Messe pour les vocations sacerdotales de l’Archidiocèse de Montréal sur S+L

EN EXCLUSIVITÉ sur les ondes de Sel et Lumière, voyez la télé diffusion de la Messe pour les vocations sacerdotales de l’Archidiocèse de Montréal le vendredi 26 janvier prochain à 19h30. Cette Messe célébrée à la magnifique chapelle du Grand Séminaire de Montréal sera présidée par S.Exc. Mgr Christian Lépine, archevêque de Montréal.

Vous trouverez au lien ci-dessous le feuillet de cette célébration:

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Homélie du pape François lors de la Messe à Las Palmas

Au terme de son 22e voyage apostolique au Chili et au Pérou, le pape François a célébré une dernière Messe sur la base aérienne Las Palmas à Lima au Pérou. Voici le texte complet de son homélie:

«Lève-toi, va à Ninive, la grande ville païenne, proclame le message que je te donne sur elle» (Jon 3, 2). C’est par ces mots que le Seigneur s’adressait à Jonas pour l’envoyer vers cette grande ville qui était sur le point d’être détruite à cause de tout le mal qu’elle faisait. Nous voyons aussi Jésus dans l’Évangile en route vers la Galilée pour prêcher sa Bonne nouvelle (cf. Mc 1, 14). Ces deux lectures nous révèlent Dieu en mouvement vers les villes d’hier et d’aujourd’hui. Le Seigneur se met en marche. Il va à Ninive, en Galilée… à Lima, à Trujillo, à Puerto Maldonado… voilà le Seigneur qui vient. Il se déplace pour entrer dans notre histoire personnelle, concrète. Nous l’avons récemment célébré : il est l’Emmanuel, le Dieu qui veut être toujours avec nous. Oui, ici à Lima, ou là où tu vis, dans la vie quotidienne du travail routinier, dans l’éducation des enfants avec espérance, dans tes aspirations et tes soucis ; dans l’intimité du foyer et dans le bruit assourdissant de nos rues. C’est là, sur les chemins poussiéreux de l’histoire que le Seigneur vient à ta rencontre.

Parfois il peut nous arriver la même chose qu’à Jonas. Nos villes, dans les situations de souffrance et d’injustice qui se répètent au quotidien, peuvent créer en nous la tentation de fuir, de nous cacher, de nous échapper. Et les raisons ne manquent pas, ni à Jonas, ni à nous. En regardant la ville nous pourrions commencer à constater qu’ « il y a des citadins qui obtiennent des moyens adéquats pour le développement de leur vie personnelle et familiale – et cela nous réjouit -, mais il y a un très grand nombre de “non citadins”, des “citadins à moitié” ou des “restes urbains” »[1] qui gisent au bord de nos chemins, qui vont vivre dans les périphéries de nos villes sans les conditions nécessaires pour mener une vie digne; et il est douloureux de constater que, très souvent, parmi ces “restes urbains” on distingue des visages de beaucoup d’enfants et d’adolescents. On distingue le visage de l’avenir.

Et en voyant ces choses dans nos villes, dans nos quartiers – qui pourraient être des lieux de rencontre et de solidarité, de joie – il finit par se produire ce que nous pouvons appeler le syndrome de Jonas: un lieu de fuite et de méfiance (cf. Jon 1, 3). Un lieu de l’indifférence, qui nous transforme en des personnes anonymes et sourdes vis-à-vis des autres, qui nous font devenir des êtres impersonnels au cœur insensible ; et par cette attitude nous blessons l’âme du peuple. Comme nous le disait Benoît XVI, « la mesure de l’humanité se détermine essentiellement dans son rapport à la souffrance et à celui qui soufre […] Une société qui ne réussit pas à accepter les souffrants et qui n’est pas capable de contribuer, par la compassion, à faire en sorte que la souffrance soit partagée et portée aussi intérieurement est une société cruelle et inhumaine » [2]. Quand Jean a été arrêté, Jésus s’est dirigé vers la Galilée pour proclamer l’Evangile de Dieu. A la différence de Jonas, Jésus, face à un événement douloureux et injuste comme le fut l’arrestation de Jean, entre dans la ville, il entre en Galilée et commence, à partir de ce petit village à semer ce qui sera le début de la plus grande espérance : le Royaume de Dieu est proche, Dieu est au milieu de nous. Et l’Évangile lui-même nous montre la joie et l’effet en chaîne que cela produit: cela a commencé avec Simon et André, puis Jacques et Jean (cf. Mc 1, 14-20). Et, depuis lors, en passant par sainte Rose de Lima, saint Torobio, saint Martin de Porres, saint Jean Macias, saint François Solano, l’Évangile est parvenu jusqu’à nous, annoncé par cette nuée de témoins qui y ont cru. Il est parvenu jusqu’à nous pour être de nouveau un antidote renouvelé contre la globalisation de l’indifférence. Car, face à cet Amour, on ne peut rester indifférent.

Jésus a invité ses disciples à vivre aujourd’hui ce qui a saveur d’éternité: l’amour de Dieu et du prochain; et il le fait de la seule manière dont il peut le faire, à la manière divine: en suscitant la tendresse et l’amour miséricordieux, suscitant la compassion et en ouvrant leurs yeux pour qu’ils apprennent à voir la réalité à la manière divine. Il les invite à créer de nouveaux liens, de nouvelles alliances porteuses d’éternité.

Jésus parcourt la ville avec ses disciples et il commence à regarder, à écouter, à prêter attention à ceux qui ont succombé sous le manteau de l’indifférence, lapidés à cause du grave péché de la corruption. Il commence à dévoiler beaucoup de situations qui asphyxient l’espérance de son peuple, suscitant une nouvelle espérance. Il appelle ses disciples et les invite à le suivre, il les invite à parcourir la ville, mais il change la cadence de leur pas, il leur apprend à voir ce qui jusqu’alors leur échappait, il leur montre de nouvelles urgences. Convertissez-vous, leur dit-il, le Royaume des Cieux consiste à rencontrer, en Jésus, Dieu qui s’unit vitalement à son peuple, qui s’implique et invite d’autres à ne pas avoir peur de faire de cette histoire une histoire de salut (cf. Mc 1, 15.21ss) Jésus continue à marcher dans nos rues, il continue comme hier à frapper aux portes, à frapper aux cœurs pour rallumer l’espérance et les aspirations : que l’avilissement soit surmonté grâce à la fraternité, l’injustice vaincue par la solidarité et la violence réduite au silence par les armes de la paix. Jésus continue à inviter et il veut nous oindre de son Esprit pour que nous aussi sortions pour oindre de cette onction capable de guérir l’espérance blessée et de renouveler notre regard.

Jésus continue à marcher et il réveille l’espérance qui nous libère des connexions vides et des analyses impersonnelles et il nous invite à nous impliquer comme un ferment là où nous sommes, là où il nous revient de vivre, dans ce petit coin de chaque jour. Le Royaume des Cieux est au milieu de vous – nous dit-il – il est là où nous sommes disposés à avoir un peu de tendresse et de compassion, où nous n’avons pas peur de faire en sorte que les aveugles voient, les paralytiques marchent, les lépreux soient purifiés et que les sourds entendent (cf. Lc 7, 22), et qu’ainsi tous ceux que nous estimions perdus jouissent de la Résurrection. Dieu ne se lasse pas ni ne se lassera jamais de marcher pour rejoindre ses enfants. Comment allumerons-nous l’espérance des prophètes manquent ? Comment ferons-nous face à l’avenir s’il nous manque l’unité ? Comment Jésus parviendra-t-il à tant de lieux reculés si des témoins courageux et audacieux manquent ?

Aujourd’hui le Seigneur t’invite à parcourir la ville avec lui, ta ville. Il t’invite à être son disciple missionnaire, et à faire ainsi partie de ce grand chuchotement qui veut continuer à résonner dans les divers recoins de notre vie : Réjouis-toi, le Seigneur est avec toi!

Réflexion du pape François lors de l’Angélus à Lima, Pérou

Le dimanche 21 janvier 2018, du balcon de la résidence de l’archevêque de Lima, sur la Place d’Armes, le Saint Père a célébré la prière de l’Angélus. Il a de plus livré une réflexion adressée, en particulier, aux jeunes. Voici le texte complet de son allocution :

Dieu notre Père, qui par Jésus-Christ a institué ton Église sur le roc des Apôtres, pour que, guidée par l’Esprit Saint, elle soit dans le monde signe et instrument de ton amour et de ta miséricorde, nous te rendons grâce pour les bienfaits que tu as accomplis dans notre Église à Lima.

