bout ; en eux s’est développée une forte spiritualité du martyre enracinée dans la perspective de se sacrifier eux-mêmes et d’offrir leur vie pour une société de réconciliation et de paix.

Les Bienheureux Pierre Claverie et ses 18 compagnons et compagnes martyrs portent sur eux le sceau salvifique de la Rédemption du Christ. En inscrivant leurs noms dans le livre des sauvés et des Bienheureux, l’Eglise désire reconnaître l’exemplarité de leur vie vertueuse, l’héroïsme de la mort de ces extraordinaires artisans de paix et de ces témoins de la fraternité, et en même temps, rendre le suprême hommage à Jésus, Rédempteur de l’homme. Dans le Christ, l’Eglise désire adorer le Dieu vivant : puisque la gloire de Dieu est l’homme qui reçoit de lui la plénitude de vie.

Cette plénitude de vie, la Vierge Marie – dont nous célébrons aujourd’hui l’Immaculée Conception – en a fait l’expérience de façon incomparable, quand l’Archange Gabriel lui a annoncé qu’elle avait trouvé grâce auprès de Dieu et que par l’action de l’Esprit Saint elle concevrait Jésus, le Fils du Très-Haut. « Réjouis-toi, comblée de grâce : le Seigneur est avec toi » (Lc 1, 28). Nous aussi aujourd’hui, en contemplant ces nouveaux Bienheureux, nous sommes invités à dépasser toute étroitesse d’esprit et à nous réjouir, parce qu’en eux nous voyons resplendir le mystère de l’éternelle sainteté de Dieu ; sainteté qui nous est proposée à travers une nouvelle actualisation de l’Evangile par nos martyrs qui en ont témoigné jusqu’à l’effusion du sang. Nous nous souvenons d’eux comme de fidèles disciples du Christ qui ont aimé la pauvreté, qui ont été sensibles à la souffrance et attentionnés aux personnes abandonnées, qui ont pris part à l’angoisse et à l’affliction de leurs frères. Ces témoins héroïques de l’amour de Jésus sont allés jusqu’à la racine même de l’expérience que l’homme fait de ses propres limites : l’humiliation, les larmes, la persécution.

Ils se sont conformés pleinement au sacrifice du Christ qui, selon le prophète Isaïe, s’est identifié avec le Serviteur souffrant du Seigneur ; lui qui, comme nous l’avons entendu dans la première lecture, s’offrant « en sacrifice de réparation, […] par suite de ses tourments, verra la lumière et justifiera les multitudes » (cf. Is 53, 10b.11). Cela arrive justement par la Croix, puisque dans la mort de Jésus, Dieu s’est définitivement fait proche de l’humanité et l’homme a acquis pleine conscience de sa dignité et de son élévation. Par leur mort en martyrs, les nouveaux Bienheureux eux aussi sont entrés dans la lumière de Dieu, et d’en-haut ils veillent sur les personnes qu’ils ont servies et aimées, priant sans cesse pour tous, même pour ceux qui les ont frappés. Ils continuent ainsi cette mission prophétique de la miséricorde et du pardon, dont ils ont été des témoins au cours de leur vie terrestre. Que leur exemple suscite en tous le désir de promouvoir ce que le Saint-Père François a défini comme « la culture de la miséricorde qui donne naissance à une véritable révolution » (cf. Lettre apostolique Misericordia et misera, n. 20). En accueillant la dynamique du pardon, admirablement vécue par les nouveaux Bienheureux, nous souhaitons que l’Algérie puisse dépasser définitivement cette terrible période de violence et de malheur et nous prions pour cela !

La mort tragique des Bienheureux Pierre Claverie et de ses 18 compagnons et compagnes martyrs est une semence tombée en terre dans des moments difficiles, fécondée par la souffrance qui portera des fruits de réconciliation et de justice. C’est cela notre mission de chrétiens : semer chaque jour les germes de la paix évangélique, pour jouir des fruits de la justice. Par cette Béatification nous voudrions dire à l’Algérie tout entière seulement ceci : l’Eglise ne désire rien d’autre que servir le peuple algérien, témoignant de son amour envers tous.

