Homélie du pape Léon XIV lors de la messe et de l’installation sur la cathèdre romaine

Photo Credit : Vatican Media

Le dimanche 25 mai 2025, le pape Léon XIV a été officiellement installé sur la cathèdre du diocèse de Rome lors d’une messe dans la basilique Saint-Jean-de-Latran. Dans son homélie, il déclare que « la communion se construit d’abord “à genoux”, par la prière et l’engagement constant dans la conversion ».

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Messe et installation sur la cathèdre romaine

HOMÉLIE DU PAPE LÉON XIV

Basilique Saint-Jean-de-Latran
25 mai 2025

 

Lire le texte intégral de l’homélie du Saint-Père ci-dessous. :

Je salue cordialement les Cardinaux présents, en particulier le Cardinal Vicaire, les évêques auxiliaires et tous les évêques, les très chers prêtres – curés, vicaires et tous ceux qui, à divers titres, collaborent à la pastorale dans nos communautés – ; ainsi que les diacres, les religieux, les religieuses, les Autorités et vous tous, très chers fidèles.

L’Église de Rome est l’héritière d’une grande histoire, enracinée dans le témoignage de Pierre, de Paul et d’innombrables martyrs, et elle a une mission unique, bien indiquée par ce qui est écrit sur la façade de cette Cathédrale : être Mater omnium Ecclesiarum, Mère de toutes les Églises.

Le Pape François nous a souvent invités à réfléchir sur la dimension maternelle de l’Église (cf. Exhort. ap.Evangelii gaudium, nn. 46-49 ,  139-141Catéchèse, 13 janvier 2016) et sur ses caractéristiques propres : la tendresse, la disponibilité au sacrifice et cette capacité d’écoute qui permet non seulement de venir en aide, mais souvent aussi d’anticiper les besoins et les attentes, avant même qu’ils ne soient exprimés. Ce sont là des traits que nous souhaitons voir grandir partout dans le peuple de Dieu, ici aussi, dans notre grande famille diocésaine : chez les fidèles, chez les pasteurs, chez moi le premier. Les lectures que nous avons écoutées peuvent nous aider à y réfléchir.

Dans les Actes des Apôtres (cf. 15, 1-2.22-29), en particulier, il est raconté comment la communauté des origines a affronté le défi de l’ouverture au monde païen dans l’annonce de l’Évangile. Cela n’a pas été un processus facile : cela a demandé beaucoup de patience et d’écoute mutuelle ; cela s’est produit tout d’abord au sein de la communauté d’Antioche, où les frères, en dialoguant – même en discutant – sont parvenus à définir ensemble la question. Mais ensuite, Paul et Barnabé sont montés à Jérusalem. Ils n’ont pas décidé de leur propre chef : ils ont cherché la communion avec l’Église mère et s’y sont rendus avec humilité.

Pierre et les Apôtres les ont écoutés. Ainsi s’est engagé le dialogue qui a finalement conduit à la bonne décision : reconnaissant et considérant la difficulté des néophytes, il a été convenu de ne pas leur imposer de charges excessives, mais de se limiter à leur demander l’essentiel (cf. Ac 15, 28-29). Ainsi, ce qui pouvait sembler un problème est devenu pour tous une occasion de réfléchir et de grandir.

Le texte biblique, cependant, nous en dit davantage, allant au-delà de la riche et intéressante dynamique humaine de l’événement.

C’est ce que révèlent les paroles que les frères de Jérusalem adressent par lettre à ceux d’Antioche, leur communiquant les décisions prises. Ils écrivent : « L’Esprit Saint et nous-mêmes » (Ac 15, 28). Ils soulignent, en effet, que dans toute cette histoire, l’écoute la plus importante, celle qui a rendu tout le reste possible, a été celle de la voix de Dieu. Ils nous rappellent ainsi que la communion se construit avant tout “à genoux”, dans la prière et dans un engagement continu de conversion. Ce n’est que dans cette tension, en effet, que chacun peut entendre en lui la voix de l’Esprit qui crie : « Abba ! Père ! » (Ga 4, 6) et, par conséquent, écouter et comprendre les autres comme des frères.

L’Évangile nous réaffirme également ce message (cf. Jn 14, 23-29), en nous disant que nous ne sommes pas seuls dans les choix de vie. L’Esprit nous soutient et nous montre le chemin à suivre, en nous “enseignant” et en nous “rappelant” tout ce que Jésus nous a dit (cf. Jn 14, 26).

Tout d’abord, l’Esprit nous enseigne les paroles du Seigneur en les imprimant profondément en nous, selon l’image biblique de la loi écrite non plus sur des tables de pierre, mais dans nos cœurs (cf. Jr 31, 33) ; un don qui nous aide à grandir jusqu’à devenir “lettre du Christ” (cf. 2 Co 3, 3) les uns pour les autres. Et il en est ainsi : nous sommes d’autant plus capables d’annoncer l’Évangile que nous nous laissons conquérir et transformer, en permettant à la puissance de l’Esprit de nous purifier au plus profond de nous-mêmes, de rendre nos paroles simples, nos désirs honnêtes et limpides, nos actions généreuses.

Et c’est là qu’intervient l’autre verbe : “rappeler”, c’est-à-dire ramener l’attention du cœur vers ce que nous avons vécu et appris, afin d’en pénétrer plus profondément le sens et d’en savourer la beauté.

Je pense à cet égard au chemin exigeant que le diocèse de Rome parcourt depuis quelques années, articulé à différents niveaux d’écoute : vers le monde environnant, pour en accueillir les défis, et au sein des communautés, pour en comprendre les besoins et promouvoir des sages et prophétiques initiatives d’évangélisation et de charité. C’est un chemin difficile, encore en cours, qui cherche à embrasser une réalité très riche, mais aussi très complexe. Il est toutefois digne de l’histoire de cette Église qui a si souvent démontré sa capacité à voir “grand”, en s’investissant sans réserve dans des projets courageux et s’impliquant même face à des scénarios nouveaux et exigeants.

En témoigne le travail considérable accompli ces jours-ci par l’ensemble du diocèse en vue du Jubilé, dans l’accueil et l’accompagnement des pèlerins et à travers d’innombrables autres initiatives. Grâce à ces nombreux efforts, la ville apparaît à ceux qui y arrivent, parfois de très loin, comme une grande maison ouverte et accueillante, et surtout comme un foyer de foi.

