Retour dans cette émission sur le discours du Pape au corps diplomatique, et sur les 26 baptêmes administrés par le Pape lui-même en la chapelle Sixtine.
Discours du pape François à l’occasion des voeux du corps diplomatique accrédité près le Saint-Siège
Vous trouverez ci-dessous le texte complet du discours du pape François à l’occasion des voeux du corps diplomatique accrédité près le Saint-Siège:
Excellences, Mesdames et Messieurs,
Je vous adresse une cordiale bienvenue à ce rendez-vous annuel, qui m’offre l’opportunité de vous présenter mes vœux pour la nouvelle année, me permettant de réfléchir avec vous sur la situation de notre monde, béni et aimé de Dieu, pourtant tourmenté et affligé de nombreux maux. Je remercie le nouveau Doyen du Corps diplomatique, Son Excellence Monsieur Armindo Fernandes do Espírito Santo Vieira, Ambassadeur d’Angola, pour les aimables paroles qu’il m’a adressées au nom de tout le Corps diplomatique accrédité près le Saint-Siège, alors que je désire rappeler d’une façon spéciale – à presqu’un mois de leur disparition – les regrettés Ambassadeur de Cuba, Rodney Alejandro López Clemente, et du Libéria, Rudolf P. von Ballmoos.
L’occasion m’est offerte aussi d’adresser une pensée particulière à tous ceux qui participent pour la première fois à cette rencontre, relevant avec satisfaction que, au cours de l’année passée, le nombre d’Ambassadeurs résidant à Rome s’est encore accru. Il s’agit d’une indication significative de l’attention avec laquelle la Communauté internationale suit l’activité diplomatique du Saint-Siège. Les Accords internationaux souscrits ou ratifiés au cours de l’année qui vient de s’achever en sont une preuve supplémentaire. Je désire, en particulier, citer ici les ententes spécifiques en matière fiscale signées avec l’Italie et les États-Unis d’Amérique, qui témoignent de l’engagement accru du Saint-Siège en faveur d’une plus grande transparence dans les questions économiques. Non moins importants sont les accords de caractère général, en vue de réguler des aspects essentiels de la vie et de l’activité de l’Église dans les différents pays, comme l’entente signée à Díli avec la République du Timor-Oriental.
Je désire également rappeler l’échange des Instruments de ratification de l’Accord avec le Tchad sur l’état juridique de l’Église catholique dans le pays, comme aussi l’Accord signé et ratifié avec la Palestine. Il s’agit de deux accords qui, avec le Mémorandum d’Entente entre la Secrétairerie d’État et le Ministère des Affaires étrangères du Koweït, montrent, entre autre, comment le vivre-ensemble pacifique entre des personnes appartenant à des religions différentes est possible, là où la liberté religieuse est reconnue et où la possibilité effective de collaborer à l’édification du bien commun, dans le respect réciproque de l’identité culturelle de chacun, est garantie.
D’autre part, chaque expérience religieuse authentiquement vécue ne peut que promouvoir la paix. Noël, que nous venons de célébrer et où nous avons contemplé la naissance d’un enfant sans défense, « appelé : Conseiller merveilleux, Dieu-fort, Père-à-jamais, Prince-de-la-Paix » (cf. Is 9, 5), nous le rappelle. Le mystère de l’Incarnation nous montre le vrai visage de Dieu, pour qui puissance ne signifie pas force et destruction, mais bien amour ; justice ne signifie pas vengeance, mais bien miséricorde. C’est dans cette perspective que j’ai voulu proclamer le Jubilé extraordinaire de la Miséricorde, inauguré exceptionnellement à Bangui au cours de mon voyage apostolique au Kenya, en Ouganda et en République Centrafricaine. Dans un pays longuement éprouvé par la faim, la pauvreté et les conflits, où la violence fratricide des dernières années a laissé des blessures profondes dans les âmes, déchirant la communauté nationale et engendrant misère matérielle et morale, l’ouverture de la Porte Sainte de la Cathédrale de Bangui a voulu être un signe d’encouragement à élever le regard, à reprendre la route et à retrouver les raisons du dialogue. Là où l’on a abusé du nom de Dieu pour commettre l’injustice, j’ai voulu rappeler, avec la communauté musulmane de la République Centrafricaine, que « celui qui dit croire en Dieu doit être aussi un homme, une femme de paix » [1], et donc de miséricorde, puisqu’on ne peut jamais tuer au nom de Dieu. Seule une forme idéologique et déviée de la religion peut penser rendre justice au nom du Tout-Puissant, en massacrant délibérément des personnes sans défense, comme cela est arrivé dans les attentats terroristes sanglants des mois derniers en Afrique, en Europe et au Moyen-Orient.
La miséricorde a été comme le “fil conducteur” qui a guidé mes voyages apostoliques déjà au cours de l’année passée. Je me réfère surtout à la visite à Sarajevo, ville profondément blessée par la guerre dans les Balkans et capitale d’un pays, la Bosnie Herzégovine, qui revêt une signification spéciale pour l’Europe et pour le monde entier. Un tel carrefour de cultures, nations et religions s’efforce, avec des résultats positifs, de construire toujours de nouveaux ponts, de valoriser ce qui unit et de regarder les différences comme des opportunités de croissance dans le respect de tous. Cela est possible grâce au dialogue patient et confiant, qui sait faire siennes les valeurs de la culture de chacun et accueillir le bien provenant des expériences d’autrui [2].
