Homélie du pape François lors de la Messe à la Basilique de Guadalupe

Le pape François a célébré la Messe au Sanctuaire Notre-Dame de Guadalupe à Mexico. Voici son homélie à l’occasion de cette célébration dans la Basilique:

Homélie du Saint-Père

Messe dans la Basilique de Guadalupe

Samedi 13 février 2016

Nous avons entendu comment Marie a été à la rencontre de sa cousine Elisabeth. En hâte, sans hésiter, sans tarder, elle va assister sa parente dans les derniers mois de sa grossesse.

La rencontre avec l’ange ne retient pas Marie, car elle ne s’est pas sentie privilégiée, ni ne devait s’éloigner de la vie de ses proches. Au contraire, cette rencontre a ravivé et suscité une attitude qui fait et fera se souvenir toujours de Marie : la femme du oui, un oui du don d’elle-même à Dieu, et en en même temps, un oui du don à ses frères. C’est le oui qui l’a poussée à donner le meilleur en se mettant en route vers les autres.

Ecouter ce passage évangélique dans cette maison a une saveur spéciale. Marie, la femme du oui, a voulu également visiter les habitants de cette terre d’Amérique à travers la personne de l’indio saint Juan Diego. Tout comme elle a parcouru les routes de Judée et de Galilée, de la même manière, elle a sillonné le Tepeyac, revêtant ses costumes, utilisant sa langue, pour servir cette grande Nation. Tout comme elle a offert sa compagnie durant la grossesse d’Elisabeth, de même elle a accompagné et accompagne la gestation de cette terre mexicaine bénie. Tout comme elle s’est fait présente au petit Juan, de la même manière, elle continue d’être présente à nous tous ; surtout à ceux qui, comme lui, sentent « qu’ils ne valaient rien » (cf. Nican Mopohua, 55).  Ce choix particulier, disons préférentiel, n’a été contre personne mais en faveur de tous. Le petit indio Juan qui se désignait lui-même comme « mecapal, cacaxtle, queue, aile, entièrement dépendant d’autrui » (cf. Ibid, 55), devenait « l’ambassadeur, vraiment digne de confiance ».

Ce matin de décembre 1531, se produisait le premier miracle qui sera ensuite la mémoire vivante de tout ce que Sanctuaire protège. Ce matin-là, lors de cette rencontre, Dieu a éveillé l’espérance de son enfant Juan, l’espérance de son peuple. Ce matin, Dieu a réveillé et réveille l’espérance des petits, des souffrants, des déplacés et des marginalisés, de tous ceux qui sentent qu’ils n’ont pas une place digne sur cette terre. Ce matin, Dieu s’est approché et s’approche du cœur souffrant mais endurant de tant de mères, pères, grands-parents, qui ont vu leurs enfants partir, se perdre, voire être arrachés de manière criminelle.

Ce matin-là, le petit Juan expérimente dans sa propre vie ce qu’est l’espérance, ce qu’est la miséricorde de Dieu. Il est choisi pour superviser, soigner, protéger et encourager la construction de ce Sanctuaire. A plusieurs occasions, il a dit à la Vierge qu’il n’était pas la personne indiquée, qu’au contraire, si elle voulait mener à bien cette œuvre, elle devrait choisir d’autres personnes, puisqu’il n’était pas cultivé, instruit ou qu’il ne faisait pas partie de ceux qui pouvaient le faire. Marie, obstinée – de cette obstination qui naît du cœur miséricordieux du Père – lui dit non, qu’il sera, lui, son ambassadeur.

Ainsi, elle réussit à éveiller une chose qu’il ne savait pas exprimer, un vrai étendard d’amour et de justice : dans la construction de cet autre sanctuaire, celui de la vie, celui de nos communautés, de nos sociétés et de nos cultures, personne ne peut être marginalisé. Nous sommes tous nécessaires, surtout ceux qui normalement ne comptent pas parce qu’ils ne sont pas ‘‘à la hauteur des circonstances’’ ou n’ ‘‘apportent pas le capital nécessaire’’ à ces constructions. Le Sanctuaire de Dieu est la vie de ses enfants, de tous et dans toutes leurs conditions, surtout celle des jeunes sans avenir, exposés à d’interminables situations douloureuses, risquées, et celle des personnes âgées non reconnues, oubliées à tant d’endroits. Le Sanctuaire de Dieu, ce sont nos familles qui ont besoin du minimum nécessaire pour pouvoir se construire et grandir. Le Sanctuaire de Dieu, c’est le visage de tant de personnes qui croisent nos chemins…

En venant à  ce Sanctuaire, il peut nous arriver la même chose qu’à Juan Diego. Regarder la Mère avec nos douleurs, nos peurs, nos désespoirs, nos tristesses et lui dire :  ‘‘Que puis-je apporter si je ne suis pas instruit ?’’ Regardons la mère avec des yeux qui disent : les situations qui nous ôtent la force sont si nombreuse, qui font sentir qu’il n’y a pas de place pour l’espérance, pour le changement, pour la transformation.

Voilà pourquoi, un peu de silence peut nous faire du bien ; tout comme la regarder, elle, la regarder longuement et calmement, et lui dire comme l’a fait l’autre enfant qui l’aimait beaucoup : ‘‘te regarder simplement – Mère -, laisser ouvert uniquement le regard ; te regarder entièrement sans rien te dire, tout te dire, sans paroles et avec respect. Ne pas perturber le vent de ton visage ; uniquement bercer ma solitude violée, dans tes yeux de Mère amoureuses et dans ton nid de terre transparente.

Les heures s’évanouissent ; secoués, les hommes insensés mordent  les déchets de la vie et de la mort, bruyamment.

