Savoir dire merci

Par le père Thomas Rosica, C.S.B.

La célébration de l’Action de grâce au Canada constitue un contrepoint intéressant face à la fête célébrée par nos voisins américains. Alors qu’ils se souviennent des premiers colons qui se sont installés dans le Nouveau Monde, les Canadiens rendent grâce pour une bonne récolte.

Au cœur de la célébration de l’Action de grâce se trouve l’idée d’être reconnaissant pour la bonne saison qui se termine. Pourtant, lorsque tout va bien dans nos vies, rendons-nous souvent grâce à Dieu pour ce que nous sommes et ce que nous avons?

La reconnaissance va bien au-delà d’un simple « merci » obligé. Elle est une manière de percevoir le monde, un moyen pour être surpris, s’émerveiller. Il s’agit d’avoir les yeux ouverts et près de son cœur.

Quelles sont les qualités des gens reconnaissants ? Le souvenir est certainement le trait le plus précieux de la gratitude. L’une des plus grandes qualités de quelqu’un est d’être capable de dire « merci » aux autres et de ne prendre rien ni personne pour acquis. Ceux et celles qui ont cette vertu de la gratitude sont très riche : non seulement savent-ils qu’ils ont été bénis, mais ils se rappellent sans cesse que toute bonne chose vient de Dieu.

Un incident qui m’a beaucoup appris à-propos de la gratitude m’a particulièrement marqué. C’était en juin 1999 et je venais tout juste d’être nommé à la direction des JMJ 2002 au Canada. Je m’étais rendu à Paris pour rencontrer les responsables de l’Église qui avaient organisé la JMJ de 1997, qui fut d’ailleurs un grand succès.

Après trois jours de réunions intenses, l’évêque qui m’accueillait m’accompagna à un taxi. Il s’arrêta un moment sur le bord de la rue et me dit : « Thomas, il y a une chose que j’ai oublié de te dire  –  nous avons oublié de remercier les employés, les bénévoles et tous ceux qui avaient travaillé avec nous si fort pour le succès de cet événement. Nous nous en sommes aperçus alors qu’il était trop tard !

« Tu sais, nous [les prêtres] sommes les maîtres des grandes célébrations liturgiques… L’Eucharistie est essentiellement le grand acte d’action de grâce, mais nous ne savons pas comment dire ‘merci’. »

Mgr Michel Dubost m’a rappelé que la chose la plus importante que je pouvais faire en tant qu’être humain, prêtre et leader d’une grande organisation était de remercier ceux et celles qui travailleraient avec moi. Il m’a dit de ne prendre personne ni même un simple geste pour acquis.

Reconnaître les autres, dire merci, est une marque de grandeur. Si nos collègues ou collaborateurs sont découragés et démotivés, peut-être est-ce parce que nous ne leur avons jamais exprimé notre gratitude pour ce qu’ils sont et ce qu’ils font ? Je sais que nous avons un long bout de chemin à faire en Église pour réellement vivre de ce que nous professons vraiment dans la célébration eucharistique. J’ajouterai que les églises ne sont pas les seules organisations qui omettent d’exprimer leur reconnaissance aux autres.

Le courage de dire merci – c’est-à-dire le courage de voir du même coup les personnes et les expériences de ce monde comme un don – transforme non seulement la personne qui profite de ce jugement, mais aussi le milieu, le monde, et ceux et celles qui nous entourent.

La gratitude est créative. Ceux et celles qui sont liés par la gratitude trouvent constamment en eux de nouvelles forces. Plus quelqu’un est reconnaissant et plus il s’enrichie de l’intérieur. Les gens reconnaissants rassemblent dans leurs souvenirs toutes les belles expériences du passé, comme le dit le proverbe : le cœur retient ce que la mémoire oublie.

En ce weekend au court duquel nous nous retrouvons avec nos parents et amis pour célébrer et partager, nous savons que Dieu est bon non pas par des oui-dires, mais parce que nous en avons fait l’expérience. Et c’est ce qui fait toute la différence.

“Fils de Lévi, suis-moi.” – Mt 9, 9-13

[NDLR] En la fête de l’apôtre Matthieu, nous publions ici l’homélie de Glen MacDonald, C.S.B., ordonné diacre samedi dernier à Toronto. Glen fut un collaborateur de Sel + Lumière. Il poursuit son stage pastorale dans une paroisse de Rochester, NY.

L’évangile d’aujourd’hui retrace l’appel de l’apôtre Matthieu. Matthieu était un collecteur d’impôts et, par son métier, il gagnait son pain en collectant une taxe auprès de ceux qui voyageaient sur la route commerciale locale. On peut imaginer que Matthieu en serait venu à connaître Jésus, qui passait régulièrement sur cette route. Apparemment, chaque fois que Jésus donnait une pièce de monnaie à Matthieu, il lui offrait bien plus que le simple désir de « rendre à César ce qui appartient à César. »

Non, au lieu de payer la taxe ou de condamner Matthieu d’être un collecteur d’impôts, Jésus s’est probablement approché avec un sourire et un mot gentil, peut-être quelques mots à-propos de tout et de rien et possiblement une invitation à souper. Plus tard, peut-être quelques enseignements sur le Royaume de Dieu et la prépondérance de la miséricorde devant le sacrifice.

Nous ne savons pas ce qui se passait au cours de ces rencontres triviales, mais nous pouvons constater qu’elles ont eu un impact profond sur Matthieu. Par de simples gestes, payer la taxe par exemple, Jésus a cultivé en Matthieu le désir de suivre Dieu. Il lui dit : « Suis-moi. » Et il le suivit.

Nous allons rencontrer plusieurs gens tout au long de cette journée : un stagiaire gêné à la cafétéria, un collègue frustré au photocopieur, un professeur stressé à son bureau, une vieille dame au dépanneur du coin, un jeune avec piercings et tatous au pub. Qui sait ? Peut-être l’une de ces personnes sera Matthieu ? Soyons généreux de nos sourires, nos gestes et nos échanges – ses gestes de miséricorde – afin que, à l’image du Christ, nous puissions préparer cette personne à répondre à l’appel de Dieu.

