On est arrivé à un moment clé du Synode sur la Synodalité, de quoi s’agit-il ?

Ce mois-ci, plus de 450 participants se réunissent à Rome pour la première session de l’Assemblée du Synode des évêques sur le thème « Pour une Église synodale : Communion, participation et mission ». Qu’est-ce donc le synode sur la synodalité ?

Tout d’abord, commençons en se demandant : qu’est-ce qu’un synode exactement ?

Un synode est un rassemblement – traditionnellement d’évêques – qui aide l’Église à avancer dans une même direction. Le mot « synode » vient du grec syn-hodos, qui signifie « le même chemin » ou « la même voie ». Les synodes étaient courants dans les premiers siècles du christianisme, donnant aux évêques l’occasion de se rencontrer et de discuter de questions importantes pour la vie de l’Église. En 1965, le pape Paul VI a institué le Synode des évêques au niveau universel de l’Église. Il voulait un moyen de poursuivre l’échange fraternel et collégial qui avait été expérimenté lors du Concile Vatican II, où les évêques du monde entier s’étaient réunis entre 1962 et 1965. Depuis lors, des synodes sont organisés tous les deux ou trois ans, réunissant des évêques, des experts et divers délégués pour discuter de sujets tels que l’Eucharistie, la parole de Dieu, le Moyen-Orient, la nouvelle évangélisation, la famille, les jeunes et l’Amazonie. Dans chaque cas, les évêques votent sur un document final, puis le pape rédige son propre texte – appelé « exhortation apostolique » – afin d’ouvrir de nouvelles voies et d’éclairer d’un jour nouveau ce dont il a été question, pour que cela puisse rayonner dans toute l’Église.

Quelle est la particularité de ce synode sur la synodalité ?

Contrairement aux synodes précédents, celui-ci n’a pas pour but d’aborder une question particulière, mais de nous permettre de devenir ce que Dieu nous appelle à être en tant qu’Église, tous ensemble, dans la réalité du monde d’aujourd’hui ! Ce Synode qui se déroule de 2021 à 2024 est totalement inédit, pour au moins trois raisons.

D’abord, il ne s’agit plus seulement d’un Synode des évêques d’un mois, mais d’un processus synodal de trois ans pour tout le peuple de Dieu, tous les baptisés ! Tous sont invités et personne ne doit être laissé de côté ou exclu ! Les laïcs ont été impliqué dès le début du Synode, dans les phases diocésaines et continentales. Et maintenant, pour la première fois dans l’histoire, des laïcs ont également le droit de vote à l’Assemblée du Synode des Évêques à Rome.

Ensuite, c’est un synode qui vise à donner à toute l’Église une expérience vécue de la synodalité. Il ne s’agit pas seulement de remplir un questionnaire, mais de recueillir les fruits de ce que l’Esprit Saint nous dit ici et maintenant pour devenir une Église plus synodale dans le monde aujourd’hui.

Finalement, le but du Synode n’est pas seulement de parler de la synodalité, mais de la mettre en pratique dès maintenant, dans chaque diocèse, paroisse et pays du monde entier. Cela nous appelle tous, à tous les niveaux de l’Église, à renouveler notre façon d’être et de travailler ensemble pour aller de l’avant.

Mais qu’est-ce que la synodalité ?

Fondamentalement, la synodalité consiste en un cheminement commun. Cela se fait par l’écoute mutuelle qui permet d’entendre ce que Dieu nous dit. C’est réaliser que le Saint-Esprit peut s’exprimer à travers n’importe qui pour nous aider à avancer ensemble sur notre chemin comme peuple de Dieu.

Il ne s’agit pas de prendre trois ans pour comprendre un nouveau mot à la mode qui va bientôt disparaître. La synodalité n’est pas une phase passagère ! Au contraire, « marcher ensemble » est au cœur de ce qu’est l’Église, comme peuple de Dieu en pèlerinage au milieu du monde. À l’époque de l’Église primitive, saint Jean Chrysostome disait que pour lui, « Église » et « synode » étaient synonymes, puisque l’Église consiste en ce cheminement commun. En ce sens, la synodalité est une manière de renouveler l’Église à partir de ses racines les plus profondes, afin d’être plus unis les uns aux autres et de mieux accomplir notre mission dans le monde. Concrètement, la synodalité est une façon d’être et de travailler selon une approche plus proche de la base et plus collaborative, en prenant le temps de discerner le chemin à suivre ensemble. Elle met en évidence le fait que nous avons tous quelque chose de précieux à apporter au Corps du Christ. De cette manière, une « Église synodale »  est une Église qui écoute : « C’est une écoute réciproque dans laquelle chacun a quelque chose à apprendre. Le peuple fidèle, le Collège épiscopal, l’Évêque de Rome, chacun à l’écoute des autres ; et tous à l’écoute de l’Esprit Saint, l’« Esprit de Vérité » (Jn 14, 17), pour savoir ce qu’il dit aux Églises (Ap 2, 7). » (Pape François, Commémoration du 50e anniversaire de l’institution du Synode des évêques, 17 octobre 2015).

Cela nous appellera naturellement à changer nos façons de faire, afin que nous devenions de plus en plus ce que nous sommes véritablement en tant qu’Église, et que nous cheminions ensemble au milieu de toute la famille humaine, guidés par l’Esprit Saint.

Esprit Saint, conduis l’Église sur son chemin de pèlerinage alors que nous T’écoutons parler à travers chacun. Fais brûler le feu de Ton amour dans nos cœurs pour que nous avancions ensemble comme Église, accompagnant toute l’humanité sur un chemin commun vers Toi.

 

La communion : les noces de l’Agneau

Le retable de Gand : L’adoration de l’agneau (Source : Wikimedia Commons)

La communion : les noces de l’Agneau 

Contribution théologique – 9 octobre 2023 

Anna Rowlands 

Professeur St Hilda de pensée et de pratique sociales catholiques Département de théologie et de religion et Centre d’études catholiques,  Université de Durham, Royaume-Uni 

Cher Saint-Père, frères et sœurs, 

 

Pouvons-nous trouver le courage de faire face à la réalité telle qu’elle est vraiment ? C’est la  question merveilleusement stimulante que nous a posé le père Timothy. Il nous a présenté le  paradoxe de notre appel à ressembler au Christ : entendre, voir et ressentir la condition de notre  monde, tout en étant aussi honnêtes que possible avec nous-mêmes, car nous ne trouvons pas  facile de supporter la réalité. La section B1 de l’Instrumentum Laboris nous conduit au cœur  de ce paradoxe chrétien fondamental : l’espérance et la difficulté, la beauté et la liberté de  l’appel de Dieu ainsi que les défis posés par la croissance dans la sainteté. L’Instrumentum  Laboris – utilisant le langage de Lumen Gentium § 1 – nous invite à réfléchir sur la mission de  l’Église d’être dans le Christ le signe et l’instrument de l’unité avec Dieu et de toute l’humanité.  La vie de communion nous est offerte comme le don gratuit de vivre ensemble dans le Christ,  en apprenant à « supporter » la réalité, avec douceur, générosité, amour et courage, pour la paix  et le salut du monde entier. 

La première chose à dire sur la communion est donc qu’elle est la réalité de la vie même de  Dieu, l’être de Dieu, Père, Fils et Saint-Esprit. En ce sens, elle est la chose la plus réelle qui  soit : le fondement de la réalité et la source de l’être de l’Église.  