Nous Te remercions en particulier pour la sainteté qui a fleuri sur notre terre. Notre Église archidiocésaine, fécondée par le travail apostolique de saint Turibio de Mogrovejo; renforcée par la prière, la pénitence et la charité de sainte Rose de Lima et de saint Martin de Porrès; embellie par le zèle missionnaire de saint François Solano et par l’humble service de saint Jean Macias; bénie par le témoignage de vie chrétienne d’autres frères fidèles à l’Évangile, Te remercie pour ton action dans notre histoire et Te demande la fidélité à l’héritage reçu.

Aide-nous à être une Église en sortie, en nous faisant proches de tous, en particulier des moins favorisés; apprends-nous à être des disciples-missionnaires de Jésus-Christ, le Seigneur des Prodiges, en vivant de l’amour, en recherchant l’unité, et en pratiquant la miséricorde, pour que, protégés par l’intercession de Notre-Dame de l’Évangélisation, nous vivions et annoncions au monde la joie de l’Évangile.

Chers jeunes, je suis heureux de pouvoir me retrouver avec vous. Ces rencontres sont pour moi très importantes, et plus encore cette année où nous nous préparons pour le Synode sur les jeunes. Vos visages, vos recherches, vos vies sont importantes pour l’Eglise et nous devons vous donner l’importance que vous méritez et avoir le courage qu’ont eu beaucoup de jeunes de cette terre qui n’ont pas eu peur d’aimer et de miser sur Jésus.

Chers amis, que d’exemples vous avez! Je pense à saint Martin de Porres. Rien n’a empêché ce jeune d’accomplir ses rêves, rien ne l’a empêché de dépenser sa vie pour les autres, rien ne l’a empêché d’aimer; et il l’a fait parce qu’il avait fait l’expérience que le Seigneur l’avait aimé en premier. Tel qu’il était: métis, et devant faire face à de nombreuses privations. Au regard des hommes, de ses amis, il semblait avoir tout à “perdre”, mais il a su faire une chose qui serait le secret de sa vie: faire confiance. Il a fait confiance au Seigneur qui l’aimait. Savez-vous pourquoi? Parce que le Seigneur lui avait d’abord fait confiance; comme il fait confiance à chacun d’entre vous et ne se lassera jamais de le faire.

Vous pourriez me dire: mais il y a des fois où cela devient très difficile. Je vous comprends. Dans ces moments-là des pensées négatives peuvent venir; sentir qu’il y a beaucoup de choses qui nous tombent dessus, que nous allons être ‘‘exclus du mondial’’. Il semblerait qu’on est en train de l’emporter sur nous. Mais ce n’est pas comme ça, pas vrai?

Il y a des moments où vous pouvez sentir que vous êtes sans possibilité de réaliser le désir de votre vie, vos rêves. Nous sommes tous passés par de telles situations. Chers amis, dans ces moments où il semble que la foi s’éteint, n’oubliez pas que Jésus est à vos côtés. Ne vous avouez pas vaincus, ne perdez pas espérance! N’oubliez pas les saints qui, du ciel, nos accompagnent ; allez à eux, priez et ne vous lassez pas de demander leur intercession. Ces saints d’hier, mais aussi d’aujourd’hui : cette terre en a beaucoup, parce que c’est une terre “sanctifiée”. Cherchez l’aide, le conseil de personnes dont vous savez qu’elles sont bonnes pour donner des conseils parce que leurs visages débordent de joie et de paix. Faites-vous accompagner par elles pour parcourir ainsi le chemin de la vie.

Jésus veut vous voir en mouvement ; il veut te voir poursuivre tes idéaux, et décidé à suivre ses instructions. Il vous conduira sur le chemin des béatitudes, un chemin en rien facile mais passionnant, un chemin qu’on ne peut parcourir seul, mais en équipe, où chacun peut collaborer avec le meilleur de lui-même. Jésus compte sur toi, comme il l’a fait il y a longtemps avec sainte Rose de Lima, saint Toribio, saint Juan Macias, saint Francisco Solano et tant d’autres. Aujourd’hui il te demande, comme à eux, si tu es-tu disposé à le suivre. Es-tu disposé à le suivre? À te laisser pousser par son Esprit pour rendre présent son Royaume de justice et d’amour?

Chers amis, le Seigneur vous regarde avec espérance, il ne désespère jamais de nous. Nous, peut-être, nous pouvons désespérer de nous-mêmes et des autres.

Je sais qu’il est très beau de regarder les photos retouchées numériquement, mais cela ne sert que pour les photos, nous ne pouvons pas faire le “photoshop” aux autres, à la réalité ni à nous- mêmes. Les filtres de couleurs et la haute définition ne marchent que pour les vidéos, mais nous ne pouvons jamais les appliquer aux amis. Il y a des photos qui sont très belles, mais elles sont complètement truquées; et laissez-moi vous dire que le cœur ne peut pas se “photoshoper”, parce que c’est là que se joue l’amour véritable, c’est là que se joue le bonheur.

Jésus ne veut pas que tu te “maquilles” le cœur ; il t’aime comme tu es et il a un rêve à réaliser avec chacun de vous. N’oubliez pas, il ne désespère pas de nous. Et si vous désespérez, je vous invite à prendre la Bible et à vous rappeler les amis que Dieu s’est choisis.

Moïse était bègue; Abraham, un vieillard; Jérémie, très jeune; Zachée, de petite taille; les disciples, quand Jésus leur demandait de prier, s’endormaient; Paul, un persécuteur des chrétiens; Pierre, il l’a renié… Et nous pourrions ainsi allonger la liste. Quelle excuse pourrions-nous avoir ?

Quand Jésus nous regarde, il ne considère pas combien nous sommes parfaits, mais à tout l’amour que nous avons dans le cœur à offrir et pour servir les autres. Pour lui, c’est cela qui est important, et il va toujours insister sur la même chose – il ne regarde pas ta taille, si tu parles bien ou mal, si tu dors en priant, si tu es trop jeune ou vieux. La seule question, c’est: Veux-tu me suivre et être mon disciple ? – Ne dépense pas pour maquiller ton cœur, remplis ta vie de l’Esprit!

Il attend sans se lasser pour nous donner son Esprit qui est l’Amour que Dieu veut répandre en nos cœurs afin de faire de nous ses disciples missionnaires.

En suivant Jésus, on ne peut jamais, mais jamais, être rejeté. Même si tu commets des erreurs; toujours le Seigneur nous offre une nouvelle chance pour marcher de nouveau avec lui.

Chers jeunes, dans ma prière, je vous mets dans les mains de la Vierge. Soyez certains qu’elle vous accompagnera à chaque instant de votre vie, à toutes les croisées de vos chemins, spécialement quand vous aurez à prendre des décisions importantes; elle sera là comme une bonne Mère, vous encourageant, vous soutenant afin que vous ne perdiez pas courage. Et si tu te décourages pour ces raisons, ne t’en fais pas, elle le dira à Jésus. Seulement, ne cesse pas de prier, ne cesse pas de demander, ne cesse pas de faire confiance à sa maternelle protection.

Discours du pape François aux religieuses de vie contemplative à Lima, Pérou

Le dimanche 21 janvier, le Saint Père s’est rendu au Sanctuaire du Seigneur des Miracles, à Lima au Pérou, où il a rencontré des religieuses de vie contemplative. Vous trouverez ci-dessous le discours qu’il leur a adressé.

Chères sœurs de divers monastères de vie contemplative:

Qu’il est bon d’être ici, dans ce Sanctuaire du Seigneur des Miracles, si fréquenté par les Péruviens, pour lui demander sa grâce et pour qu’il nous montre sa proximité et sa miséricorde! C’est lui “la lumière qui nous guide, qui nous éclaire de son amour divin”. En vous voyant ici, j’ai l’impression que vous avez profité de la visite pour vous promener un peu. Merci, Mère Soledad, pour vos paroles de bienvenue, et merci à vous toutes qui “dans le silence du cloître marchez toujours à mes côtés”.

Nous avons entendu les paroles de saint Paul, en nous rappelant que nous avons reçu l’esprit d’adoption filiale qui fait de nous des enfants de Dieu (cf. Rm 8, 15-16). En ces quelques mots se trouve condensée la richesse de toute la vocation chrétienne : la joie de nous savoir des fils. C’est l’expérience qui soutient nos vies, qui voudrait toujours être une réponse reconnaissante à cet amour. Qu’il est important de renouveler jour après jour cette joie!

Un chemin privilégié qui vous permet de renouveler cette certitude, c’est la vie de prière, communautaire et personnelle. Elle est le noyau de votre vie contemplative, et c’est la façon de cultiver l’expérience d’amour qui soutient notre foi; et comme nous le disait si bien Mère Soledad, c’est une prière qui est toujours missionnaire.