La marque du Messie devient la marque de ses disciples.

Par le père Thomas Rosica, C.S.B.

La fête de l’Exaltation de la Sainte Croix tire son origine du fait que la mère de l’empereur Constantin, sainte Hélène, a découvert le 14 septembre de l’an 320, à Jérusalem, la croix sur laquelle Jésus est mort.  À l’origine, la notion de triomphe associée à la croix faisait davantage référence à la compréhension «normale» de ce mot: une victoire sur quelqu’un, acquise au prix d’une quelconque violence. Mais n’est-il pas choquant de parler d’une croix comme symbole d’une telle sorte de triomphe? La crucifixion de Jésus est un formidable et divin paradoxe. La croix, un instrument de mort, est transformée en arbre donneur de vie. Grâce au mystère de la croix, le Christ crucifié devient notre vie et notre lumière au milieu des ténèbres.

Lorsque toute la commotion et l’activité frénétique des Journées mondiales de la jeunesse sont arrivées à leur terme, j’étais convaincu que l’une des choses qui allaient le plus durablement marquer le Canada était cette petite croix toute simple. Elle aura constitué un énorme bienfait et une source de consolation pour les centaines de milliers de personnes qui l’ont touchée et embrassée, qui ont découvert des choses grâce à elle et qui lui ont permis de les toucher personnellement à l’aide du message et du souvenir impérissables de celui qui est mort sur elle. Célébrer le triomphe de la croix, c’est donc reconnaître le plein accomplissement du ministère de Jésus. Jésus nous a demandé de courageusement choisir une vie semblable à la sienne. La souffrance ne peut être évitée ni ignorée par ceux qui marchent dans ses traces. Suivre Jésus, cela implique de souffrir et de porter, nous aussi, notre croix. La marque du Messie devient ainsi la marque de ses disciples.  

La croix, un pont jeté au-dessus de l’abîme de la mort

« Notre Seigneur a été piétiné par la mort, mais, en retour, il a frayé un chemin qui écrase la mort. Il s’est soumis à la mort et il l’a subie volontairement pour la détruire malgré elle. Car, sur l’ordre de la mort, notre Seigneur « est sorti en portant sa croix » (Jn 19,17). Mais il a crié sur la croix et il a tiré les morts des enfers…

Il est le glorieux « fils du charpentier » (Mt 13,55) qui, sur le char de sa croix, est venu au-dessus de la gueule vorace du séjour des morts et a transféré le genre humain dans la demeure de la vie (Col 1,13). Et parce que, à cause de l’arbre du paradis, le genre humain était tombé dans le séjour des morts, c’est par l’arbre de la croix qu’il est passé dans la demeure de la vie. Sur ce bois-là avait été greffée l’amertume; mais sur celui-ci la douceur a été greffée, pour que nous reconnaissions en lui le chef auquel ne résiste rien de ce qui a été créé.

Gloire à toi ! Tu as jeté ta croix comme un pont au-dessus de la mort, pour que les hommes y passent du pays de la mort à celui de la vie… Gloire à toi ! Tu as revêtu le corps d’Adam mortel et tu en as fait la source de la vie pour tous les mortels. Oui, tu vis ! Car tes bourreaux se sont comportés envers ta vie comme des semeurs : ils ont semé ta vie dans les profondeurs de la terre comme on sème le blé, pour qu’il lève lui-même et fasse lever avec lui beaucoup de grains (Jn 12,24).

Venez, faisons de notre amour comme un encensoir immense et universel ; prodiguons des cantiques et des prières à celui qui a fait de sa croix un encensoir à la Divinité et nous a tous comblés de richesses par son sang. »

– Saint Ephrem (vers 306-373), diacre en Syrie, docteur de l’Église Homélie sur notre Seigneur

Quand on s’exclue de la communion

À 13 heures cet après-midi, la Conférence des évêques catholique du Canada a rendu public une déclaration d’excommunication à l’endroit des membres de l’Armée de Marie. Il s’agit d’une situation triste qui fait certainement mal à la communion de l’Église qui a été brisée dès le moment que les actes schismatiques ont été posés.

« Suite à des consultations auprès des évêques du Canada et auprès de la Congrégation pour les instituts de vie consacrée et les sociétés de vie apostolique, la Congrégation pour la doctrine de la foi (responsable au Saint-Siège pour toutes les questions de foi et de morale) a émis une déclaration d’excommunication à l’endroit de membres de L’Armée de Marie. Cette annonce a été faite avec l’approbation du pape Benoît XVI. »

Voici l’intégral de la déclaration de la Congrégation pour la doctrine de la foi, qui explique pourquoi les membres de l’Armée de Marie se sont eux-mêmes exclus de la communion de l’Église:

CONGREGATIO PRO DOCTRINA FIDEI
DECLARATION

CONCERNANT LE MOUVEMENT
«LA COMMUNAUTÉ DE LA DAME DE TOUS LES PEUPLES»
ET DE SES OEUVRES: «L’ARMÉE DE MARIE»,
«LA FAMILLE ET LA COMMUNAUTÉ DES FILS ET FILLES DE MARIE»,
«LES OBLATS-PATRIOTES», «L’INSTITUT MARIALYS»
Son Eminence le Cardinal Marc OUELLET, Archevêque de Québec, a adressé le 26 mars 2007 à tous les fidèles de son diocèse une déclaration concernant le statut, les activités et les œuvres associées au mouvement appelé “Communauté de la Dame de tous les Peuples”, mieux connu sous le nom de “L’Armée de Marie”.

Le Cardinal déclarait « que les responsables de l’Armée de Marie se sont exclus de la communion de l’Église catholique … L’Armée de Marie est devenue clairement et publiquement un mouvement schismatique et donc une association non – catholique.  Ses doctrines particulières sont fausses et ses activités ne peuvent être fréquentées ni soutenues par des catholiques ».

