Un mur qui fait pleurer

Vous vous êtes déjà demandé pourquoi nous lui donnons le nom du Mur des Lamentations ? La réponse est évidente dès qu’on s’en approche, dès qu’on se fait une petite place devant le mur pour appuyer sa main contre la pierre et prier. Pendant mon séjour en Israël, avec mes collègues de travail, nous avons tous eu la chance de prier devant le Mur. Lorsqu’à mon tour j’observais les femmes à ma droite et à ma gauche, j’ai remarqué leur posture : elles avaient la tête baissée, leur livre de prière en main et les récitaient en se balançant par devant et par derrière. Certaines d’entre elles… pleuraient. J’étais profondément touchée par ce que je voyais et émue de prier à côté de ces femmes d’une autre confession. Comme elles, je me suis mise à pleurer. Et je me suis dit que ce n’est pas un nom si bizarre pour un mur, après tout !

Le Mur des Lamentations porte un autre nom. Il est mieux connu comme le Mur Occidental et l’un des derniers vestiges du Temple construit par Hérode vers l’an 19 av. J.-C. Ce Temple a été détruit par les romains en 70 A.D. Depuis, les juifs s’y rendent pour prier. Le Mur Occidental est tout de même demeuré un lieu saint pour eux. C’était l’endroit le plus près du lieu où reposait Dieu à l’intérieur du Temple, ce que l’on appelle le Saint des Saints ou l’Arche de l’Alliance. De plus, dans la tradition juive, Abraham aurait offert son fils Isaac en sacrifice à Dieu sur le Mont du Temple ou le Mont Moriah, où se trouve désormais le Dôme du Rocher et la mosquée Al-Aqsa.

Dans la tradition juive, on se rend au Mur pour prier, jour et nuit, pour se « lamenter » de la destruction du Temple et la ville de Jérusalem considérée sainte. C’est la raison pour laquelle nous l’appelons le Mur des Lamentations. D’innombrables plaintes sont entendues dans d’autres parties du monde : des populations entières font face à l’effondrement de leur ville, de leur maison, des lieux saints, où ils avaient l’habitude de sentir, de manière concrète, la proximité de Dieu. Alors que nous étions devant le Mur, je songeais à ceux et celles qui sont dispersés à cause de la violence et du danger de la guerre. Devant ce Mur, j’étais particulièrement consciente du fait que j’étais au Moyen Orient ! Nous étions assez loin de la violence qui menace les pays avoisinants mais assez proche pour ressentir la fragilité de l’endroit, de ses frontières, des relations entre chrétiens, juifs et musulmans, entre le gouvernement et son peuple, entre palestiniens et israéliens… Dans de telles situations, le rétablissement de la paix, et la réconciliation, nous semblent hors d’atteinte.

Dans l’ancien testament, le psalmiste cri vers Dieu :

« Des profondeurs je crie vers toi, Seigneur. Seigneur, écoute mon appel ! Que ton oreille se fasse attentive au cri de ma prière ! Si tu retiens les fautes, Seigneur, qui subsistera ? Mais près de toi se trouve le pardon pour que l’homme te craigne. J’espère le Seigneur de toute mon âme; je l’espère, et j’attends sa parole. Mon âme attend le Seigneur plus qu’un veilleur ne guette l’aurore. Plus qu’un veilleur ne guette l’aurore, attends le Seigneur, Israël. Oui, près du Seigneur, est l’amour; près de lui, abonde le rachat. C’est lui qui rachètera Israël de toutes ses fautes ».

Ce n’est qu’un psaume parmi tant d’autres qui exprime la prière profonde de toute l’humanité vers Dieu. Même Jésus, à l’heure de sa mort, a prononcé les mots du psaume 21, que nous redisons chaque Dimanche des Rameaux, « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? ». Malgré la prière puissante du psalmiste, avons-nous raison d’espérer le rétablissement de la paix en Terre Sainte? Au Moyen Orient? En effet, Dieu se montre fidèle à son peuple. Il nous rappelle sa proximité, son amour et sa sollicitude de toute sorte de manière.

Quand le pape François a effectué un pèlerinage en Israël en 2014, il a accompli un geste fort devant le Mur Occidental.  Il était accompagné par des amis proches qu’il avait connu en Argentine, un rabbin et un professeur musulman. Il les a embrassés après avoir prié devant le Mur. Plus tard, il a affirmé plus tard le grand besoin d’amour et de respect entre les personnes de différentes confessions, de travailler ensemble pour « la paix et la justice » et voir en chaque personne un frère ou une sœur.