Ma pensée va ensuite au voyage en Bolivie, en Équateur et au Paraguay, où j’ai rencontré des peuples qui ne se rendent pas face aux difficultés et affrontent avec courage, détermination et esprit de fraternité les nombreux défis qui les tourmentent, à commencer par la pauvreté diffuse et les inégalités sociales. Au cours du voyage à Cuba et aux États-Unis d’Amérique, j’ai pu embrasser deux pays qui ont été longuement divisés et qui ont décidé d’écrire une nouvelle page de l’histoire, en entreprenant un chemin de rapprochement et de réconciliation.
À Philadelphie, à l’occasion de la Rencontre mondiale des familles, comme aussi au cours du voyage au Sri Lanka et aux Philippines et avec le récent Synode des Évêques, j’ai rappelé l’importance de la famille, qui est la première et la plus importante école de miséricorde, où l’on apprend à découvrir le visage affectueux de Dieu et où notre humanité grandit et se développe. Malheureusement, nous connaissons les nombreux défis que la famille doit affronter en ce temps, où elle est « menacée par les efforts croissants de certains pour redéfinir l’institution-même du mariage à travers le relativisme, la culture de l’éphémère et un manque d’ouverture à la vie » [3]. Il y a aujourd’hui une peur diffuse face au caractère définitif que la famille exige et en font les frais surtout les plus jeunes, souvent fragiles et désorientés, et les personnes âgées qui finissent par être oubliées et abandonnées. Au contraire, « de la fraternité vécue en famille, naît (…) la solidarité dans la société » [4], qui nous porte à être responsable les uns des autres. Cela est possible seulement si dans nos maisons, de même que dans nos sociétés, nous ne laissons pas se sédimenter les peines et les ressentiments, mais donnons place au dialogue, qui est le meilleur antidote à l’individualisme si largement répandu dans la culture de notre temps.
Intentions de prière du pape François – Janvier 2016
Voici les intentions de prière du pape François pour le mois de janvier 2016, confiées au Réseau mondial de prière du Pape (Apostolat de la prière).
Intention de prière universelle : Pour que le dialogue sincère entre les hommes et les femmes de différentes religions porte des fruits de paix et de justice.
Intention de prière pour l’évangélisation : Pour qu’avec la grâce de l’Esprit Saint, les divisions entre chrétiens soient surmontées par le dialogue et la charité chrétienne.
Homélie du pape François lors de la Messe de l’Épiphanie
Les paroles du Prophète Isaïe – adressées à la ville sainte de Jérusalem – nous appellent à nous lever, à sortir, sortir de nos fermetures, sortir de nous-mêmes, et à reconnaître la splendeur de la lumière qui illumine notre existence : « Debout, Jérusalem, resplendis ! Elle est venue ta lumière, et la gloire du Seigneur s’est levée sur toi » (60,1). “Ta lumière”, c’est la gloire du Seigneur. L’Église ne doit pas croire qu’elle brille de sa propre lumière ; elle ne le doit pas. Saint Ambroise le rappelle dans une belle expression, en utilisant la lune comme métaphore de l’Église : « L’Église est véritablement comme la lune: […] elle brille non pas de sa propre lumière, mais de celle du Christ. Elle tire sa splendeur du Soleil de justice, de sorte que l’on peut dire : “Ce n’est plus moi qui vit mais le Christ qui vit en moi” » (Exameron, IV, 8, 32). Le Christ est la vraie lumière qui éclaire ; et dans la mesure où l’Église demeure ancrée en lui, dans la mesure où l’Eglise se laisse éclairer par lui, elle parvient à éclairer la vie des personnes et des peuples. C’est pourquoi les saints Pères reconnaissaient dans l’Église le “mysterium lunae”.
Nous avons besoin de cette lumière qui vient d’en haut pour correspondre de manière cohérente à la vocation que nous avons reçue. Annoncer l’Évangile du Christ n’est pas un choix que nous pourrions faire parmi tant d’autres, ce n’est pas non plus une profession. Pour l’Église, être missionnaire ne signifie pas faire du prosélytisme. Pour l’Église, être missionnaire revient à exprimer sa nature même : être illuminée par Dieu et réfléchir sa lumière. C’est cela son service. Il n’y a pas d’autre voie. La mission est sa vocation : faire resplendir la lumière du Christ est son service. Combien de personnes attendent de nous cet engagement missionnaire, parce qu’elles ont besoin du Christ, elles ont besoin de connaître le visage du Père.