Dans sa lettre du 25 mars 2007, le Commissaire Pontifical, son Excellence Mgr. Terrence PRENDERGAST, S.I., avait fixé la date ultime du 31 mai 2007 aux prêtres, membres de cette association, sous peine de sanctions canoniques adéquates, afin qu’ils expriment leurs intentions, renient les erreurs ainsi que les actes du schisme, et  promettent obéissance au Saint-Siège.

Ces prêtres n’ont pas suivi les injonctions du Commissaire Pontifical. Au contraire, le 3 juin 2007, nombreux parmi eux ont participé à l’ordination presbytérale invalide de six membres, célébrée par un prêtre de la même Association, le Père Jean-Pierre MASTROPIETRO.

Vu la gravité de la situation, et en l’absence de solution alternative, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi se fait le devoir de déclarer ce qui suit:

a) Les prétendues “ordinations diaconales et presbytérales”, célébrées par le Père Jean-Pierre Mastropietro, sont invalides.
b) Le Père Jean-Pierre MASTROPIETRO encourt l’excommunication  latae sententiae pour le délit de schisme (CIC can. 1364). En outre, il tombe dans l’irrégularité en ce qui concerne la réception et l’exercice des Ordres Sacrés, ayant attenté à un acte de l’Ordre Sacré réservé aux Evêques (CIC cann. 1384; 1041, n. 6; 1044, § 1, n. 3).
c) Les personnes qui ont prétendu se faire ordonner diacres et prêtres par l’imposition des mains du Père Jean-Pierre MASTROPIETRO encourent l’excommunication  latae sententiae pour le délit de schisme (CIC can. 1364).
d) Les membres dudit Mouvement et des oeuvres associées, qui ont adhéré à ces actes schismatiques, malgré l’avertissement fait le 26 mars 2007 par l’Ordinaire de Québec, et ont décidé de continuer à fréquenter ce mouvement, sont dans le schisme et donc encourent l’excommunication latae sententiae.
e) Demeure valide le jugement doctrinal négatif émis par les Evêques catholiques du Canada le 29 juin 2001, après consultation de notre Congrégation et avec son approbation.  Il est à réaffirmer avec clarté et fermeté que la doctrine développée par le Mouvement “Communauté de la Dame de tous les Peuples”, mieux connu sous le nom de “L’Armée de Marie”, est hérétique. Quiconque sciemment et délibérément adhère à cette doctrine encourt l’excommunication latae sententiae pour hérésie (CIC can. 1364).

Fait au Palais du Saint Office, le 11 juillet 2007
A notifier.

William Cardinal LEVADA
Préfet

X Angelo AMATO
Archevêque tit. de Sila
Secrétaire

11 septembre 1984

Par Sébastien Lacroix

Où étiez-vous il y a 23 ans? Jean-Paul II effectuait alors ce qui sera la plus longue visite apostolique de son pontificat, ici au Canada. Arrivé à Québec le 9 septembre, le Saint-Père sillona le pays pendant 12 jours, allant à la rencontre des centaine de milliers de personnes qui l’attendaient. (On peut d’ailleurs revoir en ligne les hauts moments de cette visite, entre autres sur LCN) Le 11 septembre, des milliers de personnes se trouvaient au Parc Jarry à Montréal pour assister à la toute première béatification à se déroulé en sol américain: celle de la bienheureuse Marie-Léonie Paradis, fondatrice de l’Institut des Petites Soeurs de la Sainte-Famille.

Ce jour là, Jean-Paul II a évoqué l’humilité et l’esprit de service de la bienheureuse:

Sœur Marie-Léonie Paradis ne craignait pas les diverses formes du travail manuel qui est le lot de tant de gens aujourd’hui, qui a été à l’honneur dans la Sainte Famille, dans la vie même de Jésus à Nazareth. C’est là qu’elle a vu la volonté de Dieu sur sa vie. C’est en accomplissant ces tâches qu’elle a trouvé Dieu. Avec les sacrifices inhérents à ce travail, mais offerts par amour, elle y a connu une joie et une paix profondes. Elle savait qu’elle rejoignait l’attitude foncière du Christ, « venu non pour être servi mais pour servir. » Elle était toute pénétrée de la grandeur de l’Eucharistie, et de la grandeur du sacerdoce. Oui, Dieu a jeté les yeux sur la sainteté de son humble servante, Marie-Léonie, qui s’est inspirée de la disponibilité de Marie. Et désormais sa Congrégation et l’Eglise la diront, d’âge en âge, bienheureuse (cf. Lc 1, 84).

Vingt-trois ans plus tard, les gens se souviennent. Mère Léonie a inspiré beaucoup de jeunes femmes à prendre la tenue de service. La mission de cette communauté vouée au service du clergé doit être prise dans le contexte de l’Église du XIXe et XXe siècle. Il n’en demeure pas moins que Marie-Léonie et ses filles continuent d’inspirer beaucoup de gens.

La communauté fut fondé à Memramcook, N.-B. en 1880. Faute de la reconnaissance de l’évêque du lieu, Marie-Léonie accepta l’invitation de Mgr Paul Laroque qui propose à la communauté de s’installer dans son diocèse, Sherbrooke. Avec regret, les habitants de Memramcook ont vu partir Mère Léonie et ses filles. Aujourd’hui encore, ils se souviennent de ce pilier de leur communauté. Un monument à la mémoire de la fondatrice se tient devant le collège où elle a travaillé. Le cimetière demeure toujours le lieu de repos des premières religieuses ainsi que du père Camille Lefebvre, qui a soutenu Marie-Léonie dès son arrivée au Nouveau-Brunswick.

Être pénétré de la grandeur de l’Eucharistie et, par cela, adopter la tenue de service, à l’image de Christ, voilà comment cette femme peut nous inspirer et nous servir de modèle encore aujourd’hui.

Bienheureuse Marie-Léonie, priez pour nous.