Notre première action vis-à-vis de cette réalité est une réception joyeuse, pas anxieuse ni  compétitive. Participer à la vie de communion est l’honneur et la dignité de notre vie. La  communion est la manière dont nous comprenons le but ultime de Dieu pour toute l’humanité  : attirer la création qu’il a aimée à naître toujours plus complètement dans sa propre vie, dans  l’étreinte, et, ce faisant, nous envoyer renouveler la face de la terre. L’appel à être une Église  au service du Royaume est décrit dans Lumen Gentium § 9 : « afin qu’elle soit pour tous et pour  chacun le sacrement visible de cette unité salvatrice ». L’Église montre et donne accès à la  communion avec Dieu, qui est communion pour toute la création. La communion devient alors  notre être et notre agir. 

Un ami me racontait que Raymond Brown, bibliste américain, aimait enseigner à ses étudiants  que le langage de la koinonia apparaissait pour la première fois dans le Nouveau Testament en  relation avec la pratique de l’échange d’argent, exprimant l’idée d’un pot commun de l’Église.  L’argent – la monnaie de l’Église n’est pas l’argent liquide – notre pot commun est plutôt la  richesse des dons, des charismes et des grâces que Dieu répand dans l’Église, qu’il « distribue  […] avec sa propre autorité » (Bas., fid. 3), et que nous sommes appelés à discerner. En tant que  chrétiens baptisés, nous mettons tous la main à la pâte. 

Nous pensons la communion comme le premier et le dernier mot d’une démarche synodale :  l’origine et l’horizon de notre chemin. Avec le Christ et son Esprit au centre, la communion  constitue la force centrale dans cette salle.

On dit souvent en plaisantant que Dieu s’est fait chair et que les théologiens ont remis Dieu en  mots… Comme je n’ai pas beaucoup de temps, je choisirai trois dimensions différentes de la  pensée sur la communion pour les évoquer très brièvement. 

Tout d’abord, la communion, c’est la beauté l’unité dans de la diversité. Dans un monde  moderne qui tend à la fois à l’homogénéité et à la fracture, la communion est un langage de  beauté, une harmonie d’unité et de pluralité. Cette beauté réside dans la célébration de la  richesse et de la diversité d’une création qui rend gloire à Dieu, une pluralité qui ne s’achève  que lorsque chaque chose créée a épuisé sa création et que tout est ramené à Dieu par le Christ  dans l’Esprit.  

Saint Bonaventure, le grand théologien franciscain, a magnifiquement écrit sur la façon dont  la pluralité de la création permet à l’ensemble des différentes couleurs de la lumière divine de  briller. La lumière divine est perçue à travers une communion qui rayonne dans une glorieuse  diversité – de personnes, de créatures, de cultures, de langues, de liturgies, de dons et de  charismes. Henri de Lubac a souligné que l’Église n’est jamais en compétition avec la culture.  C’est dans les cultures qu’elle habite, qu’elle confesse et reçoit le Christ. Une communion qui  rayonne est d’une diversité authentique, non compétitive, et dont le seul point d’unité est en  Dieu Trinité. 

Face à une mondanité qui vénère si souvent la force compétitive et assertive ainsi qu’une  logique de possession plutôt que de relation, Dieu nous attire dans une communion d’humilité  et de service. Jean-Marie Tillard a écrit que, contrairement à toute autre entité dans le monde,  c’est en embrassant la faiblesse, la souffrance et la pauvreté que l’Église « réussit » à devenir le  signe de la grâce de Dieu. Notre beauté n’est pas celle du monde. La section B1 nous invite à  grandir dans la communion en réfléchissant avec humilité avec ceux qui sont vulnérables,  souffrants ou faibles ainsi que sur les vulnérabilités et les faiblesses de l’Église. Dans la Section  B1, nous nous demandons avec courage comment être plus proches des plus pauvres, plus  capables d’accompagner tous les baptisés dans la diversité des situations humaines, en nous  libérant des faux pouvoirs, en étant plus proches de nos frères chrétiens et plus engagés dans  nos cultures particulières.  

Dès sa naissance, l’Église est inséparable du drame humain : dans un abri précaire, sur la croix,  à la Pentecôte. Notre catholicité continue d’être vécue au milieu du drame humain. Nous  parlons de communion, non pas en raison d’une perfection tranquille qui se trouverait juste hors  de notre portée, mais en raison de la lutte nécessaire dans chaque culture et dans chaque  contexte pour la vérité, la beauté et la bonté. La section B1 nous invite à réfléchir positivement  au sens que nous trouvons dans ces lieux de rencontre et de lutte, à entendre les échos et les  différences qui s’expriment. 

Deuxièmement, la communion existe dans des réalités concrètes et tangibles. C’est la vie  qui offre du pain aux affamés, la guérison à ceux qui souffrent, le repos à ceux qui sont troublés.  L’image la plus concrète et la plus vivante de la communion est peut-être celle du festin, le  repas de noces de l’Agneau. Dieu fait appel à nos sens : goûter et voir, prendre et manger.  

C’est dans l’Eucharistie que les différentes dimensions de la communion se rencontrent : c’est  le lieu où la communion des fidèles se manifeste, où nous recevons les dons de Dieu pour le  peuple de Dieu. L’ordre sacramentel nous enseigne, en nous nourrissant, la communion. 

La représentation scripturale de la fête est également une image qui perturbe l’ordre naturel des  choses. Dans le festin qui est préparé, les faibles, les méprisés et les souffrants seront les  premiers. Il en est ainsi en raison de la proximité de Dieu avec ceux qui souffrent et de la  proximité de beaucoup de ceux qui souffrent avec le mystère de Dieu. Un survivant d’agression  commise par clerc m’a écrit lorsqu’il a su que je participerais au Synode. Il m’a dit : « Soyez  audacieux quant au besoin de guérison. C’est un chemin pascal que nous devons parcourir  ensemble. Et dites-leur que l’Eucharistie est salvatrice ». Tous les survivants d’agressions ne  sont pas de cet avis, mais je partage ce message parce qu’il a le caractère d’une prophétie de  communion ; il appelle à la repentance et proclame la vérité centrale de notre foi. 

Les amitiés scandaleuses de Jésus qui ont rassemblé une communauté de disciples étaient  souvent des amitiés de table. Et les amitiés de table sont importantes. Lorsque je travaillais avec une association catholique d’aide aux réfugiés à Londres, je demandais aux réfugiés qui  venaient chercher de l’aide pourquoi ils choisissaient ce service en particulier. Je n’oublierai  jamais leur réponse : parce qu’ici, je suis accueilli à la porte par mon nom et que le personnel  s’assoit et mange avec nous à la même table. Cela me donne de la dignité, cela me rend mon  humanité. Dans les autres centres, le personnel ne mange pas avec nous. La fiche B1.1  concentre nos discussions sur ces questions d’une communion digne où l’Église rencontre le  Christ qui est déjà à table avec les plus pauvres.  

Troisièmement, la communion est une participation qui nous lie aux autres à travers le  temps et l’espace. Le terme koininia des Écritures est instructif ; il implique : une participation  à une réalité partagée dont personne n’est, en principe, exclu. C’est une réalité qui devient de  plus en plus elle-même au fur et à mesure qu’elle se répand, dispersée aux quatre coins du  monde et partagée de manière plus intime et plus complète entre les Églises. Accepter la vérité  signifie qu’il y a toujours plus de vérité à découvrir. 