Te regarder, Mère ; rien que te contempler, le cœur muet dans ta tendresse, dans ton silence chaste de lys’’ (Hymne liturgique).

Et dans cette contemplation, l’écouter une fois de plus nous redire : ‘‘que se passe-t-il mon fils le plus petit ? qu’est-ce qui attriste ton cœur’’ (cf. Nican Mopohua, 107.118) ‘‘Ne suis-je pas ici moi, moi qui ai l’honneur d’être ta mère ?’’ (Ibid, 119).

Elle nous dit qu’elle a l’‘’honneur’’ d’être notre mère. Cela nous donne la certitude que les larmes de ceux qui souffrent ne sont pas stériles.  Elles sont une prière silencieuse qui monte vers le ciel et qui trouve toujours chez Marie une place sous son manteau. En elle et avec elle, Dieu se fait frère et compagnon de route, partage avec nous la croix pour que ne soyons pas écrasés par nos douleurs.

Ne suis-je moi, ta mère ? Ne suis-je pas présente ? Ne te laisse pas vaincre par tes douleurs, tes tristesses, nous dit-elle. Aujourd’hui, elle nous envoie de nouveau ; aujourd’hui, elle nous redit: sois mon ambassadeur, sois mon envoyé pour construire de nombreux et nouveaux sanctuaires, pour accompagner de nombreuses vies, pour essuyer de nombreuses larmes. Va simplement par les chemins du voisinage, de ta communauté, de ta paroisse comme mon ambassadeur ; bâtis des sanctuaires en partageant la joie de savoir que nous ne sommes pas seuls, qu’elle chemine avec nous. Sois mon ambassadeur, nous dit-elle, en donnant à manger à l’affamé, à boire à celui qui a soif, accueille celui qui est dans le besoin, habille celui qui est nu et visite le malade.  Va au secours du prisonnier, pardonne à celui qui t’a offensé, console celui qui est triste, sois patient avec les autres et surtout supplie et prie notre Dieu.

‘‘Ne suis-je pas ta mère ? Ne suis-je pas là ?’’, nous redit Marie. Va construire mon sanctuaire, aide-moi à bâtir la vie de mes enfants, tes frères.

Discours du pape François aux évêques du Mexique

Ce samedi 13 février, suite à sa rencontre avec le président, les autorités civiles et le corps diplomatique, le pape François s’est rendu à la cathédrale de Mexico pour rencontrer les évêques. Vous trouverez ci-dessous le discours qu’il leur a adressé:

Discours aux évêques

Cathédrale de Mexico, Mexique

Samedi 13 février 2016

Je suis heureux de pouvoir vous rencontrer le lendemain de mon arrivée dans ce pays bien-aimé, que, suivant les traces de mes Prédécesseurs, moi aussi, je viens visiter.

Je ne pouvais pas ne pas venir ! Le Successeur de Pierre, appelé du lointain sud latino-américain, pouvait-il se priver de l’opportunité de poser son regard sur la ‘‘Vierge Morenita’’ ?

Je vous remercie pour m’avoir accueilli dans cette Cathédrale, ‘‘petite maison’’ agrandie mais toujours ‘‘sacrée’’, qu’a demandée la Vierge de Guadalupe, et pour l’aimable mot de bienvenue que vous m’avez adressé.

Sachant qu’ici se trouve le cœur secret de chaque mexicain, j’entre sur la pointe des pieds comme il convient d’entrer dans la maison ainsi que dans l’âme de ce peuple, et je vous suis profondément reconnaissant de m’ouvrir la porte. Je sais qu’en contemplant les yeux de la Vierge, j’atteins le regard de votre peuple qui, en elle, a appris à se manifester. Je sais qu’aucune autre voix ne peut exprimer avec autant de profondeur le cœur mexicain comme la Vierge peut m’en parler ; elle protège ses plus hautes aspirations et ses espérances les plus cachées, elle recueille ses joies et ses larmes ; elle comprend ses nombreuses langues et leur répond avec la tendresse de Mère, parce que ce sont ses propres enfants.

Je suis heureux de vous rencontrer, ici dans les environs du ‘‘Mont du Tepeyac’’, comme à l’aube de l’évangélisation de ce Continent et, s’il vous plaît, je vous demande de me permettre d’exprimer tout ce que j’ai à vous dire en partant de la Guadalupan. Comme je voudrais que ce soit elle-même qui vous exprime, jusqu’au plus profond de vos âmes de Pasteurs et, par vous, à chacune de vos Eglises particulières présentes dans ce vaste Mexique, tout ce qui s’écoule intensément du cœur du Pape.

Comme le fit saint Juan Diego et comme le firent les générations successives des enfants de la Guadalupana, le Pape également, depuis longtemps cultivait le désir de la regarder. Mieux, je voulais, moi-même, être sous son regard maternel. J’ai beaucoup réfléchi sur le mystère de ce regard et je vous prie d’accueillir ce qui jaillit de mon cœur de Pasteur en ce moment.

Un regard de tendresse !

Avant tout, la ‘‘Vierge Morenita’’ nous enseigne que l’unique force capable de conquérir le cœur des hommes est la tendresse de Dieu. Ce qui enchante et attire, ce qui fait fléchir et vainc, ce qui  ouvre et déchaîne, ce n’est pas la force des instruments ou la dureté de la loi, mais la faiblesse toute-puissante de l’amour divin, qui est la force irrésistible de sa douceur et la promesse irréversible de sa miséricorde.

Un remuant et important homme de lettres, (Octavio Paz), a dit qu’à Guadalupe, on ne demande plus l’abondance des récoltes ou la fertilité de la terre, mais qu’on y cherche un sein à travers lequel les hommes, toujours orphelins et déshérités, sont à la recherche d’un abri, d’un foyer.