Dix ans plus tard, le chant de Mère Teresa se poursuit

Par le père Thomas Rosica, C.S.B.
Directeur général de la Fondation catholique Sel et Lumière Média

 

Il y a dix ans, le 5 septembre 1997, Mère Teresa de Calcutta mourut à l’âge de 87 ans à Calcutta. Née Agnes Gonxha Bojaxhiu le 27 août 1910 de parents Albaniens à Skopje (autrefois l’Albanie, aujourd’hui l’ancienne Yougoslavie). Elle joint les Sœurs de Lorette à l’âge de 18 ans. Après avoir reçu une inspiration divine lors d’un voyage en train, elle laissa le milieu aisé où elle servait et se rendit à Calcutta pour fonder une nouvelle congrégation religieuse, les Missionnaires de la Charité, dont la mission était de prendre soin des malades et des mourants des milieux les plus pauvres et misérables, d’éduquer les enfants de la rue, de venir en aide aux mendiants et de donner un refuge aux sans-abri.

En 1950, elle débuta ce qui devint son œuvre la plus connue en ouvrant à Calcutta le premier Nirmal Hriday (cœur tendre) pour les mourants et les délaissés. Les mots de Mère Thérésa demeure d’ailleurs toujours inscrits sur les murs de cette maison: «De nos jours, la maladie la plus horrible n’est ni la tuberculose, ni la lèpre. C’est le sentiment d’être indésirable, rejeté, abandonné par tous. » Elle était connue pour avoir dit à des chefs de gouvernements qui discutaient de la situation des pauvres: « Alors que vous poursuivrez vos discussions à-propos de causes et d’explications, j’irai m’agenouiller à côté des plus pauvre d’entre les pauvres et répondre à leurs besoins.»

Six ans après sa mort, en 2003, elle fut déclarée bienheureuse par son ami, le pape Jean-Paul II. Même lorsqu’elle était toujours vivante, parcourant les rues des bas fonds de Calcutta, des gens de partout dans le monde, de confessions différentes, appelaient Mère Teresa «la sainte des pauvres.»

La vie de Mère Teresa n’était pas un cliché. Nous vivons à l’ère des manchettes chocs. Alors que tout va très vite, on répond aux grands enjeux de notre époque sans réfléchir, comme des poules sans tête. La vie de Mère Térésa était une métaphore de dévouement désintéressé et de sainteté. C’est pourquoi tant de jeunes femmes de presque partout et de tant d’origines continuent d’entrer chez les Missionnaires de la Charité. Mère Teresa fonda un ordre qui compte désormais plus de 4500 femmes qui oeuvrent dans plus de cent pays. Elles gèrent plus de 500 maisons, hospices et refuges pour des milliers de mourants et de délaissés, en plus de centaines d’écoles, cliniques mobiles, maisons pour les lépreux et les sidéens. Bien que la chanteuse soit partie, le chant de l’amour, de la charité et de l’espérance continue d’être chanté par ces anges de la miséricorde qui découvre Jésus dans la détresse du pauvre.

Mère Teresa découvrit dans la prière la vérité essentielle qui est la source de l’enseignement social de l’Église et de son œuvre religieuse et humanitaire à travers les âges et à travers le monde : Jésus-Christ, le Verbe fait chair, le Sauveur de l’humanité, qui a voulut s’identifier à chaque personne, spécialement le pauvre, le malade et le laissé-pour-compte.  «C’est à moi que vous l’avez fait» répétait si souvent Mère Teresa, un message qui ne passera jamais.

Il existe des critiques de l’Église qui affirment que Mère Teresa personnifiait une vision de la foi pré-Vatican II et ne s’est pas attaquée à des maux systémiques comme les dépenses militaires. Ils la critiquent de même que ses partisans pour leur condamnation sans équivoque de l’avortement. Certains disent qu’elle était un modèle ‘sûr’, et que chaque prêtre et évêque pouvait la mettre sur un piédestal et dire aux femmes: «Soyez dociles, faites ce qui vous revient, mais n’allez pas critiquer autre chose.» Je connais moi-même plusieurs religieuses et prêtres qui sont très critiques à l’endroit de  Mère Teresa à cause de son manque d’appui pour leur style de vie et leur image alors que les religieux nord-américains mettent l’emphase sur la justice sociale et le renouveau religieux. Certains ont même déclaré qu’il n’y avait en Mère Teresa aucun élément de critique prophétique, tant dans son enseignement que dans son style de vie.

Il y a aussi les prophètes religieux autoproclamés qui clament que Mère Teresa de l’orthodoxie du progrès social américain si elle avait été davantage réformatrice que consolatrice. Au lieu de rapports de comités portant sur le nombre de personnes qu’elle a élevé au-delà du seuil de la pauvreté, tout ce qu’elle a sont quelques histoires de mourants qui étaient rejetés, qu’elle a pris dans ses bras… Au lieu d’œuvrer pour obtenir une subvention dans le but de créer un programme afin d’enrayer la pauvreté, elle est déménagée dans un quartier pour la partager avec ceux qui la vivent!

Pour nous Nord-américains capables de tout, qui croient qu’il y a une solution pour chaque problème et un baume pour chaque outrage, Mère Teresa apparaît comme l’incapable classique. On oublie sa beauté spirituelle. Elle possédait une rare fidélité à un sacré qui soutient et affirme chaque individu, où qu’il soit, et non pas là où Mère Teresa ou le responsable d’une agence d’aide ou le directeur d’un programme de travail, croit qu’ils doivent être.

Lorsque Mère Teresa parle de ‘partager la pauvreté,’ elle défie la logique des institutions qui préfèrent se fier à un agenda pour les pauvres, et non pas à la communion avec ces personnes pauvres. La communion fait fi des approches conventionnelles. Elle ne permettra peut-être jamais de trouver un emploi pour quelqu’un, encore moins de remettre cette personne sur les rails. C’est pourquoi les ‘praticiens’ de cette communion sont qualifiés d’impertinents. Il peut arriver, au pire, qu’on leur colle le titre de saint, comme Mère Teresa.    

