De l’action de grâce à la grâce de l’action

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Chaque année, le 11 novembre, nous célébrons le Jour du Souvenir afin de ne pas oublier que la société dans laquelle nous vivons, loin de s’être construite toute seule, est l’œuvre de ceux qui nous ont précédés et qui sont allés jusqu’à offrir l’ultime sacrifice. Parfois, nous avons l’impression que la paix et le bon fonctionnement de notre société vont de soi, que c’est une chose évidente et qu’il serait impossible qu’il en soit autrement. Ce n’est pas le cas et le Jour du Souvenir est l’occasion idéale pour en prendre conscience.

Action de Grâce

Notre foi chrétienne nous enseigne de toujours garder à l’esprit la beauté et l’immensité du monde et des réalités qui le composent. L’attitude fondamentale du chrétien est donc une posture d’émerveillement perpétuel devant la création ainsi que l’œuvre de salut opérée par Jésus-Christ. Cependant, cette perspective ne doit pas nous enlever notre lucidité à déceler les nombreuses injustices qui existent aussi. En effet, depuis le péché originel, le cœur de l’homme est blessé et est porté à renier l’Ordre établi par Dieu, et à ne pas respecter les principes d’une « écologie intégrale » telle que nous l’enseigne l’encyclique Laudato Sì.  Devant cet état de fait, nous ne devons pas non plus tomber dans le désespoir et le cynisme en nous repliant sur nous-mêmes.

Comment donc garder un juste équilibre entre les deux extrêmes d’un éblouissement naïf ou du découragement ? C’est une tension continuelle que nous devons gérer à la fois comme personne et comme société. En ce sens la célébration des défunts disparus au combat, mort pour notre pays, aide à trouver cet équilibre. Qui voudrait vivre dans une société qui ferait comme si rien ne s’était produit? La commémoration du Jour du Souvenir permet donc cette nécessaire action de grâce envers Dieu et nos disparus en rendant leur sacrifice présent pour nous.

Grâce de l’action

Cette ingratitude toujours possible est dommageable, non seulement, parce qu’elle encourage l’égoïsme mais également parce qu’elle nous rend étranger à la volontés même des défunts. Si nous voulons que notre société se développe en cohérence avec ses principes de liberté et de solidarité, nous devons être fidèles à l’héritage qu’ils nous ont laissé. Faire mémoire de leur travail et de leur courage est donc à la citoyenneté ce que la nourriture est à la croissance.

De plus, lorsque nous faisons mémoire de ceux qui ont tout donné pour la paix et la liberté, nous prenons conscience que ces deux réalités ne sont pas que des concepts abstraits. Effectivement, on se rend ainsi compte qu’elles sont des œuvres perpétuelles auxquelles nous devons participer par notre engagement personnel et concret. La paix, la liberté ainsi que l’ordre social, qu’elles présupposent, sont donc les fruits du travail de tous. Faire mémoire de ceux qui sont allés jusqu’à mourir pour nous préserver de la tyrannie et de la violence peut nous aider à rendre grâce à Dieu pour tous ces hommes et toutes ces femmes qui ont assumé cette responsabilité jusqu’au bout et, ainsi, nous aider à faire de même.

« La mémoire est une faculté qui oublie » dit-on parfois. Des journées comme aujourd’hui sont donc bien adaptées à cette faiblesse de notre nature. Soyons donc reconnaissants à toutes ces personnes mortes au combat. Malgré le silence apparent des cimetières d’où elles s’adressent à nous aujourd’hui, mettons-nous à leur écoute sachant que, si nous l’avons fait pour eux, sans doute d’autres le feront-ils un jour pour nous. Ce sera le signe que, joint à leur sacrifice, notre travail aura porté les mêmes fruits de paix et de liberté.

Discours du pape François avec les autorités civiles et politiques d’Estonie

Vous trouverez ci-dessous le discours du pape François avec les autorités civiles et politiques d’Estonie. Sur la photo, le pape François en compagnie de la présidente Kersti Kaljulaid (photo CNS: Paul Haring):

Distingués Membres du Corps Diplomatique
Excellences, Mesdames et Messieurs,

Je suis très heureux d’être parmi vous, ici à Tallinn, la capitale la plus septentrionale que le Seigneur m’ait donné de visiter. Je vous remercie, Madame la Présidente, pour vos paroles de bienvenue et pour l’opportunité de rencontrer les représentants de ce peuple d’Estonie. Je sais que parmi vous, il y a aussi une délégation des secteurs de la société civile et du monde de la culture, ce qui me permet d’exprimer mon désir de connaître un peu plus votre culture, surtout cette capacité d’endurance qui vous a permis de recommencer face à de nombreuses situations d’adversité.