Pour ma part, j’exprime le désir et l’engagement d’entrer dans ce chantier si vaste en me mettant, autant que possible, à l’écoute de tous, pour apprendre, comprendre et décider ensemble : “chrétien avec vous et pour vous évêque ”, comme le disait saint Augustin (cf. Discours 340, 1). Je vous demande de m’aider à le faire dans un effort commun de prière et de charité, en rappelant les paroles de saint Léon le Grand : « Tout le bien que nous accomplissons dans l’exercice de notre ministère est l’œuvre du Christ ; et non pas la nôtre, car nous ne pouvons rien sans lui, mais nous nous glorifions en lui, de qui vient toute l’efficacité de notre action » (Serm. 5, de natali ipsius, 4).

À ces paroles je voudrais joindre, en concluant, celles du Bienheureux Jean-Paul Ier, qui le 23 septembre 1978, avec le visage radieux et serein qui lui avait déjà valu l’appellation de “Pape du sourire”, saluait ainsi sa nouvelle famille diocésaine : « Devenant Patriarche à Venise, Saint Pie X s’était exclamé à St-Marc : “Qu’en serait-il de moi, Vénitiens, si je ne vous aimais pas ?”. Aux Romains, je dirai quelque chose de semblable ; je puis vous assurer que je vous aime, que je désire seulement entrer à votre service et mettre à votre disposition, toutes mes pauvres forces, le peu que j’ai et le peu que je suis » (Homélie à l’occasion de la Prise de Possession de la Cathedra Romana, 23 septembre 1978).

Je vous exprime également toute mon affection, avec le désir de partager avec vous, sur notre chemin commun, les joies et les peines, les difficultés et les espoirs. Je vous offre moi aussi “le peu que j’ai et que je suis”, et je le confie à l’intercession des saints Pierre et Paul et de tant d’autres frères et sœurs dont la sainteté a illuminé l’histoire de cette Église et les rues de cette ville. Que la Vierge Marie nous accompagne et intercède pour nous.

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

Quel est le sens d’un nom ? Les plus grands papes de l’histoire qui s’appellent Léo

Saint Léon le Grand. Herrera Mozo. Wikimedia Commons

Le pape Léon XIV ! La réalité pleine d’espérance d’un nouveau Souverain Pontife commence à s’installer. Plus je le vois, plus je l’entends parler (même dans sa langue maternelle, l’anglais !),  et plus je lis son nom, plus cette nouvelle ère de la vie de l’Église me semble familière.

Qu’est-ce qu’un nom ? Lorsqu’un nouveau pape choisit un nom qui a déjà été utilisé, c’est généralement pour mettre en avant certains de ses prédécesseurs ou d’autres personnages historiques, afin de rappeler l’importance de leur héritage dans le présent.

Par exemple, en 2005, Benoît XVI a choisi son nom pour honorer à la fois saint Benoît de Nursie, le père du monachisme occidental. Le pape Benoît XV, qui s’est opposé à la popularité en appelant à la paix pendant la Première Guerre mondiale. Dans un nouveau siècle marqué par un sécularisme plus dominant en Occident et un choc croissant des civilisations mondialisées, Le pape Benoît XVI s’est attaché à la formation d’une Église européenne plus petite et plus fidèle qui proclame librement la paix du Christ.

Lorsque le pape François a choisi son nom, il a indiqué que son pontificat sera marqué par un appel à une relation renouvelée avec notre maison commune et toutes les créatures qui y vivent, ainsi qu’à une fraternité renouvelée entre les nations, les peuples et les personnes. Il a nommé ses deux encycliques sociales phares, Laudato Si’ et Fratelli Tutti, d’après des prières poétiques du grand mystique d’Assise.

En ce qui concerne le pape Léon XIV, il a explicitement mentionné le dernier prédécesseur à porter ce nom, Léon XIII (1878-1903). Voici quelques exemples antérieurs qui méritent d’être soulignés avant :

Léon III (795-816) est peut-être le plus connu pour ses relations diplomatiques avec le Souverain franc Charlemagne. Ce dialogue s’est avéré mutuellement bénéfique, en particulier lorsque Léon a couronné Charlemagne comme premier empereur romain d’Occident en trois siècles, le jour de Noël, en l’an 800 de notre ère. Il a été canonisé par le pape Clément XI en 1673.

Léon IX (1049-1054) fut un Pape réformateur qui renouvela l’exigence du célibat des clercs et éradiqua la simonie (vente de services ecclésiastiques), et d’autres formes de corruption. Cependant, son pontificat a été marqué par un affaiblissement des relations avec l’Église d’Orient, ce qui a conduit au Grand Schisme d’Occident au cours de la dernière année de son règne. Il a été canonisé 28 ans plus tard, en 1082 par le pape Grégoire VII.

Le Pape le plus important de cette « liste de Léons » est sans aucun doute saint Léon 1er (440-461), père latin et docteur de l’Église. Il fut le premier Pape à recevoir officiellement le titre de « Grand », suivi par saint Grégoire et saint Nicolas. La contribution la plus durable de saint Léon le Grand a été la doctrine de Jésus le Fils de Dieu : il a écrit de manière convaincante sur l’union dans la distinction des natures divine et humaine du Christ. Cette doctrine, appelée plus tard « union hypostatique », a été affirmée lors du concile de Chalcédoine en 451 et continue d’être la norme de la foi catholique jusqu’à aujourd’hui. La reconnaissance de sa sainteté est antérieure au processus officiel de canonisation, mais il est nommé docteur de l’unité de l’Église par le pape Benoît XIV en 1754.

Le pontificat extraordinairement long de 25 ans du pape Léon XIII a immédiatement suivi le pontificat encore plus long de 32 ans du bienheureux Pie IX. Au cours de son règne, il a promulgué des règles pour une musique plus simple et plus traditionnelle dans la liturgie, a entamé des relations plus constructives avec la nouvelle République italienne et a même composé la célèbre prière de Saint-Michel ! Il est peut-être mieux connu comme le père de l’enseignement social catholique moderne, qui commence officiellement avec son encyclique Rerum Novarum de 1891. Le 15 mai dernier était le 134e anniversaire de sa promulgation !

Cela nous amène au choix du nom du pape Léon XIV : Dans son discours au Collège des cardinaux lors de son élection, notre nouveau Pape a expliqué qu’il l’avait choisi

Principalement parce que le Pape Léon XIII, avec l’encyclique historique Rerum novarum, a abordé la question sociale dans le contexte de la première grande révolution industrielle ; et aujourd’hui l’Église offre à tous son héritage de doctrine sociale pour répondre à une autre révolution industrielle et aux développements de l’intelligence artificielle, qui posent de nouveaux défis pour la défense de la dignité humaine, de la justice et du travail.