Dieu merci pour des saints comme Teresa de Calcutta et ses disciples comme S. Nirmala Joshi qui continuent de nous rappeler que la sainteté, la bonté, la joie, la générosité et la paix demeurent possibles dans un monde si compliqué. De son vivant, Mère Teresa a dû faire face aux ombres du doute, à l’angoisse et à la nuit profonde de sa foi. Ces expériences l’ont purifiée et lui ont permis de rejoindre la multitude des saints, mystiques et bienheureux qui ont vécu des expériences similaires sur leurs chemins vers la sainteté.   

Il y a plusieurs années, lors de mes études post-universitaires à Rome, j’ai pu rencontré Mère Teresa alors que j’enseignais à ses filles dans un quartier démuni en bordure de la ville éternelle. À la fin de notre première rencontre, elle m’a béni sur le front et a posé dans mes mains une carte d’affaire comme je n’en n’avais jamais vue. On pouvait y lire:

« Le fruit du silence est la prière ; le fruit de la prière est la foi; le fruit de la foi est l’amour; le fruit de l’amour est le service; le fruit du service est la paix. Que Dieu vous bénisse. – Mère Teresa ». 

Il n’y avait pas d’adresse postale, pas numéro de telephone ou de courriel sur la carte. Mère Teresa n’avait pas besoin d’une adresse à ce moment. Et la bienheureuse Teresa de Calcutta n’en a certainement pas besoin d’une aujourd’hui. Chacun sait où elle se trouve et comment la rejoindre.

Bienheureuse Teresa de Calcutta, priez pour nous.

Fais-le quand même…

Les gens sont souvent déraisonnables, illogiques et centrés sur eux-mêmes, Pardonne les quand même…
Si tu es gentil, les gens peuvent t’accuser d’être égoïste et d’avoir des arrières pensées,
Sois gentil quand même…
Si tu réussis, tu trouveras des faux amis et des vrais ennemis,
Réussis quand même…
Si tu es honnête et franc, il se peut que les gens abusent de toi,
Sois honnête et franc quand même…
Ce que tu as mis des années à construire, quelqu’un pourrait le détruire en une nuit,
Construis quand même…
Si tu trouves la sérénité et la joie, ils pourraient être jaloux,
Sois heureux quand même…
Le bien que tu fais aujourd’hui, les gens l’auront souvent oublié demain,
Fais le bien quand même…
Donne au monde le meilleur que tu as, et il se pourrait que cela ne soit jamais assez,
Donne au monde le meilleur que tu as quand même…
Tu vois, en faisant une analyse finale, c’est une histoire entre toi et Dieu, cela n’a jamais été entre eux et toi.

– Mère Teresa de Calcutta

« Rien n’est impossible à Dieu… »

[NDLR: Nous publions ici l’intégral de l’homélie prononcée ce matin par Mgr André Vingt-Trois, archevêque de Paris, à l’occasion des funérailles du cardinal Jean-Marie Lustiger décédé dimanche dernier à l’âge de 80 ans.]

     Cette parole de l’ange Gabriel à Marie, rapportée par l’évangile de saint Luc que nous venons d’entendre, éclaire l’existence de chacun de ceux que Dieu appelle et qu’Il accueille dans son alliance. Elle éclaire particulièrement la vie du cardinal Jean-Marie Lustiger que nous accompagnons aujourd’hui tandis qu’il entre dans la lumière de Dieu et avant que son corps ne repose dans sa cathédrale.

     A travers ce que sa discrétion et sa pudeur ont laissé paraître de son histoire personnelle, nous comprenons que les enchaînements d’une vie peuvent toujours être déchiffrés de manière différente, selon la clé de lecture que l’on utilise. On peut évidemment lire l’histoire de la famille Lustiger dans la seule logique des bouleversements européens du XX° siècle qui conduisirent une famille juive à s’expatrier de Pologne en France, puis à subir la chasse meurtrière des nazis. On peut aussi la lire comme un chemin au long duquel les épisodes douloureux et les épreuves atroces sont comme la partie visible et cruellement éprouvée d’une alliance entre Dieu et l’humanité, entre Dieu et son Peuple élu, entre Dieu et chacun des humains dont Il veut faire ses fils.

     Cette lecture croyante de l’histoire d’une vie est celle que Jean-Marie Lustiger a voulu partager dans les quelques ouvrages où il a levé le voile sur son histoire. Ce n’était pas chez lui un besoin de se justifier, moins encore un exercice apologétique. C’était un acte de foi et d’action de grâce : la volonté de témoigner du ressort ultime de son existence. Pouvons-nous quelques instants le suivre sur cette voie de la foi et de l’action de grâce pour évoquer quelques traits de cette personnalité si riche ?

     Pour ceux qui ont eu la chance de l’approcher et de le connaître personnellement, ce n’est ni son intelligence, ni l’acuité de son esprit, ni l’amplitude de sa culture, toutes réelles qu’elles fussent, qui frappaient d’abord, mais plutôt la vigueur et la force de sa foi. Avant tout, il était un croyant. Que ce soit dans l’accueil de la Parole de Dieu, dans l’expérience vécue des sacrements de l’Église, dans l’annonce de l’Évangile ou dans la conduite quotidienne de sa vie, tout était reçu de Dieu et tout était rapporté à Dieu. Sa découverte et sa rencontre en Jésus-Christ du Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, avaient établi définitivement sa vie dans le régime de la grâce, du don reçu gratuitement et sans autre motif que la miséricorde du Dieu tout-puissant.

     Persuadé d’avoir tout reçu gratuitement, il était passionné du désir d’annoncer à tous la surabondance de l’amour de Dieu pour l’humanité et de transmettre l’appel du Christ à vivre de cet amour. Depuis son premier ministère auprès des étudiants jusqu’à ses dernières initiatives apostoliques comme archevêque de Paris, toute son activité, foisonnante et incessante, était animée par ce désir. Des chemins de la Terre Sainte aux routes de Chartres, des appels paroissiaux à « Agir par la Foi » aux initiatives diocésaines couronnées par « Paris-Toussaint 2004 », toutes ces entreprises dans lesquelles il s’engageait sans réserve visaient à faire connaître le Christ, Sauveur du monde.