Depuis des siècles ces terres sont appelées ‘‘Terre de Marie’’, Maajamaa. Un nom qui non seulement appartient à votre histoire, mais aussi fait partie de votre culture. Penser à Marie évoque en moi deux mots : mémoire et fécondité. Elle est la femme de la mémoire, qui garde tout ce qu’elle vit, comme un trésor, dans son cœur (Lc 2, 19) ; et elle est la mère féconde qui donne la vie à son Fils. Voilà pourquoi j’aime penser à l’Estonie ‘‘comme à une terre de mémoire et de fécondité.

Terre de mémoire

Votre peuple a dû supporter, à diverses époques historiques, de durs moments de souffrance et de tribulations : des luttes pour la liberté et pour l’indépendance qui ont toujours été remises en cause ou menacées. Cependant, au cours de cette dernière période d’un peu plus de 25 ans – où vous êtes rentrés à part entière dans la famille des nations – la société estonienne a fait des ‘‘pas de géant’’ et votre pays, même en étant petit, se trouve parmi les premiers, selon les indicateurs de développement, par sa capacité d’innovation, sans compter qu’il révèle un niveau élevé de liberté de presse, de démocratie et de liberté politique. En outre, vous avez renforcé les liens de coopération et d’amitié avec divers pays. En considérant votre passé et votre présent, nous trouvons des motifs de regarder l’avenir avec espérance, face aux nouveaux défis qui se présentent à vous. Être terre de mémoire signifie savoir se souvenir que le niveau auquel vous êtes parvenus aujourd’hui est dû à l’effort, au travail, à l’esprit et à la foi de vos ancêtres. Cultiver la mémoire reconnaissante permet de rapporter tous les résultats dont vous jouissez aujourd’hui à une histoire d’hommes et de femmes qui ont combattu pour rendre possible cette liberté, et qui à son tour vous place devant le défi de leur rendre hommage en ouvrant des voies pour ceux qui arriveront après.

Terre de fécondité

Comme je l’ai souligné au début de mon ministère d’Évêque de Rome, « l’humanité vit en ce moment un tournant historique que nous pouvons voir dans les progrès qui se produisent dans différents domaines. On doit louer les succès qui contribuent au bien-être des personnes » (Exhort. Ap. Evangelii gaudium, n. 52) ; cependant, il faut rappeler avec insistance que le bien-être n’est pas toujours synonyme de vivre bien.

L’une des conséquences que nous pouvons observer dans nos sociétés technocratiques, c’est la perte du sens de la vie, de la joie de vivre et, donc, une extinction lente et silencieuse de la capacité d’émerveillement, qui plonge souvent les gens dans une lassitude existentielle. La conscience d’appartenance et de lutte pour les autres, d’enracinement dans un peuple, dans une culture, dans une famille, peut se perdre peu à peu en privant les plus jeunes – en particulier – de racines à partir desquelles on construit son présent et son avenir, car on les prive de la capacité de rêver, de risquer, de créer. Mettre toute sa ‘‘confiance’’ dans le progrès technologique comme unique voie possible de développement peut causer la perte de la capacité de créer des liens interpersonnels, intergénérationnels et interculturels. Bref, ce tissu vital si important pour se sentir faire partie l’un de l’autre et partie prenante d’un projet commun dans le sens le plus large du terme. Par conséquent, l’une des responsabilités les importantes que nous ayons, nous qui assumons une charge sociale, politique, éducative, religieuse, se trouve précisément dans la manière dont nous devenons des artisans de liens.

Une terre féconde demande des environnements dans lesquels il faut enraciner et créer un réseau à même de faire en sorte que les membres des communautés se sentent ‘‘à la maison’’. Il n’y a pas pire aliénation que de faire l’expérience de ne pas avoir de racines, de n’appartenir à personne.

Une terre sera féconde, un peuple portera des fruits et sera en mesure de générer l’avenir uniquement dans la mesure où il donne vie à des relations d’appartenance entre ses membres, dans la mesure où il crée des liens d’intégration entre les générations et les diverses communautés qui le composent ; et également dans la mesure où il rompt les spirales qui embrouillent les sens, en nous éloignant toujours les uns des autres. Dans cet effort, chers amis, je veux vous assurer que vous pouvez toujours compter sur le soutien et sur l’aide de l’Église catholique, une petite communauté parmi vous, mais très désireuse de contribuer à la fécondité de cette terre.

Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, je vous remercie pour l’accueil et pour l’hospitalité. Que le Seigneur vous bénisse vous et votre bien-aimé peuple estonien. De manière spéciale, qu’il bénisse les personnes âgées et les jeunes afin que, gardant la mémoire et en l’assumant, ils fassent de cette terre un modèle de fécondité.

[01443-FR.01] [Texte original: Italien]

La clé de la mémoire

Il y a un mois, des milliers de jeunes étaient réunis à Cracovie pour les Journées mondiales de la jeunesse. J’y étais aussi en tant que journaliste. La semaine était un exercice de la mémoire… et un apprentissage du courage.

À mon arrivée à l’aéroport de Cracovie, les pèlerins commençaient déjà à inonder l’endroit. En attendant nos bagages sur le carrousel, deux jeunes filles étaient près de moi. C’était leurs premières JMJ…

Madrid. C’est là où j’ai vécu mes premières JMJ. Je faisais partie d’un groupe d’environ quarante personnes – nous étions tous universitaires – et notre pèlerinage vers Madrid comprenait des arrêts à Lourdes, Fatima, Avila et Compostelle. Ces lieux nous permettraient de s’apprivoiser, de prier ensemble et de nous préparer aux JMJ en présence du pape Benoit XVI et de milliers d’autres pèlerins comme nous. Le pèlerinage vers les JMJ est important, voire nécessaire, car il permet au coeur de s’ouvrir à la surprise de Dieu en chemin.

Pourtant, bien que je me sois préparée à ces Journées mondiales, les seuls souvenirs que je garde sont la chaleur, les nombreuses heures de marche, le manque de sommeil et la tempête épouvantable de la Vigile, alors que mes amis en sont repartis renouvelés. C’est comme si j’avais vécu les JMJ les yeux fermés!

…En parlant un peu plus longtemps avec ces jeunes filles, arrivées pour la première fois sur la terre de Jean-Paul II, elles m’ont demandé des conseils pour bien vivre les JMJ. (Ça m’a fait rire alors que j’en suis revenue un peu déçue la dernière fois.) Mais sachant tout de même que les JMJ étaient un temps de grâce pour l’Église, je leur ai dit de rester attentives à tout ce qui se passera autour d’elles. Dieu parle en toute chose, et il le fera par la bouche et les gestes du Pape, par les catéchèses, par les temps de prières, par chacune des conversations et rencontres qu’elles auront.

C’est lorsque je suis arrivée au Campus Misericordiae pour la Vigile avec le Pape, où je me suis « souvenu » de Dieu, de la joie qui nous pénètre quand on se laisse aimée par Lui, une joie qui peut être partagée avec tant d’autres. Plus de 1.5 millions de pèlerins étaient installés sur ce vaste terrain à plusieurs kilomètres de Cracovie. Ils ont fait le pèlerinage jusqu’au campus pour camper sous les étoiles, prier avec le Saint Père et faire la fête. Depuis cette veillée, je fais mémoire presque chaque jour de ces milliers de bougies allumées en même temps. La scène était frappante. C’était un signe de la communion de l’Église, de sa ferveur, de sa clarté au sein des ténèbres.

243A1741Dans le dernier discours qu’il a prononcé, aux bénévoles des JMJ, le Saint Père a dit : « Vous êtes l’espoir du futur ». Pour cela, poursuivait-il, « vous devez atteindre certaines conditions. La première est de préserver votre mémoire : de ton peuple, de ta famille, d’où tu viens, la mémoire de ton cheminement et ce que tu as reçu de ceux qui sont proches de toi ». La deuxième condition est « d’avoir courage – d’avoir du courage et de ne pas avoir peur ».

