Église en sortie 9 décembre 2016

Cette semaine à Église en sortie, on s’entretient avec Suzanne Desrochers, adjointe au directeur de l’Office de catéchèse du Québec. On vous présente les moments forts de la cérémonie de fermeture de la Porte de la miséricorde de l’archidiocèse de Montréal à la cathédrale Marie-Reine-du-Monde. Dans la troisième partie de l’émission, Francis Denis reçoit Francine Beaulieu-Roy qui nous parle de son livre intitulé « Projet de mariage, projet de vie ».

Montréal, une histoire à redécouvrir

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Le 11 décembre prochain, aura lieu le lancement du 375e anniversaire de la ville de Montréal. Cette année sera donc l’occasion de connaître davantage cette Ville-Marie qui allait naître il y a bientôt 375e ans. Outre les nombreuses activités organisées par la ville de Montréal pour célébrer cette riche histoire, tous sont invités à faire mémoire de ce passé pas si loin de nous afin de réfléchir aux grandes orientations qui détermineront les années à venir. En ce sens, la lettre pastorale de Mgr Christian Lépine, archevêque de Montréal, intitulée « Au nom de Jésus » nous offre une profonde réflexion qui peut nous aider à mieux comprendre la métropole du Québec.

Ville-Marie, une aventure mystique

Lorsqu’on côtoie trop souvent une réalité, nous avons tendance à nous y habituer, à ne plus y porter attention et même à la prendre pour acquise. Une ville ne fait pas exception à ce phénomène. Parlez-en à tous ces Parisiens qui ne sont jamais montés dans la tour Eiffel ou à tous ces Torontois qui ne sont jamais montés dans la Tour du CN ! De la même manière, trop peu souvent les Montréalais s’arrêtent et s’interrogent sur l’histoire de leur ville, spécialement son passé religieux, bien que sa fondation soit indissociablement « animée par un souffle d’évangélisation ».

Selon Mgr Lépine, Montréal est d’abord et avant tout un « projet inspiré par Dieu » fondé par des hommes et des femmes qui « au Nom de Jésus […] ont fondé la ville de Montréal le 17 mai 1642 ». Faire abstraction de cette dimension religieuse de la fondation de celle que l’on nommait à l’époque « Ville-Marie » participe, selon moi, de cette « mémoire blessée » selon les mots de l’historien Éric Bédard (19 :45min). Comment surmonter cette amnésie volontaire d’« un monde qui veut souvent se construire sans Dieu » ?

Pour une guérison de la mémoire

Ce monde « sans Dieu » correspond-t-il vraiment aux promesses telles que formulées par certains courants influents lors de la Révolution Tranquille ? Une « juste conception de la laïcité » est bien évidemment louable. Je ne connais aucun évêque ou prêtre désireux de gérer le boulevard Métropolitain. Cependant, faire comme si la forme la plus haute de l’expérience humaine s’exprimait dans la culture du divertissement m’apparaît être une des sources de la crise actuelle telle que décrite dans le document de l’AECQ « Des solidarités à reconstituer et à reconstruire ». Esquiver la tentation de réduire les citoyens à de simples « homo economicus » est l’une des tâches importantes des institutions aujourd’hui, et c’est à ce rendez-vous que nous convie Mgr Christian Lépine lors de ce 375e.

En ce sens, retrouver l’accès à l’inspiration de nos pères fondateurs « par le pardon et la confiance, le dialogue et la réconciliation » dépend d’un nouveau souffle évangélisateur selon les deux conseils du pape François lors de la Messe d’action de grâce pour la canonisation équipollente des saints François de Laval et Marie de l’Incarnation, à Rome, le 12 octobre 2014 :

Le premier est celui-ci : « Souvenez-vous de ceux qui vous ont dirigés : ils vous ont annoncé la parole de Dieu. La mémoire des missionnaires nous soutient au moment où nous faisons l’expérience de la rareté des ouvriers de l’Évangile.

Le second est celui-ci : Rendre hommage à qui a souffert pour nous apporter l’Évangile signifie livrer nous aussi la bonne bataille de la foi, avec humilité, douceur et miséricorde, dans la vie de chaque jour. Et cela porte du fruit.

 Mémoire de ceux qui nous ont précédés, de ceux qui ont fondé notre Église. Église féconde que celle du Québec ! Féconde de nombreux missionnaires qui sont allés partout. []

Maintenant un conseil : que cette mémoire ne nous conduise pas à abandonner la franchise et le courage. Le diable est jaloux et il ne tolère pas qu’une terre soit ainsi féconde de missionnaires. Prions le Seigneur pour que le Québec revienne sur ce chemin de la fécondité, pour donner au monde de nombreux missionnaires. [] Que le Québec redevienne cette source de bons et de saints missionnaires. 