Des siècles après l’évènement fondateur de ce pays et de l’évangélisation du Continent, le besoin de sein qui fait languir le cœur du peuple qui vous a été confié s’est-il estompé, est-il oublié ?

Je connais la longue et douloureuse histoire que vous avez traversée, non sans répandre beaucoup de sang, non sans de fortes et déchirantes convulsions, non sans violence et incompréhensions. Avec raison, mon vénéré et saint Prédécesseur, qui, au Mexique, se sentait comme dans sa maison, a voulu rappeler que : «[son] histoire est traversée, comme des fleuves parfois occultes mais toujours abondants, par trois réalités qui se rencontrent à certains moments et qui à d’autres révèlent leur différences complémentaires, sans jamais se confondre entièrement: l’ancienne et riche sensibilité des peuples autochtones qui aimèrent Juan de Zumárraga et Vasco de Quiroga, que beaucoup de ces peuples continuent à appeler pères, le christianisme enraciné dans l’âme des Mexicains et la rationalité moderne, d’origine européenne, qui a tant de fois voulu exalter l’indépendance et la liberté» (Jean-Paul II, Discours lors de la cérémonie de bienvenue au Mexique, le 22 janvier 1999).

Et dans cette histoire, le sein maternel qui a continuellement engendré le Mexique, même si parfois il paraissait un ‘‘filet qui recueillait cent cinquante-trois poissons’’ (Jn 21, 11) ne s’est jamais révélé stérile, et les fractures menaçantes se sont toujours résorbées.

C’est pourquoi je vous invite à repartir de ce besoin de sein qui émane de l’âme de votre peuple. Le sein de la foi chrétienne est capable de réconcilier le passé souvent marqué de solitude, d’isolement et de marginalisation, avec l’avenir continuellement relégué à un lendemain qui s’esquive. Ce n’est que dans ce sein qu’on peut, sans renoncer à sa propre identité, «[découvrir] la profonde vérité de la nouvelle humanité, dans laquelle tous sont appelés à être fils de Dieu » (Id., Homélie à l’occasion de la canonisation de saint Juan Diego).

Inclinez-vous donc, délicatement et avec respect, sur l’âme profonde de votre peuple, descendez en faisant attention et déchiffrez son mystérieux visage. Le présent, fréquemment dissous dans la dispersion et la fête, n’introduit-il pas à Dieu qui est uniquement et pleinement présent ? La familiarité avec la douleur et la mort ne sont-elles pas des formes de courage et des chemins vers l’espérance ? Percevoir que le monde doit être toujours et seulement sauvé n’est-ce pas un antidote contre l’autosuffisance arrogante de ceux qui croient pouvoir se passer de Dieu ?

Bien entendu, en raison de tout cela, un regard capable de refléter la tendresse de Dieu est nécessaire. Soyez, par conséquent, des Evêques au regard limpide, à l’âme transparente, au visage lumineux. N’ayez pas peur de la transparence. L’Eglise n’a pas besoin de l’obscurité pour travailler. Veillez à ce que vos regards ne soient pas obscurcis par les pénombres du brouillard de la mondanité ; ne vous laissez pas corrompre par le matérialisme trivial ni par les illusions séductrices des accords [conclus] en dessous de la table ; ne mettez pas votre confiance dans les ‘‘chars et les chevaux’’ des pharaons actuels, car notre force est la ‘‘colonne de feu’’ qui divise les eaux de la mer en les fendant en deux, sans grand bruit (Ex 14, 24-25).

Le monde dans lequel le Seigneur nous appelle à accomplir notre mission est devenu très complexe. Et cela, bien que l’arrogante idée du ‘‘cogito’’, qui ne niait pas qu’il y ait au moins un roc sur le sable de l’être, soit aujourd’hui dominée par une conception de la vie, jugée par beaucoup, plus que jamais, vacillante, errante et affaiblie parce que sans substrat solide. Les frontières si fortement invoquées et soutenues sont devenues perméables à la nouveauté d’un monde dans lequel la force de certains ne peut plus se maintenir sans la vulnérabilité des autres. L’irréversible caractère hybride de la technologie rend proche ce qui était lointain, mais malheureusement, il éloigne ce qui devrait être proche.

Et précisément c’est dans ce monde que Dieu vous demande d’avoir un regard capable de saisir l’interrogation fusant du cœur de votre peuple, l’unique qui a dans son calendrier une ‘‘fête du cri’’. A ce cri, il faut répondre que Dieu existe et est proche à travers Jésus. Que seul Dieu est la réalité sur laquelle on peut construire, car « Dieu est la réalité fondatrice, non pas un Dieu seulement pensé ou hypothétique, mais bien un Dieu au visage humain » (Benoît XVI, Discours inaugural de la Vème Conférence générale du CELAM, 13 mai 2007).

Dans vos regards, le peuple mexicain a le droit de trouver les traits de ceux qui ‘‘ont vu le Seigneur’’(cf. Jn 20, 25), de ceux qui ont été avec Dieu. C’est l’essentiel. Ne perdez donc pas du temps et des énergies dans les choses secondaires, dans les commérages et les intrigues, dans les vains projets de carrière, dans les plans vides d’hégémonies, dans les clubs stériles d’intérêts ou de coteries. Ne vous laissez pas entraîner par les rumeurs et les médisances. Introduisez vos prêtres dans cette compréhension du ministère sacré. Nous autres, ministres de Dieu, la grâce de ‘‘boire le calice du Seigneur’’, le don de protéger la part de son héritage qui nous est confiée, nous suffit, même si nous sommes des administrateurs inexpérimentés.  Laissons le Père nous assigner la place qui nous a été préparée (Mt 20, 20-28). Pouvons-nous vraiment nous occuper d’affaires autres que celles du Père ? En dehors des ‘‘affaires du Père’’(Lc 2,48-49), nous perdons notre identité et, de manière coupable, nous rendons vaine sa grâce.