En tout point de la terre, les chrétiens sont animés du désir de contribuer concrètement à construire un avenir lumineux d’espérance par la sagesse de la paix, pour édifier une société fondée sur le respect réciproque, sur la collaboration, sur l’amour. Une telle société pourra pleinement se réaliser si chacun s’efforce de développer la pédagogie du pardon, si nécessaire aussi dans ce pays.

La communauté chrétienne dans ce pays répand de petites mais significatives semences de paix. Par cette Béatification, elle peut se sentir confortée dans sa présence en Algérie ; par ces 19 martyrs, que s’affermisse en elle la conviction que sa précieuse présence près de ce peuple est justifiée par le désir d’être lumière et signe de l’amour de Dieu pour la population tout entière.

Le témoignage lumineux de ces Bienheureux constitue un exemple vivant et proche pour tous. Leur vie et leur mort est un appel direct à nous tous chrétiens et en particulier à vous, frères ou sœurs dans la vie religieuse, à être fidèles à tout prix à votre vocation propre, en servant l’Evangile et l’Eglise dans une vie de vraie fraternité, dans la persévérance et dans le témoignage du choix radical de Dieu.

Je ne peux pas terminer sans exprimer une vive gratitude aux Congrégations religieuses auxquelles nos frères appartenaient comme aussi à leurs familles naturelles qui ont tant souffert de leur perte, mais qui maintenant peuvent se réjouir avec toute l’Eglise de les savoir Bienheureux dans le ciel. Nous sommes tous réconfortés par la certitude que nos frères et nos sœurs martyrs, par leur sacrifice, par leur intercession constante et par leur protection, feront produire sur cette terre des fruits abondants de bonté et de partage fraternel.

Pour cela nous nous adressons à eux et nous disons : Bienheureux Pierre Claverie et ses 18 compagnons et compagnes martyrs, priez pour nous !

[01995-FR.01] [Texte original: Français]

Se préparer à la fête en cultivant son désir

Dimanche prochain le 2 décembre 2018, l’Église francophone du Canada vivra deux changements importants. Dans un premier temps, nous entrerons, comme l’ensemble de l’Église universelle, dans le temps de l’Avent. Un deuxième changement nous concerne aussi tout particulièrement. En effet, ce dimanche et ce pour la première fois, nous utiliserons une nouvelle traduction de la prière dominicale, le Notre-Père.

Pour conserver les plaisirs de la vie

Dans la liturgie latine, le temps de l’Avent (qui signifie avènement) met l’accent sur la dimension eschatologique de la foi ou, en d’autres termes, sur l’espérance du but ultime de notre vie et du monde qu’est le retour glorieux du Christ et la récapitulation de toutes choses en Lui. Bien évidemment tout cela est certes mystérieux et semble bien loin de notre expérience quotidienne. C’est pourquoi à chaque année, la liturgie nous invite à prendre le temps de souligner et méditer cette attente constitutive de notre foi.

On dit également de l’Avent qu’il s’agit d’un temps de préparation à Noël, ce temps de l’année où nous célébrons le Mystère de l’Incarnation du Fils de Dieu parmi nous. Cette emphase est particulièrement bien adaptée à notre nature humaine. En effet, nous faisons tous l’expérience d’une tension entre le plaisir et le désir. Plus nous désirons quelque chose, plus notre plaisir sera intense. Au contraire, lorsque nous ne désirons pas vraiment, nous n’avons pas beaucoup de plaisir, a fortiori lorsque nous ne désirons pas du tout ! Notre société de consommation nous a trop souvent convaincus que nous devons  tout avoir tout de suite, sans effort ni… désir. Cela est contradictoire et explique pourquoi les gens qui ont tout ce qu’ils désirent sont souvent blasés et à la recherche de toujours plus d’émotions fortes.