Les Mages, dont parle l’Évangile de Matthieu, sont un témoignage vivant du fait que les semences de vérité sont présentes partout, parce qu’elles sont un don du créateur qui appelle chacun à le reconnaître comme Père bon et fidèle. Les Mages représentent les hommes de partout dans le monde, qui sont accueillis dans la maison de Dieu. Devant Jésus il n’existe plus aucune division de race, de langue ni de culture : dans cet Enfant, toute l’humanité trouve son unité. Et l’Église a la tâche de reconnaître et de faire apparaître de manière plus claire le désir de Dieu que chacun porte en soi. C’est le service de l’Église, avec la lumière qu’elle réfléchit, faire apparaître le désire de Dieu que chacun porte en soi. Comme les Mages beaucoup de personnes, aussi de nos jours, vivent avec le “cœur inquiet” qui continue à interroger sans trouver de réponses certaines – c’est l’inquiétude de l’Esprit Saint qui se meut dans les cœurs. Elles sont encore à la recherche de l’Étoile qui indique la route vers Bethléem.
Combien d’étoiles il y a dans le ciel ! Et pourtant, les Mages en ont suivi une autre, nouvelle, qui brillait pour eux beaucoup plus. Ils avaient scruté longtemps le grand livre du ciel pour trouver une réponse à leurs interrogations – ils avaient le cœur inquiet –, et finalement la lumière était apparue. Cette étoile les a changés. Elle leur a fait oublier leurs intérêts quotidiens, et ils se sont mis tout de suite en chemin. Ils ont écouté une voix qui, de l’intérieur, les poussait à suivre cette lumière – la voix de l’Esprit Saint qui opère chez toutes les personnes –; et elle les a guidés jusqu’à ce qu’ils trouvent le roi des juifs dans une pauvre maison de Bethléem.
Tout cela est un enseignement pour nous. Aujourd’hui, répéter la question des Mages nous fera du bien : « Où est le roi des juifs qui vient de naître ? Nous avons vu son étoile à l’Orient et nous sommes venus nous prosterner devant lui » (Mt 2, 2). Nous sommes sollicités, surtout à une époque comme la nôtre, à nous mettre à la recherche des signes que Dieu offre, sachant qu’ils demandent notre engagement pour les déchiffrer, et comprendre ainsi sa volonté. Nous sommes interpellés à aller à Bethléem pour trouver l’Enfant et sa Mère. Suivons la lumière que Dieu nous offre – toute petite… ; l’hymne du bréviaire nous dit de manière poétique que les Mages lumen requirunt lumine : c’est une petite lumière –, la lumière qui émane du visage du Christ, plein de miséricorde et de fidélité. Et, une fois arrivés devant lui, adorons-le de tout notre cœur, et présentons-lui nos dons : notre liberté, notre intelligence, notre amour. La vraie sagesse se cache dans le visage de cet Enfant. C’est là, dans la simplicité de Bethléem, que se trouve résumée la vie de l’Église. C’est là la source de cette lumière, qui attire à elle toute personne dans le monde, et oriente le chemin des peuples sur la voie de la paix.
[00012-FR.02] [Texte original: Italien]
Échos du Vatican
Revivez dans cette émission le passage à la nouvelle année au Vatican, et l’ouverture de la quatrième et dernière porte sainte à Rome.
Homélie du pape François lors de la Messe d’ouverture de la Porte de la miséricorde à la basilique Sainte-Marie-Majeure de Rome
Salve, Mater misericordiae!
C’est avec ce salut que nous voulons nous tourner vers la Vierge Marie dans la Basilique romaine qui lui est dédiée avec le titre de Mère de Dieu. C’est le début d’une hymne antique, que nous chanterons à la fin de cette Eucharistie, remontant à un auteur inconnu et arrivé jusqu’à nous comme une prière qui jaillit spontanément du cœur des croyants : “Salut, Mère de miséricorde, Mère de Dieu et Mère du pardon, Mère de l’espérance et Mère de la grâce, Mère remplie d’une sainte joie”. Dans ces quelques paroles se trouve la synthèse de la foi de générations de personnes qui, gardant leurs yeux fixés sur l’icône de la Vierge, lui demandent l’intercession et la consolation.
Il est plus que jamais approprié qu’en ce jour nous invoquions la Vierge Marie, par-dessus tout comme Mère de la miséricorde. La Porte Sainte que nous avons ouverte est de fait une Porte de la Miséricorde. Quiconque passe ce seuil est appelé à s’immerger dans l’amour miséricordieux du Père, avec une pleine confiance et sans aucune crainte ; et il peut repartir de cette Basilique avec la certitude qu’il aura à ses côtés la compagnie de Marie. Elle est Mère de la miséricorde, parce qu’elle a engendré dans son sein le Visage même de la divine miséricorde, Jésus, l’Emmanuel, Celui qui est attendu par tous les peuples, le « prince de la paix » (Is 9,5). Le Fils de Dieu fait chair pour notre salut, nous a donné sa Mère qui, avec nous, se fait pèlerine pour que nous ne soyons jamais seuls sur le chemin de notre vie, surtout dans les moments d’incertitude et de souffrance.