Je reviendrai sur Rerum Novarum dans un autre article de blog. Surveillez notre blogue, et visitez https://slmedia.org/fr/pape, pour notre dernière couverture de cette quatorzième papauté léonine.

Discours du pape Léon XIV aux membres du corps diplomatique

Le pape Léon XIV salue un membre du corps diplomatique accrédité auprès du Saint-Siège. Photo avec l’aimable autorisation de Vatican Media.

Le mercredi 16 mai 2025, le pape Léon XIV s’est adressé aux membres du corps diplomatique accrédités auprès du Saint-Siège. Son discours réaffirme l’engagement du Saint-Siège à poursuivre la paix, la justice et la vérité dans son activité diplomatique, en disant que « dans [cette] activité diplomatique, le Saint-Siège est inspiré par une pastorale qui le conduit non pas à rechercher des privilèges, mais à renforcer sa mission évangélique au service de l’humanité ».

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DISCOURS DU PAPE LÉON XIV
AUX MEMBRES DU CORPS DIPLOMATIQUE ACCRÉDITÉ PRÈS LE SAINT-SIÈGE

Salle Clémentine
Vendredi 16 mai 2025

 

Lire le texte intégral du discours du Saint-Père aux membres du corps diplomatique ci-dessous. :

Éminence,
Excellences,
Mesdames et Messieurs,
Que la paix soit avec vous !

Je remercie S.E. M. George Poulides, Ambassadeur de la République de Chypre et Doyen du Corps diplomatique, pour les paroles cordiales qu’il m’a adressées en votre nom à tous, et pour le travail inlassable qu’il poursuit avec la vigueur, la passion et l’amabilité qui le caractérisent. Ces qualités lui ont valu l’estime de tous mes prédécesseurs qu’il a rencontrés au cours de ces années de mission auprès du Saint-Siège, et en particulier du regretté Pape François.

Je voudrais également vous exprimer ma gratitude pour les nombreux messages de vœux qui ont suivi mon élection, ainsi que pour les messages de condoléances au décès du Pape François provenant aussi de pays avec lesquels le Saint-Siège n’entretient pas de relations diplomatiques. Il s’agit là d’une marque d’estime significative qui encourage à approfondir les relations mutuelles.

Dans notre dialogue, je voudrais que le sentiment d’appartenance à une famille prenne toujours le pas. En effet, la communauté diplomatique représente toute la famille des peuples, partageant les joies et les peines de la vie ainsi que les valeurs humaines et spirituelles qui l’animent. La diplomatie pontificale est, en effet, une expression de la catholicité même de l’Église et, dans son action diplomatique, le Saint-Siège est animé par une urgence pastorale qui le pousse non pas à rechercher des privilèges, mais à intensifier sa mission évangélique au service de l’humanité. Il combat toute indifférence et rappelle sans cesse les consciences, comme l’a fait inlassablement mon vénérable prédécesseur, toujours attentif au cri des pauvres, des nécessiteux et des marginalisés, mais aussi aux défis qui marquent notre temps, depuis la sauvegarde de la création jusqu’à l’intelligence artificielle.

En plus d’être le signe concret de l’attention que vos pays accordent au Siège Apostolique, votre présence aujourd’hui est pour moi un don qui permet de renouveler l’aspiration de l’Église – et la mienne personnelle – à rejoindre et à étreindre tous les peuples et toutes les personnes de cette terre, désireux et en quête de vérité, de justice et de paix ! D’une certaine manière, mon expérience de vie, qui s’est déroulée entre l’Amérique du Nord, l’Amérique du Sud et l’Europe, est représentative de cette aspiration à dépasser les frontières pour rencontrer des personnes et des cultures différentes.

Grâce au travail constant et patient de la Secrétairerie d’État, j’entends consolider la connaissance et le dialogue avec vous et vos pays, dont j’ai déjà eu la grâce d’en visiter un bon nombre au cours de ma vie, en particulier lorsque j’étais prieur général des Augustins. Je suis convaincu que la Divine Providence m’accordera d’autres occasions de rencontres avec les réalités dont vous êtes issus, me permettant ainsi de saisir les opportunités qui se présenteront pour confirmer la foi de tant de frères et sœurs dispersés à travers le monde, et pour construire de nouveaux ponts avec toutes les personnes de bonne volonté.

Dans notre dialogue, je voudrais que nous gardions à l’esprit trois mots clés qui constituent les piliers de l’action missionnaire de l’Église et du travail diplomatique du Saint-Siège.

Le premier mot est paix. Trop souvent, nous considérons ce mot comme “négatif”, c’est-à-dire comme la simple absence de guerre et de conflit, car l’opposition fait partie de la nature humaine et nous accompagne toujours, nous poussant trop souvent à vivre dans un “état de conflit” permanent : à la maison, au travail, dans la société. La paix semble alors n’être qu’une simple trêve, une pause entre deux conflits, car, malgré tous nos efforts, les tensions sont toujours présentes, un peu comme des braises qui couvent sous la cendre, prêtes à se rallumer à tout moment.

Dans la perspective chrétienne – comme dans d’autres expériences religieuses – la paix est avant tout un don le premier don du Christ : « Je vous donne ma paix » (Jn 14, 27). Elle est cependant un don actif, engageant, qui concerne et implique chacun de nous, indépendamment de notre origine culturelle et de notre appartenance religieuse, et qui exige avant tout un travail sur soi-même. La paix se construit dans le cœur et à partir du cœur, en déracinant l’orgueil et les revendications, et en mesurant son langage, car on peut blesser et tuer aussi par des mots, pas seulement par des armes.

Dans cette optique, je considère que la contribution que les religions et le dialogue interreligieux peuvent apporter pour favoriser des contextes de paix est fondamentale. Cela exige naturellement le plein respect de la liberté religieuse dans chaque pays, car l’expérience religieuse est une dimension fondamentale de la personne humaine, sans laquelle il est difficile, voire impossible, d’accomplir cette purification du cœur nécessaire pour construire des relations de paix.

À partir de ce travail, auquel nous sommes tous appelés, il est possible d’éradiquer les prémices de tout conflit et de toute volonté destructrice de conquête. Cela exige également une sincère volonté de dialogue, animée par le désir de se rencontrer plutôt que de s’affronter. Dans cette perspective, il est nécessaire de redonner un souffle à la diplomatie multilatérale et aux institutions internationales qui ont été voulues et conçues avant tout pour remédier aux conflits pouvant surgir au sein de la Communauté internationale. Bien sûr, il faut encore la volonté de cesser de produire des instruments de destruction et de mort, car, comme le rappelait le  pape François dans son dernier Message Urbi et Orbi, « aucune paix n’est possible sans véritable désarmement [et] le besoin de chaque peuple de pourvoir à sa propre défense ne peut se transformer en une course générale au réarmement » [1].