Si notre regard ne témoigne pas d’avoir vu Jésus, alors ses paroles dont nous faisons mémoire ne représenteraient que des figures rhétoriques vides. Peut-être exprimeraient-elles la nostalgie de ceux qui ne peuvent pas oublier le Seigneur, mais de toute façon, elles ne seraient que le balbutiement d’orphelins près du tombeau. Des mots en fin de compte incapables d’empêcher que le monde soit abandonné et réduit à sa propre puissance désespérée.

Je pense à la nécessité d’offrir un sein maternel aux jeunes. Que vos regards soient capables de croiser leurs regards, de les aimer et de saisir ce qu’ils cherchent avec ce courage avec lequel beaucoup, comme eux, ont quitté barques et filets sur l’autre rive de la mer (Mc 1, 17-18), ont abandonné des bancs d’extorsions en vue de suivre le Seigneur de la vraie richesse (Mt 9, 9).

Je suis particulièrement préoccupé par beaucoup d’entre eux, qui, séduits par la puissance du monde, exaltent les chimères et se revêtent de leurs macabres symboles pour commercialiser la mort en échange de trésor qu’en fin de compte les mites et la rouille dévorent, et qui incite les voleurs à percer les murs (cf. Mt 6, 20). Je vous demande de ne pas sous-évaluer le défi moral et anticivique que représente le narcotrafic pour la société mexicaine, y compris l’Eglise.

La proportion du phénomène, la complexité de ses causes, l’immensité de son extension comme une métastase qui dévore, la gravité de la violence qui désagrège, tout comme ses connexions néfastes, ne nous permettent pas à nous, Pasteurs de l’Eglise, de nous réfugier derrière des condamnations génériques. Mais tout cela exige un courage prophétique ainsi qu’un projet pastoral sérieux et de qualité, pour contribuer, progressivement, à resserrer ce délicat réseau humain, sans lequel tous, nous serions dès le départ vaincus par cette insidieuse menace. En commençant d’abord par les familles ; en nous approchant et en embrassant la périphérie humaine et existentielle des territoires dévastés de nos villes ; en impliquant les communautés paroissiales, les écoles, les institutions communautaires, les communautés politiques, les structures de sécurité ; c’est seulement ainsi qu’on pourra se libérer totalement des eaux dans lesquelles malheureusement se noient tant de vies, que ce soit celle de celui qui meurt comme victime, que ce soit celle de celui qui devant Dieu aura toujours du sang sur les mains, même s’il a les poches pleines d’argent sale et la conscience anesthésiée.

Un regard capable de tisser

Dans le manteau de l’âme mexicaine, Dieu a tissé, avec le fil des empreintes métisses de son peuple, le visage de sa manifestation dans la ‘‘Morenita’’. Dieu n’a pas besoin de couleurs ternes pour peindre son visage. Les desseins de Dieu ne sont pas conditionnés par les couleurs et par les fils, mais ils sont déterminés par l’irréversibilité de son amour qui veut avec persistance s’imprimer en nous.

Soyez, par conséquent, des Evêques capables d’imiter cette liberté de Dieu en choisissant ce qui est humble pour rendre visible la majesté de son visage et de faire vôtre cette patience divine en tissant, avec le fil fin de l’humanité que vous trouvez, cet homme nouveau que votre pays espère. Ne vous laissez pas guider par le vain désir de changer de peuple comme si l’amour de Dieu n’avait pas assez de force pour le changer.

Redécouvrez, en effet, la constance sage et humble avec laquelle les Pères de la foi de ce pays ont su introduire les générations successives dans la sémantique du mystère divin. D’abord, en apprenant, et ensuite, en enseignant la grammaire nécessaire pour dialoguer avec ce Dieu, caché durant les siècles de leur recherche et fait proche dans la personne de son Fils Jésus, qu’aujourd’hui tant de personnes reconnaissent dans la figure ensanglantée et humiliée, comme symbole de leur propre destin. Imitez sa condescendance et sa capacité de s’abaisser. Nous ne comprendrons jamais assez le fait qu’avec les fils métis de notre peuple Dieu a tissé le visage par lequel il se fait connaître ! Jamais, nous ne serons assez reconnaissants.

Je vous demande un regard d’une délicatesse singulière pour les peuples indigènes et pour leurs fascinantes cultures souvent occultées. Le Mexique a besoin de leurs racines amérindiennes pour ne pas être réduit à une énigme irrésolue. Les indigènes du Mexique attendent encore qu’on reconnaisse effectivement la richesse de leur contribution et la fécondité de leur présence pour assumer cette identité qui fait de vous une Nation unique et non seulement une parmi d’autres.

On a souvent évoqué le présumé destin inachevé de cette Nation, le ‘‘labyrinthe de la solitude’’ dans lequel elle serait emprisonnée, la géographie comme destin qui la piège. Pour certains, tout cela serait un obstacle au projet d’un visage unitaire, d’une identité adulte, d’une position singulière dans le concert des nations et d’une mission partagée.

Pour d’autres, l’Eglise au Mexique serait également condamnée à choisir entre subir l’infériorité à laquelle elle a été reléguée dans certaines périodes de son histoire, comme lorsque sa voix a été étouffée et qu’on a cherché à limiter sa présence, ou à s’aventurer dans les fondamentalismes pour réacquérir des certitudes provisoires en oubliant d’enraciner dans son cœur la soif de l’Absolu et le fait qu’elle est appelée dans le Christ à réunir tous et non seulement une partie (cf. Lumen gentium, 1, 1).