Marie est Mère de Dieu qui pardonne, qui donne le pardon, et pour cela nous pouvons dire qu’elle est Mère du pardon. Cette parole – “pardon” – bien incomprise de la mentalité mondaine, indique par contre le fruit propre, original de la foi chrétienne. Celui qui ne sait pas pardonner n’a pas encore connu la plénitude de l’amour. Et seul celui qui aime vraiment est en mesure d’arriver jusqu’au pardon, en oubliant l’offense reçue. Au pied de la Croix, Marie voit son Fils qui s’offre totalement et témoigne ainsi ce que signifie aimer comme Dieu aime. En ce moment elle entend prononcer par Jésus des paroles qui viennent probablement de ce qu’elle-même lui avait enseigné dès qu’il était enfant : « Père, pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu’ils font » (Lc 23, 34). En ce moment, Marie est devenue pour nous tous Mère du pardon. Elle-même, à l’exemple de Jésus et avec sa grâce, a été capable de pardonner à tous ceux qui étaient en train de faire mourir son Fils innocent.
Pour nous, Marie devient une icône de la manière dont l’Église doit étendre le pardon à tous ceux qui le demandent. La Mère du pardon enseigne à l’Église que le pardon offert sur le Golgotha ne connaît pas de limites. La loi avec ses subtilités ne peut l’arrêter, ni la sagesse de ce monde avec ses distinctions. Le pardon de l’Église doit avoir la même extension que celui de Jésus sur la Croix, et de Marie à ses pieds. Il n’y a pas d’alternative. C’est pourquoi l’Esprit Saint a rendu les apôtres instruments efficaces du pardon, afin que tout ce qui a été obtenu par la mort de Jésus puisse rejoindre tout homme en tout lieu et en tout temps (cf. Jn 20, 19-23).
L’hymne marial, enfin, continue en disant : «Mère de l’espérance et Mère de la grâce, Mère remplie d’une sainte joie ». L’espérance, la grâce et la sainte joie sont sœurs : toutes sont du Christ, et même, elles sont d’autres de ses noms, écrits, pour ainsi dire, dans sa chair. Le cadeau que Marie nous donne en nous donnant Jésus Christ est celui du pardon qui renouvelle la vie, qui vous permet d’accomplir de nouveau la volonté de Dieu, et qui remplit la vie d’un vrai bonheur. Cette grâce ouvre le cœur pour regarder l’avenir avec la joie de celui qui espère. C’est l’enseignement qui provient aussi du Psaume : « Crée en moi un cœur pur, ô mon Dieu, renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit. […] Rends-moi la joie d’être sauvé » (50, 12.14). La force du pardon est le véritable antidote à la tristesse provoquée par la rancune et la vengeance. Le pardon ouvre à la joie et à la sérénité parce qu’il libère l’âme des pensées de mort, tandis que la rancune et la vengeance poussent l’esprit à la révolte et déchirent le cœur, lui ôtant le repos et la paix.
Franchissons donc la Porte Sainte de la Miséricorde avec la certitude de la compagnie de la Vierge Mère, la Sainte Mère de Dieu, qui intercède pour nous. Laissons-nous accompagner par elle pour redécouvrir la beauté de la rencontre avec son Fils Jésus. Ouvrons tout grand notre cœur à la joie du pardon, conscients de l’espérance confiante qui nous est rendue, pour faire de notre existence quotidienne un humble instrument de l’amour de Dieu.
Et avec l’amour des enfants acclamons-la avec les paroles mêmes du peuple d’Éphèse, au temps du Concile historique : “Sainte Mère de Dieu !”.
Homélie du pape François lors de la Messe de la Solennité de Sainte Marie, Mère de Dieu
Vous trouverez ci-dessous le texte complet de l’homélie du pape François prononcée lors de la Messe de la Solennité de la Mère de Dieu:
Nous avons entendu les paroles de l’apôtre Paul : « Lorsqu’est venue la plénitude des temps, Dieu a envoyé son Fils, né d’une femme » (Ga 4, 4).
Que signifie le fait que Jésus naisse à “ la plénitude des temps ” ? Si notre regard se dirige vers le moment historique, nous pouvons vite rester déçus. Rome dominait sur une grande partie du monde connu par sa puissance militaire. L’empereur Auguste était arrivé au pouvoir après avoir combattu cinq guerres civiles. Même Israël avait été conquis par l’empereur romain et le peuple élu était privé de liberté. Pour les contemporains de Jésus, par conséquent, ce n’était certainement pas le temps le meilleur. Ce n’est donc pas vers la sphère géopolitique que l’on doit regarder pour définir le sommet du temps.
Une autre interprétation est alors nécessaire, qui comprenne la plénitude à partir de Dieu. Lorsque Dieu établit que le moment d’accomplir la promesse faite est arrivé, alors pour l’humanité se réalise la plénitude des temps. Donc, ce n’est pas l’histoire qui décide de la naissance du Christ ; c’est, plutôt, sa venue dans le monde qui permet à l’histoire d’atteindre sa plénitude. C’est pour cela qu’à partir de la naissance du Fils de Dieu, commence le calcul d’une nouvelle ère, celle qui voit l’accomplissement de l’antique promesse. Comme écrit l’auteur de la Lettre aux Hébreux : « À bien des reprises et de bien des manières, Dieu, dans le passé, a parlé à nos pères par les prophètes ; mais à la fin, en ces jours où nous sommes, il nous a parlé par son Fils qu’il a établi héritier de toutes chose et par qui il a créé les mondes. [Il est le] rayonnement de la gloire de Dieu, expression parfaite de son être, et porte l’univers par sa parole puissante » (1, 1-3). La plénitude des temps, donc, est la présence de Dieu personnellement dans notre histoire. Maintenant, nous pouvons voir sa gloire qui resplendit dans la pauvreté d’une étable, et être encouragés et soutenus par son Verbe qui s’est fait “petit” dans un enfant. Grâce à Lui, notre temps peut trouver sa plénitude. Notre temps personnel aussi trouvera sa plénitude dans la rencontre avec Jésus-Christ, Dieu fait homme.