La prière missionnaire est celle qui parvient à unir les frères dans les diverses circonstances où ils se rencontrent et à demander que ne leur manquent pas l’amour et l’espérance. Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus le disait ainsi: «Je compris que l’Amour seul faisait agir les membres de l’Eglise, que si l’Amour venait à s’éteindre, les Apôtres n’annonceraient plus l’Evangile, les Martyrs refuseraient de verser leur sang… Je compris que l’Amour renfermait toutes les vocations, que l’Amour était tout, qu’il embrassait tous les temps et tous les lieux… en un mot, qu’il est éternel!… Dans le cœur de l’Eglise, ma Mère, je serai l’Amour» [1]. Etre l’amour! C’est savoir être sensible à la souffrance de tant de frères et dire avec le psalmiste: « Dans mon angoisse j’ai crié vers le Seigneur, il m’a exaucé, mis au large» (Ps 117, 5). C’est de cette manière que votre vie en clôture arrive à avoir une portée missionnaire et universelle ainsi qu’«un rôle fondamental dans la vie de l’Eglise. Vous priez et intercédez pour beaucoup de frères et sœurs qui sont en prison, migrants, réfugiés et persécutés, pour tant de familles blessées, les personnes sans travail, les pauvres, les malades, les victimes des dépendances, pour ne citer que quelques-unes des situations qui sont chaque jour plus pressantes. Vous êtes comme ces personnes qui portèrent un paralytique devant le Seigneur pour qu’il le guérisse (cf. Mc 2, 1-12). Par la prière, jour et nuit, vous amenez au Seigneur la vie de beaucoup de frères et sœurs qui, pour diverses raisons, ne peuvent le rejoindre pour faire l’expérience de sa miséricorde qui soigne, alors que Lui les attend pour leur faire grâce. Avec votre prière, vous pouvez guérir les plaies de beaucoup de frères » [2]. Pour cela même, nous pouvons affirmer que la vie de clôture n’enferme ni ne rétrécit le cœur, mais elle l’élargit par la relation avec le Seigneur et qu’elle le rend capable de sentir d’une nouvelle manière la douleur, la souffrance, la frustration, le malheur de tant de frères qui sont victimes de cette “culture du déchet” de notre époque. Que l’intercession pour ceux qui sont dans le besoin soit la caractéristique de votre prière. Et, quand c’est possible, aidez-les, non seulement par la prière mais aussi par le service concret.

La prière de demande qui se fait dans vos monastères rejoint le cœur de Jésus qui implore le Père pour que tous nous soyons un, afin que le monde croie (cf. Jn 17, 21). Combien nous avons besoin d’unité dans l’Eglise! Aujourd’hui et toujours! Unis dans la foi. Unis par l’espérance. Unis par la charité. Dans cette unité qui jaillit de la communion avec le Christ qui nous unit au Père dans l’Esprit et, dans l’Eucharistie, nous unit les uns aux autres dans ce grand mystère qu’est l’Eglise. Je vous demande, s’il vous plaît, de prier beaucoup pour l’unité de cette Eglise péruvienne bien-aimée. Œuvrez à la vie fraternelle, faisant en sorte que chaque monastère soit une lampe qui éclaire au milieu de la désunion et de la division. Aidez à prophétiser que c’est possible. Que tous ceux qui s’approchent de vous puissent goûter par avance la béatitude de la charité fraternelle, si caractéristique de la vie consacrée et si nécessaire au monde d’aujourd’hui et à nos communautés. Quand la vocation est vécue en fidélité, la vie devient une annonce de l’amour de Dieu. Je vous demande de ne pas cesser de donner ce témoignage. En cette église des Carmélites Nazaréennes Déchaussées, je me permets de rappeler les paroles de la Maîtresse spirituelle, sainte Thérèse de Jésus: « Si elles perdent le guide qui est le bon Jésus, elles n’en trouverons point le chemin; […] Le même Seigneur qui a dit qu’il est la voie a dit aussi qu’il est lumière et que personne ne peut aller à son Père si ce n’est par lui»[3]. Chères sœurs, l’Eglise a besoin de vous. Soyez des lampes par votre vie fidèle et indiquez Celui qui est chemin, vérité et vie, l’unique Seigneur qui donne la plénitude à notre existence et la vie en abondance [4].

Priez pour l’Eglise, pour les pasteurs, pour les personnes consacrées, pour les familles, pour ceux qui souffrent, pour ceux qui font du mal, pour ceux qui exploitent leurs frères. Et n’oubliez pas, s’il vous plaît, de prier pour moi.

Discours du Saint Père aux évêques du Pérou

Le pape François a rencontré les évêques du Pérou, ce dimanche 21 janvier, à l’archevêché de Lima. Vous trouverez ci-dessous, le discours qu’il leur a adressé. 

Chers frères dans l’épiscopat,

Merci pour les paroles que m’ont adressées le Cardinal Archevêque de Lima et le Président de la Conférence Épiscopale au nom de tous ceux qui sont présents. J’ai souhaité être ici avec vous. Je garde un vif souvenir de votre visite ad limina, qui date de l’année dernière.

Les journées passées parmi vous ont été très intenses et enrichissantes. J’ai pu écouter et vivre les différentes réalités qui composent cette terre et partager de près la foi du saint peuple fidèle de Dieu, qui nous a fait tant de bien. Merci pour l’occasion qui m’a été donnée de pouvoir ‘‘toucher’’ la foi du peuple que Dieu vous a confié.

Le thème de ce voyage nous parle de l’unité et de l’espérance. C’est un programme difficile, mais en même temps qui interpelle, qui nous rappelle les hauts faits de saint Turibio de Mogrovejo, Archevêque de ce Siège et patron de l’épiscopat latino-américain, un modèle de ‘‘bâtisseur de l’unité ecclésiale’’, comme l’a défini mon prédécesseur, saint Jean Paul II, lors de son premier Voyage Apostolique dans ce pays [1].

Il est significatif que ce saint Évêque soit représenté sur ses portraits comme un ‘‘nouveau Moïse’’. Comme vous le savez, au Vatican est conservé un tableau où figure saint Turibio traversant une rivière impétueuse dont les eaux s’ouvrent sur son passage, comme s’il s’agissait de la mer Rouge, pour qu’il puisse parvenir sur l’autre rive où l’attend un groupe important d’indigènes. Derrière saint Turibio, il y a une grande multitude de personnes, qui constitue le peuple fidèle suivant son pasteur dans l’œuvre de l’évangélisation [2]. Ce beau tableau m’offre la possibilité de focaliser sur lui ma réflexion avec vous. Saint Turibio, l’homme qui a voulu atteindre l’autre rive.

Nous le voyons dès le moment où il reçoit mandat pour venir dans ce pays avec la mission d’être père et pasteur. Il a abandonné la terre ferme pour s’aventurer dans un univers totalement nouveau, inconnu et difficile. Il est allé vers une terre promise, guidé par la foi comme « une façon de posséder ce que l’on espère » (Hb 11, 1). Sa foi et sa confiance dans le Seigneur l’ont poussé et le pousseront, tout au long de sa vie, à atteindre l’autre rive, où le Seigneur l’attendait au milieu d’une multitude.

1. Il a voulu atteindre l’autre rive à la recherche de ceux qui étaient éloignés et dispersés. Pour cela, il a dû renoncer au confort de l’évêché et parcourir le territoire qui lui a été confié, pour des visites pastorales constantes, en essayant de rejoindre et d’être là où l’on avait besoin de lui, – et comme on avait besoin de lui! Il allait à la rencontre de tous par des chemins qui, au dire de son secrétaire, étaient plus faits pour les chèvres que pour les personnes. Il a dû affronter les climats et les régions plus divers, « sur les 22 années d’épiscopat, il en a passé 18 en dehors de son siège, parcourant à trois reprises son territoire » [3]. Il savait que c’était la seule manière de guider son troupeau : être proche en apportant les secours divins, exhortation qu’il adressait aussi continuellement à ses prêtres. Cependant il ne le faisait pas en paroles mais par son témoignage, en étant lui-même en première ligne de l’évangélisation. Aujourd’hui, nous l’appellerions un Évêque ‘‘de la rue’’. Un évêque avec des semelles usées à force de marcher, de visiter, d’aller à la rencontre pour « annoncer l’Évangile à tous, en tous lieux, en toutes occasions, sans répulsion et sans peur. La joie de l’Évangile est pour tout le peuple, personne ne peut en être exclu » [4]. Comme il le savait, saint Turibio! Sans peur et sans répulsion, il a parcouru notre continent pour annoncer la Bonne Nouvelle.