Message du pape François pour la Journée mondiale de prière pour les vocations

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Poussés par l’Esprit
pour la mission

Chers frères et sœurs,
Au cours des années passées, nous avons eu l’occasion de réfléchir sur deux aspects qui concernent la vocation chrétienne : l’invitation à ‘‘sortir de soi’’ pour se mettre à l’écoute de la voix du Seigneur et l’importance de la communauté ecclésiale en tant que lieu privilégié où l’appel de Dieu naît, s’alimente et s’exprime.

À présent, à l’occasion de la 54ème Journée Mondiale de Prière pour les Vocations, je voudrais m’arrêter sur la dimension missionnaire de l’appel chrétien. Celui qui s’est laissé attirer par la voix de Dieu et s’est mis à la suite de Jésus découvre bien vite en soi l’irrésistible désir de porter la Bonne Nouvelle à ses frères, à travers l’évangélisation et le service de la charité. Tous les chrétiens sont constitués missionnaires de l’Évangile ! Le disciple, en effet, ne reçoit pas le don de l’amour de Dieu pour une consolation privée ; il n’est pas appelé à porter lui-même ni à défendre les intérêts d’une entreprise ; il est simplement touché et transformé par la joie de se sentir aimé de Dieu et il ne peut pas garder cette expérience pour lui-même : « La joie de l’Évangile qui remplit la vie de la communauté des disciples est une joie missionnaire ». (Exhort. ap. Evangelii gaudium, n. 21)

L’engagement missionnaire, par conséquent, n’est pas quelque chose qu’on va ajouter à la vie chrétienne, comme s’il s’agissait d’un ornement, mais au contraire, il est situé au cœur de la foi même : la relation avec le Seigneur implique le fait d’être envoyé dans le monde comme prophète de sa parole et témoin de son amour.

Même si nous expérimentons en nous beaucoup de fragilité et que nous pouvons parfois nous sentir découragés, nous devons élever la tête vers Dieu, sans nous laisser écraser par le sentiment d’inadéquation ou sans céder au pessimisme, qui fait de nous des spectateurs passifs d’une vie fatiguée et routinière. Il n’y a pas de place pour la crainte : c’est Dieu lui-même qui vient purifier nos ‘‘lèvres impures’’, en nous rendant aptes pour la mission : « Ta faute est enlevée, ton péché est pardonné. J’entendis alors la voix du Seigneur qui disait : ‘‘Qui enverrai-je ? qui sera notre messager ?’’ Et j’ai répondu : ‘‘Me voici : envoie-moi !’’ » (Is 6, 6-8).

Chaque disciple missionnaire sent dans son cœur cette voix divine qui l’invite à ‘‘passer’’ au milieu des gens, comme Jésus, ‘‘en guérissant et faisant du bien’’ à tous (cf. Ac 10, 38). J’ai déjà eu l’occasion de rappeler, en effet, qu’en vertu du baptême, chaque chrétien est un ‘‘christophe’’, c’est-à- dire ‘‘quelqu’un qui porte le Christ’’ à ses frères (cf. Catéchèse, 30 janvier 2016). Cela vaut de manière particulière pour ceux qui sont appelés à une vie de consécration spéciale et également pour les prêtres, qui ont généreusement répondu : ‘‘Me voici, Seigneur, envoie-moi !’’. Avec un enthousiasme missionnaire renouvelé, ils sont appelés à sortir des enceintes sacrées du temple, pour permettre à la tendresse de Dieu de déborder en faveur des hommes (cf. Homélie de la Messe chrismale, 24 mars 2016). L’Église a besoin de prêtres ainsi : confiants et sereins pour avoir découvert le vrai trésor, anxieux d’aller le faire connaître à tous avec joie (cf. Mt 13, 44) !

Certes, nombreuses sont les questions qui surgissent lorsque nous parlons de la mission chrétienne : que signifie être missionnaire de l’Évangile ? Qui nous donne la force et le courage de l’annonce ? Quelle est la logique évangélique dont s’inspire la mission ? À ces interrogations, nous pouvons répondre en contemplant trois scènes de l’Évangile : le début de la mission de Jésus dans la synagogue de Nazareth (cf. Lc 4, 16-30) ; le chemin que parcourt le Ressuscité aux côtés des disciples d’Emmaüs (cf. Lc 24, 13-35) ; enfin, la parabole de la semence (cf. Mc 4, 26-27).