Si nous voulons conserver le plaisir, il nous faut donc apprendre à cultiver le désir. C’est ce que permet le temps liturgique de l’Avent. En nous recentrant sur l’essentiel de la venue du Christ à Noël, nous sommes invités à cultiver notre désir intérieur de pouvoir enfin le contempler dans la crèche. Ainsi, parce que nous aurons, à la fois, appris à attendre et à la fois compris ce qui est véritablement essentiel, toute notre vie se transformera et nous pourrons apprécier dans leur plénitude les plaisirs célestes et terrestres.

Un « Notre-Père » clarifié

Ce dimanche, les fidèles francophones du Canada vivront un autre changement majeur. En effet, pour la première fois, nous devrons réciter différemment la prière du Notre Père. Alors que nous étions habitués à dire : « Ne nous soumets pas à la tentation », nous dirons dorénavant : « Et ne nous laisse pas entrer en tentation ». La raison n’en est pas que la précédente formulation était absolument erronée, l’Église n’aurait pu tolérer que les fidèles invoquent Dieu d’une manière théologiquement fausse. C’est plutôt pour éviter toutes les éventuelles mauvaises interprétations qui pouvaient en émerger.

En effet, la version précédente pouvait faire penser que Dieu désirait directement que nous soyons tentés. Or, puisque Dieu ne peut vouloir directement le péché, il ne pouvait désirer la tentation. Dans le livre de Job, nous voyons clairement que le tentateur n’est pas Dieu mais Satan. Il est donc plus approprié de demander à Dieu de ne pas nous laisser « entrer en tentation » c’est-à-dire de ne pas laisser Satan s’approcher de nous et nous laisser être séduits par les mensonges de cet ange déchu.

En ce sens, il est très opportun que cette nouvelle formulation du Notre-père advienne durant le temps de l’Avent. En effet, comme nous l’avons dit plus haut, cette période de l’année nous invite à l’attente persévérante de l’Avènement du Christ. Cette attente ne doit non pas nous porter vers l’immobilisme du « divan » mais plutôt nous revigorer dans la dimension combattante de la vie spirituelle. Comme le dit le pape François : « La lutte contre les projets habiles de destruction et de déshumanisation menés par le démon est une réalité quotidienne ». L’Avent, ce « petit carême », nous invite à cette purification de notre propre vie intérieure en cultivant ce désir des joies de Noël par des privations et des actes d’amour de toutes sortes. En ce sens, le changement de formulation du Notre-Père est donc plus que bienvenu.

Échos du Vatican

Retour dans cette émission sur la rencontre, sans précédent, convoquée par le pape François en février au Vatican pour la protection des mineurs dans l’Église

Participez au mouvement mondial du don le mardi 27 novembre 2018


« Mardi je donne » – la journée mondiale du don.
Ce 27 novembre 2018

« Mardi je donne » est un mouvement mondial de dons et de bénévolat qui nous encourage à se rallier aux causes qui nous tiennent à cœur. « Mardi je donne » profite ainsi du potentiel des médias sociaux et stimule la générosité des gens du monde entier.

En cette journée de célébration, consacrée à la générosité, je voudrais vous inviter à effectuer un don pour soutenir notre ministère d’évangélisation par les médias ; qui, s’efforce de rencontrer les catholiques là où ils se trouvent, invite les croyants à approfondir leurs connaissances de la foi, et fait appel à tous, en particulier à ceux et celles en périphérie de la foi, de se rapprocher du Seigneur et d’expérimenter la communauté de l’Église.

Veuillez consulter le message du P. Thomas Rosica, c.s.b., sur cette journée de « Mardi je donne »

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La liberté religieuse est de plus en plus menacée

La liberté religieuse est de plus en plus menacée à travers le monde. C’est ce qui ressort du nouveau rapport publiée ce jeudi 22 novembre 2018 par l’Aide à l’Église en Détresse (AED). Sur 196 pays étudiés par l’organisation, le rapport fait état de 38 pays où les croyants sont discriminés ou persécutés à cause de leur foi, et cela dans l’indifférence générale.

Près de la moitié de ces pays ont vu leur situation s’aggravée, notamment en Chine et en Inde (les deux pays les plus peuplés du monde), alors qu’elle s’est améliorée seulement dans 2 pays, en Tanzanie et au Kenya.