Cependant, ce mystère semble contraster avec la dramatique expérience historique. Chaque jour, tandis que nous voudrions être soutenus par des signes de la présence de Dieu, nous devons rencontrer des signes opposés, négatifs, qui le font plutôt sentir comme absent. La plénitude des temps semble s’effriter devant les multiples formes d’injustice et de violence qui blessent chaque jour l’humanité. Parfois nous nous demandons : comment est-il possible que perdure le mépris de l’homme par l’homme ?, que l’arrogance du plus fort continue à humilier le plus faible, le reléguant aux marges les plus sordides de notre monde ? Jusqu’à quand la méchanceté humaine sèmera sur la terre violence et haine, provoquant d’innocentes victimes ? Comment ce peut être le temps de la plénitude, ce que nous donnent à voir des multitudes d’hommes, de femmes et d’enfants qui fuient la guerre, la faim, la persécution, disposés à risquer leur vie pour voir respectés leurs droits fondamentaux ? Un fleuve de misère, alimenté par le péché, semble contredire la plénitude des temps réalisée par le Christ. Rappelez-vous, chers pueri cantores, c’était la troisième question que vous m’avez posée hier : comment cela s’explique… Les enfants aussi se rendent compte de cela.
Pourtant, ce fleuve en crue ne peut rien contre l’océan de miséricorde qui inonde notre monde. Nous sommes tous appelés à nous immerger dans cet océan, à nous laisser régénérer, pour vaincre l’indifférence qui empêche la solidarité, et sortir de la fausse neutralité qui empêche le partage. La grâce du Christ, qui porte l’attente du salut à son accomplissement, nous pousse à devenir ses coopérateurs dans la construction d’un monde plus juste et fraternel, où chaque personne et chaque créature puisse vivre en paix, dans l’harmonie de la création originaire de Dieu.
Au début d’une nouvelle année, l’Église nous fait contempler la maternité divine de Marie comme icône de paix. L’antique promesse s’accomplit en sa personne. Elle a cru aux paroles de l’Ange, elle a conçu le Fils, elle est devenue Mère du Seigneur. À travers elle, à travers son “oui”, est arrivée la plénitude des temps. L’Évangile que nous avons entendu dit que la Vierge « retenait tous ces évènements et les méditait dans son cœur » (Lc 2, 19). Elle se présente à nous comme un vase toujours rempli de la mémoire de Jésus, Siège de la Sagesse, où puiser pour avoir l’interprétation cohérente de son enseignement. Aujourd’hui, elle nous offre la possibilité de saisir le sens des événements qui nous touchent personnellement, qui touchent nos familles, nos pays et le monde entier. Là où ne peut arriver la raison des philosophes ni les négociations de la politique, là peut arriver la force de la foi qui porte la grâce de l’Évangile du Christ, et qui peut toujours ouvrir de nouvelles voies à la raison et aux négociations.
Bienheureuse es-tu, Marie, parce que tu as donné au monde le Fils de Dieu ; mais encore plus heureuse es-tu pour avoir cru en Lui. Pleine de foi, tu as conçu Jésus d’abord dans ton cœur et puis dans ton sein, pour devenir Mère de tous les croyants (cf. Augustin, Sermon 215, 4). Mère, étends sur nous ta bénédiction en ce jour qui t’est consacré ; montre-nous le visage de ton Fils Jésus, qui donne au monde entier miséricorde et paix. Amen.
Homélie du pape François lors de la Messe de la Sainte Famille
Vous trouverez ci-dessous le texte de l’homélie du pape François lors de la Messe de la solennité de la sainte famille.
Les lectures bibliques que nous avons écoutées nous ont présenté l’image de deux familles qui accomplissent leur pèlerinage vers la maison de Dieu. Elkana et Anne portent leur fils Samuel au temple de Silo et le consacrent au Seigneur (cf. 1 Sam 1, 20-22.24-28). De la même manière, Joseph et Marie, pour la fête de la Pâque, se font pèlerins à Jérusalem avec Jésus (cf. Lc 2, 41-52).
Nous avons souvent sous les yeux les pèlerins qui se rendent aux sanctuaires et aux lieux chers à la piété populaire. En ces jours, beaucoup se sont mis en chemin pour rejoindre la Porte Sainte ouverte dans toutes les cathédrales du monde et aussi dans de nombreux sanctuaires. Mais la chose la plus belle mise en relief aujourd’hui par la Parole de Dieu est que toute la famille accomplit le pèlerinage. Papa, maman et les enfants, ensemble, se rendent à la maison du Seigneur pour sanctifier la fête par la prière. C’est un enseignement important qui est offert aussi à nos familles. Nous pouvons même dire que la vie de la famille est un ensemble de petits et de grands pèlerinages.