Jésus est oint par l’Esprit et envoyé. Être disciple missionnaire signifie participer activement à la mission du Christ, que Jésus lui-même décrit dans la synagogue de Nazareth : « L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs leur libération, et aux aveugles qu’ils retrouveront la vue, remettre en liberté les opprimés, annoncer une année favorable accordée par le Seigneur » (Lc 4, 18- 19). C’est aussi notre mission : être oints par l’Esprit et aller vers nos frères annoncer la Parole, en devenant pour eux un instrument de salut.

Jésus se joint à notre chemin. Face aux questions qui émergent du cœur de l’homme et aux défis qui surgissent de la réalité, nous pouvons éprouver une sensation d’égarement et sentir un manque d’énergies et d’espérance. Il y a le risque que la mission chrétienne apparaisse comme une pure utopie irréalisable ou, en tout cas, comme une réalité qui dépasse nos forces. Mais si nous contemplons Jésus ressuscité, qui marche aux côtés des disciples d’Emmaüs (cf. Lc 24, 13-15), notre confiance peut être ravivée ; dans cette scène évangélique, nous avons une authentique ‘‘liturgie de la route’’, qui précède celle de la Parole et du Pain rompu et nous fait savoir que, à chacun de nos pas, Jésus est à nos côtés ! Les deux disciples, blessés par le scandale de la Croix, sont en train de retourner chez eux en parcourant la voie de l’échec : ils portent dans leur cœur une espérance brisée et un rêve qui ne s’est pas réalisé. En eux, la tristesse a pris la place de la joie de l’Évangile. Que fait Jésus ? Il ne les juge pas, il parcourt la même route qu’eux et, au lieu d’élever un mur, il ouvre une nouvelle brèche. Lentement, il transforme leur découragement, il rend brûlants leurs cœurs et ouvre leurs yeux, en annonçant la Parole et en rompant le Pain. De la même manière, le chrétien ne porte pas seul l’engagement de la mission, mais dans les fatigues et dans les incompréhensions, il fait aussi l’expérience que « Jésus marche avec lui, parle avec lui, respire avec lui, travaille avec lui. Il ressent Jésus vivant avec lui au milieu de l’activité missionnaire » (Exhort. ap. Evangelii gaudium, n. 266).

Jésus fait germer la semence. Enfin, il est important d’apprendre de l’Évangile le style de l’annonce. Souvent, en effet, même avec les meilleures intentions, il peut arriver de céder à une certaine frénésie du pouvoir, au prosélytisme ou au fanatisme intolérant. L’Évangile, au contraire, nous invite à rejeter l’idolâtrie du succès et de la puissance, la préoccupation excessive pour les structures, et une certaine anxiété qui répond plus à un esprit de conquête qu’à l’esprit du service. La semence du Royaume, bien que petite, invisible et parfois insignifiante, grandit silencieusement grâce à l’œuvre incessante de Dieu : « Il en est du règne de Dieu comme d’un homme qui jette en terre la semence : nuit et jour, qu’il dorme ou qu’il se lève, la semence germe et grandit, il ne sait comment » (Mc 4, 26- 27). Voilà notre première confiance : Dieu dépasse nos attentes et il nous surprend par sa générosité, en faisant germer les fruits de notre travail au-delà des calculs de l’efficacité humaine.

Par cette confiance évangélique, nous nous ouvrons à l’action silencieuse de l’Esprit, qui est le fondement de la mission. Il ne peut jamais y avoir de pastorale vocationnelle ni de mission chrétienne sans la prière assidue et contemplative. En ce sens, il faut alimenter la vie chrétienne par l’écoute de la Parole de Dieu et, surtout, prendre soin de la relation personnelle avec le Seigneur dans l’adoration eucharistique, ‘‘lieu’’ privilégié de la rencontre avec Dieu.

C’est cette intime amitié avec le Seigneur que je désire vivement encourager, surtout pour implorer du ciel de nouvelles vocations au sacerdoce et à la vie consacrée. Le peuple de Dieu a besoin d’être guidé par des pasteurs qui consacrent leur vie au service de l’Évangile. C’est pourquoi je demande aux communautés paroissiales, aux associations et aux nombreux groupes de prière présents dans l’Église : contre la tentation du découragement, continuez à prier le Seigneur d’envoyer des ouvriers à sa moisson et de nous donner des prêtres amoureux de l’Évangile, capables d’être proches de leurs frères et d’être, ainsi, un signe vivant de l’amour miséricordieux de Dieu.