Il a de plus déposé une prière entre les pierres du mur – une pratique commune pour les pèlerins. La prière du Pape était celle du Notre Père : une prière quotidienne qui nous rappelle que Dieu agi dans notre vie à l’instant présent et nous donne tout ce dont nous avons besoin pour surmonter les défis qui se présentent au jour le jour. Dépasser les divisions est donc un travail qui se fait au jour le jour, qui se construit entre les personnes et dans l’humilité. « Devant le mystère de Dieu, nous sommes tous pauvres », nous dit le Pape.

Gaetano Gagliano: un grand ambassadeur et communicateur

GaetanoJPII

Réflexion du père Thomas Rosica c.s.b. suite au décès de Mr. Gaetano Gagliano † 2016, fondateur de télévision Sel + Lumière média:

À une époque où la dignité et le caractère sacré de la vie humaine sont menacés, alors que le mariage et la famille sont en crise, l’histoire de la famille Gagliano, de cet amour solide vieux 70 ans entre deux personnes et qui a engendré 10 enfants, 35 petits-enfants et 16 arrière petits-enfants, rayonne de toutes parts. L’histoire légendaire de Gaetano Gagliano (1917 – 2016) décrit le trajet d’un jeune homme du petit village de Cattolica Eraclea en Sicile qui avec une scolarité de 5e année, est devenu le récipiendaire de plusieurs doctorats honorifiques, de prix prestigieux et, à 80 ans, de l’Ordre du Canada!

Après avoir servi lors de la 2e guerre mondiale, le jeune Gaetano retourne dans son village natal d’Italie pour se marier. Après la guerre, la vie à la ferme était très difficile, spécialement dans l’Italie du sud. Alors que sa femme Giuseppina était enceinte de leur 5e enfant, les Gagliano ont décidé de vendre toutes leurs possessions afin d’immigrer au Canada. Le jour suivant son arrivée au Canada, Gaetano eut la chance de trouver un travail au Canadien Pacifique comme installateur de rails. Concrètement c’est donc en fixant de rails de chemin de fer qu’il a commencé, mais en réalité, il serait plus tard appelé à installer les rails de quelque chose de totalement nouveau et audacieux. En effet, déjà à cette époque, il imprimait des invitations sur une petite imprimante qu’il avait installée dans son sous-sol.

Il y a plus de cent ans, l’architecte civil américain Daniel Burnham avait dit aux planificateurs de la ville de Chicago : « Ne faites pas de petits plans. Ils n’ont pas la magie nécessaire à remuer du sang humain ». Ainsi, Gaetano a eu une grande vision à partir d’un petit atelier d’imprimerie dans sa maison. Il allait fonder une corporation médiatique qui se répandrait partout au Canada. Dès le premier jour, il décida de nommer sa compagnie « St-Joseph » en l’honneur du père de Jésus, le saint patron des travailleurs et du Canada.

Ce qui a commencé en 1956 comme une entreprise d’imprimerie de lettres dans un sous-sol est aujourd’hui la plus grande compagnie de communication privée du Canada; un fournisseur de solutions totalement intégrées en communication de contenu et un leader en imprimerie de documents et de médias. Ce succès moderne est une histoire de travail acharné, de vision et de foi d’un immigrant italien nommé Gaetano.

Le meilleur était encore à venir lorsqu’en 2003, à l’âge de 86 ans, Gaetano fonda un nouveau moyen de communication : La Fondation Catholique Sel et Lumière Média. Née dans la foulée des Journées mondiales de la Jeunesse de Toronto en 2002, www.seletlumieretv.org allait devenir la première télévision catholique du Canada diffusant sur le câble 24 heures par jour.

Chaque fois que Gaetano Gagliano nous visitait à notre centre de diffusion au centre-ville de Toronto il nous demandait : « Comment va le bébé? » ce qui voulait dire « Comment va Sel et Lumière télévision ? ». Sel et Lumière était son rêve devenu réalité ! Il avait désiré une télévision catholique pour le Canada pendant de nombreuses années avant les Journée Mondiales de la Jeunesse qui sont devenues pour lui, à la fois, une propulsion fantastique ainsi qu’un vent qui allait soutenir ses ailes.