Ne vous lassez pas en revanche de rappeler à votre peuple combien sont puissantes les racines anciennes qui ont permis la vivante synthèse chrétienne de communion humaine, culturelle et spirituelle qui a été forgée ici. Souvenez-vous que les ailes de votre peuple se sont déjà déployées plusieurs fois au-dessus de nombreuses vicissitudes. Préservez la mémoire du long chemin parcouru jusqu’à présent et sachez susciter l’espérance de nouveaux objectifs, car demain sera une terre ‘‘riche de fruits’’ même s’il nous confronte à des défis non négligeables (Nm 13, 27-28).

Que vos regards, posés toujours et uniquement sur le Christ, soient capables de contribuer à l’unité de votre peuple ; de favoriser la réconciliation de ses différences et l’intégration de ses diversités ; de promouvoir la solution de ses problèmes endogènes ; de rappeler le haut niveau que le Mexique peut atteindre s’il apprend à s’appartenir avant d’appartenir à d’autres ; d’aider à trouver des solutions partagées et durables à ses misères ; de motiver la Nation tout entière à ne pas se contenter de moins que ce qu’elle espère de la façon mexicaine d’habiter le monde.

Un regard attentif et proche, pas endormi

Je vous prie de ne pas tomber dans la paralysie de donner de vieilles réponses aux questions nouvelles. Votre passé est une source de richesses à creuser qui peut inspirer le présent et illuminer l’avenir. Malheur à vous, si vous vous endormez sur vos lauriers ! Il ne faut pas mépriser l’héritage reçu, sauvegardez-le par un travail constant. Vous êtes assis sur les épaules de géants : évêques, prêtres, religieux, religieuses et les laïcs, fidèles ‘‘jusqu’au bout’’,  qui ont offert la vie pour que l’Eglise puisse accomplir sa propre mission. Du haut de ce podium, vous êtes appelés à lancer un large regard sur le champ du Seigneur pour planifier la semence et attendre la récolte.

Je vous invite à vous fatiguer sans peur dans la mission d’évangéliser et d’approfondir la foi à travers une catéchèse mystagogique qui sache faire trésor de la religiosité populaire de vos gens. Notre temps demande une attention pastorale aux personnes et aux groupes, qui  espèrent pouvoir aller à la rencontre du Christ vivant. Seule une courageuse conversion pastorale de nos communautés peut retrouver, générer et nourrir les disciples actuels de Jésus (Document d’Aparecida, 226, 368, 370).

Par conséquent, nous autres pasteurs, il nous faut surmonter la tentation de la distance et du cléricalisme, de la froideur et de l’indifférence, du triomphalisme et de l’autoréférentialité. Guadalupe nous enseigne que Dieu a un visage familier, que la proximité et la bienveillance peuvent plus que la force.

Comme l’enseigne la belle tradition  de Guadalupe, la ‘‘Morenita’’ protège les regards de ceux qui la contemplent, reflète le visage de ceux qui la rencontrent. Il faut apprendre qu’il y a une chose d’unique dans chacun de ceux qui, à la recherche de Dieu, nous regardent. Il nous revient de ne pas nous rendre imperméables à ces regards, de garder en nous chacun d’eux, de les conserver dans le cœur, de les sauvegarder.  

Seule une Eglise qui sait garder le visage des hommes qui vont frapper à sa porte est capable de leur parler de Dieu. Si nous ne déchiffrons pas leurs souffrances, si nous ne nous rendons pas compte de leurs besoins, nous ne pourrons rien leur offrir. La richesse que nous avons ne coule que lorsque nous rencontrons la petitesse de ceux qui mendient et, précisément, cette rencontre se réalise dans notre cœur de Pasteurs.

Le premier visage que je vous supplie de protéger dans votre cœur est celui de vos prêtres. Ne les laissez pas exposés à la solitude et à l’abandon, en proie à la mondanité qui dévore le cœur. Soyez attentifs et apprenez à lire [dans] leurs regards pour vous réjouir avec eux lorsqu’ils sentent la joie de raconter ce qu’ils « ont fait et enseigné » (Mc 6, 30), et également pour ne pas reculer lorsqu’ils se sentent un peu abattus et ne peuvent que pleurer parce qu’ils « ont renié le Seigneur » (Lc 22, 61-62), et aussi pour les soutenir, en communion avec le Christ, quand l’un ou l’autre, sortira avec Judas « dans la nuit » (Jn 13, 30). Que jamais, dans ces situations, ne manque votre paternité, en tant qu’Evêques, à vos prêtres. Encouragez la communion entre eux ; promouvez leurs dons ; intégrez-les dans les grandes causes, car le cœur de l’apôtre n’a pas été fait pour des choses petites.

Le besoin de familiarité habite dans le cœur de Dieu. Notre Dame de Guadalupe ne demande, en effet, qu’une « petite maison sacrée ». Nos peuples latino-américains comprennent bien le langage diminutif et très volontiers l’utilisent. Peut-être ont-ils besoin de diminutif parce qu’autrement ils se sentiraient perdus. Ils se sont adaptés au fait de se sentir diminués et sont habitués à vivre dans la modestie.

L’Eglise, lorsqu’elle se réunit dans une majestueuse Cathédrale, ne pourra s’empêcher de se comprendre comme un ‘‘petite maison’’ dans laquelle ses enfants peuvent  se sentir à l’aise. On se maintient devant Dieu seulement si on est petit, si on se sent orphelin, si on est mendiant.