     Loin de se laisser enfermer dans le monde ecclésiastique, il avait dans la société française et dans le monde entier d’innombrables contacts: dans l’université comme dans le monde économique, dans les milieux politiques comme dans l’univers culturel. Son élection à l’Académie Française établit avec cette illustre compagnie des liens qui n’étaient pas seulement de convenance. Ce tissu serré de relations était comme une sorte de paroisse universelle où il voulait exercer son ministère de prêtre du Christ et de témoin de la foi. Créé cardinal par le regretté Jean-Paul II, il portait avec lui le souci pastoral de l’Église entière en partageant profondément sa vision de l’homme dans le monde de ce temps.

     Avec l’encouragement et le soutien du Jean-Paul II, il a posé pour le développement des relations entre les juifs et les chrétiens des actes décisifs que peut-être lui seul pouvait engager. Son histoire personnelle le conduisait à se reconnaître comme un témoin privilégié de la vocation universelle de l’Alliance conclue au Sinaï entre Dieu et son Peuple. Quelles que soient les incompréhensions bien explicables ou les souffrances secrètes dont il était blessé, jamais il ne renonçait à ce qu’il comprenait comme sa mission propre.

     Ce que l’acuité de l’analyse et la perspicacité de l’intelligence lui révélaient comme une fulgurance se traduisait immédiatement en projet d’action et d’évangélisation. Ce qui lui advenait devait servir à l’accomplissement de la mission avec une exigence dont tous ses collaborateurs ont été les témoins et les acteurs sous son impulsion. Dans une période de la vie de l’Église où les regrets et les lassitudes risquaient de réduire les ambitions apostoliques à la mesure des moyens supposés, il discernait, – et pas seulement pour le plaisir intellectuel du paradoxe -, des opportunités nouvelles et il engageait de nouveaux projets, quitte à perturber la quiétude même des moins timorés. Ce n’était chez lui ni le désir de promouvoir ses œuvres propres, ni l’impatience d’agir, comme certains pouvaient l’en soupçonner. Cette tension permanente vers des objectifs à atteindre relevait de l’espérance raisonnée et d’une lecture des « signes des temps ».

     En un quart de siècle cette passion de l’évangélisation s’est exprimée par des fondations qui trouvent peu à peu leur maturité : création de nouvelles paroisses, constructions d’églises, École cathédrale, Radio Notre-Dame, Séminaire diocésain, Fraternité Missionnaire des Prêtres pour la Ville, télévision KTO, Faculté Notre-Dame, Collège des Bernardins sont autant de ces projets dont l’articulation et la cohérence apparaissent à mesure qu’ils se développent. Il faut aussi évoquer les Journées Mondiales de la Jeunesse de Paris en 1997 et leur rayonnement tant en France que dans le monde et le lancement des Congrès pour l’évangélisation dont Budapest sera la prochaine étape en septembre 2007.

     Cette activité était enracinée dans une vie de communion au Christ. Prêtre, puis évêque d’Orléans et Archevêque de Paris, Jean-Marie Lustiger fut vraiment un maître spirituel. Il ne fut pas seulement un prédicateur talentueux et écouté, il avait le souci de la qualité de la prière dans l’Église, jusque dans la perfection de la mise en œuvre liturgique, conscient que Dieu agit à travers les gestes et les signes donnés aux hommes. Les moins avertis pouvaient bien n’y voir qu’un travers de maniaquerie ; en fait, ce qui l’animait était le souci de vivre par la pureté et la beauté des signes le sens profond des rites et d’aider les fidèles à y entrer. Comment pourrions-nous l’oublier dans cette cathédrale dont il a souhaité et réalisé le réaménagement que nous voyons et où il a si souvent présidé la Messe dominicale, célébré la Messe chrismale, ordonné les prêtres et les diacres du diocèse ?

     Soucieux d’encourager les prêtres dans l’engagement spirituel de leur ministère, il a renouvelé les propositions de retraite sacerdotale et mis en œuvre des « lundis de prière » où il aimait se joindre aux prêtres dans un climat de recueillement et de partage fraternel. Encore ne savons-nous rien du secret de sa prière et de sa relation personnelle avec Dieu. Mais on pressentait qu’elle était assez forte pour surmonter les fausses modesties et les craintes humaines quand il était convaincu que l’annonce de l’Évangile était en cause.

     Au cours de l’année écoulée, l’aggravation de son état de santé l’a contraint à réduire ses activités et à servir d’une autre manière. De chacune des étapes, il a accueilli les symptômes avec lucidité et courage. Il a offert sans se plaindre la nécessité d’un temps de vie dans la dépendance de la maladie. Le véritable sacrifice offert à Dieu, ce fut d’accepter cette limitation avec sérénité.

     Si le temps de l’historien n’est pas encore venu, nous sommes déjà dans le temps de l’action de grâce. Nous rendons grâce à Dieu d’avoir envoyé sur notre chemin un témoin tel que Jean-Marie Lustiger. Les fruits de son ministère parmi nous ne révèlent pas seulement une personnalité exceptionnelle ; ils sont à reconnaître avant tout comme des signes de l’œuvre de Dieu dans l’histoire humaine. Ils nous encouragent à comprendre comment nos limites et nos faiblesses, les difficultés rencontrées et les épreuves subies, sont autant d’occasions de reconnaître la puissance de Dieu agissant dans la faiblesse de ses serviteurs. Quelle que soit la valeur de la « poterie », pour reprendre l’expression de Paul, c’est de Dieu, – nous en sommes convaincus -, que vient la puissance extraordinaire du trésor qui nous est confié. C’est Dieu Lui-même qui se penche sur la faiblesse de ses serviteurs et de ses servantes pour les couvrir de l’ombre de son Esprit et les associer à l’enfantement mystérieux auquel participe la création tout entière.