Plus de 13 années plus tard, cette chaîne de télévision catholique est maintenant disponible dans plus de 2.5 millions de foyers et est accessible partout dans le monde par l’entremise des médias sociaux et de l’internet sans compter le fait qu’elle diffuse en anglais, français, italien, mandarin et cantonais.

Le secret de Gaetano Gagliano était, à la fois, innovant et simple. Cela demandait de la responsabilité envers la communauté, de la décence, du respect, de l’intégrité ainsi qu’une foi chrétienne en Dieu et dans l’humanité. Il a réussi à garder cet équilibre qui a permis à sa vie et à son entreprise de porter du fruit. En fait, il avait appris jeune que la recette du succès est de servir les autres et d’être reconnaissant envers la société. Même dans ses succès, il est toujours resté fidèle à ces principes.

Il y a presque 60 ans de cela, Gaetano Gagliano n’a pas limité la grandeur de ses plans pour son rêve en communication. Je rends grâce à Dieu pour des personnes comme Gaetano et Giuseppina qui n’ont pas eu besoin d’une grande scolarité ou de nombreux titres pour apprendre au monde une leçon aussi puissante. Ils nous ont laissé en héritage des valeurs familiales exceptionnelles tandis que Gaetano a donné à la société canadienne des pratiques commerciales honnêtes, décentes et généreuses. Ils nous ont donné des leçons très importantes à propos de la foi, de la famille, de l’éthique des affaires, de la générosité et de la philanthropie. Par son témoignage de vie, Gaetano nous a appris la fidélité dans la foi, l’importance d’une vie intègre ainsi que la façon d’être de bons communicateurs.

Durant les dernières années de sa vie avant son décès survenu le 14 avril 2016, la vie de Gaetano était un témoignage qui incarnait parfaitement les mots suivants du pape François dans sa dernière exhortation apostolique Amoris Laetitia (La joie de l’Amour) :

« Les récits des personnes âgées font beaucoup de bien aux enfants et aux jeunes, car ils les relient à l’histoire vécue aussi bien de la famille que du quartier et du pays. Une famille qui ne respecte pas et ne s’occupe pas des grands-parents, qui sont sa mémoire vivante, est une famille désintégrée ; mais une famille qui se souvient est une famille qui a de l’avenir. Par conséquent, « une civilisation où il n’y a pas de place pour les personnes âgées, ou qui les met au rebut parce qu’elles créent des problèmes, est une société qui porte en elle le virus de la mort »,[218] car elle « arrache ses propres racines ».[219]

Le phénomène des orphelins contemporains, en termes de discontinuité, de déracinement et d’effondrement des certitudes qui donnent forme à la vie, nous place devant le défi de faire de nos familles un lieu où les enfants peuvent s’enraciner dans le sol d’une histoire collective. » (No 193)

Nous serons toujours reconnaissants à Gaetano, à celui qui nous a donné de la foi de l’espérance, de l’audace et du courage, des racines et des ailes. Qu’il repose en paix et qu’il intercède pour nous.

Père Thomas Rosica c.s.b.

PDG fondateur, Fondation Catholique Sel et Lumière Média

14 avril 2016

Bernie Sanders invité au Vatican

C’est un « grand fan » du pape François qui débarque au Vatican. Bernie Sanders, candidat démocrate à la Maison-Blanche, participera vendredi 15 avril à une conférence sur les problématiques sociales, économiques et environnementales, organisée par l’Académie pontificale des sciences sociales, au Vatican.

La conférence s’inscrit dans le cadre du 25ème anniversaire de l’encyclique « Centesimus Annus » de Jean-Paul II. Un document magistériel, publié en 1991, qui met en garde contre les excès du libéralisme, en insistant sur la nécessité d’une éthique dans l’économie. C’est donc sur ce sujet que le sénateur socialiste, pourfendeur des inégalités, est invité à s’exprimer ce vendredi, aux côtés d’autres dirigeants mondiaux, experts et universitaires, dont le président équatorien Rafael Correa et son homologue bolivien Evo Morales.

Bernie Sanders, touché par cette invitation, l’a donc naturellement acceptée afin d’exprimer « l’urgence d’une économie morale ». De confession juive, mariée à une catholique, le sénateur du Vermont ne cache pas son admiration pour le Pape argentin qui « joue un rôle incroyable pour injecter une dimension morale dans l’économie », a-t-il déclaré sur la chaîne de télévision américaine MSNBC. Si bien qu’il « aimerait beaucoup » rencontrer le Souverain Pontife à l’occasion de son passage au Vatican.