2. Il a voulu atteindre l’autre rive non seulement géographique mais aussi culturelle. C’est ainsi qu’il a promu, par de nombreux moyens, une évangélisation dans la langue locale. Par le troisième Concile de Lima, il s’est employé à ce que les catéchismes soient faits et traduits en quechua et en aymara. Il a incité le clergé à étudier et à connaître la langue de leurs peuples pour pouvoir leur administrer les sacrements de manière compréhensible. En visitant son peuple et en vivant avec lui, il s’est rendu compte qu’il ne suffisait pas de le rejoindre physiquement mais qu’il était nécessaire d’apprendre à utiliser le langage des autres, et que ce n’était qu’ainsi que l’Évangile arriverait à être entendu et à pénétrer dans le cœur. Combien une telle vision est urgente pour nous, pasteurs du XXIème siècle, qui devons apprendre un langage totalement nouveau comme l’est le langage numérique, pour ne citer qu’un exemple. Connaître le langage actuel de nos jeunes, de nos familles, des enfants… Comme saint Turibio a bien su le voir, il ne suffit pas d’atteindre un lieu et d’occuper un territoire; il faut pouvoir initier des processus dans la vie des personnes pour que la foi s’enracine et devienne significative. Et pour cela nous devons parler leur langue. Il faut parvenir là où sont en train de s’élaborer les nouveaux récits et les nouveaux paradigmes, atteindre avec la Parole de Jésus les éléments centraux les plus profonds de l’âme de nos villes et de nos peuples [5]. L’évangélisation de la culture nous demande d’entrer dans le cœur de la culture elle-même, pour qu’elle soit éclairée de l’intérieur par l’évangile.

3. Il a voulu atteindre l’autre rive de la charité. Pour notre [saint] patron, l’évangélisation ne pouvait pas se faire en dehors de la charité. Car il savait que la forme la plus sublime de l’évangélisation était de façonner dans sa propre vie le don de soi de Jésus-Christ par amour pour tous les hommes. Les enfants de Dieu et les enfants du démon se révèlent ainsi: celui qui ne pratique pas la justice n’est pas de Dieu, pas plus que celui qui n’aime pas son frère (cf. 1Jn 3, 10). Lors de ses visites, il a pu constater les abus et les excès que subissaient les populations autochtones, et ainsi sa main n’a pas tremblé, en 1585, quand il a excommunié le représentant de la Couronne à Cajatambo, affrontant tout un système de corruption et tout un réseau d’intérêts qui « suscitait l’hostilité de beaucoup », y compris du Vice-roi. [6] C’est ainsi que le pasteur nous montre qu’il sait que le bien spirituel ne peut jamais être séparé du juste bien matériel et d’autant plus quand l’intégrité et la dignité des personnes sont menacées. Attitude prophétique de l’évêque qui n’a pas peur de dénoncer les abus et les excès commis contre son peuple. Et de cette manière il parvient à rappeler à l’intérieur de la société et de ses communautés que la charité doit toujours aller de pair avec la justice et qu’il n’y a pas d’authentique évangélisation qui n’annonce pas et ne dénonce pas toutes les fautes contre la vie de nos frères, en particulier des plus vulnérables.

4. Il a voulu atteindre l’autre rive dans la formation de ses prêtres. Il a fondé le premier séminaire postconciliaire dans cette région du monde, en encourageant ainsi la formation du clergé autochtone. Il a compris qu’il ne suffisait pas d’aller partout et de parler la même langue, mais qu’il était nécessaire que l’Église puisse engendrer ses propres pasteurs locaux et ainsi devenir une mère féconde. C’est pourquoi il a plaidé pour l’ordination des métis – quand c’était une question discutée – cherchant à encourager et à inciter à ce que le clergé, s’il devait être différent dans quelque chose, ce soit par la sainteté de ses pasteurs et non par la provenance raciale. [7] Et cette formation ne se limitait pas seulement aux études au séminaire, mais elle se poursuivait grâce à ses nombreuses visites. À ces occasions, il pouvait voir directement ‘‘l’état de ses prêtres’’, montrant qu’il portait leur souci. Selon la légende, à la veille de Noël, sa sœur lui aurait offert une chemise pour qu’il la porte pour la première fois à cette fête. Ce jour-là, il est allé rendre visite à un prêtre et en voyant la condition dans laquelle il vivait, il a enlevé sa chemise et la lui a donnée.[8] C’est le pasteur qui connaît ses prêtres. Il cherche à les atteindre, à les accompagner, à les encourager, à les réprimander – il a rappelé à ses prêtres qu’ils étaient des pasteurs et non des négociants et que, par conséquent, ils devaient protéger et défendre les indiens comme des fils-. [9] Mais il ne le fait pas depuis le ‘‘bureau’’, et ainsi il peut connaître ses brebis et celles-ci reconnaissent, en sa voix, la voix du Bon Pasteur.

5. Il a voulu atteindre l’autre rive, celle de l’unité. Il a encouragé de manière admirable et prophétique la création et l’intégration de lieux de communion et de participation entre les différents membres du peuple de Dieu. C’est ce qu’a souligné saint Jean-Paul II quand, dans ce pays, parlant aux évêques, il disait:« Le troisième Concile de Lima est le résultat de cet effort, présidé, stimulé, dirigé par saint Turibio, et qui a porté des fruits dans un précieux trésor de l’unité dans la foi, de normes pastorales et organisationnelles, en même temps que dans des inspirations valides pour l’intégration latino-américaine souhaitée ». [10] Nous savons bien que cette unité et ce consensus ont été précédés de grands tensions et conflits. Nous ne pouvons pas nier les tensions, les différences ; une vie sans conflits est impossible. Ces conflits nous obligent, si nous sommes des hommes et des chrétiens, à les regarder en face et à les assumer. Mais à les assumer dans l’unité, dans un dialogue honnête et sincère, en nous regardant en face et en veillant à ne pas céder à la tentation ou d’ignorer ce qui est arrivé, ou de rester prisonniers et sans horizon qui aide à trouver les chemins de l’unité et de la vie. Il est stimulant, dans notre cheminement de Conférence Épiscopale, de rappeler que l’unité prévaudra toujours sur le conflit.[11] Chers frères, travaillez pour l’unité, ne restez pas prisonniers des divisions qui fractionnent et limitent la vocation à laquelle nous avons été appelés : être sacrement de communion. N’oubliez pas que ce qui attirait dans l’Église primitive, c’était comment ils s’aimaient. C’était – c’est et ce sera- la meilleure évangélisation.

6. Pour saint Turibio est arrivé le moment de passer sur la rive définitive, vers cette terre qui l’attendait et qu’il savourait en quittant sans cesse la rive. Ce nouveau départ, il ne l’a pas fait seul. Tout comme dans le tableau que je vous ai commenté au début, il allait à la rencontre des saints suivi d’une grande foule derrière lui. C’est le pasteur qui a su remplir ‘‘sa valise’’ de visages et de noms. Ils étaient son passeport pour le ciel. Et c’était si vrai qu’au moment où le pasteur rendait son âme à Dieu, il n’a pas voulu omettre l’accord final. Il l’a fait uni à son peuple et un aborigène lui jouait de la flûte afin que l’âme de son pasteur ressente la paix. Chers frères, quand nous aurons à entreprendre l’ultime voyage, puissions-nous vivre cela! Demandons au Seigneur de nous l’accorder [12]!

Et, s’il vous plaît, n’oubliez pas de prier pour moi !

Discours du pape François lors de la veillée mariale à Trujillo

Le samedi 20 janvier, le pape François a présidé une célébration mariale en la fête de la Virgen de la Puerta. Cette veillée s’est déroulée sur la Place d’Armes dans le centre ville de Trujillo, tout près de la cathédrale. Des dizaines de milliers de personnes y ont participé. Voici le texte complet du discours du Saint Père lors de cette cérémonie: 

Chers frères et sœurs!

Je remercie Mgr Héctor Miguel pour ses paroles de bienvenue au nom de tout le peuple de Dieu qui est en pèlerinage dans ce pays.

Sur cette belle et historique place de Trujillo qui a su susciter des rêves de liberté pour tous les péruviens, nous sommes réunis aujourd’hui pour nous retrouver avec la ‘‘Petite Mère de Otzuco’’. Je sais les nombreux kilomètres que beaucoup d’entre vous ont parcourus pour être ici aujourd’hui, rassemblés sous le regard de la Mère. Cette place devient ainsi un sanctuaire à ciel ouvert où nous voulons tous nous laisser regarder par la Mère, par son doux et maternel regard. La Mère qui connaît le cœur des péruviens du nord et de tant d’autres endroits ; elle a vu vos larmes, vos rires, vos aspirations. Sur cette place, on veut faire trésor de la mémoire d’un peuple qui sait que Marie est Mère et qu’elle n’abandonne pas ses enfants.