Le deuxième mot est justice. Poursuivre la paix exige de pratiquer la justice. Comme je l’ai déjà évoqué, j’ai choisi mon nom en pensant avant tout à Léon XIII, le Pape de la première grande encyclique sociale, Rerum novarum. Dans le changement d’époque que nous vivons, le Saint-Siège ne peut s’empêcher de faire entendre sa voix face aux nombreux déséquilibres et injustices qui conduisent, entre autres, à des conditions de travail indignes et à des sociétés de plus en plus fragmentées et conflictuelles. Il faut également s’efforcer de remédier aux inégalités mondiales, qui voient l’opulence et la misère creuser des fossés profonds entre les continents, entre les pays et même au sein d’une même société.

Il incombe à ceux qui ont des responsabilités gouvernementales de s’efforcer à construire des sociétés civiles harmonieuses et pacifiées. Cela peut être accompli avant tout en misant sur la famille fondée sur l’union stable entre un homme et une femme, « une société très petite sans doute, mais réelle et antérieure à toute société civile » [2]. En outre, personne ne peut se dispenser de promouvoir des contextes où la dignité de chaque personne soit protégée, en particulier celle des plus fragiles et des plus vulnérables, du nouveau-né à la personne âgée, du malade au chômeur, que celui-ci soit citoyen ou immigrant.

Mon histoire est celle d’un citoyen, descendant d’immigrés, lui-même émigré. Au cours de la vie, chacun d’entre nous peut se retrouver en bonne santé ou malade, avec ou sans emploi, dans sa patrie ou en terre étrangère : cependant sa dignité reste toujours la même, celle d’une créature voulue et aimée de Dieu.

Le troisième mot est vérité. On ne peut construire des relations véritablement pacifiques, même au sein de la Communauté internationale, sans vérité. Là où les mots revêtent des connotations ambiguës et ambivalentes ou le monde virtuel, avec sa perception altérée de la réalité, prend le dessus sans contrôle, il est difficile de construire des rapports authentiques, puisque les prémisses objectives et réelles de la communication font défaut.

Pour sa part, l’Église ne peut jamais se soustraire à son devoir de dire la vérité sur l’homme et sur le monde, en recourant si nécessaire à un langage franc qui peut au début susciter une certaine incompréhension. Mais la vérité n’est jamais séparée de la charité qui, à la racine, a toujours le souci de la vie et du bien de tout homme et de toute femme. D’ailleurs, dans la perspective chrétienne, la vérité n’est pas l’affirmation de principes abstraits et désincarnés, mais la rencontre avec la personne même du Christ qui vit dans la communauté des croyants. Ainsi, la vérité ne nous éloigne pas, mais au contraire elle nous permet d’affronter avec plus de vigueur les défis de notre temps comme les migrations, l’utilisation éthique de l’intelligence artificielle et la sauvegarde de notre Terre bien-aimée. Ce sont des défis qui exigent l’engagement et la collaboration de tous, car personne ne peut penser les relever seul.

Chers Ambassadeurs,

mon ministère commence au cœur d’une année jubilaire, dédiée d’une façon particulière à l’espérance. C’est un temps de conversion et de renouveau, mais surtout l’occasion de laisser derrière nous les conflits et d’emprunter un nouveau chemin, animés par l’espérance de pouvoir construire, en travaillant ensemble, chacun selon ses sensibilités et ses responsabilités, un monde dans lequel chacun pourra réaliser son humanité dans la vérité, dans la justice et dans la paix. Je souhaite que cela puisse se réaliser dans tous les contextes, à commencer par les plus éprouvés, comme celui de l’Ukraine et de la Terre Sainte.

Je vous remercie pour tout le travail que vous accomplissez afin de construire des ponts entre vos pays et le Saint-Siège, et de tout cœur je vous bénis, ainsi que vos familles et vos peuples. Merci !

[Bénédiction]

Et merci pour tout le travail que vous accomplissez !

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

Habemus Papam! Bienvenue le pape Léon XIV!

Crédit Photo : Vatican Media

Habemus Papam !
Nous avons un Pape !

Nous accueillons avec joie notre nouveau Saint-Père, le pape Léon XIV, 267e Pontife et successeur de saint Pierre, évêque de Rome et serviteur des serviteurs de Dieu.

Voici sa biographie, publiée en Anglais par la Libreria Editrice Vaticana :

Le pape Léon XIV est né Robert Francis Prevost le 14 septembre 1955 à Chicago en IL, É.U.  En 1977, il entre au noviciat de l’Ordre de Saint Augustin (O.S.A.) dans la province de Notre-Dame du Bon Conseil, à Saint Louis. Le 29 août 1981, il prononça ses vœux solennels. Il étudie à la Catholic Theological Union de Chicago, où il obtient un diplôme en théologie.

À l’âge de 27 ans, il a été envoyé par l’Ordre à Rome pour étudier le droit canon à l’Université pontificale Saint-Thomas d’Aquin (Angelicum). Il reçoit l’ordination sacerdotale le 19 juin 1982. Il obtient sa licence en 1984, puis est envoyé oeuvrer dans la mission de Chulucanas, à Piura, au Pérou (1985-1986).

En 1987, il obtient un doctorat avec la thèse : « Le rôle du prieur local dans l’Ordre de Saint Augustin ». La même année, il est élu directeur des vocations et directeur des missions de la province augustinienne Notre-Dame du Bon Conseil d’Olympia Fields, Illinois, aux États-Unis d’Amérique.

En 1988, il a été envoyé dans la mission de Trujillo en tant que directeur du projet commun de formation des aspirants augustiniens dans les vicariats de Chulucanas, Iquitos et Apurímac. Il y a exercé les fonctions de prieur de communauté (1988-1992), de directeur de la formation (1988-1998) et d’enseignant des profès (1992-1998). À l’archidiocèse de Trujillo, il a été vicaire judiciaire (1989-1998) et professeur de droit canonique, patristique et moral au grand séminaire San Carlos y San Marcelo.

En 1999, il est élu préfet provincial de la province Notre-Dame du Bon Conseil de Chicago. Après deux ans et demi, le chapitre général ordinaire l’a élu Prieur général, ministère qui lui a de nouveau été confié lors du chapitre général ordinaire de 2007. 

En octobre 2013, il retourne dans sa province, Chicago, pour y exercer les fonctions d’enseignant des profès, et de vicaire provincial ; des rôles qu’il occupa depuis le 3 novembre 2014, lorsque le pape François le nomme administrateur apostolique du diocèse de Chiclayo, au Pérou, l’élevant à la dignité d’évêque et lui attribuant le diocèse titulaire de Sufar.