Dans des régions du Proche-Orient, autrefois occupées par l’Etat Islamique, la plupart des gouvernements n’a pas fourni d’aide d’urgence aux communautés déplacées qui souhaitaient rentrer chez elle. Ces minorités souffrantes sont victimes de l’indifférence, et leur sort est ignoré par une société pour qui la liberté religieuse n’est pas une priorité.

En Occident les attaques motivées par la haine religieuse se multiplient, et la menace semble être universelle, imminente et omniprésente. Elle est appelée « terrorisme de voisinage. »

Le rapport de l’AED s’alarme d’une banalisation de ces atteintes à la liberté religieuse « sous l’action conjuguées d’un ultranationalisme agressif et d’un fondamentalisme qui tend à s’universaliser. »Tout cela, déplore-t-il, dans une indifférence générale.

Face à cette situation préoccupante, pour réveiller les consciences, l’Aide à l’Église en Détresse appelle les pouvoirs publics à respecter les droits des communautés religieuses, à n’y apporter que des limites indispensables, réellement justifiées et proportionnées. Elle invite également les responsables religieux à reconnaitre la liberté de l’« homo religiosus » et à faire preuve d’une ouverture au dialogue. Enfin, les communautés religieuses et les familles sont appelées à transmettre aux jeunes générations, dès leur plus jeune âge, le souci du respect réciproque.

Au total dans le monde la liberté religiseuse est menacée dans un pays sur cinq. Une réalité accablante que dénonce l’AED, à quelques jours du 70ème anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’Homme, dont l’article 18 garantit justement la liberté religieuse.

Échos du Vatican

Retour dans cette émission sur la journée mondiale des pauvres célébrée par le Pape François au Vatican avec des milliers d’hommes et femmes défavorisés.

Homélie du pape François pour la 2e Journée Mondiale des Pauvres

Vous trouverez ci-dessous le texte complet de l’homélie du pape François telle que prononcée lors de la Messe pour la 2e Journée Mondiale des Pauvres en la basilique Saint-Pierre-de-Rome. :

Regardons trois actions que Jésus accomplit dans l’Evangile.

La première. En plein jour, il laisse : il laisse la foule au moment du succès, quand il est acclamé pour avoir multiplié les pains. Tandis que les disciples voulaient se réjouir de la gloire, il les oblige immédiatement à s’en aller et il renvoie la foule (cf. Mt 14,22-23). Recherché par les gens, il s’en va seul : lorsque tout était “en descente”, il monte sur la montagne pour prier. Puis, au cœur de la nuit, il descend de la montagne et rejoint les siens en marchant sur les eaux agitées par le vent. En tout, Jésus va à contre-courant : d’abord, il laisse le succès, puis la tranquillité. Il nous enseigne le courage de laisser : laisser le succès qui enfle le cœur et la tranquillité qui endort l’âme.

Pour aller où ? Vers Dieu, en priant, et vers celui qui a besoin, en aimant. Ce sont les vrais trésors de la vie : Dieu et le prochain. Monter vers Dieu et descendre vers les frères, voilà la route indiquée par Jésus. Il nous détourne de pâturer, sans être dérangés dans les plaines faciles de la vie, de vivoter oisivement au milieu des petites satisfactions quotidiennes. Les disciples de Jésus ne sont pas faits pour la tranquillité banale d’une vie normale. Comme leur Seigneur, ils vivent en chemin, légers, prêts à laisser les gloires du moment, attentifs à ne pas s’attacher aux biens qui passent. Le chrétien sait que sa patrie est ailleurs, il sait qu’il y est déjà – comme le rappelle l’apôtre Paul dans la seconde lecture – « concitoyens des saints, membres de la famille de Dieu » (cf. Ep 2,19). Il est un voyageur agile de l’existence. Nous ne vivons pas, nous, pour accumuler, notre gloire se trouve dans le fait de laisser ce qui passe pour retenir ce qui demeure. Demandons à Dieu de ressembler à l’Eglise décrite dans la première Lecture : toujours en mouvement, experte dans le détachement et fidèle dans le service (cf. Ac 28,11-14). Réveille-nous, Seigneur de l’oisiveté tranquille, du calme paisible de nos ports sûrs où nous sommes en sécurité. Détache-nous des amarres de l’autoréférentialité qui leste la vie, libère-nous de la recherche de nos succès. Enseigne-nous à savoir laisser pour fonder la route de notre vie sur la tienne : vers Dieu et vers le prochain.