Pour faire mémoire, donc, j’ai appris une chose: il faut se parler. Il faut se parler et être attentif. Ça prend les autres pour nous rappeler ce que nous avons vécu et nous ramener à l’essentiel. Pendant l’une des catéchèses, un évêque s’est adressé aux jeunes en leur disant, qu’« il faut être mendiants les uns envers les autres… j’ai besoin de toi pour grandir ». Quand on se croit incapable de réussir une tâche, on a besoin qu’on nous dise: « Mais te souviens-tu de cette fois où tu l’as réussi? C’est toujours possible! ». Encore, si l’on croit ne pas pouvoir corriger une faiblesse en nous, quelqu’un doit 243A1534répéter: « N’oublie pas que le Seigneur est plus grand que ta faiblesse! »

Ceux qui ont perdu espoir ou qui ne croient pas que l’Église est vivante alors, c’est le moment opportun de faire mémoire de ce qui s’est passé pendant les JMJ, de ce qu’on a vu et entendu. En effet, j’ai pris à cœur le seul conseil que j’ai laissé aux jeunes pèlerins en début de voyage. Y être comme journaliste était une grâce puisque cela m’a obligée d’être attentive à ce qui se vivait au jour le jour. « Ce que nous avons vu et entendu, nous vous l’annonçons à vous aussi, pour que vous aussi vous soyez en communion avec nous… Et nous écrivons cela, afin que notre joie soit complète » (1 Jean 1, 3-4).

Discours d’accueil du pape François lors de la rencontre avec les autorités, la société civile et le Corps diplomatique

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Vous trouverez ci-dessous le texte complet de l’allocution du pape François lors de la Rencontre avec les autorités civiles et le Corps diplomatique:

Monsieur le Président,
Distinguées Autorités,
Membres du Corps diplomatique,
Recteurs magnifiques,
Mesdames et Messieurs,

Je salue avec déférence Monsieur le Président et je le remercie pour l’accueil chaleureux et pour ses aimables paroles. Je suis heureux de saluer les membres distingués du Gouvernement et du Parlement, les Recteurs d’universités, les Autorités régionales et de la cité, de même que les membres du Corps diplomatique et les autres Autorités présentes. C’est la première fois que je visite l’Europe centre-orientale et je suis heureux de commencer par la Pologne, qui a eu parmi ses fils l’inoubliable saint Jean-Paul II, inventeur et promoteur des Journées mondiales de la Jeunesse. Il aimait parler de l’Europe qui respire avec ses deux poumons : le rêve d’un nouvel humanisme européen est animé par le souffle créateur et harmonieux de ces deux poumons et de la civilisation commune qui trouve dans le christianisme ses racines les plus solides. 

La mémoire caractérise le peuple polonais. Le sens vivant de l’histoire du Pape Jean-Paul II m’a toujours impressionné. Quand il parlait des peuples, il partait de leur histoire pour en faire ressortir les trésors d’humanité et de spiritualité. La conscience de l’identité, libre des complexes de supériorité, est indispensable pour organiser une communauté nationale sur la base de son patrimoine humain, social, politique, économique et religieux, pour inspirer la société et la culture, en les maintenant fidèles à la tradition et en même temps ouvertes au renouveau et à l’avenir. Dans cette perspective, vous avez célébré il y a peu de temps le 1050ème anniversaire du Baptême de la Pologne. Cela a certainement été un moment fort d’unité nationale, qui a confirmé comment la concorde, même dans la diversité des opinions, est la route sûre pour atteindre le bien commun du peuple polonais tout entier.

De même, la fructueuse coopération dans le cadre international et la considération réciproque murissent par la conscience et le respect de l’identité propre et de celle d’autrui. Le dialogue ne peut exister si chacun ne part pas de sa propre identité. Dans la vie quotidienne de chaque individu, comme de toute société, il y a toutefois deux types de mémoire : bonne et mauvaise, positive et négative. La mémoire bonne est celle que la Bible nous montre dans le Magnificat, le cantique de Marie, qui loue le Seigneur et son œuvre de salut. La mémoire négative est au contraire celle qui tient le regard de l’esprit et du cœur fixé avec obsession sur le mal, surtout sur celui commis par les autres. En considérant votre histoire récente, je rends grâce à Dieu car vous avez pu faire prévaloir la mémoire bonne : par exemple, en célébrant les 50 années du pardon réciproquement offert et reçu entre les épiscopats polonais et allemand, après la seconde guerre mondiale. L’initiative, qui a impliqué initialement les communautés ecclésiales, a déclenché aussi un processus social, politique, culturel et religieux irréversible, changeant l’histoire des relations entre les deux peuples. À ce sujet, rappelons aussi la Déclaration conjointe entre l’Église catholique de Pologne et l’Église orthodoxe de Moscou : un acte qui a engagé un processus de rapprochement et de fraternité non seulement entre les deux Églises, mais aussi entre les deux peuples. 