Nous agissons toujours à la lumière de ce qui a été. Nous agissons maintenant et nous agissons  vers ce qui nous appelle – vers l’unité au service du royaume. Chacune de ces actions – déjà  commencées mais toujours en devenir – nous lie aux réalités du passé – actions joyeuses qui  doivent être poursuivies, actions néfastes dont on doit se repentir et guérir – Elle nous lie à la  louange de Dieu et à l’appel de notre prochain dans le présent, et vers l’avenir où nous aspirons  à être reçus. Si le langage de la communion est un langage pascal et donc porteur d’espérance,  c’est en grande partie parce qu’il relie le passé, le présent et l’avenir comme par un fil d’or. À  une époque où l’on cherche souvent à rompre ces liens, notre foi s’y accroche. C’est l’un des  repères qui nous est donné pour nous orienter. 

Cette réalité d’une communion qui rayonne, mystérieuse mais tout à fait concrète, déjà là mais  encore en devenir, offerte comme le pain de vie qui sauve le monde et la parole qui sauve des  vies, devant être exprimée dans chaque contexte – local, régional, mondial – habité par l’Église ;  c’est la réalité de cet horizon paradoxal de l’espérance, que, si nous en avons le courage, le  Seigneur nous invite à rejoindre.

Que pouvons-nous attendre du Synode ?

Conférence de presse du 5 octobre, le lendemain de l’ouverture officielle de l’Assemblée générale 2023.

Que pouvons-nous attendre du processus synodal en cours ? Comme dans tout vrai processus de discernement, où l’on essaie d’entendre la volonté de Dieu, la réponse courte est que nous ne savons pas vraiment. Il n’y a pas de scénario préétabli pour ce chemin synodal. Il s’agit d’un pèlerinage où l’on prie ensemble, où l’on s’écoute les uns les autres et où l’on découvre ensemble, en tant qu’Église, ce que Dieu a à nous dire en cette période de l’histoire de l’humanité. 

Il y a cependant des choses dont nous pouvons être sûrs qu’elles ne sortiront pas de ce synode. Les synodes n’ont pas pour but de changer notre foi. Il n’est pas question de ne plus croire en la résurrection de Jésus, par exemple. Il ne s’agit pas non plus de changer le Credo ou de réviser l’Évangile. Le Synode actuel cherche plutôt à nous aider à devenir l’Église que Jésus ressuscité nous appelle à être dans le monde d’aujourd’hui, afin qu’au milieu des réalités de notre temps, nous puissions vivre et partager l’Évangile de manière féconde avec tous nos frères et sœurs en humanité.

Pour accomplir cette tâche ambitieuse, le pape François a voulu impliquer tout le monde ! C’est pourquoi, d’une manière totalement inédite, le pape a voulu entendre tous les membres de l’Église. C’est le premier synode à commencer par une phase diocésaine, qui s’est déroulée à partir d’octobre 2021, afin d’écouter les voix des personnes dans les paroisses et les églises locales. Ensuite, il y a eu une phase continentale, afin que les diverses cultures de tous les pays du monde puissent apporter leur contribution pour enrichir notre compréhension de la manière dont Dieu appelle l’Église à travers le monde. Et enfin, deux Assemblées à Rome : l’une en octobre 2023 et l’autre un an plus tard en octobre 2024. Ces deux Assemblées rassemblent un plus grand nombre de participants que d’habitude : c’est la plus grande Assemblée synodale jamais organisée à Rome. Il y a une année entre ces deux Assemblées pour que les participants puissent continuer à prier, à réfléchir et à parler avec d’autres de la direction que l’Esprit Saint nous appelle à prendre en tant qu’Église aujourd’hui. Pour la première fois, des laïcs ont été nommés membres à part entière du Synode, avec le droit de vote, aux côtés des évêques. Cela signifie que les préoccupations et les perspectives des catholiques ordinaires, hommes et femmes, auront toute leur place dans ce processus de discernement.

Le titre de ce synode nous donne un aperçu de ce dont il s’agit : « Pour une Église synodale : Communion, Participation et Mission ». Devenir une Église synodale, c’est approfondir la communion par laquelle Dieu nous unit en tant que ses fils et filles ; c’est ouvrir des espaces où chacun peut participer, car nous avons tous un rôle à jouer dans la famille de Dieu ; et enfin, c’est accomplir la mission que Dieu nous confie en tant qu’Église au 21e siècle, comme levain dans la pâte de la société au service de l’avènement du royaume de Dieu. Nous pouvons espérer une Église plus accueillante, plus inclusive, une Église caractérisée par la miséricorde que Jésus nous montre dans l’Évangile. En même temps, nous devons reconnaître qu’une Église plus accueillante et plus miséricordieuse commence par nous-mêmes. Il ne s’agit pas seulement de documents provenant de Rome, il s’agit de la manière dont nous vivons nos vocations de chrétiens jour après jour, du type de communautés que nos paroisses et nos diocèses sont pour nous et pour les autres. Quant aux documents, on peut s’attendre à ce qu’un document de synthèse émerge de cette première session de l’Assemblée synodale à Rome, puis un document final à l’issue de la deuxième session en octobre prochain, et probablement une exhortation apostolique du Saint-Père, possiblement promulguée en 2025. Il s’agirait de nouveaux pas en avant sur la base des riches ressources déjà issues de ce processus synodal depuis 2021 :

Le Synode n’est pas une question d’idéologies ou de slogans, ni de changement de notre foi. Il s’agit plutôt de demander à Dieu de nous dire comment l’Église fondée par Jésus peut continuer à porter du fruit au milieu des joies et des défis du monde d’aujourd’hui, comment nos pratiques pastorales peuvent être renouvelées et converties pour mieux remplir notre mission. Il s’agit de devenir une Église capable de discerner le chemin à suivre et de faire rayonner les dons de chacun.

Dieu notre Père, nous te demandons de nous prendre par la main et de marcher avec nous. Inspire-nous avec audace et humilité pour vivre tes rêves pour l’Église de notre temps. Marie, Mère de l’Église, prie pour nous. Amen.

 

La Samaritaine au puits (Jean 4, 7-30)

Marcantonio Franceschini – Le Christ et la femme de Samarie. (Source : Wikimedia Commons)

La Samaritaine au puits : Jean 4.7 – 30
Contribution spirituelle – 9 octobre
Père Timothy Radcliffe OP

Aujourd’hui, nous commençons à réfléchir sur le point B.1 de l’Instrumentum Laboris, « Une communion qui rayonne ». Le thème qui est apparu le plus fréquemment dans nos sessions de la semaine dernière est celui de la formation. Comment pouvons-nous donc tous être formés à une communion qui déborde sur la mission ?

Dans le chapitre 4 de Jean, nous entendons parler de la rencontre de Jésus avec la femme au puits. Au début du chapitre, elle est seule, une figure solitaire. À la fin, elle est transformée en première prédicatrice de l’Évangile, tout comme la première prédicatrice de la résurrection sera une autre femme, Marie Madeleine, l’Apôtre des Apôtres : deux femmes qui lancent la prédication, d’abord de la bonne nouvelle que Dieu est venu jusqu’à nous pour prêcher ensuite la résurrection.

Comment Jésus surmonte-t-il l’ostracisme vis à vis de Marie Madeleine ? La rencontre s’ouvre sur quelques mots brefs, seulement trois en grec : « Donne-moi à boire ». Jésus a soif et il a besoin de plus que de l’eau. Tout l’évangile de Jean est structuré autour de la soif de Jésus. Son premier signe a été d’offrir du vin aux invités assoiffés des noces de Cana. Ses derniers mots ou presque, sur la croix, sont « J’ai soif ». Puis il dit : « Tout est accompli » et meurt.