Par exemple, comme cela nous fait du bien de penser que Marie et Joseph ont enseigné à Jésus à réciter les prières ! Et cela est un pèlerinage, le pèlerinage de l’éducation à la prière. Et cela nous fait aussi du bien de savoir que durant la journée ils priaient ensemble ; et qu’ensuite le samedi, ils allaient ensemble à la synagogue pour écouter les Écritures de la Loi et des Prophètes et louer le Seigneur avec tout le peuple. Et certainement durant le pèlerinage vers Jérusalem, ils ont prié en chantant avec les paroles du Psaume : « Quelle joie quand on m’a dit : “Nous irons à la maison du Seigneur!”. Maintenant notre marche prend fin devant tes portes, Jérusalem ! » (122, 1- 2).
Comme il est important pour nos familles de marcher ensemble et d’avoir un même but à atteindre ! Nous savons que nous avons un parcours commun à accomplir ; une route où nous rencontrons des difficultés mais aussi des moments de joie et de consolation. Dans ce pèlerinage de la vie, nous partageons aussi le moment de la prière. Qu’y-a-t-il de plus beau pour un papa et une maman que de bénir leurs enfants au début de la journée et à sa conclusion ? Tracer sur leur front le signe de la croix comme le jour du Baptême. N’est-ce pas peut-être la prière la plus simple des parents pour leurs enfants ? Les bénir, c’est-à-dire les confier au Seigneur, comme l’ont fait Elkana et Anne, Joseph et Marie, pour qu’il soit leur protection et leur soutien dans les différents moments de la journée. Comme il est important pour la famille de se retrouver aussi pour un bref moment de prière avant de prendre ensemble les repas, pour remercier le Seigneur de ces dons, et pour apprendre à partager ce qui est reçu avec celui qui est davantage dans le besoin. Ce sont de tout- petits gestes qui expriment cependant le rôle de formation que possède la famille dans le pèlerinage de tous les jours.
Au terme de ce pèlerinage, Jésus retourne à Nazareth et il était soumis à ses parents (cf. Lc 2, 51). Cette image contient aussi un bel enseignement pour nos familles. Le pèlerinage, en effet, ne finit pas quand on arrive au but du sanctuaire, mais quand on revient à la maison et qu’on reprend la vie de tous les jours, mettant en acte les fruits spirituels de l’expérience vécue. Nous savons ce que Jésus avait fait cette fois. Au lieu de revenir à la maison avec les siens, il s’était arrêté à Jérusalem dans le Temple, causant une grande peine à Marie et à Joseph qui ne le trouvaient plus. Pour cette “escapade”, Jésus a dû aussi probablement faire des excuses à ses parents. L’Évangile ne le dit pas, mais je crois que nous pouvons le supposer. La question de Marie, d’ailleurs, manifeste une certaine réprobation, rendant évidente sa préoccupation et son angoisse ainsi que celle de Joseph. Revenant à la maison, Jésus s’est certainement soumis à eux pour montrer toute son affection et son obéissance. Ces moments qui, avec le Seigneur, se transforment en opportunité de croissance, en occasion de demander pardon et de le recevoir, de montrer l’amour et de l’obéissance, font aussi partie du pèlerinage de la famille.
Au cours de l’Année de la Miséricorde, que chaque famille chrétienne puisse devenir un lieu privilégié de ce pèlerinage où s’expérimente la joie du pardon. Le pardon est l’essence de l’amour qui sait comprendre l’erreur et y porter remède. Pauvres de nous si Dieu ne nous pardonnait pas ! C’est à l’intérieur de la famille qu’on s’éduque au pardon, parce qu’on a la certitude d’être compris et soutenus malgré les erreurs qui peuvent se commettre.
Ne perdons pas confiance dans la famille ! C’est beau de s’ouvrir toujours le cœur les uns aux autres, sans rien cacher. Là où il y a l’amour, là aussi il y a compréhension et pardon. Je confie à vous toutes, chères familles, ce pèlerinage domestique de tous les jours, cette mission si importante, dont le monde et l’Église ont plus que jamais besoin.
[02282-FR.01] [Texte original: Italien]
Allocution du pape François lors de la bénédiction Ubi et Orbi
Vous trouverez ci-dessous le texte officiel français de l’allocution du pape François lors de la traditionnelle bénédiction Ubi et Orbi:
«Chers frères et sœurs, joyeux Noël !
Christ est né pour nous, exultons en ce jour de notre salut !
Ouvrons nos cœurs pour recevoir la grâce de ce jour, qu’il est lui-même : Jésus est le “ jour ” lumineux qui est apparu à l’horizon de l’humanité. Jour de miséricorde, dans lequel Dieu le Père a révélé à l’humanité son immense tendresse. Jour de lumière qui dissipe les ténèbres de la peur et de l’angoisse. Jour de paix, où il devient possible de se rencontrer, de dialoguer, de se réconcilier. Jour de joie : une « grande joie » pour les petits et les humbles, et pour tout le peuple (cf. Lc 2, 10).