Ainsi, la noble nation polonaise montre comment on peut faire grandir la mémoire bonne et laisser tomber la mauvaise. Pour cela il faut une espérance solide et une confiance en Celui qui conduit le destin des peuples, ouvre les portes fermées, transforme les difficultés en opportunité et crée de nouveaux scenarios là où cela semblait impossible. Les vicissitudes historiques de la Pologne en témoignent vraiment : après les tempêtes et les obscurités, votre peuple, rétabli dans sa dignité a pu chanter, comme les Hébreux de retour de Babylone : « Nous étions comme en rêve. […] notre bouche était pleine de rires, nous poussions des cris de joie » (Ps 126, 1-2). La conscience du chemin accompli et la joie pour les objectifs atteints donnent force et sérénité pour affronter les défis du moment, qui demandent le courage de la vérité et un engagement éthique constant, afin que les processus décisionnels et opératifs comme aussi les relations humaines soient toujours plus respectueux de la dignité de la personne. Chaque activité y est associée : aussi l’économie, la relation avec l’environnement et la manière mêmeCapture d’écran 2016-07-27 à 11.39.42 de gérer le complexe phénomène migratoire.

Ce dernier demande un supplément de sagesse et de miséricorde, pour dépasser les peurs et réaliser le plus grand bien. Il faut discerner les causes de l’émigration de la Pologne, en facilitant le retour de tous ceux qui le veulent. En même temps, il faut la disponibilité pour accueillir tous ceux qui fuient la guerre et la faim ; la solidarité envers ceux qui sont privés de leurs droits fondamentaux, parmi lesquels celui de professer en liberté et sécurité leur propre foi. En même temps, cela demande des collaborations et des synergies au niveau international dans le but de trouver des solutions aux conflits et aux guerres, qui contraignent tant de personnes à laisser leur maison et leur patrie. Il s’agit aussi de faire le possible pour alléger leurs souffrances, sans se lasser d’agir avec intelligence et continuité pour la justice et la paix, en témoignant dans les faits des valeurs humaines et chrétiennes. 

À la lumière de son histoire millénaire, j’invite la Nation polonaise à regarder avec espérance l’avenir et les problèmes qu’elle doit affronter. Une telle attitude favorise un climat de respect entre toutes les composantes de la société et une confrontation constructive entre les différentes positions ; en outre, elle crée les meilleures conditions pour une croissance civile, économique et même démographique, alimentant la confiance d’offrir une vie bonne à ses propres enfants. En effet, ils ne devront pas seulement affronter des problèmes mais ils jouiront des beautés de la création, du bien qu’ils sauront accomplir et diffuser, de l’espérance que nous saurons leur donner. Les mêmes politiques sociales en faveur de la famille, cellule première et fondamentale de la société, pour venir en aide aux plus faibles et aux plus pauvres et les soutenir dans l’accueil responsable de la vie, seront de cette façon encore plus efficaces. La vie doit toujours être accueillie et protégée – les deux choses ensemble : accueillie et protégée – de la conception à la mort naturelle, et tous nous sommes appelés à la respecter et à en prendre soin. D’autre part, il revient à l’État, à l’Église et à la société d’accompagner et d’aider concrètement quiconque se trouve en situation de graves difficultés, afin qu’un enfant ne soit jamais perçu comme un poids mais comme un don, et que les personnes les plus fragiles et pauvres ne soient pas abandonnées. 

Monsieur le Président,

La nation polonaise peut compter, comme cela a été tout au long de son long parcours historique, sur la collaboration de l’Église catholique, afin que, à la lumière des principes chrétiens qui l’inspirent et qui ont forgé l’histoire et l’identité de la Pologne, elle sache, dans les conditions historiques changeantes, poursuivre son chemin, fidèle à ses meilleures traditions et pleine de confiance et d’espérance, également dans les moments difficiles.

En renouvelant l’expression de ma gratitude, je vous souhaite ainsi qu’à chacune des personnes présentes un service du bien commun serein et fructueux.

Que la Vierge de Częstochowa bénisse et protège la Pologne !

Mémoire de la CECC sur le projet de loi C-14 (« aide médicale à mourir ») soumis au Comité permanent de la justice et des droits de la personne

Comme stipulé dans ses déclarations antérieures sur le sujet, la Conférence des évêques catholiques du Canada désapprouve entièrement et catégoriquement toute tentative de justifier ou d’appuyer le « droit » à l’aide médicale au suicide ou à l’euthanasie. Cette position est fondée sur l’enseignement immuable de notre Église, provenant du Christ lui-même, voulant que cette pratique soit toujours moralement inacceptable (cf. Catéchisme de l’Église catholique 2276-79; saint Jean-Paul II, Evangelium Vitae no 66). Pour cette raison, le projet de loi C-14, qui légalise le meurtre de certaines catégories de personnes, est une loi fondamentalement injuste. De la perspective catholique, aucune modification ne pourrait justifier le mal inhérent qui sous-tend la prémisse derrière la législation proposée.