‘‘Petite maison’’ familiale et en même temps ‘‘sacrée’’, car la proximité est remplie de la grandeur toute-puissante. Nous sommes les gardiens de ce mystère ! Peut-être avons-nous perdu ce sens de l’humble mesure divine et nous sommes fatigués d’offrir aux nôtres la ‘‘petite maison’’ dans laquelle ils se sentiront en intimité avec Dieu. Il se peut également qu’ayant découvert un peu le sens de sa grandeur, on ait perdu une partie de la crainte révérencielle envers cet amour. L’homme ne peut accéder à l’endroit où Dieu habite, sans y être admis et il n’y entre qu’en ôtant ses sandales (cf. Ex 3, 5) pour confesser sa propre insuffisance.

Ce fait d’avoir oublié d’‘‘ôter les sandales’’ pour entrer, n’est-il vraisemblablement pas à la racine de la perte du sens de la sacralité de la vie humaine, de la personne, des valeurs essentielles, de la sagesse accumulée au long des siècles, du respect de la nature ? Sans récupérer, dans la conscience des hommes et de la société, ces racines profondes, il manquera, même au travail généreux en faveur des droits humains légitimes, la sève vitale qui peut provenir uniquement d’une source que l’humanité ne pourra jamais se donner elle-même.

Un regard d’ensemble et d’unité

Rien qu’en regardant la ‘‘Morenita’’, on saisit entièrement le Mexique. Par conséquent, je vous invite à comprendre que la mission que l’Eglise vous confie demande ce regard qui embrasse la totalité. Et cela ne peut se réaliser de manière isolée, mais seulement en communion.

La Gudalupana  est ceinte d’une cordon qui annonce sa fécondité. C’est la Vierge qui a déjà dans son sein le Fils attendu par les hommes. C’est la Mère qui a déjà conçu l’humanité du nouveau monde naissant. C’est l’Epouse qui préfigure la maternité féconde de l’Eglise du Christ. Vous avez la mission de ceindre l’entière Nation mexicaine de la fécondité de Dieu. Aucune partie de ce cordon ne peut être méprisée.

L’épiscopat mexicain a accompli de remarquables progrès en ces années conciliaires ; ses membres ont augmenté ; la formation continue et qualifiée a été promue ; le climat fraternel n’a pas manqué ; l’esprit de collégialité a crû ; les interventions pastorales ont eu un impact sur vos Eglises et sur la conscience nationale ; les travaux pastoraux  partagés ont été fructueux dans les domaines essentiels de la mission ecclésiale tels que la famille, les vocations, la présence sociale.

Tandis que nous nous réjouissons du parcours de ces années, je vous demande de ne pas vous laisser décourager par les difficultés et de ne ménager aucun effort possible pour promouvoir, entre vous et dans vos diocèse, le zèle missionnaire, surtout en direction des régions qui ont le plus besoin de l’unique corps de l’Eglise mexicaine. Redécouvrir que l’Eglise est mission est fondamental pour son avenir, car seul ‘‘l’enthousiasme, l’émerveillement convaincu’’ des évangélisateurs a la force pour entraîner. Je vous demande, par conséquent, de prendre spécialement soin de la formation et de la préparation des laïcs, en surmontant toute forme de cléricalisme et en les impliquant activement dans la mission de l’Eglise, surtout dans la tâche de rendre présent, par le témoignage de leur propre vie, l’évangile du Christ dans le monde.  

Un témoignage unificateur de la synthèse chrétienne et une vision partagée de l’identité ainsi que du destin de vos gens aideraient beaucoup ce peuple mexicain. Dans ce sens, il serait très important que l’Université Pontificale du Mexique soit toujours davantage au cœur des efforts de l’Eglise pour assurer ce regard d’universalité sans laquelle la raison, réduite à des unités partielles, renonce à sa plus haute aspiration de recherche de la vérité.

La mission est vaste et la faire progresser exige de multiples voies. Et avec la plus vive insistance, je vous exhorte à conserver la communion et l’unité entre vous. La communion est la forme vitale de l’Eglise et l’unité de ses pasteurs donne la preuve de sa véracité. Le Mexique ainsi que sa vaste et multiforme Eglise ont besoin d’Evêques serviteurs et gardiens de l’unité fondée sur la Parole du Seigneur, alimentée par son Corps et guidée par son Esprit qui est le souffle vital de l’Eglise.

Les ‘‘principes’’ ne sont pas nécessaires, mais une communauté de témoins du Seigneur l’est. Le Christ est l’unique lumière ; il est la source d’eau vive ; de son souffle émane l’Esprit qui déploie les voiles de la barque ecclésiale. Dans le Christ glorifié, que les gens de ce peuple aiment honorer comme Roi, allumez ensemble la lumière, soyez comblés de sa présence qui ne s’épuise pas ; respirez à pleins poumons l’air de son Esprit. Il vous revient de semer le Christ dans cette terre, de maintenir allumée son humble lumière qui éclaire sans aveugler, d’assurer que la soif du peuple soit étanchée par ses eaux ; d’étendre les voiles pour que le souffle de l’Esprit les déploie et que la barque de l’Eglise au Mexique ne fasse pas naufrage.

Souvenez-vous-en, l’Epouse sait bien que le Pasteur bien-aimé (Ct 1, 7) ne se trouvera que là où le pâturage est vert et où les cours d’eau sont cristallins. L’Epouse ne fait pas confiance aux compagnons de l’Epouse qui, parfois soit par négligence soit par incapacité conduisent le troupeau par des endroits arides et rocheux. Malheur à nous pasteurs, compagnons du Pasteur Suprême, si nous laissons son Epouse errer parce que l’Epoux ne se trouve pas dans la tente que nous avons construite !