Dieu apparaît parmi nous comme quelqu’un qui a soif avant tout de chacun d’entre nous. Mon maître des étudiants, Geoffrey Preston OP, a écrit : « Le salut, c’est lorsque Dieu nous désire, qu’il est rongé par la soif de nous ; Dieu nous désire tellement plus que nous ne pourrons jamais le désirer. La mystique anglaise du XIVe siècle, Julian de Norwich, a dit : « Le désir et la soif spirituelle [pneumatique] du Christ durent et dureront jusqu’au jour du Jugement dernier. Dieu a eu tellement soif de cette femme déchue qu’il se fit humain. Il a partagé avec elle ce qu’il y a de plus précieux, le nom divin : « Je suis celui qui te parle ». C’est comme si l’Incarnation
s’était produite juste pour elle. Elle apprend à avoir soif, elle aussi. D’abord d’eau, pour ne pas avoir à venir au puits tous les jours. Puis elle découvre une soif plus profonde. Jusqu’à présent, elle allait d’homme en homme. Aujourd’hui, elle découvre celui qu’elle a toujours désiré sans le savoir. Comme le disait Romano le Mélodiste, souvent la vie sexuelle erratique des gens est une expression brouillonne de leur soif la plus profonde, celle de Dieu. Nos péchés, nos échecs, sont généralement des tentatives erronées de trouver ce que nous désirons le plus. Mais le Seigneur nous attend patiemment près de nos puits, nous invitant à avoir encore plus soif.

La formation à « une communion qui rayonne » consiste donc à apprendre à avoir soif et à avoir faim de plus en plus profondément. Nous commençons par nos désirs ordinaires. Lorsque j’étais malade d’un cancer à l’hôpital, je n’ai rien pu boire pendant environ trois semaines. J’avais une soif intense. Rien n’a jamais été aussi bon que le premier verre d’eau, encore mieux qu’un verre de whisky ! Mais peu à peu, j’ai découvert qu’il existait une soif plus profonde : « Dieu tu es mon Dieu je te cherche dès l’aube, mon âme a soif de toi ; après toi languit ma chair, terre aride altérée sans eau » (Psaume 62).

Ce qui nous isole tous, c’est d’être pris au piège de petits désirs, de petites satisfactions, comme celle de battre nos adversaires ou d’accéder à un statut, ou encore de porter un chapeau particulier ! Selon la tradition orale, lorsque Thomas d’Aquin s’est vu demander par sa sœur Théodora comment devenir un saint, il a répondu d’un mot : Velle ! Vouloir ! Jésus demande constamment aux personnes qui viennent à lui : « Voulez-vous ? »;  « Que voulez-vous que je fasse pour vous ? ». Le Seigneur veut nous donner la plénitude de l’amour. Le voulons-nous ?

La formation à la synodalité signifie donc apprendre à devenir des personnes passionnées, remplies d’un désir profond. Pedro Arrupe, le merveilleux supérieur général des Jésuites, a écrit : « Rien n’est plus pratique que de trouver Dieu, c’est-à-dire de tomber amoureux
d’une manière tout à fait absolue et définitive. Ce dont vous êtes amoureux, ce qui s’empare de votre imagination, affectera tout. C’est ce qui décidera de vous sortir du lit le matin, de ce que vous ferez de vos soirées, de la manière dont vous passerez vos week-ends, de ce que vous lirez, de qui vous connaîtrez, de ce qui vous brisera le cœur et de ce qui vous émerveillera, rempli de joie et de gratitude. Tombez amoureux, restez amoureux, et cela décidera de tout. » Saint Augustin, cet homme passionné, s’est exclamé : « Je t’ai goûté et j’ai maintenant faim et soif de toi ; tu m’as touché et j’ai brûlé pour ta paix ».

Mais comment devenir des personnes passionnées – passionnées par l’Évangile, remplies d’amour les unes pour les autres – sans désastre ? C’est une question fondamentale pour notre formation, en particulier pour nos séminaristes. L’amour de Jésus pour cette femme sans nom la libère. Elle devient la première prédicatrice, mais nous n’entendons plus jamais parler d’elle. Une Église synodale sera une Église dans laquelle nous sommes formés à l’amour non possessif : un amour qui ne fuit pas l’autre personne et ne prend pas possession d’elle ; un amour qui n’est ni abusif ni froid.

Il s’agit d’abord d’une rencontre intensément personnelle entre deux personnes. Jésus la rencontre telle qu’elle est. Tu as raison de dire : « Je n’ai pas de mari ». En effet, tu as eu cinq maris et celui que tu as maintenant n’est pas ton mari. Ce que tu as dit est vrai. Elle s’enflamme et répond d’un ton moqueur : « Ah, tu es donc un prophète ! ».

Nous devrions être formés à des rencontres profondément personnelles les uns avec les autres, dans lesquelles nous transcendons les étiquettes faciles. L’amour est personnel et la haine est abstraite. Je cite à nouveau le roman de Graham Greene, La puissance et la gloire : « La haine n’était qu’un échec de l’imagination  ». Le désaccord très personnel entre saint Paul et saint Pierre était dur, mais il s’agissait véritablement d’une rencontre. Le Saint-Siège est fondé sur cette rencontre passionnée, colérique mais réelle. Les personnes que saint Paul ne pouvait pas supporter étaient les espions sournois, qui comméraient et ourdissaient leurs plans en secret, chuchotant dans les couloirs, cachant qui ils étaient sous des sourires trompeurs. Le désaccord ouvert n’était pas le problème.

Tant de personnes se sentent exclues ou marginalisées dans notre Église parce que nous leur avons collé des étiquettes abstraites : divorcés-remariés, homosexuels, polygames, réfugiés, Africains, Jésuites ! Un ami m’a dit l’autre jour : « Je déteste les étiquettes. Je déteste que l’on mette les gens dans des cases. Je ne supporte pas ces conservateurs ». Si vous rencontrez vraiment quelqu’un, vous pouvez vous mettre en colère, mais dans une rencontre vraiment personnelle, la haine ne pourra pas durer. Si vous entrevoyez leur humanité, vous verrez celui qui les crée et les soutient dans l’être dont le nom est JE SUIS.

Le fondement de notre rencontre aimante et non possessive avec les autres est certainement notre rencontre avec le Seigneur, chacun puisant à son propre puits, avec ses échecs, ses faiblesses et ses désirs. Il nous connaît tels que nous sommes et nous rend libres de nous rencontrer dans un amour qui libère et ne contrôle pas. Dans le silence de la prière, nous sommes libérés.

Elle rencontre celui qui la connaît parfaitement. Cela la pousse à poursuivre sa mission. Venez voir l’homme qui m’a dit tout ce que j’ai fait ». Jusqu’à présent, elle a vécu dans la honte et la dissimulation, craignant le jugement de ses concitoyens. Elle va au puits en plein midi, parce qu’il n’y a personne d’autre. Mais maintenant, le Seigneur a mis en lumière tout ce qu’elle est et l’aime. Après la chute, Adam et Ève se sont soustraits à la vue de Dieu, honteux. Maintenant, elle entre dans la lumière. La formation à la synodalité fait tomber nos déguisements et nos masques, de sorte que nous entrions dans la lumière. Puisse cela se produise dans nos circuli minori !

Nous serons alors en mesure de transmettre le plaisir sans limite de Dieu en chacun de nous, plaisir dans lequel il n’y a pas de honte. Je n’oublierai jamais une clinique spécialisée dans le traitement du sida, appelée Mashambanzou, à la périphérie de Harare, au Zimbabwe. Le mot signifie littéralement « l’heure où les éléphants se lavent », c’est-à-dire l’aube. Ils descendent ensuite à la rivière pour s’éclabousser, s’asperger d’eau et s’en asperger les uns les autres. C’est un moment de joie et de jeu. La plupart des patients étaient des adolescents à qui il ne restait plus beaucoup de temps à vivre, mais c’était un lieu de joie. Je me souviens particulièrement d’un jeune garçon appelé Courage, qui remplissait l’endroit de rires.