Le 7 novembre, il a pris possession canonique du diocèse en présence du nonce apostolique James Patrick Green ; il a été ordonné évêque le 12 décembre, en la fête de Notre-Dame de Guadalupe, en la Cathédrale de son diocèse. Il a été évêque de Chiclayo à partir du 26 novembre 2015. En mars 2018, il est devenu deuxième vice-président de la Conférence épiscopale péruvienne. Le pape François l’a nommé membre de la Congrégation pour le clergé en 2019, et membre de la Congrégation pour les évêques en 2020.

Le 15 avril 2020, le Pape le nomme administrateur apostolique du diocèse de Callao.

Le 30 janvier 2023, le pape François nomme Mgr Prevost préfet du Dicastère pour les évêques et président de la Commission pontificale pour l’Amérique latine. Il a été créé cardinal lors du Consistoire du 30 septembre 2023.

Nous félicitons chaleureusement le pape Léon, et prions pour que son ministère de pasteur, à la tête de l’Église, soit rempli de courage, de sagesse et de l’espérance de l’Évangile.

Homélie Du Cardinal Giovanni Battista Re – Messe pour l’élection du Pontife romain

La messe pour l’eléction du Pontife Romain de la Basilique Saint-Pierre au Vatican. Droits réservés à Sel + Lumière Médias

Ce mercredi 7 mai 2025, alors que le conclave s’apprête à élire le 267ᵉ successeur de saint Pierre, le cardinal Giovanni Battista Re, doyen du Collège des cardinaux, a présidé la messe solennelle « Pro Eligendo Romano Pontifice » en la basilique Saint-Pierre. Dans son homélie, il a appelé les cardinaux électeurs à invoquer l’Esprit Saint avec ferveur, soulignant que « prier, en invoquant l’Esprit Saint, est la seule attitude juste qui convienne » face à cette responsabilité exceptionnelle.

Pour suivre aussi notre couverture du conclave et l’interrègne papal visitez notre page : https://slmedia.org/fr/papaute

Lisez le texte intégral de l’homélie du cardinal Battista Re ci-dessous :

HOMÉLIE DU CARDINAL GIOVANNI BATTISTA RE
DOYEN DU COLLÈGE CARDINALICE

Basilique Saint-Pierre
Mercredi 7 mai 2025

 

On lit dans les Actes des Apôtres qu’après l’Ascension du Christ au ciel, et dans l’attente de la Pentecôte, tous étaient assidus à la prière avec Marie, la Mère de Jésus (cf. Ac 1, 14).

C’est exactement ce que nous faisons nous aussi, peu avant le début du Conclave, sous le regard de la Vierge Marie placée à côté de l’autel, en cette Basilique qui s’élève sur la tombe de l’Apôtre Pierre.

Nous sentons que tout le peuple de Dieu est uni à nous, avec sa foi, son amour pour le Pape et son attente confiante.

Nous sommes ici pour invoquer l’aide de l’Esprit Saint, pour implorer sa lumière et sa force afin que soit élu le Pape dont l’Église et l’humanité ont besoin en ce tournant si difficile et si complexe de l’histoire.

Prier, en invoquant l’Esprit Saint, est la seule attitude juste qui convienne, alors que les Cardinaux électeurs se préparent à un acte de la plus haute responsabilité humaine et ecclésiale, et à un choix d’une importance exceptionnelle ; un acte humain pour lequel toute considération personnelle doit être abandonnée, en n’ayant que le Dieu de Jésus-Christ et le bien de l’Église et de l’humanité dans l’esprit et dans le cœur.

Dans l’Évangile qui a été proclamé, résonnent des paroles qui nous conduisent au cœur du message suprême, le testament de Jésus, remis à ses apôtres le soir de la Cèn au Cénacle : « Mon commandement, le voici : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés » (Jn 15, 12). Afin de préciser ce « comme je vous ai aimés » et indiquer jusqu’où doit aller notre amour, Jésus ajoute : « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime » (Jn 15, 13).

C’est le message d’amour que Jésus définit comme un “nouveau” commandement. Nouveau parce qu’il transforme en positif et élargit considérablement l’avertissement de l’Ancien Testament qui disait : « Ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu’on te fasse ».

L’amour que Jésus révèle ne connaît pas de limites et doit caractériser les pensées et l’action de tous ses disciples qui doivent toujours, dans leur comportement, manifester un amour authentique et s’engager à construire une nouvelle civilisation, celle que Paul VI a appelée “civilisation de l’amour”. L’amour est la seule force capable de changer le monde.

Jésus nous a donné l’exemple de cet amour au début de la dernière Cène par un geste surprenant : Il s’est abaissé au service des autres, lavant les pieds des apôtres, sans discrimination, n’excluant pas Judas qui allait le trahir.

Ce message de Jésus fait écho à ce que nous avons entendu dans la première lecture de la messe, où le Prophète Isaïe nous a rappelé que la qualité fondamentale des pasteurs est l’amour jusqu’au don total de soi.

Les textes liturgiques de cette célébration eucharistique nous invitent donc à l’amour fraternel, à l’aide mutuelle et à l’engagement en faveur de la communion ecclésiale et de la fraternité humaine universelle. Parmi les tâches de chaque successeur de Pierre, il y a celle de faire grandir la communion : communion de tous les chrétiens avec le Christ ; communion des évêques avec le Pape ; communion des évêques entre eux. Il ne s’agit pas d’une communion autoréférentielle mais tendue vers la communion entre les personnes, les peuples et les cultures, soucieuse que l’Église soit toujours “maison et école de communion”.

L’appel est fort à maintenir l’unité de l’Église dans la voie tracée par le Christ aux Apôtres. L’unité de l’Église est voulue par le Christ ; une unité qui ne signifie pas uniformité, mais une communion solide et profonde dans la diversité, à condition de rester dans la pleine fidélité à l’Évangile.

Chaque Pape continue d’incarner Pierre et sa mission et représente ainsi le Christ sur terre ; il est le roc sur lequel l’Église est édifiée (cf. Mt 16, 18).

L’élection du nouveau Pape n’est pas une simple succession de personnes, mais c’est toujours l’Apôtre Pierre qui revient.

Les Cardinaux électeurs exprimeront leur vote dans la Chapelle Sixtine où, comme le dit la Constitution apostolique Universi dominici gregis, « tout concourt à nourrir la conscience de la présence de Dieu, devant lequel chacun devra un jour se présenter pour être jugé ».