     Le 8 décembre 1979, lors de sa consécration épiscopale à Orléans, la liturgie de la fête de l’Immaculée Conception proposait le récit de l’Annonciation dans l’évangile selon saint Luc. Est-ce cette occasion providentielle ou un choix plus délibéré qui conduisit Jean-Marie Lustiger à prendre le message de l’ange comme une phrase de référence, sinon comme une devise : « Rien n’est impossible à Dieu ! » ? Toujours est-il qu’il aimait revenir à cette profession de foi en la puissance de Dieu à travers la faiblesse des comportements humains. Ses entreprises les plus hardies n’ont-elles pas été marquées par cette confiance que Dieu seul peut construire et conduire son Église selon sa volonté ? S’il s’émerveillait, ce n’était ni de la notoriété, des charges ou des honneurs, ni non plus des incompréhensions ou des jalousies, qui constituent la face visible de l’existence de quiconque approche des sommets des organisations humaines. Ce qui était la source de sa joie et de son action de grâce, c’était de voir que la Providence accomplissait son œuvre par des voies qui nous restent souvent mystérieuses mais que la foi apprend à reconnaître. Il ne recherchait pas l’approbation du monde, mais il cherchait toujours avec confiance et obstination à déchiffrer cet itinéraire par lequel Dieu veut conduire son Peuple.

     Par le témoignage de sa vie, comme de celle de tant de disciples du Christ depuis deux mille ans, nous avons la preuve quotidienne que, vraiment, « rien n’est impossible à Dieu. » Ce qui a été vrai dans la vie de la Vierge Marie, ce qui a été vrai dans la vie de Jean-Marie Lustiger, est vrai aussi dans la nôtre et nous sommes donc appelés avec lui à reprendre à notre compte la réponse de Marie au message de l’ange : « Voici la servante du Seigneur ; que tout se passe pour moi selon ta parole. »

 

+ André VINGT-TROIS

Archevêque de Paris

La foi qui informe…

Par Stefano Cascio 

[NDLR:  Stefano est séminariste pour le diocèse de Rome, en stage pastoral à Télévision Sel + Lumière pour six semaines. Il sera un collaborateur régulier de ce blogue.]

Le Secrétaire d’état du Vatican, le cardinal Tarcisio Bertone vient de recevoir le prix Gaudium et Spes, à la 125ième convention suprême des Chevaliers de Colomb. Je désire donc réfléchir avec vous, durant quelques jours sur cette encyclique et en particulier sur l’article 43 ou comment la foi informe la vie du croyant…  

Introduction
La philosophie des lumières envahissant les esprits a provoqué la Révolution française fortement opposée au catholicisme, puis le Libéralisme politique et économique du XIXème siècle. Progressivement des domaines entiers de la société civile échappent au pouvoir de l’Eglise : l’économie, la santé et l’éducation. Apparaît alors l’idée naturelle, face à ce nouveau visage de la société, que la religion doit se vivre dans la sphère privée.
Face à une telle sécularisation de la société, les Pères vont vouloir promulguer, pour la première fois, un document important d’un Concile à tous les hommes. Il n’a été précédé dans ce sens que par l’encyclique Pacem in Terris de Jean XXIII.
La Constitution Pastorale De Ecclesia in mundo hujus temporis, (dont « Gaudium et Spes » sont les premiers mots), qui désire présenter le rôle de l’Eglise dans le monde contemporain est exceptionnelle par son but et sa forme :
C’est le plus long texte de toute l’histoire conciliaire. Son style est original pour être accessible au plus grand nombre : les ébauches du texte furent rédigées en français, langue vivante la plus usitée parmi les Pères et les experts. Pour le texte officiel latin, les Pères ont privilégié la clarté et l’intelligibilité plutôt que de soigner le latin classique.
Pour la première fois également, l’aspect temporel de la vie chrétienne est très largement abordé. Mais une constitution pastorale ne peut répondre à tous les problèmes, elle donnera donc des principes d’actions de longues durées.
Nous le verrons, ce texte va accepter l’anthropocentrisme qu’il a christianisé. La vision chrétienne de l’homme et du monde est un humanisme eschatologique. Le nouvel axe de la présence de l’Eglise dans le monde passe par la liberté de l’homme chrétien. Mais il n’y a pas opposition entre la présence de l’Eglise et la liberté de l’homme, entre l’Eglise et le monde.
Après trois chapitres où sont exposés la dignité de l’homme, son caractère communautaire, le sens de son entreprise de construction du monde, le chapitre IV définit la mission divine et humaine de l’Eglise.
Ce chapitre reprend donc le principe posé au chapitre III, sur la “ juste autonomie des réalités terrestres ” (n°36). Il est appliqué aux trois domaines de la vie personnelle, de la vie sociale, de la construction du monde. L’Eglise observe et apprécie, « tient en grande estime » le dynamisme de l’histoire (n°41), les bienfaits actuels des progrès sociaux et politiques (n°42).
Les Pères vont, tout d’abord, réaffirmés la place de la foi dans la vie de tous chrétiens (I) en condamnant certains comportements (A) et en les exhortant à réaliser une synthèse entre la foi et les activités profanes (B). Puis, dans la première partie du numéro 43, que nous étudierons, ils s’attachent, plus particulièrement, au rôle des laïcs qui se doivent « d’imprégner » le monde d’esprit chrétien (I) en reconnaissant la valeur propre des activités séculières (A) et leur responsabilité (B). Cette mission ne peut se faire sans être témoin du Christ (III), en étant attentif à sa conscience (A) et au milieu de la communauté humaine (B)

à suivre…

125 de foi en action

Par Sébastien Lacroix

Vous les avez souvent vu lors d’une procession liturgique, épée et chapeau à plumes. Pourtant, les Chevaliers de Colomb sont bien plus que cela. Bien souvent, ils sont les piliers de nos communautés chrétiennes partageant avec elles leurs talents, leur temps et leurs biens.  