À Phnom Penh, au Cambodge, j’ai visité un autre hospice pour malades du sida, dirigé par un prêtre appelé Jim. Lui et ses assistants recueillent dans les rues les personnes mourant du sida et les ramenaient dans cette simple cabane en bois. Un jeune homme venait d’être amené. Il était émacié et ne semblait pas avoir beaucoup de temps à vivre. On lui lavait et coupait les cheveux. Son visage était béat. C’était l’enfant de Dieu en qui le Père se complaît.

Les disciples reviennent avec de la nourriture. Ils sont choqués de voir Jésus parler à cette femme déchue. Les puits sont des lieux de rencontres romantiques dans la Bible ! Comme pour elle, la conversation commence lentement. Deux mots seulement : « Rabbi, mange ». Mais elle est déjà devenue prédicatrice avant eux. Notre rôle en tant que prêtres est souvent de soutenir ceux qui ont déjà commencé à récolter la moisson avant même que nous nous réveillions.

Homélie du pape François lors de la messe d’ouverture du Synode 2023

L’Assemblée générale 2023 du Synode sur la synodalité a débuté par la Sainte Messe le 4 octobre, en la fête de Saint François d’Assise. Dans son homélie, le pape François a affirmé que « le Synode sert à nous rappeler ceci : notre Mère l’Église a toujours besoin d’être purifiée, d’être « réparée », car nous sommes un peuple composé de pécheurs pardonnés – les deux éléments : pécheurs pardonnés – qui ont toujours besoin de revenir à la source qu’est Jésus et de se remettre sur les chemins de l’Esprit pour atteindre tout le monde avec son Évangile. »

Messe avec les nouveaux cardinaux et le Collège des cardinaux
Ouverture de l’Assemblée générale ordinaire du Synode des évêques
Homélie de Sa Sainteté
Place Saint-Pierre
Mercredi 4 octobre 2023

Voici le texte intégral:

L’Évangile que nous venons d’entendre est précédé par le récit d’un moment difficile de la mission de Jésus, que nous pourrions définir comme un moment de “désolation pastorale” : Jean Baptiste doute qu’il soit vraiment le Messie ; de nombreuses villes qu’il a traversées, malgré les miracles accomplis, ne se sont pas converties ; les gens l’accusent d’être un glouton et un ivrogne, alors qu’un peu plus tôt ils s’étaient plaints du Baptiste parce qu’il était trop austère (cf. Mt 11, 2-24). Cependant, nous voyons que Jésus ne se laisse pas abattre par la tristesse, mais il lève les yeux vers le ciel et bénit le Père parce qu’il a révélé aux simples les mystères du Royaume de Dieu : « Père, Seigneur du ciel et de la terre, je proclame ta louange : ce que tu as caché aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout-petits » (Mt 11, 25). Au moment de la désolation, Jésus a donc un regard capable de voir au-delà: il loue la sagesse du Père et il est capable de discerner le bien caché qui grandit, la semence de la Parole accueillie par les simples, la lumière du Royaume de Dieu qui se fraye un chemin même dans la nuit. 

Chers frères cardinaux, frères évêques, sœurs et frères, nous sommes à l’ouverture de l’Assemblée synodale. Et nous n’avons pas besoin d’un regard immanent, fait de stratégies humaines, de calculs politiques ou de batailles idéologiques. Nous ne sommes pas ici pour mener une réunion parlementaire ou un plan de réforme. Non. Nous sommes ici pour marcher ensemble sous le regard de Jésus, qui bénit le Père et accueille tous ceux qui sont fatigués et opprimés. Partons donc du regard de Jésus, un regard qui bénit et qui accueille.

1. C’est avant tout un regard qui bénit. Bien qu’il ait fait l’expérience du rejet et qu’il ait vu tant de dureté de cœur autour de lui, le Christ ne se laisse pas emprisonner par la déception, il ne devient pas amer, il n’éteint pas la louange ; son cœur, enraciné dans le primat du Père, reste serein même dans la tempête. 

Ce regard qui bénit du Seigneur nous invite aussi à être une Église qui, avec un esprit joyeux, contemple l’action de Dieu et discerne le présent. Et qui, au milieu des vagues parfois agitées de notre temps, ne se décourage pas, ne cherche pas d’échappatoires idéologiques, ne se barricade pas derrière des convictions acquises, ne cède pas aux solutions faciles, ne se laisse pas dicter son agenda par le monde. Telle est la sagesse spirituelle de l’Église, résumée avec sérénité par saint Jean XXIII : « Il est nécessaire avant tout que l’Église ne détourne jamais son regard de l’héritage sacré de vérité qu’elle a reçu des anciens. Mais il faut aussi qu’elle se tourne vers les temps présents, qui entraînent de nouvelles situations, de nouvelles formes de vie et ouvrent de nouvelles voies à l’apostolat » (Discours pour l’ouverture solennelle du Concile œcuménique Vatican II, 11 octobre 1962). 

Le regard qui bénit de Jésus nous invite à être une Église qui n’affronte pas les défis et les problèmes d’aujourd’hui avec un esprit de division et de conflit, mais qui, au contraire, tourne les yeux vers Dieu qui est communion et, avec crainte et humilité, le bénit et l’adore, le reconnaissant comme son unique Seigneur. Nous Lui appartenons et – ne l’oublions pas – nous n’existons que pour Le 

porter au monde. Comme nous l’a dit l’apôtre Paul, « la croix de notre Seigneur Jésus Christ reste notre seule fierté » (Ga 6, 14). Cela nous suffit, Il nous suffit. Nous ne voulons pas de gloires terrestres, nous ne voulons pas paraitre beaux aux yeux du monde, mais le rejoindre avec la consolation de l’Évangile, pour mieux témoigner, à tous, de l’amour infini de Dieu. En effet, comme l’a dit Benoît XVI en s’adressant à une Assemblée synodale, « La question pour nous est la suivante : Dieu a parlé, Il a vraiment rompu le grand silence, Il s’est montré, mais comment pouvons-nous faire arriver cette réalité à l’homme d’aujourd’hui afin qu’elle devienne salut? » (Méditation au cours de la 1ère Congrégation générale de la XIIIe Assemblée Générale Ordinaire du Synode des Évêques, 8 octobre 2012). Telle est la question fondamentale. Et c’est la tâche première du Synode : recentrer notre regard sur Dieu, pour être une Église qui regarde l’humanité avec miséricorde. Une Église unie et fraternelle, qui écoute et dialogue ; une Église qui bénit et encourage, qui aide ceux qui cherchent le Seigneur, qui secoue avec bienveillance les indifférents, qui ouvre des chemins pour initier les personnes à la beauté de la foi. Une Église qui a Dieu en son centre et qui, par conséquent, ne se divise pas à l’intérieur et n’est jamais dure à l’extérieur. C’est ainsi que Jésus veut l’Église, son Épouse.

2. Après le regard qui bénit, nous contemplons le regard du Christ qui accueille. Alors que ceux qui se croient sages ne reconnaissent pas l’œuvre de Dieu, lui se réjouit dans le Père parce qu’il se révèle aux petits, aux simples, aux pauvres en esprit. Ainsi, tout au long de sa vie, il adopte ce regard hospitalier envers les plus faibles, les souffrants, les laissés-pour-compte. C’est vers eux, en particulier, qu’il se tourne, en disant ce que nous avons entendu : « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos » (Mt 11, 28).