« J’aimerais simplement le remercier » a indiqué M.Sanders dans une entrevue accordée à notre chaîne de télévision. Lors de l’entretien, l’homme politique se dit interpellé par l’audace et le courage du Saint-Père dont il salue « sa volonté de soutenir des vérités profondes dans une société corrompue et malade ». « Sa parole a un impact profond. Il ne fait pas seulement pointer du doigt les inégalités économiques, les plus démunis, les chômeurs ou les pauvres, et ce qui leur arrive. Il nous rappelle aussi que la vie est plus que l’accumulation d’argent. Et en tant qu’être humain […] nous devons reconnaître la souffrance autour de nous et y répondre. C’est ce qui nous rendra plus heureux », a poursuivi l’homme de gauche, aujourd’hui âgé de 74 ans.

Sur d’autres sujets en revanche, et pas des moindres, les deux hommes ne partagent pas la même vision, notamment sur les questions liées à la protection de la vie humaine, depuis sa conception jusqu’à sa mort naturelle. « Ce que je peux dire au mieux sur ces questions, commente Bernie Sanders, toujours sur Salt and Light TV, c’est : respectons-nous quand nous sommes en désaccord, et travaillons ensemble dans les domaines où nous sommes d’accord ».

Et quand bien même ils ne s’entendent pas sur ces points « non négociables » de l’enseignement de l’Église, une rencontre entre l’homme politique et l’homme d’Église, à quelques jours seulement d’une primaire cruciale à New York, pourrait certainement encourager bon nombre de catholiques à voter pour le candidat socialiste à l’investiture démocrate pour la présidentielle américaine. Mais à ce jour, « il n’y a aucune rencontre prévue avec le Pape » a déclaré à l’AFP le porte-parole du Saint-Siège.

En dépit de son désaccord affiché sur l’immigration avec le candidat républicain Donald Trump, le chef de l’Église catholique ne veut sans doute pas s’ingérer davantage dans la campagne présidentielle américaine.

Échos du Vatican

AMORIS LAETITIA : présentation et réactions après la publication de la nouvelle exhortation apostolique du pape François.

Amoris Laetitia ou la famille sur la voie de la charité

blog_1460110951

Aujourd’hui même à midi heure de Rome, le pape François a publié sa très attendue exhortation apostolique intitulée Amoris Laetitia sur le thème de l’amour dans la famille. Ce document de 258 pages pour l’édition française est le fruit des travaux des deux synodes sur la famille qui ont eu lieu au Vatican en 2014 et 2015. Bien que, dès les premières pages du texte, le Pape « ne recommande pas une lecture générale hâtive » (no 7), la rédaction de ce premier article nécessitait que je le lise dans son entièreté assez rapidement… Toutefois, n’ayez crainte, nous aurons l’occasion d’en reparler dans une série d’articles dans lesquels nous nous arrêterons plus longuement sur les nombreux thèmes abordés. Je vous propose aujourd’hui mes premières impressions suite à ma lecture d’Amoris Laetitia, espérant que dans notre prochain rendez-vous, vous aurez eu l’occasion de parcourir cet important document vous-mêmes.

La première chose qui me vient à l’esprit après la lecture d’Amoris Laetitia c’est que ce texte respire la préoccupation de l’Église et du pape François pour les familles d’aujourd’hui. Conscient de sa mission d’accompagner tous les fidèles et tous les humains, on perçoit avec quelle intensité le présent Pape souhaite que tous puissent découvrir la grandeur de cette vocation humaine. Pour cela, le Pape souhaite que l’on redécouvre l’essence de l’attitude de l’Église qui consiste en ce qu’il appelle la « via caritatis » (no 306) qui signifie en français la voie de la charité. En effet, on a souvent taxé l’Église d’être dogmatique et d’avoir un enseignement qui n’est plus en accord avec notre monde d’aujourd’hui. Il me semble que ce document répond magnifiquement à cette critique, à la fois, en manifestant que l’Église est non seulement parfaitement consciente et à l’écoute de la réalité contemporaine mais aussi qu’elle est capable d’un esprit critique envers elle-même et face au monde, esprit qu’elle puise à la lumière de la Révélation d’amour accomplie en Jésus-Christ.