Nombreux sont les prélats, évêques et cardinaux, qui se sont rendus à Nashville USA pour la 125ième convention suprême. Dans une entrevue accordée cet après-midi dans le cadre de Zoom, Mgr André Gaumond, archevêque de Sherbrooke et Président de la CECC, a expliqué que les C de C sont essentiels pour réaliser la mission de l’Église. Et comment! Dans son discours sur la situation des chevaliers, le chevalier suprême Carl Anderson faisait état de millions d’heures de bénévolat des C de C en 2006. Chiffré par le Independant Institute, ce temps vaut environ 1,3 milliard de dollars. À 18,77 l’heure, faites le calcul… Plus encore, le district d’état du Québec fut le plus généreux, en contribuant plus de 7,8 millions de dollars aux charités de l’Ordre. Comme quoi les Chevaliers demeurent une force et une ressource incontournable pour l’Église et pour la société en général. 

Tout cela a commencé par le rêve d’un jeune prêtre américain qui voulait fonder une société de bienfaisance, catholique et fraternelle. L’abbé Michael J. McGivney réussit à ce qu’un premier conseil puisse se voir octroyer une chartre en 1882.  

Le cardinal Bertone à la messe d'ouverture de la convention le 7 aoûtInvité d’honneur de la 125ième convention suprême, le Secrétaire d’État du Vatican, le cardinal Tarcisio Bertone, a parlé aux délégués du dévouement de l’abbé McGivney. « En tant que prêtre, il a rejoint les gens au-delà des confins de la paroisse (…) Il a cherché à être un signe vivant du Christ pour les gens qu’il servait. » Laissant de côté le texte de son homélie, le cardinal a dit qu’il appuyait la cause de béatification du Serviteur de Dieu Michael J. McGivney, et qu’il allait faire en sorte que les choses accélèrent du côté de Rome. C’en fut assez pour soulever la foule. Depuis longtemps déjà les Chevaliers et leurs proches prient pour la canonisation de leur fondateur. Pour eux, la promesse du numéro deux au Vatican est plus qu’une lueur d’espoir. 

Qu’il soit reconnu ou non par l’Église, l’abbé McGivney demeurera une inspiration pour les Chevaliers qui suivront les traces de leur fondateur pour être des signes vivant de Jésus-Christ.

Mont Thabor, Paul VI et la fête de la Transfiguration de Notre Seigneur

Par le père Thomas Rosica, C.S.B. 

Chaque année, le 6 août est consacré à la fête de la Transfiguration du Seigneur. C’est un très grand mystère que nous sommes amenés à contempler à la suite des trois apôtres que Jésus prit avec lui sur la montagne : Pierre, Jacques, et Jean. Mais c’est surtout à la suite de Pierre que nous allons assister à cet événement unique dans la vie de Jésus. Car s’il y a quelqu’un qui a osé se manifester ce jour-là, c’est bien Pierre: la Transfiguration du Seigneur a tellement marqué l’esprit de cet apôtre qu’il en a parlé longuement dans sa deuxième épître (cf. 2 P. 1, 16-18). Avec Pierre, et à sa suite, voyons ce qui s’est passé en ce 6 août avant la mort de Jésus…

Le mystère de la Transfiguration consiste, pour Jésus, à manifester tout l’éclat et toute la gloire de sa divinité. Jésus, qui est homme, veut montrer le plus clairement possible qu’il est aussi et d’abord Dieu. Aussi, ce qui est humain en lui, tout en demeurant véritablement humain, prend un aspect et une apparence qui dépasse en plénitude tout ce que l’esprit de l’homme peut concevoir en lui : en se transfigurant devant ses apôtres, Jésus se présente à eux comme un homme qui, à la limite, ne serait plus homme, mais Dieu.

 

Sur la sainte montagne, Pierre est heureux! Jacques et Jean le sont aussi, mais il n’y a que Pierre qui ose le dire à Jésus. Vraiment, l’enthousiasme de Pierre fait de lui le témoin privilégié de cet événement. Et il veut que cela dure, longtemps, longtemps ! Si longtemps qu’il veut dresser des abris, des sortes de tentes, afin que Jésus, Moïse et Elie puissent demeurer là, devant lui, dans l’éclat et la splendeur de la Gloire !

 

Vraiment, la Transfiguration du Christ a marqué l’esprit de Pierre : c’est cela qu’il veut avoir devant les yeux, toujours, toujours, toujours… Et Pierre s’en souviendra encore longtemps, racontant l’événement dans sa deuxième épître, ainsi que je l’ai déjà dit. Ne serait-ce pas ce souvenir qu’il eut devant les yeux lorsqu’il mourut quelque trente ans plus tard, crucifié, non pas comme son Maître, mais la tête en bas ?

 

Rappelons-nous la mort du Pape Paul VI (qui, un jour, sera déclaré bienheureux) survenue le dimanche 6 août 1978, fête de la Transfiguration. Fidèle imitateur de son Seigneur, il portait dans son cœur la lumière du Mont Thabor, et avec cette lumière, il marcha jusqu’à la fin, portant sa croix avec une joie évangélique.  Sans doute, Pierre, le premier Pape, et son Successeur, le Pape Paul VI, sont-ils tous deux entrés dans la Gloire du Seigneur ayant dans l’esprit le souvenir de la Transfiguration de Jésus…

 

La Transfiguration de Jésus n’est qu’une étape, un chemin vers la Gloire du Ciel, une anticipation et un commencement d’éternité, si on peut ainsi parler. Le Chrétien vit déjà dans le Ciel par la foi, l’espérance, et la charité, mais il demeure toujours sur terre, obligé de suivre fidèlement la Loi de Dieu et les inspirations de l’Esprit du Seigneur. A la suite de Pierre, de Jacques et de Jean, nous devons tous écouter le Christ, notre Maître : dans le Ciel de notre âme, le Fils de Dieu nous rassasie de sa Parole, et dans notre corps, nous portons les marques de sa Passion par notre obéissance de la foi.

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