Chers frères et sœurs, aujourd’hui encore, nous pouvons retrouver l’ardeur de l’annonce et proposer, surtout aux jeunes, la sequela du Christ. Face à la sensation répandue d’une foi fatiguée ou réduite à de purs ‘‘devoirs à accomplir’’, nos jeunes ont le désir de découvrir l’attrait toujours actuel de la figure de Jésus, de se laisser interroger et provoquer par ses paroles et par ses gestes et, enfin, de rêver, grâce à lui, d’une vie pleinement humaine, joyeuse de se consacrer à l’amour.

La Très Sainte Marie, Mère de notre Sauveur, a eu le courage d’embrasser ce rêve de Dieu, en mettant sa jeunesse et son enthousiasme dans ses mains. Que son intercession nous obtienne la même ouverture de cœur, la diligence à professer notre ‘‘Me voici’’ à l’appel du Seigneur et la joie de nous mettre en route (Lc 1, 39), comme elle, pour l’annoncer au monde entier.

Du Vatican, le 27 novembre 2016 Premier dimanche de l’Avent

FRANÇOIS

[01925-FR.01] [Texte original: Italien]

Homélie du cardinal André Vingt-Trois lors de la Messe à l’intention des victimes des attentats de Paris

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Vous trouverez ci-dessous l’homélie du cardinal André Vingt-Trois lors de la Messe à l’intention des victimes, de leurs proches et pour la France suite aux des attentats de Paris.

Les événements tragiques qui ont frappé notre pays ces jours-ci, -et particulièrement Paris et Saint-Denis-, plongent nos concitoyens dans l’effroi et la stupeur. Ils nous posent deux redoutables questions : en quoi notre mode de vie peut-il provoquer une agression aussi barbare ? A cette première question, nous répondons volontiers par l’affirmation de notre attachement aux valeurs de la République, mais l’événement nous oblige à nous interroger sur le prix à payer pour cet attachement et à un examen de ces valeurs. La deuxième question est encore plus redoutable car elle instille un soupçon dans beaucoup de familles : comment des jeunes formés dans nos écoles et nos cités peuvent-ils connaître une détresse telle que le fantasme du califat et de sa violence morale et sociale puissent représenter un idéal mobilisateur ? Nous savons que la réponse évidente des difficultés de l’intégration sociale ne suffit pas à expliquer l’adhésion d’un certain nombre au djihadisme bien qu’ils échappent apparemment à l’exclusion sociale. Comment ce chemin de la barbarie peut-il devenir un idéal ? Que dit ce basculement sur les valeurs que nous défendons ?

La foi chrétienne peut-elle nous être de quelque secours dans le désarroi qui s’est abattu sur nous ? A la lumière des lectures bibliques que nous venons d’entendre, je voudrais vous proposer trois éléments de réflexion.

1. « Dieu, mon seul espoir. » (Psaume15)

Le psaume 15, comme beaucoup d’autres psaumes, est un cri de foi et d’espérance. Pour le croyant dans la détresse, Dieu est le seul recours fiable : « Il est à ma droite, je suis inébranlable. »

C’est peu dire que les tueries sauvages de ce vendredi noir ont plongé dans la détresse des familles entières. Et cette détresse est d’autant plus profonde qu’il ne peut pas y avoir d’explications rationnelles qui justifieraient l’exécution aveugle de dizaines de personnes anonymes. Mais si la haine et la mort ont une logique, elles n’ont pas de rationalité. Bien sûr, nous avons besoin de dire des mots, nous avons besoin que des mots soient dits et que nous les entendions, mais nous sentons tous que ces paroles ne vont pas au-delà d’un réconfort immédiat. Avec l’irruption aveugle de la mort, c’est la situation de chacun d’entre nous qui devient incontournable.
Le croyant, comme tout un chacun, est confronté à cette réalité inéluctable, proche ou lointaine, mais certaine : notre existence est marquée par la mort. On peut essayer de l’oublier, de la contourner, de la vouloir douce et légère, mais elle est là. La foi, aucune foi, ne permet d’y échapper. Et nous sommes intimement acculés à répondre de nous-mêmes : vers qui nous tourner dans cette épreuve ? Faire confiance aux palliatifs, plus ou moins efficaces ou durables ou bien faire confiance à notre Dieu, qui est le Dieu de la vie. Le psalmiste nous soutient pour mettre sur nos lèvres la prière de la foi et de l’espérance : « Tu ne peux m’abandonner à la mort ni laisser ton ami voir la corruption. »

En ces jours d’épreuve, chacun de ceux qui croient au Christ est appelé au témoignage de l’espérance pour lui-même et tous ceux qu’il essaie d’accompagner et de soulager. Au moment où va s’ouvrir, dans quelques semaines, l’année de la miséricorde, nous voudrions, par nos paroles et nos actions, être des messagers de l’espérance au cœur de la souffrance humaine.