La seconde action : en pleine nuit, Jésus encourage. Il va vers les siens, plongés dans l’obscurité, en marchant « sur la mer » (v. 25). En réalité, il s’agissait d’un lac, mais la mer, avec la profondeur de ses obscurités souterraines, évoquait à cette époque les forces du mal. Jésus, en d’autres paroles, va à la rencontre des siens en piétinant les ennemis mauvais de l’homme. Voilà la signification de ce signe : ce n’est pas une manifestation célébrant la puissance, mais la révélation pour nous de la rassurante certitude que Jésus, Jésus seul, vainc nos grands ennemis : le diable, le péché, la mort, la peur. A nous aussi aujourd’hui, il dit : « Confiance ! c’est moi, n’ayez plus peur » (v.27).

La barque de notre vie est souvent ballottée par les flots et secouée par les vents, et lorsque les eaux sont calmes elles recommencent vite à s’agiter. Alors nous nous en prenons aux tempêtes du moment, qui semblent nos uniques problèmes. Mais le problème n’est pas la tempête du moment, c’est la manière de naviguer dans la vie. Le secret pour bien naviguer est d’inviter Jésus à bord. Le gouvernail de la vie lui est donné, afin que ce soit Lui qui conduise la route. Lui seul en effet donne vie dans la mort et espérance dans la douleur ; Lui seul guérit le cœur par le pardon et libère de la peur par la confiance. Aujourd’hui, invitons Jésus dans la barque de notre vie. Comme les disciples, nous ferons l’expérience qu’avec Lui à bord, les vents se calment (cf. v.31) et on ne fait jamais naufrage. Et c’est seulement avec Jésus que nous devenons capables nous aussi d’encourager. Il y a un grand besoin de gens qui sachent consoler, non pas avec des paroles vides, mais bien avec des paroles de vie. Au nom de Jésus on donne une consolation véritable. Ce ne sont pas des encouragements formels et limités, mais c’est la présence de Jésus qui redonne des forces. Encourage-nous, Seigneur : consolés par toi, nous serons de vrais consolateurs pour les autres.

Troisième action : Jésus, au milieu de la tempête, tend la main (cf. v.31). Il saisit Pierre qui, apeuré, doutait et, en s’enfonçant, criait : « Seigneur, sauve-moi ! ». Nous pouvons nous mettre à la place de Pierre : nous sommes des gens de peu de foi et nous sommes ici pour mendier le salut. Nous sommes des pauvres de vraie vie et nous avons besoin de la main tendue du Seigneur, qui nous tire hors du mal. C’est le début de la foi : se vider de l’orgueilleuse conviction de nous croire en ordre, capables, autonomes, et reconnaître que nous avons besoin de salut. La foi croît dans ce climat, un climat auquel on s’habitue en se tenant avec tous ceux qui ne se mettent pas sur un piédestal, mais qui ont besoin et demandent de l’aide. Pour cela, vivre la foi au contact de ceux qui ont besoin est important pour nous tous. Ce n’est pas une option sociologique, c’est une exigence théologique. C’est nous reconnaître mendiants de salut, frères et sœurs de tous, mais spécialement des pauvres, les préférés du Seigneur. Ainsi nous atteignons l’esprit de l’Evangile : « l’esprit de pauvreté et de charité – dit le Concile – est, en effet, la gloire et le témoignage de l’Eglise du Christ » (Const. Gaudium et spes, n.88).