En ce jour, de la Vierge Marie, est né Jésus, le Sauveur. La crèche nous fait voir le « signe » que Dieu nous a donné : « un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire » (Lc 2, 12). Comme les bergers de Bethléem, nous aussi allons voir ce signe, cet événement qui se renouvelle dans l’Église chaque année. Noël est un événement qui se renouvelle dans chaque famille, dans chaque paroisse, dans chaque communauté qui accueille l’amour de Dieu incarné en Jésus Christ. Comme Marie, l’Église montre à tous le « signe » de Dieu : l’Enfant qu’elle a porté dans son sein et a enfanté, mais qui est le Fils du Très-Haut, parce que « il vient de l’Esprit Saint » (Mt 1, 20). C’est pourquoi il est le Sauveur, parce qu’il est l’Agneau de Dieu qui prend sur lui le péché du monde (cf. Jn 1, 29). Avec les bergers, prosternons-nous devant l’Agneau, adorons la Bonté de Dieu faite chair, et laissons des larmes de repentir remplir nos yeux et laver notre cœur. Nous en avons tous besoin !
Lui seul, Lui seul peut nous sauver. Seule la Miséricorde de Dieu peut libérer l’humanité de nombreuses de formes de mal, aux visages monstrueux, que l’égoïsme engendre en elle. La grâce de Dieu peut convertir les cœurs et ouvrir des voies de sortie de situations humainement insolubles.
Là où naît Dieu, naît l’espérance. C’est Lui qui porte l’espérance. Là où naît Dieu, naît la paix. Et là où naît la paix, il n’y a plus de place pour la haine et pour la guerre. Pourtant même là où est venu au monde le Fils de Dieu fait chair, des tensions et des violences continuent et la paix reste à don à invoquer et à construire. Qu’Israéliens et Palestiniens puissent reprendre un dialogue direct et arriver à une entente qui permette aux deux peuples de vivre en harmonie, dépassant un conflit qui les a longuement opposés, avec de graves répercussions sur toute la région.
Au Seigneur, nous demandons que l’entente intervenue au sein des Nations Unies parvienne le plus tôt possible à faire taire le vacarme des armes en Syrie et à remédier à la très grave situation humanitaire de la population épuisée. Il est aussi urgent que l’accord sur la Libye obtienne le soutien de tous, afin que soient dépassées les graves divisions et les violences qui affligent le pays. Que l’attention de la Communauté internationale soit unanimement dirigée à faire cesser les atrocités qui, aussi bien dans ces pays qu’en Irak, au Yémen et dans l’Afrique subsaharienne, fauchent encore de nombreuses victimes, causent d’effroyables souffrances et n’épargnent pas non plus le patrimoine historique et culturel de peuples entiers. Ma pensée va aussi à tous ceux qui ont été touchés par d’atroces actions terroristes, particulièrement par les récents attentats survenus sous les cieux d’Égypte, à Beyrouth, Paris, Bamako et Tunis.
À nos frères, persécutés dans de nombreuses parties du monde à cause de la foi, que l’Enfant-Jésus donne consolation et force. Ce sont mos martyrs d’aujourd’hui.
Nous demandons paix et concorde pour les chères populations de la République démocratique du Congo, du Burundi et du Sud Soudan afin que, par le dialogue, se renforce l’engagement commun pour l’édification de sociétés civiles animées d’un esprit sincère de réconciliation et de compréhension réciproque.
Que Noël apporte aussi une paix véritable à l’Ukraine, offre soulagement à ceux qui subissent les conséquences du conflit et inspire la volonté de porter à leur achèvement les accords pris, pour rétablir la concorde dans le pays tout entier.
Que la joie de ce jour illumine les efforts du peuple colombien pour que, animé par l’espérance, il continue avec ardeur à poursuivre la paix désirée.
Là où naît Dieu, naît l’espérance ; et là où naît l’espérance, les personnes retrouvent la dignité. Pourtant, encore aujourd’hui de nombreux hommes et femmes sont privés de leur dignité humaine et, comme l’Enfant-Jésus, souffrent du froid, de la pauvreté et du refus des hommes. Que notre proximité rejoigne aujourd’hui ceux qui sont le plus sans défense, surtout les enfants-soldats, les femmes qui subissent des violences, les victimes de la traite des personnes et du narcotrafic.
Que notre réconfort ne manque pas à tous ceux qui fuient la misère ou la guerre, voyageant dans des conditions trop souvent inhumaines et risquant souvent leur vie. Que soient récompensés avec d’abondantes bénédictions tous ceux qui, simples personnes et États, s’emploient avec générosité à secourir et à accueillir les nombreux migrants et réfugiés, les aidant à construire un avenir digne pour eux et pour leurs proches et à s’intégrer à l’intérieur des sociétés qui les reçoivent.
En ce jour de fête, que le Seigneur redonne espérance à tous ceux qui n’ont pas de travail – il y en a tellement ! – et soutienne l’engagement de tous ceux qui ont des responsabilités publiques dans le domaine politique et économique pour qu’ils mettent tout en œuvre afin de poursuivre le bien commun et protéger la dignité de toute vie humaine.
Là où naît Dieu, fleurit la miséricorde. Elle est le don le plus précieux que Dieu nous fait, particulièrement en cette année jubilaire, durant laquelle nous sommes appelés à découvrir la tendresse que Notre Père céleste a envers chacun de nous. Que le Seigneur donne particulièrement aux détenus d’expérimenter son amour miséricordieux qui soigne les blessures et vainc le mal.