2. « Tu m’apprends le chemin de la vie. » (Psaume 15)

Cette espérance définit une manière de vivre pour ceux qui la reçoivent. Elle nous apprend le chemin de la vie. Heureusement tous ne sont pas confrontés aux horreurs subies par les victimes du fanatisme comme celles de vendredi dernier. Mais tous, sans exception, chacun et chacune d’entre nous, nous devons affronter des événements et des périodes difficiles dans notre existence. À quoi reconnaît-on un homme ou une femme d’espérance ? À sa capacité à assumer des épreuves et à combattre contre les forces destructrices dans la confiance et la sérénité. Cette force intérieure permet à des hommes et à des femmes ordinaires, comme vous et moi, de refuser de plier, de faire des choix difficiles, parfois héroïques, bien au-delà de ses propres forces.

Après les périodes de dures épreuves, nous pouvons reconnaître que certaines et certains ont tenu sans faiblir parce que leur conviction intérieure était assez forte pour braver des dangers possibles ou réels. Pour nous, chrétiens, cette force vient de notre confiance en Dieu et de notre capacité à nous appuyer sur Lui. Mais nous pouvons aller plus loin dans notre interprétation : pour un certain nombre d’hommes et de femmes, leur foi en une réelle transcendance de l’être humain les motive. Même s’ils ne partagent pas notre foi en Dieu, ils partagent un de ses fruits qui est la reconnaissance de la valeur unique de chaque existence humaine et de sa liberté. Pouvons-nous voir dans le calme et le sang-froid dont nos compatriotes ont fait preuve un signe de cette conviction que notre société ne peut se justifier que par son respect indéfectible de la dignité de la personne humaine ?

Face à la barbarie aveugle, toute fissure dans ce socle de nos convictions serait une victoire de nos agresseurs. Nous ne pouvons répondre à la sauvagerie barbare que par un surcroît de confiance en nos semblables et en leur dignité. Ce n’est pas en décapitant que l’on montre la grandeur de Dieu, c’est en travaillant au respect de l’être humain jusque dans ses extrêmes faiblesses.

3. « Lorsque vous verrez arriver tout cela… » (Marc 13, 29)

Cette confiance en Dieu est une lumière sur le chemin de la vie, mais pas seulement pour chacun d’entre nous dans son existence personnelle. Elle est aussi une lumière pour comprendre l’histoire humaine, y compris dans son déroulement énigmatique. L’évangile de Marc que nous avons entendu annonce le retour du Fils de l’Homme, le Sauveur, à travers des signes terrifiants dans les cieux et sur la terre. Nous ne sommes plus accoutumés à cette façon de scruter les signes, encore que beaucoup fassent commerce de cet exercice. Mais il me semble que le plus important pour nous est de puiser dans cette lecture deux enseignements.

D’abord, nul ne sait ni le jour ni l’heure de la fin des temps. Seul, le Père les connaît. Nous savons aussi que nous ne connaissons ni le jour ni l’heure de notre propre fin et que cette ignorance taraude bien des gens. Mais nous voyons tous, -et l’événement de cette semaine nous le rappelle cruellement-, que l’œuvre de mort ne cesse jamais et frappe, parfois aveuglément.

Ensuite, les événements dramatiques ou terrifiants de l’histoire humaine peuvent être interprétés et compris comme des signes adressés à tous. « Lorsque vous verrez cela, sachez que le Fils de l’Homme est proche à votre porte » nous dit l’évangile (Marc 13,29). Cette capacité d’interpréter l’histoire n’est pas une façon de nier la réalité. Elle est une façon de découvrir que l’histoire a un sens. Elle annonce quelqu’un qui frappe à notre porte, à chacune de nos portes. Ce quelqu’un, c’est le Christ.

Ainsi nous ne pouvons pas nous arrêter aux malheurs de la vie ni aux souffrances que nous endurons, comme si cela n’avait aucun sens. À travers eux, nous pouvons découvrir que Dieu frappe à notre porte et veut nous appeler encore à la vie, nous ouvrir les chemins de la vie. Cette espérance, nous devons la porter et en témoigner comme un réconfort pour ceux qui souffrent et comme un appel pour tous à vérifier les vraies valeurs de sa vie.

Je vous propose maintenant de vous unir intensément à la prière des défunts qui va être chantée.

(Lectures: Dn 12, 1-3 ; Ps 15 ; He 10, 11-14.18 ; Mc 13, 24-32)

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