Par le père Thomas Rosica, C.S.B.
Les thèmes forts de la mort et de la résurrection imprègnent la lecture de l’évangile du cinquième dimanche du carême (année A). Le récit de la résurrection de Lazare dans l’Évangile de Jean (Jn 11, 1-45) se situe peu de temps avant que Jésus soit capturé, jugé et crucifié. Cet événement a directement conduit à la condamnation de Jésus par ceux qui cherchaient à le tuer.
Jésus fut informé de la maladie de son ami Lazare et il n’est pas allé le guérir. En fait il est arrivé plusieurs jours après la mort de Lazare. Il donnait à ses disciples des leçons au long de la route sur la lumière. Leçons incompréhensibles dans le contexte de la grave maladie et de la mort mais compréhensibles avec la lumière apportée par la résurrection de Lazare et du Christ.
Combien de fois avons-nous comme Marthe et Marie, lâché ces mêmes mots de douleur: « Seigneur, si seulement tu avais été là, mon frère, ou ma sœur, ou ma mère, ou mon père, ou mon ami ne serait pas mort. » Quel genre de Dieu terrible permettrait aux tragédies de prendre place dans notre monde ? L’évangile du jour nous dit quel genre de Dieu nous avons… un Dieu qui « gémit dans l’esprit et qui fut troublé ; un Dieu qui a pleuré sur la tombe de son ami Lazare et un Dieu qui est profondément ému par la commotion et le chagrin de tant d’amis de Marthe, Marie et Lazare. La fine pointe de toute la Bible se trouve dans ce récit évangélique : « Jésus pleura » (Jn 11, 35).
Jésus nous révèle un Dieu qui est avec nous dans la souffrance, le deuil et la mort… un Dieu qui pleure avec nous. Dieu n’intervient pas pour prévenir les tragédies et les souffrances de la vie, parce que Dieu nous aime trop. Si Dieu le faisait, alors Dieu ne serait pas Dieu. Et nous ne serions pas l’être humain libre que nous sommes. Si nous avions un Dieu qui se précipitait pour prévenir les tragédies humaines et les souffrances de la vie, la religion et la foi seraient tout simplement réduites à une forme de magie ou de destin, et nous serions des pions impuissants sur l’échiquier d’un dieu lunatique. Où est Dieu dans les drames humains ? Dieu est là au milieu de tout cela, en pleurs. Tel est notre Dieu.
Juste avant sa mort et sa résurrection, Jésus proclame les mots qui forment le cœur de l’Évangile d’aujourd’hui : « Je suis la résurrection et la vie » (Jn 11, 25). L’évêque du quatrième siècle Grégoire de Naziance (328-389) parle du miracle de Béthanie qui préfigure la mort et la résurrection de Jésus. Saint Grégoire écrit :
“Il prie, mais il entend nos prières. Il pleure, mais il met fin aux larmes.
Il demande où Lazare a été déposé, parce qu’il était un être humain ;
et il ressuscite Lazare, parce qu’Il est Dieu.
Comme un mouton il est mené à l’abattage
mais il est le pasteur d’Israël et maintenant du monde entier.
Il est meurtri et blessé,
mais il guérit de toute maladie et de toute infirmité.
Il est relevé et cloué à l’arbre,
mais par l’arbre de vie il nous renouvelle…
Il donne sa vie,
mais il a le pouvoir de la reprendre ;
et le voile est déchiré, pour que les mystérieuses portes du ciel soient ouvertes ;
Les pierres se fendent, les morts se lèvent.
Il meurt, mais il donne la vie, et sa mort détruit la mort.
Il est enterré, mais il ressuscite. »
Seul Celui qui est entré dans le royaume de la mort et qui a affronté la mort dans la bataille, peut donner la vie à ceux qui sont morts. Jean rapporte la résurrection de Lazare comme un signe qui transforme la tragédie en Espérance. La maladie et la mort de Lazare sont une occasion pour la manifestation de la gloire de Dieu. En tant que chrétiens, nous n’espérons pas échapper à la mort ; mais nous l’approchons avec la foi en la résurrection.