Permettez-moi un dernier mot pour exprimer l’appréciation du Pape pour tout ce que vous faites afin d’affronter le défi de notre époque représentée par les migrations. Ce sont des millions d’enfants de l’Eglise qui vivent aujourd’hui dans la diaspora ou en transit, se déplaçant vers le Nord à la recherche de nouvelles opportunités. Beaucoup d’entre eux laissent derrière eux leurs propres racines pour aller à l’aventure, même dans la clandestinité qui implique tout genre de risques, en quête du ‘‘feu vert’’ qu’ils considèrent comme leur espérance. Tant de familles sont divisées ; et l’intégration dans la supposée ‘‘terre promise’’ n’est pas toujours aussi facile qu’on le croit.

Chers frères, que vos cœurs soient capables de les suivre et de les rejoindre au-delà des frontières. Renforcez la communion avec vos frères de l’épiscopat des Etats-Unis d’Amérique pour que la présence maternelle de l’Eglise maintienne vivantes les racines de leur foi, les raisons de leurs espérances et la force de leur charité.  Leurs harpes pendues, que leurs joies ne se taisent pas, qu’ils n’oublient pas Jérusalem et ne deviennent pas des ‘‘exilés hors d’eux-mêmes’’ (Ps 136). Qu’ils témoignent ensemble que l’Eglise est gardienne d’une vision unitaire de l’homme et ne peut accepter qu’il soit réduit à une pure ‘‘ressource’’ humaine.

L’empressement de vos diocèse à passer un peu de baume sur les pieds meurtris de ceux qui traversent vos territoires et à dépenser pour eux l’argent difficilement recueilli ne sera pas vain ; le Samaritain divin, en fin de compte, enrichira celui qui n’est pas passé, indifférent, devant lui lorsqu’il gisait au sol sur le chemin (Lc 10, 25-37).

Chers frères, le pape est sûr que le Mexique et son Eglise arriveront à temps au rendez-vous avec eux-mêmes, avec l’histoire, avec Dieu. Peut-être une pierre en chemin retardera-t-elle la marche, et la fatigue du voyage exigera-t-elle un arrêt, mais ce ne sera jamais suffisant pour faire manquer le but. Car, peut-il arriver tard celui qui a une mère qui l’attend ? Celui qui peut sentir sans cesse résonner dans son propre cœur ‘‘ne suis-je pas ici, moi qui suis ta Mère’’ ?

Discours du pape François aux autorités civiles du Mexique

Ce samedi 13 février, le pape François a rencontré les autorités civiles et le corps diplomatique au Palais national à Mexico. Voici le discours qu’il a prononcé:

Monsieur le Président,

Membres du Gouvernement de la République,

Distinguées autorités,

Représentants de la société civile,

Mes frères dans l’Episcopat,

Mesdames et Messieurs,

Je vous remercie, Monsieur le Président pour les paroles de bienvenue que vous m’avez adressées. C’est un motif de joie de pouvoir fouler cette terre mexicaine qui occupe une place spéciale dans le cœur des Américains. Aujourd’hui, je viens comme missionnaire de miséricorde et de paix mais également comme un fils qui veut rendre hommage à sa mère, la Vierge de Guadalupe, et se laisser regarder par elle.

En cherchant à être un bon fils, en suivant les traces de la Mère, je veux, en même temps, rendre hommage à ce peuple et à cette terre si riche de cultures,  d’histoire et de diversité. A travers votre personne, Monsieur le Président, je voudrais saluer et embrasser le peuple mexicain dans ses multiples expressions et dans les situations les plus variées  qu’il vit. Merci de me recevoir aujourd’hui sur cette terre.

Le Mexique est un grand pays, doté d’abondantes ressources naturelles et d’une énorme biodiversité qui s’étend sur tout son vaste territoire. Sa position géographique privilégiée en fait un point de référence pour l’Amérique ; et ses cultures indigènes, métisses et créoles lui confèrent une identité propre qui lui offre une richesse culturelle qu’il n’est pas toujours facile de trouver et surtout de valoriser. La sagesse ancestrale liée à sa multi-culturalité est, de loin, l’une de ses meilleures ressources identitaires. Cette identité, qu’elle a appris progressivement à gérer dans la diversité, constitue sans doute un riche patrimoine à mettre en valeur, à promouvoir et à préserver.

Je pense et j’ose dire que la principale richesse du Mexique aujourd’hui a un visage jeune ; oui, ce sont ses jeunes. Un peu plus de la moitié de la population est jeune. Cela permet de penser et de préparer l’avenir, le lendemain. Cela offre espérance et perspective. Un peuple jeune est un peuple capable de se rénover, de se transformer ; c’est une invitation à élever le regard avec espoir vers l’avenir et – en même temps – cela nous interpelle positivement dans le présent. Cette réalité nous conduit inévitablement à réfléchir sur notre propre responsabilité dans la construction du Mexique que nous appelons de tous nos vœux, le Mexique que nous voulons léguer aux futures générations. Cela nous conduit à nous rendre compte également qu’un avenir d’espérance se forge dans la vie présente d’hommes et de femmes justes, honnêtes, capables de s’engager pour le bien commun, ce ‘‘bien commun’’ qui, en ce XXIème siècle, n’est pas très prisé. L’expérience nous montre que chaque fois que nous cherchons la voie du privilège ou du bénéfice de quelques-uns au détriment du bien de tous, tôt ou tard, la vie en société devient un terrain fertile pour la corruption, le narcotrafic, l’exclusion des cultures différentes, la violence, y compris pour le trafic de personnes, la séquestration et la mort, causant la souffrance et freinant le développement.