La maison est en fête d’une manière particulière. Les images venues de différents endroits de cette région nous accompagnent. En même temps que la bien-aimée Vierge Immaculée de la Porte d’Otuzco, je salue et je souhaite la bienvenue à la Sainte Croix de Chalpón de Chiclayo, au Seigneur Prisonnier d’Ayabaca, à la Vierge des Grâces de Paita, au Divin Enfant du Miracle d’Eten, à la Vierge des Douleurs de Cajamarca, à la Vierge de l’Assomption de Cutervo, à l’Immaculée Conception de Chota, à Notre-Dame de Grandes Grâces de Huamachuco, à Saint Turibio de Mogrovejo de Tayabamba (Huamachuco), à la Vierge de l’Assomption de Chachapoyas, à la Vierge de l’Assomption d’Usquil, à la Vierge du Secours de Huanchoco, aux Reliques des Martyrs Conventuels de Chimbote.

Chaque communauté, chaque petite localité de ce territoire est assistée par le visage d’un saint, par l’amour pour Jésus Christ et pour sa Mère. Et il faut réaliser que là où il y a une communauté, là où il y a de la vie et des cœurs qui battent et qui sont désireux de trouver des raisons pour espérer, pour chanter, pour danser, pour vivre dignement… là se trouve le Seigneur, là nous trouvons sa Mère et aussi l’exemple de nombreux saints qui nous aident à demeurer joyeux dans l’espérance.

Avec vous, je rends grâce à notre Dieu pour sa délicatesse. Il trouve le moyen de s’approcher de chacun de manière à ce qu’on puisse le recevoir; et ainsi naissent les invocations les plus variées. Elles expriment le désir de notre Dieu qui veut être proche de chaque cœur parce que la langue de l’amour de Dieu, c’est toujours un dialecte; il n’a pas une autre manière de le faire. Et en outre, c’est un fait porteur d’espérance que de voir comment la Mère adopte les traits caractéristiques de ses enfants, leur manière de se vêtir, le dialecte des siens pour les faire participer à sa bénédiction. Marie sera toujours une Mère métisse, parce que dans son cœur tous les sangs trouvent une place, parce que l’amour recherche tous les moyens pour aimer et être aimé. Toutes ces images nous rappellent la tendresse avec laquelle Dieu veut être proche de chaque population, de chaque famille, de vous, de moi, de tous.

Je sais l’amour que vous portez à la Vierge Immaculée de la Porte d’Otuzco et qu’avec vous je voudrais déclarer aujourd’hui : Vierge de la Porte, ‘‘Mère de la Miséricorde et de l’Espérance’’. Sainte Vierge qui, tout au long des siècles passés, a montré son amour pour les enfants de cette terre, quand placée sur une porte, elle les a défendus et les a protégés des menaces qui les affectaient, suscitant l’amour de tous les Péruviens jusqu’à nos jours.

Elle continue de nous défendre et de nous indiquer la Porte qui nous ouvre le chemin de la vie authentique, de la Vie qui ne dépérit pas. Elle est celle qui sait accompagner chacun de ses enfants pour qu’ils retournent à la maison. Elle nous accompagne et nous conduit jusqu’à la Porte qui donne la Vie, parce que Jésus ne veut que personne reste dehors, à la merci de l’intempérie. Elle accompagne ainsi «la nostalgie de beaucoup du retour à la maison du Père qui attend leur venue»[1] et qui souvent ne savent pas comment revenir. Comme le disait saint Bernard : « Toi qui te sens loin de la terre ferme, entraîné par les vagues de ce monde, au milieu des bourrasques et des tempêtes : regarde l’Étoile et invoque Marie »[2]. Elle nous indique le chemin de la maison, elle nous conduit jusqu’à Jésus qui est la Porte de la Miséricorde.

En 2015, nous avons eu la joie de célébrer le Jubilé de la Miséricorde. Une année durant laquelle j’ai invité tous les fidèles à passer par la Porte de la Miséricorde, «où quiconque entrera pourra faire l’expérience de l’amour de Dieu qui console, pardonne, et donne l’espérance»[3]. Et j’aimerais réitérer avec vous le même désir que j’avais alors : «Combien je voudrais que les années à venir soient comme imprégnées de miséricorde pour aller à la rencontre de chacun en lui offrant la bonté et la tendresse de Dieu ! »[4]. Comme je voudrais que cette terre habitée par la Mère de la Miséricorde et de l’Espérance puisse démultiplier et apporter la bonté et la tendresse de Dieu en tout lieu. Car, chers frères, il n’y a pas de meilleure médecine pour soigner tant de blessures qu’un cœur qui connaît la miséricorde, qu’un cœur qui sait avoir de la compassion face à la souffrance et au malheur, face à l’erreur et au désir de se relever de beaucoup qui souvent ne savent pas comment y parvenir.

La compassion est active parce que «nous avons appris que Dieu se penche sur nous (cf. Os. 11, 14) pour que nous puissions, nous aussi, l’imiter et nous pencher sur nos frères » [5]. Nous pencher en particulier sur ceux qui souffrent le plus. Comme Marie, nous devons être attentifs à ceux qui n’ont plus le vin de la fête, comme cela est arrivé aux noces de Cana.

En regardant Marie, je ne voudrais pas terminer sans vous inviter à penser à toutes les mères et grands-mères de cette Nation ; elles sont la véritable force motrice de la vie et des familles du Pérou. Que serait le Pérou sans les mères et les grands-mères, que serait notre vie sans elles ! L’amour pour Marie doit nous aider à avoir des attitudes de reconnaissance et de gratitude envers la femme, envers nos mères et nos grands-mères qui sont un rempart dans la vie de nos cités. Presque toujours silencieuses, elles font avancer la vie. C’est le silence et la force de l’espérance. Merci pour leur témoignage.

Reconnaître et remercier; toutefois en regardant les mères et les grands-mères, je voudrais vous inviter à lutter contre un fléau qui touche notre continent américain: les nombreux cas de féminicide. Il y a de nombreuses situations de violence qui sont étouffées derrière tant de murs. Je vous invite à lutter contre cette source de souffrance, en demandant que soient encouragées une législation et une culture du rejet de toute forme de violence.

Chers frères, la Vierge de la Porte, Mère de la Miséricorde et de l’Espérance nous montre le chemin et nous indique la meilleure protection contre le mal de l’indifférence et de l’insensibilité. Elle nous conduit jusqu’à son Fils et elle nous invite aussi à promouvoir et à faire rayonner une « culture de la miséricorde, fondée sur la redécouverte de la rencontre des autres: une culture dans laquelle personne ne regarde l’autre avec indifférence ni ne détourne le regard quand il voit la souffrance des frères»[6].

Discours du pape François lors de la rencontre avec les prêtres, religieux, religieuses et séminaristes à Trujillo

Vous trouverez ci-dessous le texte de l’allocution du pape François telle que prononcée lors de la rencontre avec les prêtres, religieux, religieuses et séminaristes de Trujillo, Pérou:

Chers frères et sœurs, Bonsoir!

Je remercie pour les paroles que Monseigneur José Eguren Anselmi, archevêque de Piura, m’a adressées au nom de toutes les personnes présentes.

Vous rencontrer, vous connaître, vous écouter et exprimer l’amour pour le Seigneur et pour la mission qu’il nous a donnée est important. Je sais que vous avez fait des efforts pour être ici.

Merci!

C’est le Collège Séminaire, l’un des premiers créés en Amérique Latine pour la formation de nombreuses générations d’évangélisateurs, qui nous reçoit. Me retrouver ici et avec vous, c’est sentir que nous sommes dans l’un de ces ‘‘berceaux’’ de nombreux missionnaires. Et je n’oublie que cette terre a vu mourir, en mission, saint Toribio de Mogrovejo, patron des évêques latino- américains. Tout nous porte à regarder nos racines, ce qui nous soutient tout au long du temps et de l’histoire pour grandir et donner des fruits. Nos vocations auront toujours cette double dimension : des racines dans la terre et le cœur dans le ciel. Quand l’un manque, quelque chose commence à aller mal et notre vie peu à peu dépérit (cf. Lc 13, 6-9).

J’aime souligner que notre foi, notre vocation fait mémoire; c’est une dimension deutéronomique de la vie. Elles font mémoire, car elles savent reconnaître que ni la vie, ni la foi, ni l’Église ne commencent par la naissance de qui ce soit parmi nous : la mémoire regarde le passé pour trouver la sève qui a irrigué durant des siècles le cœur des disciples, et ainsi elle reconnaît le passage de Dieu dans la vie de son peuple. Mémoire de la promesse qu’il a faite à nos pères et qui, lorsqu’elle continue d’être vivante parmi nous, est cause de notre joie et nous fait chanter : « Quelles merveilles le Seigneur fit pour nous, nous étions en grande fête » (Ps 125, 3).