Ce regard accueillant de Jésus nous invite également à être une Église hospitalière. Dans une époque complexe comme la nôtre, de nouveaux défis culturels et pastoraux apparaissent, qui requièrent une attitude intérieure cordiale et douce, afin que nous puissions nous confronter sans crainte. Dans le dialogue synodal, dans cette belle “marche dans l’Esprit Saint” que nous entreprenons ensemble en tant que Peuple de Dieu, nous pouvons grandir dans l’unité et l’amitié avec le Seigneur pour regarder les défis d’aujourd’hui avec son regard ; pour devenir, selon une belle expression de saint Paul VI, une Église qui « se fait conversation » (Lett. enc. Ecclesiam suam, n. 67). Une Église dont “le joug est doux” (cf. Mt 11, 30), qui n’impose pas de fardeaux et qui répète à chacun : “Venez, vous qui êtes fatigués et opprimés, venez, vous qui vous êtes égarés ou qui vous sentez loin, venez, vous qui avez fermé les portes de l’espérance : l’Église est là pour vous”.

3. Frères et sœurs, Peuple saint de Dieu, face aux difficultés et aux défis qui nous attendent, le regard qui accueille et bénit Jésus nous empêche de tomber dans certaines tentations dangereuses : être une Église rigide, qui s’arme contre le monde et regarde en arrière ; être une Église tiède, qui se soumet aux modes du monde ; être une Église fatiguée, repliée sur elle-même. Marchons ensemble, humbles, ardents et joyeux. Marchons sur les traces de saint François d’Assise, le saint de la pauvreté et de la paix, le “fou de Dieu” qui a porté dans son corps les stigmates de Jésus et s’est dépouillé de tout pour se revêtir de Lui. Saint Bonaventure raconte que, tandis qu’il priait, le Crucifié lui dit : « Va et répare mon église » (Legenda maior, II, 1). Le Synode sert à nous rappeler ceci : notre Mère l’Église a toujours besoin d’être purifiée, d’être “réparée”, parce que tous nous sommes un Peuple de pécheurs pardonnés, qui ont toujours besoin de revenir à la source qu’est Jésus et de se remettre sur les chemins de l’Esprit pour rejoindre tout le monde avec son Évangile. François d’Assise, à une époque de grandes luttes et de divisions entre les pouvoirs temporel et religieux, entre l’Église institutionnelle et les courants hérétiques, entre les chrétiens et les autres croyants, n’a critiqué ni critiqué personne, mais il a pris à bras le corps les armes de l’Évangile : l’humilité et l’unité, la prière et la charité. Faisons de même !

Et si le saint Peuple de Dieu, et ses pasteurs, partout dans le monde, nourrit des attentes, des espoirs et même quelques craintes à l’égard du Synode que nous commençons, souvenons-nous qu’il ne s’agit non pas d’un rassemblement politique, mais d’une convocation dans l’Esprit ; non pas d’un parlement polarisé, mais d’un lieu de grâce et de communion. L’Esprit Saint brise souvent nos attentes pour créer quelque chose de nouveau qui dépasse nos prédictions et notre négativité. Ouvrons-nous à Lui et invoquons-Le, Lui le protagoniste, l’Esprit Saint. Et avec Lui, marchons, dans la confiance et la joie. 

 

 

Homélie du pape François durant la veillée œcuménique de prière

Homélie du pape François lors de la veillée œcuménique de prière par laquelle il demande à l’Esprit le don de l’écoute pour les participants au Synode : « Écoute de Dieu jusqu’à entendre avec Lui le cri du peuple ; écoute du peuple, jusqu’à y respirer la volonté à laquelle Dieu nous appelle »

VEILLÉE ŒCUMÉNIQUE DE PRIÈRE

HOMÉLIE DU PAPE FRANÇOIS

Place Saint-Pierre
Samedi 30 septembre 2023

Voici le texte intégral:

« Together ». « Ensemble ». Comme la communauté chrétienne des premiers temps le jour de la Pentecôte ; comme un seul troupeau, aimé et rassemblé par un seul Pasteur, Jésus ; comme la grande foule de l’Apocalypse, nous sommes ici, frères et sœurs « de toutes nations, tribus, peuples et langues » (Ap 7, 9), provenant de communautés et de pays différents, filles et fils du même Père, animés par l’Esprit reçu au baptême, appelés à la même espérance (cf. Ep 4, 4-5).

Merci pour votre présence. Merci à la communauté de Taizé pour cette initiative. Je salue très chaleureusement les chefs d’Églises, les responsables et les délégations des différentes traditions chrétiennes, et je vous salue tous, en particulier les jeunes : merci. Merci d’être venus prier pour nous et avec nous, à Rome, avant l’Assemblée générale ordinaire du Synode des évêques, à la veille de la retraite spirituelle qui la précède. « Syn-odos » : marchons ensemble, pas seulement les catholiques, mais tous les chrétiens, tout le peuple des baptisés, tout le Peuple de Dieu, parce que « seul l’ensemble peut être l’unité de tous » (J.A. Möhler, Symbolik oder Darstellung der dogmatischen Gegensätze der Katholiken und Protestanten nach ihren öffentlichen Bekenntnisschriften, II, Köln-Olten 1961, 698).

Comme la grande foule de l’Apocalypse, nous avons prié en silence, en écoutant un « grand silence » (cf. Ap 8, 1). Et le silence est important, il est puissant : il peut exprimer une douleur indicible face au malheur, mais aussi, dans les moments de joie, une allégresse qui dépasse les mots. C’est pourquoi je voudrais réfléchir brièvement avec vous sur son importance dans la vie du croyant, dans la vie de l’Église et dans le chemin d’unité des chrétiens. L’importance du silence.

Premièrement, le silence est essentiel dans la vie du croyant. En effet, il se trouve au début et à la fin de l’existence terrestre du Christ. Le Verbe, la Parole du Père, s’est fait « silence » dans la mangeoire et sur la croix, dans la nuit de la Nativité et dans celle de Pâques. Ce soir, nous, chrétiens, nous nous tenons en silence devant le Crucifix de Saint-Damien, comme des disciples à l’écoute devant la croix, qui est la cathèdre du Maître. Notre silence n’a pas été vide, mais a été un moment rempli de foi, d’attente et de disponibilité. Dans un monde plein de bruit, nous ne sommes plus habitués au silence, et nous avons même parfois du mal à le supporter parce qu’il nous met face à Dieu et face à nous-mêmes.Et pourtant, il est le fondement de la parole et de la vie. Saint Paul dit que le mystère du Verbe incarné a été « gardé depuis toujours dans le silence » (Rm 16, 25), il nous enseigne que le silence garde le mystère, comme Abraham gardait l’Alliance, comme Marie gardait dans son sein et méditait dans son cœur la vie de son Fils (cf. Lc 1, 31 ; 2, 19 51). Par ailleurs, la vérité n’a pas besoin de cris violents pour atteindre le cœur des hommes. Dieu n’aime pas les proclamations et les clameurs, le bavardage et le vacarme : Dieu préfère plutôt, comme il l’a fait avec Élie, parler dans le « murmure d’une brise légère » (1 R 19,12), dans un « fin silence sonore ». Et alors, nous aussi, comme Abraham, comme Élie, comme Marie, nous avons besoin de nous libérer de tant de bruits pour entendre sa voix. Car ce n’est que dans notre silence que sa Parole résonne.