Et ainsi aujourd’hui ensemble, exultons dans le jour de notre salut. En contemplant la crèche, fixons notre regard sur les bras ouverts de Jésus qui nous montrent l’étreinte miséricordieuse de Dieu, tandis que nous écoutons les vagissements de l’Enfant qui nous susurre : « À cause de mes frères et de mes proches, je dirai : “ Paix sur toi ! ” » (Ps 121 [122], 8).»
Homélie du pape François pour la Messe de minuit
Vous trouverez ci-dessous l’homélie du pape François lors de la Messe de la veille de Noël en la Basilique Saint-Pierre de Rome:
En cette nuit, resplendit une « grande lumière » (Is 9, 1) ; sur nous tous brille la lumière de la naissance de Jésus. Comme les paroles du prophète Isaïe que nous avons écoutées sont vraies et actuelles : « Tu as prodigué la joie, tu as fait grandir l’allégresse » (9, 2) ! Notre cœur était déjà rempli de joie par l’attente de ce moment, mais maintenant, ce sentiment est multiplié et surabonde, parce que la promesse s’est accomplie, finalement elle s’est réalisée. Joie et allégresse nous assurent que le message contenu dans le mystère de cette nuit vient vraiment de Dieu. Il n’y a pas de place pour le doute ; laissons-le aux sceptiques qui, pour interroger seulement la raison, ne trouvent jamais la vérité. Il n’y a pas de place pour l’indifférence qui domine dans le cœur de celui qui ne réussit pas à aimer parce qu’il a peur de perdre quelque chose. Toute tristesse est bannie, parce que l’Enfant Jésus est le véritable consolateur du cœur.
Aujourd’hui, le Fils de Dieu est né : tout change. Le Sauveur du monde vient pour se faire participant de notre nature humaine ; nous ne sommes plus seuls ni abandonnés. La Vierge nous offre son Fils comme principe d’une vie nouvelle. La lumière vient éclairer notre existence, souvent enfermée dans l’ombre du péché. Aujourd’hui découvrons d’une façon nouvelle qui nous sommes ! En cette nuit, nous est rendu manifeste le chemin à parcourir pour rejoindre le but. Maintenant, toute peur et toute frayeur doivent cesser, parce que la lumière nous indique la route vers Bethléem. Nous ne pouvons demeurer inertes. Il ne nous est pas permis de rester arrêtés. Nous devons aller voir notre Sauveur déposé dans une mangeoire. Voilà le motif de la joie et de l’allégresse : cet Enfant est « né pour nous », il nous est « donné à nous », comme l’annonce Isaïe (cf. 9, 5). À un peuple qui depuis deux mille ans parcourt toutes les routes du monde pour rendre chaque homme participant de cette joie, est confiée la mission de faire connaître le « Prince de la paix » et devenir son instrument efficace au milieu des nations.
Et donc, quand nous entendons parler de la naissance du Christ, restons en silence et laissons parler cet Enfant ; imprimons dans notre cœur ses paroles sans détourner notre regard de son visage. Si nous le prenons dans nos bras et si nous nous laissons embrasser par lui, il nous apportera la paix du cœur qui n’aura jamais de fin. Cet Enfant nous enseigne quelle est la chose vraiment essentielle dans notre vie. Il naît dans la pauvreté du monde, parce qu’il n’y a pas de place à l’hôtellerie pour lui et sa famille. Il trouve abri et soutien dans une étable, et il est déposé dans une mangeoire pour animaux. Pourtant, de ce rien, émerge la lumière de la gloire de Dieu. À partir de là, pour les hommes au cœur simple, commence le chemin de la libération véritable et du rachat éternel. De cet Enfant, qui porte imprimés sur son visage les traits de la bonté, de la miséricorde et de l’amour de Dieu le Père, jaillit pour nous tous, ses disciples, comme l’enseigne l’apôtre Paul, l’engagement à « renoncer à l’impiété » et à la richesse du monde, pour vivre « de manière raisonnable, avec justice et piété » (Tt 2, 12).
Dans une société souvent éprise de consommation et de plaisir, d’abondance et de luxe, d’apparence et de narcissisme, Lui nous appelle à un comportement sobre, c’est-à-dire simple, équilibré, cohérent, capable de saisir et de vivre l’essentiel. Dans un monde qui est trop souvent dur avec le pécheur et mou avec le péché, il faut cultiver un fort sens de la justice, de la recherche et de la mise en pratique de la volonté de Dieu. Dans une culture de l’indifférence qui finit souvent par être impitoyable, que notre style de vie soit au contraire plein de piété, d’empathie, de compassion, de miséricorde, puisées chaque jour au puits de la prière.
Comme pour les bergers de Bethléem, que nos yeux puissent aussi être pleins d’étonnement et d’émerveillement, contemplant dans l’Enfant-Jésus le Fils de Dieu. Et, devant Lui, que jaillisse de nos cœurs l’invocation : « Montre-nous, Seigneur, ta miséricorde, et donne-nous ton salut » (Ps 85, 8).
[02277-FR.01] [Texte original: Français]