Je voudrais partager avec vous certaines vertus de ce fait de faire mémoire.

1. La joie consciente d’elle-même.
L’évangile que nous avons écouté, nous le lisons de coutume en utilisant la grille de la

vocation et ainsi nous nous concentrons sur la rencontre des disciples avec Jésus. Je voudrais, d’abord, regarder Jean-Baptiste. Il était accompagné de deux de ses disciples et en voyant Jésus passer, il leur dit: «Voici l’Agneau de Dieu» (Jn 1, 36); en entendant cela, ils ont quitté Jean et ils ont suivi Jésus (cf. v. 37). C’est surprenant; ils avaient fréquenté Jean, ils savaient qu’il était un homme bon, mieux, le plus grand parmi ceux qui sont nés d’une femme, comme Jésus le qualifie (cf. Mt 11, 11), mais il n’était pas celui qui devait venir. Jean aussi attendait un autre plus grand que lui-même. Jean savait clairement qu’il n’était pas le Messie mais que simplement il l’annonçait. Jean était l’homme qui faisait mémoire de la promesse et de sa propre personne.

Jean exprime la conscience du disciple qui sait qu’il n’est pas, ni ne sera jamais le Messie, mais qu’il est uniquement appelé à indiquer le passage du Seigneur dans la vie de son peuple. Nous, consacrés, nous ne sommes pas appelés à supplanter le Seigneur, ni par nos œuvres, ni par nos missions, ni par nos innombrables activités. Il nous est simplement demandé de travailler avec le Seigneur, coude-à-coude, mais sans jamais oublier que nous n’occupons pas sa place. Cela ne nous fait pas ‘‘nous ramollir’’ dans la mission d’évangélisation; au contraire, cela nous galvanise et exige de nous de travailler en nous souvenant que nous sommes des disciples de l’unique Maître. Le disciple sait qu’il passe et passera toujours après le Maître. C’est la source de notre joie.

Il faut que nous sachions que nous ne sommes pas le Messie! Cela nous évite de nous croire trop importants, trop occupés (c’est courant d’entendre dans certaines régions: ‘‘non, ne va pas à cette paroisse, parce que le Père est toujours très occupé’’). Jean-Baptiste savait que sa mission était d’indiquer le chemin, d’initier des processus, d’ouvrir des espaces, d’annoncer qu’un Autre était porteur de l’Esprit de Dieu. Faire mémoire nous délivre de la tentation des messianismes.

Cette tentation se combat de plusieurs manières, mais aussi par le rire. Oui, apprendre à rire de soi-même nous donne la capacité spirituelle de nous mettre devant le Seigneur avec nos propres limites, nos erreurs et nos péchés, mais aussi avec nos succès, et avec la joie de savoir qu’il est à nos côtés. Un beau test spirituel, c’est de nous demander notre capacité de rire de nous-mêmes. Le rire nous sauve du néo-pélagianisme «autoréférentiel et prométhéen de ceux qui, en définitive, font confiance uniquement à leurs propres forces et se sentent supérieurs aux autres » (Exhort. Ap. Evangelii gaudium, n. 94). Chers frères, riez en communauté, et non pas de la communauté ou des autres. Gardons-nous de ces gens si mais si importants que, dans la vie, ils ont oublié de sourire !

2. L’heure de l’appel
Jean l’Évangéliste recueille dans Évangile même l’heure de ce moment qui a changé sa vie :

« Il était quatre heures de l’après-midi » (v. 39). La rencontre avec Jésus change la vie, marque un avant et un après. Il faut se rappeler cette heure, ce jour clef pour chacun d’entre nous, où nous nous sommes rendus compte que le Seigneur attendait quelque chose de plus. La mémoire de cette heure où nous avons été touchés par sa mémoire.

Chaque fois que nous oublions cette heure, nous oublions nos origines, nos racines; et en perdant ces repères fondamentaux, nous laissons de côté la chose la plus précieuse qu’un consacré puisse posséder : le regard du Seigneur. Peut-être n’es-tu pas content de cet endroit où le Seigneur t’a rencontré ; peut-être cela ne répond-il pas à une situation idéale ou que tu ‘‘aurais aimé mieux’’. Mais ce fut là qu’il t’a rencontré et a soigné tes blessures. Chacun d’entre nous connaît où et quand: peut-être à un moment caractérisé par des situations complexes, oui; dans des situations douloureuses, oui ; mais c’est là que t’a rencontré le Dieu de la Vie pour faire de toi un témoin de sa Vie, pour faire de toi une partie intégrante de sa Vie, pour te faire participer à sa mission et pour que tu sois avec lui une caresse de Dieu pour de nombreuses personnes. Il nous faut nous rappeler que nos vocations sont un appel d’amour pour aimer, pour servir. Si le Seigneur a jeté sur vous un regard d’amour et vous a choisis, ce n’est pas parce que vous êtes plus nombreux que les autres, car vous êtes le plus petit parmi les peuples, mais c’est par pur amour (cf. Dt 7, 7-8). Amour venant des entrailles, amour de miséricorde qui remue nos entrailles pour que nous allions servir les autres à la manière de Jésus Christ.

Je voudrais m’arrêter sur un aspect que je juge important. Beaucoup d’entre nous, au moment d’entrer au Séminaire ou dans la maison de formation, nous avons été encouragés par la foi de nos familles et de nos voisins. C’est ainsi que nous avons fait nos premiers pas, soutenus souvent par les manifestations de la piété populaire, qui au Pérou ont pris les formes plus exquises et pris racine dans le peuple fidèle et simple. Votre peuple a manifesté un grand attachement à Jésus Christ, à la Vierge ainsi qu’aux saints et aux bienheureux à travers de nombreuses dévotions que je n’ose pas énumérer de peur d’en omettre. Dans ces sanctuaires, «beaucoup de pèlerins prennent des décisions qui marquent leur vie. En ses murs sont inscrites beaucoup d’histoires de conversion, de pardon et de dons reçus, que des millions de personnes pourraient raconter » (5ème Conférence générale de l’Episcopat Latino-américain et des Caraïbes, Document d’Aparecida, 29 juin 2007, n. 260). Peut-être beaucoup de vos vocations sont-elles même gravées dans ces murs. Je vous exhorte à ne pas oublier, encore moins à mépriser, la foi fidèle et simple de votre peuple. Sachez accueillir, accompagner et encourager la rencontre avec le Seigneur. Ne devenez pas des professionnels du sacré, oubliant votre peuple, d’où le Seigneur vous a pris. Ne perdez pas la mémoire et le respect envers qui vous a appris à prier.

Se souvenir de l’heure de l’appel, faire mémoire, avec joie, du passage de Jésus Christ dans notre vie, cela nous aidera à dire cette belle prière de saint François Solano, grand prédicateur et ami des pauvres: « Mon bon Jésus, mon Rédempteur et mon ami. Qu’ai-je que tu ne m’aies donné ? Que sais-je que tu ne m’aies appris?»

Ainsi, le religieux, le prêtre, la consacrée, le consacré sont des personnes qui font mémoire, une mémoire joyeuse et reconnaissante : triade à former et à garder comme des ‘‘armes’’ face à tout ‘‘camouflage’’ vocationnel. La conscience reconnaissante élargit le cœur et nous incite au service. Sans reconnaissance, nous pouvons être de bons exécuteurs du sacré, mais il nous manquera l’onction de l’Esprit pour devenir serviteurs de nos frères, surtout des plus pauvres.

Le peuple fidèle de Dieu a du flair et sait distinguer entre le fonctionnaire du sacré et le serviteur reconnaissant. Il sait faire la différence entre celui qui fait mémoire et celui qui oublie. Le peuple de Dieu est endurant, mais il reconnaît celui qui le sert et le soigne avec l’huile de la joie et de la gratitude.

3. La joie contagieuse.
André était l’un des premiers disciples de Jean-Baptiste, qui avaient suivi Jésus ce jour-là.

Après être resté avec lui et avoir vu où il vivait, il est allé dans la maison de son frère Simon Pierre et lui a dit: «Nous avons trouvé le Messie» (Jn 1, 41). C’est la plus grande nouvelle qu’il puisse lui annoncer, et il l’a conduit à Jésus. La foi en Jésus est contagieuse, elle ne peut ni se confiner ni être enfermée; ici, on voit la fécondité du témoignage : les disciples nouvellement appelés attirent, à leur tour, d’autres à travers leur témoignage de foi, de la même manière que dans le passage de l’évangile, Jésus nous appelle à travers d’autres personnes. La mission jaillit spontanément de la rencontre avec Jésus. André commence son apostolat par les plus proches, par son frère Simon, presque comme quelque chose de naturel, en rayonnant de joie. C’est le meilleur signe que nous avons ‘‘découvert’’ le Messie. La joie est une constante dans le cœur des apôtres, et nous le constatons dans la force avec laquelle André confie à son frère: “Nous l’avons trouvé !”. Car « la joie de l’Évangile remplit le cœur et toute la vie de ceux qui rencontrent Jésus. Ceux qui se laissent sauver par lui sont libérés du péché, de la tristesse, du vide intérieur, de l’isolement. Avec Jésus Christ la joie naît et renaît toujours » (Exhort. ap. Evangelii gaudium, n. 1).