Deuxièmement, le silence est essentiel dans la vie de l’Église. Les Actes des Apôtres racontent qu’après le discours de Pierre au Concile de Jérusalem, « toute la multitude garda le silence » (Ac 15, 12) en se préparant à recevoir le témoignage de Paul et de Barnabé sur les signes et les prodiges que Dieu avait accomplis parmi les nations. Et cela nous rappelle que le silence dans la communauté ecclésiale rend possible la communication fraternelle dans laquelle l’Esprit Saint harmonise les points de vue ; parce qu’Il est harmonie. Être synodal veut dire s’accueillir les uns les autres en ayant conscience que nous avons tous quelque chose à témoigner et à apprendre, en nous mettant ensemble à l’écoute de « l’Esprit de vérité » (Jn 14, 17) pour savoir ce qu’il « dit aux Églises » (Ap 2, 7). Et le silence permet justement le discernement, à travers l’écoute attentive des « gémissements inexprimables » (Rm 8, 26) de l’Esprit qui résonnent, souvent cachés, dans le Peuple de Dieu. Demandons donc à l’Esprit le don de l’écoute pour les participants au Synode : « Écoute de Dieu jusqu’à entendre avec Lui le cri du peuple ; écoute du peuple, jusqu’à y respirer la volonté à laquelle Dieu nous appelle » (Discours à l’occasion de la Veillée de prière préparatoire au Synode sur la Famille, 4 octobre 2014).

Enfin, troisièmement, le silence est essentiel sur le chemin de l’unité des chrétiens. En effet, il est fondamental pour la prière qui est le point de départ de l’œcuménisme et sans laquelle il est stérile. Jésus, en effet, a prié pour que ses disciples « soient un » (Jn 17, 21). Le silence qui devient prière permet d’accueillir le don de l’unité « comme le Christ la veut », « avec les moyens qu’il veut » (cf. P. Cᴏᴜᴛᴜʀɪᴇʀ, Prière pour l’unité), et non comme le fruit autonome de nos efforts et selon des critères purement humains. Plus nous nous tournons ensemble vers le Seigneur dans la prière, plus nous sentons que c’est Lui qui nous purifie et nous unit au-delà des différences. L’unité des chrétiens grandit dans le silence devant la croix, comme les semences que nous recevrons et qui représentent les différents dons accordés par l’Esprit Saint aux diverses traditions : nous avons le devoir de les semer, avec la certitude que Dieu seul donne la croissance (cf. 1 Co 3, 6). Elles seront un signe pour nous, appelés à notre tour à mourir silencieusement à l’égoïsme pour grandir, sous l’action de l’Esprit Saint, dans la communion avec Dieu et la fraternité entre nous.

C’est pourquoi, frères et sœurs, nous demandons dans la prière commune de réapprendre à faire silence : pour écouter la voix du Père, l’appel de Jésus et le gémissement de l’Esprit. Demandons que le Synode soit un kairós de fraternité, un lieu où l’Esprit Saint purifie l’Église des bavardages, des idéologies et des polarisations. Alors que nous nous dirigeons vers l’important anniversaire du grand Concile de Nicée, demandons de pouvoir adorer unis, et en silence comme les Mages, le mystère du Dieu fait homme, certains que, plus nous serons proches du Christ, plus nous serons unis entre nous. Et comme les sages d’Orient furent conduits à Bethléem par une étoile, que la lumière céleste nous guide vers l’unique Seigneur et vers l’unité pour laquelle Il a prié. Frères et sœurs, mettons-nous en route ensemble, désireux de le rencontrer, de l’adorer et de l’annoncer « pour que le monde croie » (Jn 17, 21).

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

 

Le Carême and Pâques : soyons transformés, cheminant ensemble

Quel est le lien entre la synodalité, le Carême et Pâques ? Comment vivre le chemin de Carême et de Pâques de manière synodale ?

Pensons à deux images clés : celle de « marcher ensemble » et celle de la « transformation ». 

La synodalité nous rappelle que le Carême et la Pâques ne sont pas un trajet à faire tout seul, mais un chemin que nous sommes appelés à parcourir ensemble. Tout d’abord, nous marchons ensemble avec Dieu. C’est le Christ qui nous précède et qui nous conduit. Le Carême et Pâques sont un temps où nous avançons avec Jésus, où nous le suivons de plus près, où nous réalisons à nouveau combien il est proche de nous. En même temps, l’expérience de marcher avec le Christ nous ouvre les uns aux autres. Être disciple, ce n’est pas seulement suivre Jésus, mais le faire avec d’autres, comme les premiers apôtres que Jésus a rassemblés autour de lui. Ils ont parcouru ensemble la Galilée et la Judée pendant trois ans en suivant Jésus. Ils ne marchaient pas tout seuls : ils faisaient partie d’une communauté en marche, qui s’appelle aujourd’hui « l’Église » !

Comme il est facile de considérer le Carême comme un chemin personnel dans lequel chacun de nous s’efforce de faire ses propres efforts. Mais le Carême n’est pas destiné à être vécu seul, tout comme Pâques n’est pas destiné à être célébré seul. Le Carême et Pâques sont le voyage de l’Église toute entière – c’est le chemin qui mène du désert à la terre promise, de la mort à la vie nouvelle, du péché au salut, de la Croix à la Résurrection. Cette année, profitons de ce temps pour vivre ce cheminement ensemble avec le Christ et avec d’autres. 

Cela nous amène à notre deuxième image-clé : la transformation. Notre expérience du Carême et de Pâques est censée nous transformer, tout comme le chemin de la synodalité. Les deux vont de pair. Comme nous le savons, le Carême est un temps de conversion : pour nous préparer à Pâques, pour ouvrir nos cœurs et nous laisser renouveler par Dieu. Jésus nous invite à nous concentrer sur Lui et sur les autres, en surmontant nos tentations de rester centrés sur nous-mêmes. La synodalité implique ce même type de conversion, d’ouverture à Dieu et aux autres. Notre pèlerinage du Carême et de Pâques est une chance de se laisser renouveler par le Christ chaque année. La synodalité est le chemin par lequel Dieu veut renouveler toute l’Église en ce moment de l’histoire. Le Christ nous transforme lorsque nous marchons ensemble, en tant que chrétiens et en tant qu’êtres humains. Car la synodalité n’est pas seulement une façon de marcher ensemble en tant que disciples mais aussi une façon de marcher ensemble avec le monde. Notre mission en tant qu’Église est de partager avec tous la joie de Pâques – du Christ qui est vraiment ressuscité et présent au milieu de nous. Marcher avec le monde est le chemin par lequel nous pouvons vivre la mission de l’Église au 21ème siècle. 

Alors que nous traversons les temps du Carême et de Pâques, cherchons des moyens de partager notre expérience avec d’autres. Ce n’est pas un chemin que nous parcourons seuls. Profitons de ce temps pour parler aux autres de la manière dont tu as grandi spirituellement pendant le Carême. Ose répandre la joie de Pâques plus largement cette année, en particulier avec ceux et celles qui sont dans la difficulté et le besoin. Pourquoi pas inviter quelqu’un qui est seul à célébrer le dimanche de Pâques avec toi et ta famille à se joindre à vous pour Pâques, ou tend la main à un membre de ta famille élargie avec qui tu as perdu le contact. Laisse-toi transformer par l’expérience de marcher ensemble avec d’autres dans la lumière du Christ ressuscité, qui nous appelle non seulement en tant qu’individus mais ensemble. Notre Seigneur crucifié et ressuscité vient à notre rencontre à travers les autres, tout comme il vient à la rencontre des autres à travers nous. Il est présent et vivant au milieu de nous alors que nous cheminons ensemble, les uns avec les autres.