Bien que la législation elle-même soit intrinsèquement et gravement immorale pour les raisons susmentionnées, la version actuelle du projet de loi C-14 contient des caractéristiques particulières qui rendent la législation encore plus nuisible et dangereuse pour la société canadienne. Par exemple, elle ne prévoit aucune protection pour les professionnels de la santé qui refusent de coopérer dans la soi-disant « aide médicale à mourir » ou d’aiguiller efficacement les patients qui en font la demande, ni pour les établissements qui refusent d’offrir le service pour des raisons religieuses ou de conscience. Laisser aux législateurs provinciaux ou aux organismes professionnels (p. ex., les collèges provinciaux de médecins, de pharmaciennes et pharmaciens, ou d’infirmières et infirmiers) la responsabilité de concevoir et d’appliquer de telles protections résulterait en une situation chaotique avec des règlements contradictoires entre les provinces et entraînerait la démission ou le renvoi de plusieurs professionnels de la santé. Les hôpitaux sous les auspices de groupes religieux, la majorité catholiques, pourraient éventuellement devoir fermer leurs portes. Ces établissements emploient des milliers de médecins et des dizaines de milliers d’employés. Alors que notre système de santé requiert plus de ressources, pas moins, le gouvernement fédéral ne devrait pas permettre aux juridictions de second rang de faire fuir les praticiennes et praticiens de la santé consciencieux de leur profession.

Il est également déplorable que le projet de loi C-14 échoue dans ses efforts de vouloir limiter le mal potentiel que pourrait causer la légalisation de l’aide au suicide, comme dans le critère énoncé au paragraphe 241.2(d) (que la mort naturelle d’une personne « est devenue raisonnablement prévisible »). Toute personne qui a réfléchi à son existence mortelle sait que sa mort naturelle n’est pas seulement raisonnablement prévisible, elle est de fait inévitable. Cette « sauvegarde » ne protégera personne.

L’enseignement de l’Église catholique et la position des évêques catholiques du Canada affirment le caractère sacré et la dignité de la vie humaine. Le suicide et l’euthanasie sont contraires à la profonde inclination naturelle de l’être humain de vivre et de préserver la vie. Par ailleurs, ils contredisent la responsabilité fondamentale des êtres humains de se protéger les uns et les autres, et d’améliorer la qualité des soins de santé et des services sociaux que chaque vie humaine mérite, de la conception à la mort naturelle.

Peu importe les modifications qui y seront apportées, le projet de loi C-14 est un affront à la dignité humaine, une érosion de la solidarité humaine, et un danger à toutes les personnes vulnérables – particulièrement les personnes âgées, handicapées, infirmes et malades qui sont souvent isolées et marginalisées. De plus, c’est une violation du sacro-saint devoir des professionnels de la santé de soigner, et de la responsabilité des législateurs et des citoyens de fournir et d’assurer une protection à tous, spécialement aux personnes les plus à risque. L’adoption du projet de loi C-14, déclenchée par la décision défaillante rendue dans la cause Carter, aura des répercussions dévastatrices sur la structure sociale de notre pays que nous ne pouvons prévoir aujourd’hui.


La Conférence des évêques catholiques du Canada est l’assemblée nationale des évêques catholiques romains et catholiques orientaux. Pasteurs principaux de l’Église au Canada, ils s’expriment en son nom et ils ont pour fonction de guider et d’éclairer sur le plan spirituel plus de treize millions de catholiques canadiens. Les personnes baptisées dans l’Église catholique représentent quarante-six pour cent de la population canadienne.

— Photo: Diocèse de Hamilton

Un mémoire qui mérite vraiment d’être diffusé…

J’étais bien heureux de voir que le site Web cyberpresse publie aujourd’hui la lettre d’André Bourque, médecin et professeur agrégé au département de médecine familiale de l’Université de Montréal et chef du département de médecine générale du CHUM. Cette lettre dénonçant une dépénalisation possible de l’euthanasie est appuyée par une centaine de médecins québécois. Elle résume bien les principaux éléments d’un mémoire qui a été remis au Collège des médecins du Québec à la fin août dernier. Nous l’avons ici pour vous dans son intégralité. À partager.

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