En ce sens, les deux précédents synodes l’ont démontré : l’Église n’est pas cette institution fermée et rétrograde mais bien une communauté d’hommes et de femmes qui marchent ensemble à la suite du Christ; une communauté universelle qui s’interroge sur les meilleurs chemins à prendre pour rester le plus fidèle possible à l’amour qui repose en leur être depuis le baptême. Comment donc réaliser ce projet de Dieu sur nous dans nos familles aujourd’hui? C’est la question fondamentale à laquelle ce texte tente d’apporter sa contribution.

Pour ce faire, le pape manifeste que le dessein de Dieu sur la famille n’est pas un idéal abstrait mais une réalité concrète. C’est pourquoi, on ne doit jamais se décourager de nous-mêmes ou des situations dans lesquelles nous nous trouvons. Nous ne sommes pas parfaits et la perfection à laquelle nous sommes destinés n’est pas de ce monde. Les chutes et les échecs sur le chemin sont pour Dieu et pour nous des occasions de réconciliation dont le but sublime est de manifester la grandeur de la Miséricorde de Dieu.

C’est le deuxième point qui a attiré mon attention : ce souci de montrer que la miséricorde est la clé de compréhension de tout l’enseignement et de la pratique de l’Église. En effet, la miséricorde « n’est pas seulement l’agir du Père, mais elle devient le critère pour comprendre qui sont ses véritables enfants. En résumé, nous sommes invités à vivre de miséricorde parce qu’il nous a d’abord été fait miséricorde » (no 310). Selon moi, tout le texte tient à revisiter cet enseignement sur la famille si incompris par bon nombre de personnes aujourd’hui; parmi lesquelles on retrouve malheureusement beaucoup de catholiques. Que ce soit dans la présentation des enseignements bibliques et magistériels sur la famille (chapitre 1 et 3), dans l’analyse des défis contemporains auxquels toutes les familles font face dans leur volonté (consciente ou non) de réaliser leurs plus grandes aspirations (chapitre 2 et 5), dans la présentation de la beauté et de l’héroïcité nécessaires à la mise en pratique des exigences de l’amour véritable (chapitre 4 et 7) ou de l’approche pastorale nécessaire pour accompagner les familles dans la réalisation de leur vocation universelle à la sainteté (chapitre 6 et 8), l’ensemble du document semble être orienté vers la proximité avec Dieu qui se trouve aux côtés de chacun d’entre nous et qui nous invite à le connaître et l’aimer par l’entremise de nos relations familiales « où se reflète, par grâce, le mystère de la Sainte Trinité » ( no 86).

Nous reviendrons, dans les prochaines semaines, sur les différents thèmes abordés dans cette exhortation apostolique qui, des plus polémiques aux plus apparemment anodins, auront sans doute eu l’occasion de faire surface ici et là dans l’actualité. Entre temps, je vous recommande fortement la lecture de ce document qui saura réchauffer le cœur de tous les lecteurs qui forcément sentiront l’immense trésor de sagesse dont l’Église est dépositaire et dont elle nous fait part gratuitement s’appuyant sur ce don ultime de Dieu par son Fils sur la Croix.

Échos du Vatican

Dans cette émission le cardinal Georges Cottier (décédé le 31 mars dernier) revient sur ses souvenirs avec saint Jean-Paul II, dont nous commémorions le 11ème anniversaire de décès le 2 avril dernier.

Homélie du pape François lors de la veillée de prière pour dimanche de la miséricorde

blog_1459620183

Nous partageons avec joie et reconnaissance ce moment de prière qui nous introduit au Dimanche de la Miséricorde, tant désiré par saint Jean-Paul II – il y a onze ans, comme en ce jour, en 2005 il s’en est allé – ; et il voulait ceci pour accomplir une demande de sainte Faustine. Les témoignages qui ont été proposés – et dont nous remercions – et les lectures que nous avons entendues ouvrent des trouées de lumière et d’espérance pour entrer dans le grand océan de la miséricorde de Dieu. Combien sont les visages de sa miséricorde, avec lesquels il vient à notre rencontre ? Ils sont vraiment nombreux ; il est impossible de tous les décrire, parce que la miséricorde de Dieu est en croissance continuelle. Dieu ne se fatigue jamais de l’exprimer et nous ne devrions jamais nous habituer à la recevoir, à la rechercher, à la désirer ! C’est quelque chose de toujours nouveau qui provoque étonnement et surprise en voyant la grande imagination créatrice de Dieu quand il vient à notre rencontre avec son amour.