Dans le Triptyque romain, le Pape Jean-Paul II souhaitait que, au moment de la grande décision à travers le vote, l’image imposante de Jésus Juge rappelle à chacun la grandeur de la responsabilité de remettre les “clés suprêmes” (Dante) entre de bonnes mains.

Prions pour que l’Esprit Saint, qui nous a donné au cours des cent dernières années une série de Pontifes vraiment saints et grands, nous donne un nouveau Pape selon le cœur de Dieu, pour le bien de l’Église et de l’humanité.

Prions pour que Dieu accorde à l’Église le Pape qui saura le mieux réveiller les consciences de tous ainsi que les énergies morales et spirituelles dans la société actuelle, caractérisée par de grands progrès technologiques mais qui tend à oublier Dieu.

Le monde d’aujourd’hui attend beaucoup de l’Église pour la sauvegarde de ces valeurs fondamentales, humaines et spirituelles, sans lesquelles la coexistence humaine ne pourra s’améliorer ni porter du bien aux générations futures.

Que la Bienheureuse Vierge Marie, Mère de l’Église, intervienne par sa maternelle intercession, afin que l’Esprit Saint éclaire l’esprit des Cardinaux électeurs et les rende unanimes dans l’élection du Pape dont notre temps a besoin.

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

Le prochain conclave expliqué : Traditions ancestrales, questions modernes

Pérugin, « La remise des clés ». Wikimedia Commons.

Vous êtes-vous déjà interrogé sur les règles d’un conclave ? Pourquoi seuls les cardinaux peuvent-ils voter ? Et que signifie le mot « conclave » ? Nous avons préparé une série de questions-réponses pour vous éclairer sur le processus d’élection du prochain pape. Nous avons également établi une chronologie de l’interrègne et du conclave à l’adresse suivante: slmedia.org/fr/blogue/conclave-chronologie.

1- Pourquoi seuls les cardinaux peuvent-ils voter lors d’un conclave et pourquoi doivent-ils avoir moins de 80 ans ?

Tous les cardinaux en règle âgés de moins de 80 ans sont éligibles et tenus de voter. S’ils ne sont pas en mesure de venir à Rome, ils doivent en expliquer la raison et obtenir l’autorisation du reste du Collège de rester chez eux (Universi Dominici Gregis # 38). Même dans ce cas, il est prévu qu’un cardinal électeur aille chercher les votes des cardinaux qui ont pu venir à Rome mais qui ne peuvent quitter la Casa Santa Marta pour cause de maladie ou de blessure (n° 67).

La limite d’âge de 80 ans est similaire à l’âge de la retraite obligatoire pour les évêques, qui est de 75 ans. Jean-Paul II a expliqué qu’elle découlait du « désir de ne pas ajouter au poids d’un âge aussi vénérable la charge supplémentaire de la responsabilité de choisir celui qui devra conduire le troupeau du Christ d’une manière adaptée aux besoins de l’époque » (préambule).

La limite d’âge signifie que ni le doyen du Collège, le cardinal Re, ni le sous-doyen, le cardinal Leonardo Sandri, ne sont autorisés à participer aux sessions de vote elles-mêmes, bien qu’ils puissent certainement prendre part aux Congrégations générales et à d’autres préparatifs. Par ailleurs, le cardinal Re a présidé avec émotion les funérailles du pape François, il y a prononcé l’homélie, et il présidera la messe Pro Eligendo Romano Pontifice. Le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’État du pape François, présidera les séances de vote du conclave.

La raison pour laquelle seuls les cardinaux peuvent voter est un peu plus obscure. Elle remonte à d’anciennes traditions selon lesquelles l’évêque de Rome était élu par un synode représentatif des principaux clercs et laïcs de la ville. Ces synodes électoraux peuvent être désordonnés, voire très politiques. Les empereurs, les rois et d’autres dirigeants civils exerçaient une influence considérable sur l’élection afin d’obtenir le candidat le plus favorable à leurs intérêts. Au Moyen Âge, la papauté était peut-être devenue la plus grande puissance de la politique européenne, de sorte que l’élection du candidat préféré d’un souverain faisait de la papauté un véritable enjeu politique.

Pour protéger le caractère sacré de la fonction, des réformes ont été entreprises au fil du temps. En 1059, le pape Nicolas II a décrété que seuls les cardinaux pouvaient élire le Pape – à l’origine, seuls les cardinaux-évêques. En 1179, le pape Alexandre III a étendu le vote à tous les cardinaux et exigé une majorité des deux tiers. Cette règle s’applique encore aujourd’hui.

Malgré toutes ces réformes, un conclave reste un type de synode représentatif. Le mot « cardinal » vient du latin cardo, qui signifie charnière d’une porte ou d’une armoire. Ainsi, le diocèse de Rome « tourne » grâce à ce clergé, ainsi qu’à l’apport des évêques des diocèses environnants. C’est pourquoi tous les cardinaux du monde, en plus de leur ministère d’évêque diocésain, de préfet de dicastère ou autre, sont soit des « cardinaux-diacres » ou des « cardinaux-prêtres » honoraires d’une paroisse de Rome, soit des « cardinaux-évêques » d’un diocèse voisin. Par exemple, le cardinal Gérald Cyprien Lacroix est archevêque de Québec et cardinal prêtre de San Giuseppe, une paroisse du quartier de Aurelio à Rome. La communauté paroissiale elle-même est dirigée par un curé et un clergé assistant incardiné dans le diocèse de Rome. Tout cela signifie que le Collège des cardinaux continue d’être, au moins nominalement, le principal clergé de la ville ! La papauté étant un ministère mondial, il est important que les cardinaux élus soient aussi représentatifs que possible de l’Église mondiale. Pour ce conclave, les électeurs viennent de 72 pays du monde entier, représentant tous les continents et toutes les régions.

Pour plus d’informations sur le Collège des cardinaux, y compris une brève biographie de chaque membre du Collège, consultez cette page du site web du Vatican.

 

2 – Seuls les cardinaux de moins de 80 ans peuvent-ils être élus, Pape ?

En fait, la seule condition est qu’ils puissent être consacrés en tant qu’évêque. Autrement dit, tout homme catholique non marié âgé de 35 ans et plus peut être élu Pape ! Bien entendu, l’élection d’un autre cardinal élu est une convention si solide qu’elle n’a jamais été rompue depuis près de 650 ans. Le dernier non cardinal à avoir été élu est l’archevêque Bartolomeo Prignano de Bari en 1378, qui est devenu le pape Urbain VI. Le dernier non-évêque à avoir été élu est le diplomate papal et prêtre camaldule, le cardinal Bartolomeo Alberto Cappellari. (À son époque, les membres du clergé de la Curie et du corps diplomatique n’étaient pas toujours ordonnés évêques, même s’ils étaient élevés au rang de cardinal). Il fut ordonné évêque et devint le pape Grégoire XVI en 1831.