Jésus a entendu le cri de Pierre. Demandons la grâce d’entendre le cri de celui qui vit dans des eaux tumultueuses. Le cri des pauvres : c’est le cri étranglé des enfants qui ne peuvent naître, des petits qui souffrent de la faim, des enfants habitués au fracas des bombes au lieu des cris joyeux des jeux. C’est le cri des personnes âgées mises de côté et laissées seules. C’est le cri de celui qui se trouve à affronter les tempêtes de la vie sans une présence amie. C’est le cri de celui qui doit fuir, laissant sa maison et sa terre sans la certitude d’un but. C’est le cri de populations entières, privées même des ressources naturelles considérables dont ils disposent. C’est le cri des nombreux Lazare qui pleurent, tandis qu’une poignée de riches fait des banquets avec ce qui, en justice, revient à tous. L’injustice est la racine perverse de la pauvreté. Le cri des pauvres devient chaque jour plus fort, mais chaque jour moins écouté, dominé par le vacarme de quelques riches, qui sont toujours moins nombreux et toujours plus riches.

Devant la dignité humaine piétinée, souvent on reste les bras croisés ou on ouvre les bras, impuissants face à la force obscure du mal. Mais le chrétien ne peut rester les bras croisés, indifférent, ou les bras ouverts, fataliste, non. Le croyant tend la main, comme fait Jésus avec lui. Auprès de Dieu le cri des pauvres trouve une écoute, mais en nous ? Avons-nous des yeux pour voir, des oreilles pour entendre, des mains tendues pour aider ? « Le Christ lui-même, dans la personne des pauvres, en appelle comme à haute voix à la charité de ses disciples » (ibid.). Il nous demande de le reconnaître dans celui qui a faim et soif, qui est étranger et dépouillé de sa dignité, malade et en prison (cf. Mt 25,35-36).

Le Seigneur tend la main : c’est un geste gratuit, ce n’est pas un dû. C’est ainsi qu’on fait. Nous ne sommes pas appelés à faire le bien seulement à celui qui nous aime. Echanger est normal, mais Jésus nous demande d’aller au-delà (cf. Mt 5,46) : de donner à celui qui ne peut pas rendre, c’est-à-dire d’aimer gratuitement (cf. Lc 6,32-36). Regardons nos journées : parmi les nombreuses choses, faisons-nous quelque chose de gratuit, quelque chose pour celui qui n’a rien à donner en échange ? Ce sera notre main tendue, notre véritable richesse au ciel.

Tend-nous la main, Seigneur, et saisis-nous. Aide-nous à aimer comme tu aimes, toi. Enseigne-nous à laisser ce qui passe, à encourager celui qui se trouve à côté de nous, à donner gratuitement à celui qui est dans le besoin. Amen.

[01851-FR.01] [Texte original: Italien]

Le pape François a également convient des centaines de personnes pour un repas festif en l’honneur des personnes en difficulté  et qui fut donné en la Salle Paul VI du Vatican. En voici quelques photos:

CNS: Paul Haring

CNS: Paul Haring

Prendre sur soi la croix de l’itinérance

C’est en plein cœur du Salon du livre de Montréal, qu’avait lieu, hier en fin d’après-midi, une conférence autour du livre « Confession d’un prêtre de la rue ». J’avais évidemment très hâte de lire la vie de celui qui anime les « Chroniques des actualités de la rue » en tant que collaborateur de l’émission Église en Sortie depuis les débuts. Composé d’une série d’entretiens entre Jean-Marie Lapointe et l’abbé Claude Paradis, cet ouvrage retrace, à la fois, le parcours difficile de celui qui était appelé à devenir prêtre de tout éternité et la profondeur de sa démarche trop souvent occultée par la philosophie de l’entraide qui prédomine aujourd’hui.

Un purgatoire plus tôt que prévu!