Dieu s’est révélé en manifestant plusieurs fois son nom, et ce nom est « miséricordieux » (cf. Ex. 34,6). Comme grande et infinie est la nature de Dieu, aussi grande et infinie est sa miséricorde, à tel point qu’il semble une entreprise ardue de pouvoir la décrire sous tous ses aspects. Parcourant les pages de la sainte Ecriture, nous trouvons que la miséricorde est avant tout la proximité de Dieu avec son peuple. Une proximité qui s’exprime et se manifeste principalement comme aide et protection. C’est la proximité d’un père et d’une mère qui se reflète dans une belle image du prophète Osée. Il dit ceci : « Je le guidais avec humanité, par des liens d’amour ; je le traitais comme un nourrisson qu’on soulève tout contre sa joue ; je me penchais vers lui pour le faire manger » (11, 4). L’accolade d’un père et d’une mère à leur enfant. Cette image est très expressive : Dieu prend chacun de nous et le soulève tout contre sa joue. Que de tendresse cela contient, que d’amour cela exprime ! Tendresse : mot presqu’oublié et dont le monde d’aujourd’hui – nous tous – nous avons besoin. J’ai pensé à cette parole du prophète quand j’ai vu le logo du Jubilé. Non seulement Jésus porte l’humanité sur ses épaules, mais sa joue est contre celle d’Adam, à tel point que les deux visages semblent se fondre en un.

Nous n’avons pas un Dieu qui ne saurait pas comprendre nos faiblesses et y compatir (cf. He 4, 15). Au contraire ! Justement en vertu de sa miséricorde Dieu s’est fait l’un de nous : « Par son incarnation, le Fils de Dieu s’est en quelque sorte uni lui-même à tout homme. Il a travaillé avec des mains d’homme, il a pensé avec une intelligence d’homme, il a agi avec une volonté d’homme, il a aimé avec un cœur d’homme. Né de la Vierge Marie, il est vraiment devenu l’un de nous, en tout, en tout semblable à nous, hormis le péché (Gaudium et spes, n. 22). En Jésus, donc, non seulement nous pouvons toucher de la main la miséricorde du Père, mais nous sommes poussés à devenir nous-mêmes instrument de la miséricorde. Il peut être facile de parler de miséricorde, alors qu’il est plus engageant d’en devenir concrètement des témoins. C’est un parcours qui dure toute la vie et ne devrait connaître aucune pause. Jésus nous a dit que nous devons être « miséricordieux comme le Père » (cf. Lc 6, 36). Et cela dure toute la vie !

Que de visages a donc la miséricorde de Dieu ! Elle nous est fait connaître comme proximité et tendresse, mais aussi en vertu de cela comme compassion et partage, comme consolation et pardon. Qui plus en reçoit, plus il est appelé à l’offrir, à la partager ; elle ne peut être tenue cachée ni gardée seulement pour soi-même. C’est quelque chose qui brûle le cœur et le provoque à aimer, reconnaissant le visage de Jésus Christ surtout en celui qui est plus loin, faible, seul, perdu et marginalisé. La miséricorde ne reste pas clouée sur place : elle va à la recherche de la brebis perdue, et quand elle la retrouve elle exprime une joie contagieuse. La miséricorde sait regarder dans les yeux chaque personne ; chacune est précieuse pour elle, parce que chacune est unique. Que de douleur nous éprouvons dans le cœur lorsque nous entendons dire : ‘‘Ces gens… ces gens, ces pauvres gens, mettons-les dehors, laissons-les dormir dans la rue…’’. Cela est-il de Jésus ?

Chers frères et sœurs, la miséricorde ne peut jamais nous laisser tranquilles. C’est l’amour du Christ qui nous « inquiète » tant que nous n’avons pas atteint l’objectif ; qui nous pousse à embrasser et à serrer contre nous, à impliquer tous ceux qui ont besoin de miséricorde pour permettre à tous d’être réconciliés avec le Père (cf. 2 Co 5, 14-20). Nous ne devons pas avoir peur, c’est un amour qui nous rejoint et nous implique au point d’aller au-delà de nous-mêmes, pour nous permettre de reconnaître son visage dans celui de nos frères. Laissons-nous conduire docilement par cet amour et nous deviendrons miséricordieux comme le Père.