 

3- Pourquoi parle-t-on de « Conclave » ?

Le mot vient du latin cum clave, qui signifie « avec une clé ». Il fait référence au fait que les cardinaux sont littéralement enfermés à l’intérieur de la chapelle Sixtine pour voter. 

À l’origine, c’était un moyen d’encourager les électeurs à prendre une décision plus rapide, comme pour leur dire : « Vous ne pouvez pas sortir avant d’avoir choisi quelqu’un ! ». Le pape Grégoire X a instauré cette règle en 1274 : les cardinaux avaient mis trois ans à l’élire en 1271, et il voulait s’assurer que cela ne se reproduise plus jamais ! En outre, le verrouillage des portes a permis de limiter – mais pas d’exclure totalement – l’influence des rois et autres dirigeants civils sur l’élection, à une époque où la papauté était le plus grand pouvoir de la politique européenne.

C’est 850 ans plus tard, que la règle est plus conceptuelle que littérale, bien que la porte soit effectivement verrouillée pendant les sessions de vote et qu’il soit « expressément interdit aux cardinaux électeurs, pendant toute la durée de l’élection, de recevoir des journaux ou des périodiques de quelque nature que ce soit, d’écouter la radio ou de regarder la télévision » (n° 57). En 2025, cela inclut aussi clairement les smartphones et l’accès à l’internet. À mon avis, cum clave signifie également le secret que les cardinaux élus sont tenus, par serment, de respecter pendant et après le Conclave, et la liberté de l’Église de discerner la volonté de Dieu, à l’écart du gain personnel et des intérêts politiques séculiers.

Je parlerai de la politique d’un Conclave dans un autre article. Pour l’instant, abordons une question complémentaire :

 

4- Pourquoi tous ces secrets ?

Nous aimons les bons drames politiques, même si le processus de vote d’un conclave est en fait assez répétitif. Hélas, les cardinaux  et les assistants (cuisiniers, agents d’entretien et personnel médical) sont tenus, sous peine d’excommunication, de ne pas divulguer les détails concernant les totaux des votes, les blocs de vote, les discussions et les débats pendant le conclave. 

Il est vrai que les journalistes sont souvent en mesure de reconstituer les événements en émettant des hypothèses fondées sur les opinions exprimées publiquement par les cardinaux, sur les informations générales fournies par le Bureau de presse du Saint-Siège, comme les thèmes des Congrégations générales, et avec l’aide de quelques sources anonymes. Cependant, une fois le Conclave terminé et le nouveau Pape présenté à l’Église, le Collège s’engage à présenter une démonstration unie de soutien au nouveau Pape. Plus important encore, il s’engage à tenir compte de l’avertissement de Saint Paul de « s’efforcer de maintenir l’unité de l’Esprit par le lien de la paix » (Ephésiens 4:3). Les commentaires et les descriptions de divisions au sein du Conclave, aussi exacts soient-ils, risquent de saper ce soutien.  

 

5- Comment puis-je me tenir au courant de toutes les nouvelles et de tous les événements de l’Interrègne et du Conclave ?

Rendez-vous sur slmedia.org/fr/papaute pour tous nos reportages à Rome, y compris les messes novendiales en mémoire du pape François, les préparatifs du conclave et la messe d’inauguration du nouveau Pape. Découvrez également le prochain épisode de notre série spéciale « Entre deux pontificats : un pèlerinage d’espérance » dès maintenant !

Le conclave papal : Chronologie

Alors que nous continuons à recommander notre cher pape François dans les bras de Dieu, les catholiques du monde entier ont une autre responsabilité à assumer à partir du 7 mai : l’élection d’un nouveau souverain pontife.

Oui, vous avez bien lu. Vous aussi avez un rôle essentiel à jouer dans le prochain conclave : Prier. Vous êtes appelé.es à vous réunir avec votre famille, vos ami.es et vos paroissiens, paroissiennes et à consacrer du temps à vos prières personnelles pour exprimer à Dieu votre espérance, vos rêves, vos inquiétudes et vos préoccupations concernant l’avenir du peuple de Dieu. 

Vous êtes appelé.es à demander à l’Esprit Saint de donner au Collège des cardinaux une nouvelle dose de courage, de sagesse et de joie afin de choisir notre prochain Pape.

Cependant, vous vous demandez peut-être ce que font les cardinaux. Voici une chronologie pour vous aider à le découvrir !

 

Quel est le processus du conclave ?

Les conclaves des Papes sont régis par la Constitution apostolique Universi Dominici Gregis de 1996 de saint Jean-Paul II, que le pape Benoît XVI a révisée en 2007 et en 2013. Elle établit des règles très précises et exactes (comme l’aspect des cartes de vote ! Voir n° 65) pour s’assurer que le résultat est clair et universellement reconnu.

Voici ce qui se passe à Rome, selon ces règles et le calendrier général :

  • 21 avril : le pape François meurt ; l’ensemble du Collège des cardinaux est convoqué à Rome et tous s’installent à la Casa Santa Marta.
  • 22 avril : les cardinaux prêtent serment de discrétion et commencent à se réunir quotidiennement pour prier, apprendre à se connaître, discuter et superviser les affaires de l’Église, ce qu’on appelle les « Congrégations générales ». Les cardinaux âgés de plus de 80 ans participent à ces réunions.
  • Du 23 avril au 6 mai : Deuil du pape François : mise en bière, funérailles, inhumation et messes de Novendiali. Les Congrégations générales se poursuivent.
  • Le conclave débute le 7 mai.

 

Le Conclave

Le 7 mai : 

  • Le matin, le cardinal Giovanni Battista Re, doyen du Collège des cardinaux, préside la messe votive Pro Eligendo Romano Pontifice « pour l’élection du Pontife romain » à la basilique Saint-Pierre.
  • En après-midi, les cardinaux électeurs – tous les cardinaux présents et en règle âgés de moins de 80 ans – passent de la chapelle Pauline à la chapelle Sixtine pendant que le chœur chante la litanie des saints.
  • Les électeurs prêtent à nouveau le serment de discrétion et s’assoient à la place qui leur a été assignée. Mgr Diego Ravelli, le maître des célébrations liturgiques papales, déclare Extra omnes (littéralement « tout le monde dehors ! ») et verrouille la porte de la chapelle Sixtine pour la première session de vote. Le cardinal Raniero Cantalamessa, 90 ans, prédicateur émérite de la Maison pontificale, désigné au préalable prononce une méditation « sur le grave devoir qui leur incombe et donc sur la nécessité d’agir avec une intention droite pour le bien de l’Église universelle » (n° 52). Le cardinal Cantalamessa et l’archevêque Ravelli sont les seuls non-électeurs autorisés à rester dans la chapelle Sixtine. 