Pour en savoir davantage sur le parcous sur la synodalité, regardez le dernier épisode de « Sur le chemin du Synode » sur Sel + Lumière plus.

 

Église en Sortie 15 mars 2021

Dans cet épisode d’Église en Sortie, on parle de l’avenir du Synode des évêques avec Sr. Nathalie Becquart. On vous présente un reportage sur l’église Sainte-Jeanne de Chantal de l’île Perrot. Dans la troisième partie de l’émission, Francis Denis s’entretient des rapports de l’Église avec la modernité avec le sociologue Martin E. Meunier. Église en sortie est tous les lundis à 20H30 et en reprise les vendredis à 19H30. Sur les ondes de Sel + Lumière, votre chaîne canadienne de télévision catholique.

Les rêves du Pape pour l’Amazonie

(Photo: CNS/Paul Haring) Mercredi dernier le 12 février 2020, la très attendue exhortation apostolique suivant le Synode d’octobre dernier sur l’Amazonie était publiée. Intitulée « Querida Amazonia », ce texte d’une trentaine de pages manifeste le rêve du premier Pape sud-américain pour cette terre unique de l’Amazonie. Divisée en quatre parties représentant chacune les « rêves » (no 7) du pape pour l’ensemble des peuples qui vivent dans la région, ce document n’en a pas moins une importance et une résonnance universelle.

Les peuples autochtones nous précèdent

La nature de ce texte est d’abord et avant tout une exhortation afin que l’ensemble du peuple de Dieu et « des personnes de bonne volonté » puissent se joindre à lui par la prière et les initiatives pastorales pour le bien des populations vivant dans cette région du monde. Pour ce faire, le Pape rappelle la centralité des populations autochtones de la région dans l’amélioration de leurs propres conditions de vie sociales et environnementales. En effet, bien que la défense de la nature soit des plus urgentes, « un conservatisme « qui se préoccupe du biome mais qui ignore les peuples amazoniens » est inutile » (no8). On pourrait dire que le bien de l’environnement dépend de la santé sociale de ces peuples et que ce n’est qu’en respectant leur dignité à tous les niveaux, que la solution aux problèmes environnementaux se manifestera. En d’autres termes, en cherchant le bien-être des autochtones de l’Amazonie la préservation de l’environnement nous sera donné comme « par surcroît » (Mt 6,33).

En effet, comment ne pas voir que ces populations, du fait même qu’elles aient gardé un rapport plus étroit avec la nature (no 40), sont les plus à même d’agir comme peuple intermédiaire avec l’esprit techniciste propre à notre époque. Véritables ambassadeurs de la nature auprès de l’humanité, les peuples autochtones doivent être aux premières loges des décisions de développement de leur région. Il continue en écrivant ceci : « La sagesse de la manière de vivre des peuples autochtones – malgré toutes ses limites – nous pousse à approfondir cette aspiration » (no 22). Pour cela, le Pape exhorte les peuples autochtones à en être eux-mêmes les « protagonistes » (no 27) tout en cultivant un esprit ouvert au dialogue (no 26).Tous les pays doivent donc chercher des moyens pour développer « une recherche de la justice qui est inséparablement un chant de fraternité et de solidarité, une stimulation pour la culture de la rencontre ».

Pour une culture de l’enracinement

Pour être le plus efficace dans la préservation des intérêts des peuples amazoniens, le Pape les exhorte à être d’authentiques « cultivateurs » de leurs cultures et mémoires ancestrales : « J’invite les jeunes de l’Amazonie, surtout les autochtones, à « prendre en charge les racines, parce que des racines provient la force qui les fait croître, fleurir, fructifier » (no 33). Sans connaissance claire de l’histoire personnelle, familiale et nationale, impossible d’entrer dans un dialogue authentique avec les autres peuples. En ce sens, le pape François se « réjouis(t) de voir que ceux qui ont perdu le contact avec leurs propres racines cherchent à retrouver la mémoire perdue » (no 35). En ce sens, l’Église peut être d’une aide importante dans la préservation des cultures amazoniennes en suscitant la production et le rayonnement d’initiative culturelle.

On voit aujourd’hui combien un thème comme l’environnement peut faire l’objet d’instrumentalisation partisane. Dans ce contexte, les peuples de l’Amazonie peuvent jouer un rôle central pour surpasser ces écueils contre-productifs. Gardant une vision holistique de la nature c’est-à-dire une vision de l’environnement qui inclut l’humanité, les peuples de l’Amazonie voit d’une manière encore plus aigüe que partout ailleurs qu’« abuser de la nature c’est abuser des ancêtres, des frères et sœurs, de la création et du Créateur, en hypothéquant l’avenir »(no 42). Ainsi, les peuples amazoniens de par leur attachement à leur culture et à l’environnement nous montre que la défense de la nature ne pourra se développer que parallèlement à une culture des racines culturelles propres à chaque peuple. Défendre la nature dépend de notre engagement envers la culture. L’Amazonie a donc beaucoup à nous apprendre.

Une Exhortation pour tous

Bien que l’Exhortation apostolique du pape François « Querida Amazonia » soit spécifiquement orientée vers les peuples de l’Amazonie et ceux qui sont directement en lien avec ces derniers, ce texte a beaucoup à nous apprendre pour le tournant missionnaire que nous avons tous à faire. Que ce soit par les relations étroites qu’ils entretiennent avec la nature que par leur souci de préserver leur culture des ravages d’un monde en proie à l’uniformisation, l’Église et la société ont tout à gagner à se mettre à leur école et à prendre véritablement un « visage amazonien »

Synode sur l’Amazonie

L’Assemblée spéciale du synode des évêques sur l’Amazonie se tiendra au Vatican du 6 au 27 octobre 2019. Au total, 185 membres participeront aux travaux sur le thème : Nouveaux chemins pour l’Église et pour une écologie intégrale.

L’Assemblée sera composée de 114 évêques de la région Pan-amazonienne, c’est-à-dire de Bolivie, Brésil, Colombie, Equateur, Pérou et Venezuela. Les 13 chefs de dicastères de la Curie romaine seront également présents, ainsi que des experts, des auditeurs, et autres membres nommés par le Pape, originaires essentiellement d’Amérique Latine, mais aussi d’Europe, du Canada et d’Afrique.

Ce synode sur l’Amazonie avait été annoncé en octobre 2017 par le pape François, afin « de trouver de nouvelles voies pour l’évangélisation de cette portion du Peuple de Dieu, en particulier les indigènes, souvent oubliés et privés de la perspective d’un avenir serein, notamment à cause de la crise touchant la forêt amazonienne, poumon d’une importance capitale pour notre planète

L’Amazonie est peuplée par 3 millions d’autochtones sur une superficie de 6 millions de km² à travers neuf pays : le Brésil, la Guyane française, le Pérou, la Colombie, le Venezuela, le Surinam, la Bolivie, l’Équateur et le Guyana. Pas moins de 86 langues et 650 dialectes sont parlés sur ce territoire.

Cette région est couverte en grande partie par la forêt amazonienne. C’est la plus grande forêt tropicale du monde, avec une biodiversité unique : 30 000 espèces de plantes, 500 espèces de mammifères.

Alors que cet environnement naturel est menacé, l’Eglise, tout au long de ce synode, tentera d’apporter des réponses appropriées pour la défense de la vie, de la terre, et des cultures de cette région, « poumon de notre planète ».

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