Nous avons écouté l’Évangile : Thomas était un homme têtu. Il n’avait pas cru. Et il a trouvé la foi précisément lorsqu’il a touché les plaies du Seigneur. Une foi qui n’est pas capable de se mettre dans les plaies du Seigneur n’est pas la foi ! Une foi qui n’est pas capable d’être miséricordieuse, comme les plaies du Seigneur sont signe de miséricorde, n’est pas la foi : c’est une idée, c’est une idéologie. Notre foi est incarnée dans un Dieu qui s’est fait chair, qui s’est fait péché, qui a été plaie pour nous. Mais si nous voulons croire vraiment et avoir la foi, nous devons nous approcher et toucher cette plaie, caresser cette plaie et également abaisser la tête pour laisser les autres caresser nos plaies.

Il est bien alors que ce soit l’Esprit Saint qui guide nos pas : C’est lui l’Amour, c’est lui la Miséricorde qui se communique à nos cœurs. Ne mettons pas d’obstacles à son action vivifiante, mais suivons-le docilement sur les sentiers qu’il nous indique. Demeurons avec le cœur ouvert, pour que l’Esprit puisse le transformer ; et ainsi, pardonnés, réconciliés, immergés dans les plaies du Seigneur, devenons des témoins de la joie qui jaillit du fait d’avoir rencontré le Seigneur ressuscité, vivant au milieu de nous.

[Bénédiction]

L’autre jour, en parlant avec les dirigeants d’une association d’aide, de charité, a émergé cette idée, et j’ai pensé : ‘‘Je l’exprimerai à Place [Saint Pierre], le samedi’’. Qu’il serait beau que comme souvenir, disons, comme un ‘‘monument’’ de cette Année de la Miséricorde, il y ait dans chaque diocèse une œuvre, sous la forme d’une structure, de miséricorde : un hôpital, une maison pour les personnes âgées, pour les enfants abandonnés, une école là où il n’y en a pas, une maison pour récupérer les toxicomanes… Tant de choses qu’on peut faire… Il serait beau que chaque diocèse y pense : que puis-je laisser comme souvenir vivant, comme œuvre de miséricorde vivante, comme plaie de Jésus vivant à l’occasion de cette Année de la Miséricorde ? Pensons-y et parlons- en avec les Evêques. Merci !

[00501-FR.02] [Texte original: Italien]

Mgr Donald Bolen sur la réponse des catholiques aux Appels à l’action de Vérité et Réconciliation

blog_1459548214

Pourquoi l’Église catholique au Canada publie-t-elle des déclarations sur la doctrine de la découverte et sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones?

Les déclarations sont l’une et l’autre des réponses à des Appels à l’action de la Commission de Vérité et Réconciliation (CVR). Les Appels à l’action 46 et 49 invitent les communautés croyantes à répudier les concepts qui ont servi à justifier la domination européenne sur les territoires et les peuples autochtones, comme la doctrine de la découverte et le principe de terra nullius. L’Appel à l’action 46 demande aussi l’adoption et l’application complète de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. L’Appel à l’action 48 va plus loin en attirant l’attention sur le droit à l’autodétermination en matière de spiritualité, en appelant à des réformes là où elles s’imposent, en encourageant le dialogue public et l’action à l’appui de la Déclaration. Comme plusieurs autres communautés chrétiennes, l’Église catholique a soutenu le processus de la CVR et elle tient à donner suite à ses Appels à l’action.

Pourquoi maintenant?

La CVR avait demandé spécifiquement à chaque confession religieuse de publier une déclaration, au plus tard le 31 mars 2016, pour indiquer comment elle entend appliquer la Déclaration de l’ONU. Au sujet de la doctrine de la découverte, il y a déjà plus d’un an que la Commission Justice et Paix de la Conférence des évêques catholiques du Canada (CECC) travaille à un texte. Les controverses autour de la portée de la doctrine de la découverte imposaient sa répudiation et les appels lancés de certains côtés pour que le pape François révoque des décrets pontificaux du 15e siècle invitaient un commentaire et une clarification.

Au sujet de la Déclaration de l’ONU sur les droits des peuples autochtones, est-ce la première fois que l’Église catholique réagit à ce texte?

Non. Le Vatican et l’Église catholique de différents pays – dont le Canada – ont réagi très positivement à la Déclaration. La CECC a écrit au Gouvernement du Canada (avec d’autres Églises chrétiennes en 2010 et directement en 2015) pour lui demander d’appuyer la Déclaration après qu’il eut manifesté une certaine réticence.