Une chose est certaine, ce livre est une véritable « confession ». Sans édulcorer le vécu du curé des gens de la rue du Centre-Ville de Montréal, ce livre nous présente un homme bien incarné qui, comme saint Paul, a « reçu dans [sa] chair une écharde ». On y retrace donc l’itinéraire d’un gaspésien qui, sous le poids des blessures parfois cruelles de la vie, a vécu une « véritable descente aux enfers » qui, vue d’aujourd’hui, apparaît comme un réel purgatoire. On y retrace sa conversion puis le séminaire, son ordination puis l’apprentissage de la vie de prêtre ;  une série d’événement qui lui ont certainement permis de comprendre, plus que nous tous, cette Parole de l’Évangile : « Ma grâce te suffit, car ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse. » (2 Cor 12, 9).

Le livre ne se contente cependant pas d’offrir des éléments biographiques. On y côtoie aussi de profondes réflexions sur le sens de la souffrance, de la pauvreté et des différentes dépendances. En effet, on voit, dans la vie de l’abbé Paradis, une véritable soif  d’amour, ce qui a pu décupler la souffrance causée par les rejets parfois brutaux dont il a pu faire l’objet. Quelle intensité la découverte de l’Amour indéfectible de Dieu a-t-elle pu susciter en lui pour créer un tel retournement qui fera de lui un prêtre quelques année plus tard !

Une porte vers le ciel

On constate également certaines caractéristiques de l’état de dépendance et le combat contre celles-ci. Contrairement au rêve d’autonomie absolue dont notre société essaie de nous convaincre, nous sommes des êtres foncièrement dépendants. Dépendants de la société pour vivre, dépendants de nos parents pour nous donner la vie et nous éduquer, dépendants de l’environnement pour nous soutenir, etc. Les toxicomanes, eux, savent trop bien que notre état de dépendance est réel. Voilà pourquoi les différents groupes de soutien n’ont pas de difficultés à comprendre la nécessité de faire référence à une « Force Supérieure » ou, en d’autres termes, à Dieu. Nous avons donc beaucoup à apprendre de ces gens souffrants de la rue qui, d’une certaine façon, sont pour nous le miroir brutal de notre propre misère. Contrairement à nous, leur état ne leur permet pas de se voiler la face et de se penser autonomes et maîtres d’eux-mêmes ; d’où leur plus grande ouverture à Dieu et à la transcendance.

Mais comment cette ouverture pourrait-elle être comblée sans des témoins crédibles pour nous aider, comme le disait le curé d’Ars, à nous « montrer le chemin du ciel » ? Tel est le sens de la vie de l’abbé Claude Paradis et de l’apostolat de Notre-Dame-de-la-rue. La vie spirituelle des âmes qu’il rencontre est sa priorité et pour cause.  Faire de la place à l’amour dans leur cœur des hommes est la seule chose qui puisse étancher la soif du Christ sur la croix !

Prendre sa croix et celles des autres

Enfin, j’aimerais jeter un éclairage sur une autre dimension de la vie du Curé de la rue. Comme cela a été merveilleusement présenté dans le documentaire de Charles Le Bourgeois « Dealer d’espoir », à visionner sur Sel et Lumière, l’abbé Claude Paradis ne cherche pas seulement à aider les pauvres, il cherche aussi  à prendre sur lui la croix de l’itinérance. C’est pourquoi, il lui est arrivé à plusieurs reprises de dormir dehors, quêter et errer dans les rues comme une offrande au Père éternel. Est-il possible de non seulement souffrir sa propre vie mais aussi de vouloir prendre sur soi les blessures des autres ? C’est pourtant ce que l’Église nous enseigne : « La grâce comprend aussi les dons que l’Esprit nous accorde pour nous associer à son œuvre, pour nous rendre capables de collaborer au salut des autres et à la croissance du Corps du Christ. […] (Catéchisme de l’Église catholique, no 2003). S’associer à la Croix rédemptrice de Jésus par une vie communautaire avec les itinérants de Montréal voilà qui pourrait bien résumer le charisme de l’abbé Claude Paradis.

Je recommande la lecture du livre  « Confession d’un prêtre de la rue ».  Pour en savoir davantage sur le livre et sur l’abbé Paradis,  je reçois pour en discuter Jean-Marie Lapointe, cette semaine à l’émission Église en Sortie sans oublier la maintenant très attendue « Chronique des actualités de la rue » de l’abbé Claude Paradis !

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