Séances de vote :

  • Les électeurs inscrivent le nom de leur choix sur leur bulletin de vote en papier.
  • Un à un, ils présentent leur bulletin aux scrutateurs (tirés au sort parmi les membres du collège).
  • Les votes sont lus et comptés un par un.
  • Les réviseurs (également tirés au sort) vérifient les bulletins et confirment les votes.

« Pour que l’élection du Pontife romain soit valide, il faut au moins deux tiers des voix, calculées sur la base du nombre total d’électeurs présents et votants » (n° 62).

À l’heure où nous écrivons ces lignes, cela signifie que 89 voix sont nécessaires pour une élection. Tout homme catholique célibataire âgé de 35 ans ou plus est éligible. Toutefois, les seuls Papes qui ont été élus au cours des 650 dernières années étaient eux-mêmes des cardinaux-électeurs.

S’il n’y a pas d’élection valide, les bulletins de vote sont brûlés à l’aide de produits chimiques : 

  • Les bulletins de vote sont brûlés avec des produits chimiques pour produire une fumée noire dans la cheminée de la chapelle Sixtine : la foule de la place Saint-Pierre soupire.
  • Les électeurs procèdent immédiatement à un second tour de scrutin, en répétant le processus ci-dessus.
  • Il y a jusqu’à quatre sessions de vote par jour, avec une pause pour le déjeuner après la deuxième session et une pause pour le soir après la quatrième session.
  • Cela dure trois jours, suivis d’une pause d’un jour, puis de sept autres séances de vote, d’une pause et d’un nouveau vote.

S’il y a une élection valide :

  • Le cardinal électeur le plus ancien (voir la question n° 3 ci-dessous) « demande le consentement de l’élu dans les termes suivants : Acceptez-vous votre élection canonique comme Souverain Pontife ? Et, dès qu’il a reçu le consentement, il lui demande : Sous quel nom veux-tu être appelé ? ». (Universi Dominici Gregis # 87).
  • Le nouveau Pape répond ! Le conclave est officiellement terminé, la chapelle Sixtine est ouverte et d’autres officiels sont invités à entrer.
  • Les cardinaux et d’autres personnes accueillent le nouveau Pape.
  • Les bulletins de vote sont brûlés avec des produits chimiques pour produire de la fumée blanche dans la cheminée de la chapelle Sixtine : la foule sur la place Saint-Pierre applaudit !
  • Le cardinal diacre le plus ancien annonce : « Habemus Papam » depuis la loggia de la basilique Saint-Pierre.
  • Le nouveau Pape salue la foule et donne la bénédiction Urbi et Orbi.

Quelques jours plus tard :

  • Messe d’installation sur la place Saint-Pierre
  • Prise de possession de la basilique Saint-Jean-de-Latran, la cathédrale du diocèse de Rome

 

Biographie des « papabili »

cardinal-marc-ouellet

Le cardinal Marc Ouellet PSS, Préfet de la Congrégation pour les évêques et président de
la Commission pontificale pour l’Amérique latine, archevêque émérite de Québec, est né le
8 Juin 1944 à Lamotte, diocèse d’Amos, nell’Abitibi troisième d’une famille de huit fils
de Pierre Ouellet et Graziella Michaud.

Après avoir purgé ses études théologiques au Grand Séminaire de Montréal (1964-1968), en
1968 il a obtenu une licence en théologie à l’Université de Montréal. Ordonné prêtre pour
le diocèse d’Amos le 25 mai 1968 dans sa paroisse natale, il fut nommé vicaire de la
paroisse de Saint-Sauveur de Val-d’Or (1968-1970).

Plus tard, il a enseigné la philosophie au Grand Séminaire de Bogota, en Colombie,
dirigée par la province canadienne de la Société des Prêtres de Saint-Sulpice. Avant de
rejoindre les Sulpiciens, de Février à Mai 1972, il a occupé le noviciat au Séminaire de
philosophie à Montréal.

Il a ensuite étudié à Rome, où il a obtenu en 1974 une licence en philosophie à
l’Université Pontificale de Saint Thomas d’Aquin. Publié en 1974, au Grand Séminaire de
Manizales en Colombie, en 1976, a été appelé le Grand Séminaire de Montréal, où il a
travaillé jusqu’en 1978.

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« Extra Omnes », les cardinaux en conclave

Master of papal liturgical ceremonies closes doors to Vatican's Sistine Chapel

« Extra Omnes », c’est par cette formule latine que les portes de la chapelle Sixtine se sont fermées ce mardi, à 17h35, heure de Rome. Désormais tous les regards sont  tournés vers la cheminée de la chapelle Sixtine. Celle qui annoncera par une fumée blanche l’élection du successeur de Benoît XVI, le 266ème pape de l’Église catholique. Ce mardi, à 16h15, les 115 cardinaux électeurs en habit de chœur, soutane rouge et surplis blanc, sont entrés en procession dans la Chapelle Sixtine, en chantant la litanie des saints d’Orient et d’Occident, pour souligner le caractère universel du conclave. Après s’être installés à la place qui leur a été attribuée, les cardinaux ont invoqué l’Esprit-Saint en entonnant le chant du Veni Creator,puis ils ont prêté serment, tous ensemble, de garder le secret du conclave : « Nous promettons et nous jurons surtout de garder avec la plus grande fidélité et avec tous, clercs et laïcs, le secret sur tout ce qui concerne d’une manière quelconque l’élection du pontife romain et sur ce qui se fait dans le lieu de l’élection et qui concerne directement ou indirectement les scrutins ; de ne violer en aucune façon ce secret aussi bien pendant qu’après l’élection du nouveau pontife, à moins qu’une autorisation explicite en ait été accordée par le pape lui-même ». Puis individuellement, les uns après les autres selon l’ordre de préséance, les cardinaux ont juré la main sur l’Évangile : «  Et moi, N. Cardinal N., je le promets, j’en fais le vœu et je le jure… Que Dieu m’y aide ainsi que ces saints Évangiles que je touche de ma main ». [Read more…]

Pourquoi le conclave est-il secret?

Notre collègue Charles Le Bourgeois a pu interviewer le cardinal Philippe Barbarin vendredi 9 mars, entre deux courses en vélo. Il explique pourquoi le conclave est secret

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