[Read more…]

Réponse catholique à l’Appel à l’action 48 de la Commission de vérité et réconciliation

(Sur l’adoption et l’application de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones)

reponse catholique

1. Introduction : La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones

Voilà presque un an, la Commission de vérité et réconciliation du Canada publiait 94 Appels à l’action. L’un de ceux-ci demande aux groupes confessionnels au Canada d’« adopter officiellement et de respecter les normes et les principes de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones en tant que cadre de réconciliation ». Les évêques catholiques, les instituts de vie consacrée, les sociétés de vie apostolique et les autres organisations catholiques au Canada appuient la Déclaration et ils estiment que son esprit peut être le point de départ d’une réconciliation entre autochtones et non-autochtones au Canada. D’ailleurs, le bureau du Saint-Siège qui intervient aux Nations Unies – l’Observateur permanent du Saint-Siège à l’ONU – a appuyé explicitement cette Déclaration à plusieurs occasions2345 .

La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones été adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies en 2007. Sur le plan technique, il s’agit d’un « instrument de défense des droits de la personne », et non d’un traité ou d’une convention : une fois adoptée, elle n’a donc pas à être signée ou ratifiée. Elle s’adresse aux gouvernements des États nations; en ce sens, elle ne fait pas référence aux églises ou aux groupes religieux. Ce qui ne veut pas dire que les églises et les groupes religieux ne peuvent pas chercher à mettre en pratique les principes qu’elle formule. Étant donné que les églises et les groupes religieux font partie intégrante de la société au nom de laquelle parle et agit le gouvernement, il nous importe de nous faire entendre.

Les grands thèmes de la Déclaration présentent une forte convergence avec diverses déclarations qu’a déjà faites l’Église catholique par la voix de la Conférence des évêques catholiques du Canada (CECC) ou du Saint-Siège. C’est le cas notamment du droit des peuples autochtones à l’autodétermination, à l’autonomie gouvernementale et à leurs propres institutions, du droit à leurs territoires traditionnels, du droit à un processus équitable dans le règlement des revendications territoriales, du droit à leurs coutumes et à leurs traditions culturelles, du droit de pratiquer et de manifester leurs coutumes et leurs traditions spirituelles, du droit de préserver leurs langues, du droit à leurs propres établissements d’enseignement, du droit à l’amélioration de leur situation économique et sociale, du droit de diriger leur propre développement et du droit à la reconnaissance et à l’application des traités.

[Read more…]

La « doctrine de la découverte » et la terra nullius : Réaction catholique

TR

Le texte suivant examine et rejette des concepts et des principes dénués de fondement dont se sont servis les Européens pour justifier la saisie de territoires qui appartenaient à des peuples autochtones, et souvent connus sous le nom de « doctrine de la découverte » et de terra nullius. Une annexe fournit un aperçu historique de l’évolution de ces concepts en regard de la doctrine catholique et retrace leur répudiation. Les présupposés qui sous-tendent ces concepts ont aussi inspiré la politique profondément déplorable qui a amené à arracher des enfants autochtones à leurs familles et à leurs cultures pour les placer dans des pensionnats indiens. Le texte comprend des engagements qui sont recommandés pour une meilleure façon de cheminer avec les peuples autochtones.

Préambule

Ces dernières années, le processus de Vérité et Réconciliation nous a amenés à reconnaître de nouveau les abus commis dans le passé envers les peuples autochtones de notre pays. C’est avec émotion et beaucoup d’humilité que nous avons écouté des témoignages courageux et détaillés sur la violence, les traitements inhumains et le dénigrement culturel perpétrés par le système des pensionnats indiens. La brève note que voici traduit notre détermination à collaborer avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis afin d’aller de l’avant et veut aussi répondre en partie aux Appels à l’action de la Commission de Vérité et Réconciliation : nous entendons notamment revenir sur la façon dont la terre a souvent été arrachée à ses habitants autochtones sans leur consentement ou sans aucune justification juridique. La Conférence des évêques catholiques du Canada (CECC), le Conseil autochtone catholique du Canada et d’autres organisations catholiques réfléchissent depuis un certain temps aux notions de « doctrine de la découverte » et de terra nullius (on trouvera en annexe une analyse historique plus poussée).

[Read more…]

Secured By miniOrange