Cette joie nous ouvre aux autres, c’est une joie à transmettre. Dans le monde divisé dans lequel nous vivons, qui nous pousse à nous isoler, nous avons le défi d’être des artisans et des prophètes de communauté. Car, personne ne se sauve seul. Et à ce sujet, je voudrais être clair. La division ou l’isolement n’est pas quelque chose qui se produit ‘‘à l’extérieur’’ comme si c’était un problème du ‘‘monde’’. Chers frères, les divisions, les guerres, les isolements, nous les vivons également dans nos communautés. Et que de mal elles nous font ! Jésus nous envoie porter la communion, l’unité, mais souvent, il semble que nous le fassions désunis et, pire, souvent en nous faisant des crocs-en-jambe. On nous demande d’être des artisans de communion et d’unité; ce qui ne revient pas à penser tous de la manière, à faire tous la même chose. Cela signifie valoriser les apports, les différences, le don des charismes dans l’Église en sachant que chacun, avec ses qualités y met du sien, mais a besoin des autres. Seul le Seigneur a la plénitude des dons, lui seul est le Messie. Et il a voulu partager ses dons de telle manière que nous puissions tous offrir le nôtre en nous enrichissant avec celui des autres. Il faut se garder de la tentation du ‘‘fils unique’’ qui veut tout pour lui, car il n’a personne avec qui partager. À ceux à qui il revient d’assumer des missions dans le service de l’autorité, je demande, s’il vous plaît, de ne pas devenir autoréférentiels ; essayez de prendre soin de vos frères, faites en sorte qu’ils se sentent bien ; car le bien se communique. Ne tombons pas dans le piège d’une autorité qui devient autoritarisme parce qu’elle oublie que, avant tout, elle est une mission de service.

Chers frères, de nouveau, merci, et que cette mémoire deutéronomique nous rende plus joyeux et plus reconnaissants afin que nous soyons des serviteurs de l’unité au sein de notre peuple.

Que le Seigneur vous bénisse et que la Vierge Sainte vous protège ! Et n’oubliez pas de prier pour moi!

[00067-FR.01] [Texte original: Espagnol]

Homélie du pape François lors de la Messe sur la plage de Huanchaco, Pérou

CNS/Paul Messe sur la plage Huanchaco de Trujillo, Peru

Vous trouverez ci-dessous l’homélie du pape François lors de la Messe sur l’esplanade à Huanchaco, Pérou.

Cette terre a un goût d’Évangile. Tout l’environnement avec cette immense mer en arrière- fond nous aide à mieux comprendre l’expérience que les apôtres ont eue avec Jésus et que nous aussi, aujourd’hui, nous sommes invités à vivre. Je me réjouis de savoir que vous êtes venus de différents endroits du nord Pérou pour célébrer cette joie de l’Évangile.

Les disciples d’hier, comme beaucoup parmi vous aujourd’hui, gagnaient leur vie par la pêche. Ils utilisaient des barques comme certains d’entre vous continuent à le faire, avec les “embarcations de roseaux” [petits chevaux de roseaux] et, dans le même but, aussi bien pour eux que pour vous : gagner le pain de chaque jour. Voilà l’enjeu de la plupart de nos fatigues quotidiennes : pouvoir faire progresser nos familles et leur donner ce qui les aidera à construire un avenir meilleur.

Cette ‘‘lagune aux poissons dorés’’, comme on a voulu l’appeler, a été une source de vie et de bénédiction pour de nombreuses générations. Elle a su nourrir les rêves et les espérances au fil du temps.

Vous, comme les apôtres, vous connaissez la violence de la nature et vous avez subi ses coups. Tout comme eux ont affronté la tempête sur la mer, vous avez été frappés par le terrible coup du phénomène ‘‘El Niño de la côte’’, dont les conséquences douloureuses durent encore dans de nombreuses familles, en particulier dans les familles qui n’ont toujours pas pu reconstruire leurs maisons. C’est également pour cette raison que j’ai voulu être ici et prier avec vous.

En cette Eucharistie, nous nous souvenons également de ce moment si difficile qui interpelle et bien des fois fait douter notre foi. Nous voulons nous unir à Jésus. Il connaît la souffrance et les épreuves ; il a traversé toutes les souffrances pour pouvoir nous accompagner dans les nôtres. Jésus sur la croix veut être proche de chaque situation douloureuse pour nous donner la main et nous aider à nous relever. Car il est entré dans notre histoire, il a voulu partager notre chemin et toucher nos plaies. Nous n’avons pas un Dieu insensible à ce que nous éprouvons et à ce que nous souffrons, au contraire, au cœur de la souffrance il nous donne la main.

Ces chocs interpellent et mettent en jeu la valeur de notre esprit et de nos attitudes les plus élémentaires. Ainsi nous voyons combien il est important de ne pas être seuls mais unis, d’être riches de cette union qui est le fruit de l’Esprit Saint.

Qu’est-ce qui est arrivé aux jeunes filles de l’Évangile que nous venons d’entendre ? Soudain, elles entendent un cri qui les réveille et les met en mouvement. Certaines se sont rendu compte qu’elles n’avaient pas l’huile nécessaire pour éclairer le chemin dans l’obscurité ; les autres, en revanche, ont rempli leurs lampes et ont pu trouver et éclairer le chemin qui les conduisait vers l’époux. Au moment opportun, chacune a montré avec quoi elle avait rempli sa vie.

Il en va de même pour nous. Dans des circonstances déterminées, nous prenons conscience de ce avec quoi nous avons rempli notre vie. Comme il est important de remplir nos vies avec cette huile qui permet d’alimenter nos lampes dans les divers moments d’obscurité et de trouver les chemins pour aller de l’avant !

Je sais que, dans l’obscurité, quand elles ont subi le choc du ‘‘Niño’’, ces populations ont su se mettre en mouvement et elles avaient l’huile pour accourir et s’entraider comme de vrais frères. Il y avait l’huile de la solidarité, de la générosité qui vous a mis en mouvement et vous êtes allés à la rencontre du Seigneur par d’innombrables gestes concrets d’aide. En pleine obscurité, avec beaucoup d’autres, vous avez été des cierges vivants qui ont éclairé le chemin grâce à des mains ouvertes et disponibles pour atténuer la souffrance et partager ce que vous aviez dans leur pauvreté.

Dans la lecture, nous pouvons observer comment les jeunes filles qui n’ont pas d’huile sont parties au village pour en acheter. A ce moment crucial de leur vie, elles se sont rendu compte que leurs lampes étaient vides, qu’il leur manquait l’essentiel pour trouver le chemin de la joie authentique. Elles étaient seules et ainsi elles ont été privées de la fête. Il y a des choses, comme vous le savez, qui ne s’improvisent pas et qui, encore moins, ne s’achètent pas. L’âme d’une communauté se juge à la manière dont elle parvient à s’unir pour faire face aux moments difficiles, à l’adversité, pour maintenir vivante l’espérance. Par cette attitude, vous donnez le meilleur témoignage évangélique : « À ceci tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l’amour les uns pour les autres » (Jn 13, 35). Parce que la foi nous ouvre à un amour concret, fait d’œuvres, de mains tendues, de compassion ; un amour qui sache construire et reconstruire l’espérance quand tout semble perdu. Ainsi, nous devenons participants de l’action divine, telle que nous la présente l’apôtre Jean quand il nous montre que Dieu essuie les larmes de ses enfants. Et cette mission divine, Dieu l’accomplit avec la même tendresse que celle d’une mère qui cherche à faire sécher les larmes de ses enfants. Quelle belle question nous posera le Seigneur : combien de larmes as-tu essuyées aujourd’hui ?

D’autres tempêtes peuvent s’abattre sur ces côtes et avoir des effets dévastateurs sur la vie des enfants de ce pays. Des tempêtes qui nous interpellent également comme communauté et mettent en jeu la valeur de notre esprit. Ces tempêtes s’appellent la violence organisée telle que l’assassinat et l’insécurité qu’il provoque ; le manque de perspectives éducatives et professionnelles, en particulier dans les rangs des plus jeunes, ce qui les empêche de construire un avenir avec dignité ; le manque d’un toit sûr pour de nombreuses familles forcées de vivre dans des zones de grande instabilité et sans accès sûrs ; ainsi que tant d’autres situations que vous connaissez et que vous subissez, qui comme les pires glissements de terrain détruisent la confiance mutuelle si nécessaire pour construire un réseau de soutien et d’espérance. Des glissements de terrain qui affectent l’âme et nous interpellent concernant l’huile dont nous disposons pour y faire face.

Bien des fois, nous nous interrogeons sur la manière d’affronter ces tempêtes, ou sur la façon d’aider nos enfants à aller de l’avant face à ces situations. Je voudrais vous le dire : il n’y a pas de meilleure solution que celle de l’Évangile. Elle s’appelle Jésus Christ. Remplissez toujours vos vies de l’Évangile. Je voudrais vous encourager à être une communauté qui se laisse oindre par son Seigneur avec l’huile de l’Esprit. Il transforme tout, renouvelle tout, consolide tout. En Jésus, nous avons la force de l’Esprit pour ne pas rendre naturel ce qui nous fait du mal, ce qui assèche notre cœur, et pire, ce qui nous vole l’espérance. En Jésus, nous avons l’Esprit qui nous tient unis pour nous soutenir les uns les autres et pour affronter ce qui veut nous prendre le meilleur de nos familles. En Jésus, Dieu fait de nous une communauté croyante qui sait se soutenir; une communauté qui espère et par conséquent lutte pour faire reculer et transformer les nombreuses adversités ; une communauté qui aime, car elle ne permet pas que nous croisions les bras. Avec Jésus, l’âme de ce peuple de Trujillo pourra continuer à s’appeler ‘‘la ville de l’éternel printemps’’, parce qu’avec le Seigneur tout est une opportunité pour l’espérance.

Je connais l’amour que ce pays a pour la Vierge, et je sais combien la dévotion à Marie vous soutient toujours en vous conduisant jusqu’à Jésus. Demandons-lui de nous couvrir de son manteau et de nous conduire toujours à son Fils ; mais disons-le-lui par cette belle chanson populaire : « Petite Vierge de la porte, accorde-moi ta bénédiction. Petite Vierge de la porte, donne-nous la paix et beaucoup d’amour ».

[00066-FR.01] [Texte original: Espagnol]

Église en sortie 20 janvier 2018

Cette semaine à Église en sortie, Francis Denis reçoit la réalisatrice Annabel Loyola qui nous parle de son tout dernier documentaire « Le dernier souffle ». On vous présente la première chronique des actualités de la rue avec l’abbé Claude Paradis. Dans la troisième partie de l’émission, on s’entretient avec Sr. Catherine Mckee sur son tout dernier livre « Charles de Foucauld, le frère universel ».

Visite du pape François au foyer « Le Petit Prince » à Puerto Maldonado

Le Saint Père s’est arrêté dans un foyer pour enfants en difficulté, « Le Petit Prince » (Hogar El Principito), à Puerto Maldonado au Pérou, ce vendredi 19 janvier. Cette rencontre s’est déroulée dans le cadre de son 22e voyage apostolique. Veuillez trouver le texte complet de son discours ci-dessous:

Chers frères et sœurs, Chers enfants,

Merci beaucoup pour ce bel accueil et pour vos paroles de bienvenue. Vous voir danser me comble de joie.

Je ne pouvais pas repartir de Porto Maldonado sans venir vous rendre visite. Vous avez voulu venir de différentes maisons d’accueil au Foyer Le Petit Prince. Merci pour les efforts que vous avez faits pour être ici aujourd’hui.

Nous venons de célébrer la Nativité. Nous avons eu le cœur ému par la représentation de l’Enfant Jésus. C’est lui notre trésor, et vous, les enfants, vous êtes son reflet, et vous êtes aussi notre trésor, le trésor de nous tous, le trésor le plus précieux que nous devons protéger. Pardonnez les fois où, nous les plus grands, nous ne le faisons pas, ou bien nous ne vous donnons pas l’importance que vous méritez. Vos regards, vos vies exigent toujours un plus grand engagement et du travail de notre part pour que nous ne devenions pas aveugles ou indifférents face à tant d’autres enfants qui souffrent et sont dans le besoin. Vous êtes, sans l’ombre d’un doute, le trésor le plus précieux que nous devions protéger.

Chers enfants du Foyer Le Petit Prince, et vous les jeunes des autres maisons d’accueil, je sais que certains d’entre vous sont parfois tristes la nuit. Je sais que vous manquent le papa ou la maman qui ne sont pas là, et je sais aussi qu’il y a des blessures qui vous font beaucoup souffrir. Dirsey, tu as été courageux et tu nous as fait part de cela. Et tu me disais: ‘‘Que mon message soit un message d’espérance’’. Mais laisse-moi te dire quelque chose : ta vie, tes paroles, et celle de vous tous sont une lumière d’espérance. Je voudrais vous remercier pour votre témoignage. Merci d’être lumière d’espérance pour nous tous.

Je suis heureux de voir que vous avez un foyer où vous êtes accueillis, où, avec tendresse et amitié, on vous aide à découvrir que Dieu vous tend les mains et qu’il sème des rêves vos cœurs. Quel beau témoignage que le vôtre, vous les jeunes qui êtes passés par ce chemin, qui avez rempli hier votre cœur d’amour dans cette maison, et qui aujourd’hui avez pu construire votre avenir ! Vous êtes pour nous tous le signe des immenses potentialités que possède chaque personne. Pour ces enfants, vous êtes le meilleur exemple à suivre, l’espérance qu’eux aussi pourront le faire. Nous avons tous besoin de modèles à suivre, les enfants ont besoin de regarder en avant et de trouver des modèles positifs : ‘‘je veux être comme lui ou comme elle’’, sentent-ils et disent-ils. Tout ce que vous les jeunes pouvez faire, comme venir jouer avec eux, passer du temps avec eux, est important. Soyez pour eux comme disait le Petit Prince: les petites étoiles qui éclairent dans la nuit (cf. Antoine de Saint-Exupéry, XXIV; XXVI).

Certains d’entre vous, jeunes qui nous accompagnez, viennent des communautés indigènes. Avec tristesse vous voyez la destruction des forêts. Vos grands-parents vous ont enseigné à les découvrir ; ils y trouvaient leur nourriture et les médicaments qui les soignaient. Elles sont aujourd’hui dévastées par le vertige d’un progrès mal compris. Les rivières qui vous ont vus jouer et qui vous ont offert de la nourriture sont aujourd’hui boueuses, polluées, mortes. Jeunes, ne vous résignez pas face à ce qui est en train de se passer. Ne renoncez pas à l’héritage de vos grands- parents, à votre vie ni à vos rêves. J’aimerais vous encourager à étudier, à vous préparer, à saisir l’occasion que vous avez de vous former. Le monde a besoin de vous, jeunes des peuples autochtones, et il a besoin de vous comme vous êtes. Ne vous contentez pas d’être le wagon de queue de la société, accrochés et vous laissant porter ! Nous avons besoin de vous comme moteur, qui impulse. Ecoutez vos grands-parents, valorisez vos traditions, ne refreinez pas votre curiosité. Cherchez vos racines et, en même temps, ouvrez les yeux à ce qui est nouveau, oui… et faites votre propre synthèse. Rendez au monde ce que vous apprenez, car le monde a besoin de vous dans votre originalité, tels que vous êtes en réalité, non comme des imitations. Nous avons besoin de vous dans votre authenticité, en tant que jeunes fiers d’appartenir aux peuples amazoniens et qui apportent à l’humanité une alternative de vie vraie. Chers amis, souvent nos sociétés ont besoin de corriger le cap et vous, les jeunes autochtones – j’en suis sûr – vous pouvez énormément aider dans ce défi, surtout en nous apprenant un style de vie basé sur la sauvegarde et non sur la destruction de tout ce qui s’oppose à notre cupidité.

Je voudrais remercier le Père Xavier, les religieux et religieuses, les missionnaires laïques qui font un travail magnifique et tous les bienfaiteurs qui forment cette famille ; les volontaires qui offrent leur temps gratuitement, qui est un baume rafraichissant sur les blessures. Je voudrais remercier aussi ceux qui confirment ces jeunes dans leur identité amazonienne et les aident à forger un avenir meilleur pour leurs communautés et pour toute la planète.

Chers enfants, demandons à Dieu de nous donner sa bénédiction. Que le Seigneur vous bénisse et vous garde, qu’il fasse resplendir sur vous son visage, que le Seigneur tourne vers vous son visage et vous accorde tous ses bienfaits, au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit. (Cf. Nb 6, 24-26 ; Ps 66, Bénédiction du Temps ordinaire)

Je vous demande une faveur : priez pour moi et merci d’être les petites étoiles qui éclairent dans la nuit.

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