Le peuple mexicain met son espérance dans l’identité qui s’est forgée dans de durs et difficiles moments de son histoire par de remarquables témoignages de citoyens qui ont compris que, pour pouvoir surmonter les situations nées de la fermeture de l’individualisme, était nécessaire l’accord des Institutions politiques, sociales et économiques, ainsi que celui de tous les hommes et femmes engagés dans la recherche du bien commun et dans la promotion de la dignité de la personne.  

Une culture ancestrale et un capital humain prometteur, comme les vôtres, doivent être la source d’inspiration pour que nous trouvions de nouvelles formes de dialogue, de négociation, de ponts capables de nous guider sur la voie de l’engagement solidaire. Un engagement dans lequel tous, en commençant par nous qui nous appelons chrétiens, nous devons nous consacrer à la construction d’«une politique vraiment humaine » (Gaudium et spes, n. 73) et d’une société dans laquelle personne ne doit se sentir victime de la culture de rejet.

Il revient, de façon spéciale, aux dirigeants de la vie sociale, culturelle et politique, de travailler pour offrir à tous les citoyens l’opportunité d’être de dignes acteurs de leur propre destin, dans leur famille et dans tous les domaines où se développe la société humaine, en leur facilitant un accès réel aux biens matériels et spirituels indispensables : logement décent, travail digne, nourriture, justice réelle, sécurité effective, un environnement sain et de paix.

Il ne s’agit pas seulement d’une affaire de lois qui exigent des mises à jour et des amendements – toujours nécessaires –, mais d’une formation urgente à la responsabilité personnelle de chacun dans le plein respect de l’autre en tant que coresponsable de la cause commune de promotion du développement national. C’est une tâche qui implique tout le peuple mexicain dans les diverses instances aussi bien publiques que privées, autant collectives qu’individuelles.

Je vous assure, Monsieur le Président, que dans cet effort, le Gouvernement mexicain peut compter sur la collaboration de l’Eglise catholique, qui a accompagné la vie de cette Nation et qui renouvelle son engagement ainsi que sa volonté de servir la grande cause de l’homme : l’édification de la civilisation de l’amour.

Je me prépare à parcourir ce beau et grand pays en qualité de missionnaire et de pèlerin qui veut revivre avec vous l’expérience de la miséricorde comme un nouvel horizon de possibilité qui est inévitablement porteur de justice et de paix.

Et je me place sous le regard de Marie la Vierge de Guadalupe afin que, par son intercession, le Père miséricordieux fasse que ces journées et l’avenir de cette terre soient une opportunité de rencontre, de communion et de paix.

Merci beaucoup !

Il ne fallait qu’attendre 1000 ans!

« [La] rencontre des Primats de l’Église catholique et de l’Église orthodoxe russe, préparée depuis longtemps, sera la première dans l’histoire et marquera une étape importante dans les relations entre les deux Églises ». C’est ce qu’ont annoncé vendredi dernier, le Saint Siège et le patriarcat de Moscou. Le pape François et le Patriarche Cyrille de Moscou se retrouveront pour une audience à Cuba ce vendredi 12 février.

En effet, la dernière rencontre entre un pape et un patriarche orthodoxe russe remonte au 11e siècle. Le père Federico Lombardi, directeur de la salle de presse du Saint Siège, a de plus ajouté que c’est un signe positif et d’espoir. Puisqu’il y a une volonté de « dialogue et de compréhension ». Il a précisé que la rencontre n’était pas improvisée. Elle se prépare depuis deux ans et c’est le lieu qui la rendait possible. Cuba serait un terrain neutre, déconnecté de « l’histoire difficile entre les chrétiens » en Europe. La visite du Patriarche Cyrille de Moscou à Cuba coïncidait avec celui du pape François au Mexique.

Le métropolitain Hilarion, et président des relations extérieures du patriarcat de Moscou, a affirmé que la rencontre n’aurait pu avoir lieu sous d’autres conditions. Il a de plus indiqué que cette rencontre est envisageable dans le contexte actuel des chrétiens persécutés dans le monde. « Il est nécessaire de mettre de côté les désaccords internes et d’unir les efforts pour sauver le christianisme dans les régions où il est soumis à la persécution la plus grave » a-t-il indiqué. D’ailleurs ils signeront une déclaration commune pour mettre fin aux persécutions.

Même si c’est la raison du rapprochement entre les deux Églises, d’autres sujets sont encore source de divisions entre elles. La plus récente étant la crise en Ukraine. L’Église gréco-catholique en Ukraine s’oppose fortement à la Russie et davantage depuis son annexion en Crimée. Autre facteur de tension, la présence catholique en Russie tout court, c’est-à-dire l’activité des églises occidentales qui sont en communion avec Rome. Accusées de prosélytisme et d’avoir vidé les églises orthodoxes.

Mais l’établissement des relations entre les Église catholiques et orthodoxes russes est désiré depuis longtemps. Les papes Jean-Paul II et Benoit XVI en sont les précurseurs. Jean-Paul II avait reçu le président de la Russie à l’époque, Mikhaïl Gorbatchev, au Vatican. C’est seulement après l’élection de Benoit XVI qu’un représentant du Patriarcat de Moscou ait mis les pieds dans le petit État.  Puis la visite de Vladimir Poutine au Vatican en juin dernier a ouvert la voie à une rencontre avec, cette fois-ci, le Patriarche de Moscou.

Dans une entrevue accordée à un quotidien italien lundi dernier, le pape François a insisté sur le nécessité de bâtir des ponts et non des murs. « Ils doivent être construit pas à pas jusqu’à pouvoir serrer la main de la personne qui se trouve de l’autre côté » disait-il. Il est certain, donc, que le pape cherchera d’abord à établir des liens là où les deux Églises puissent collaborer.

Devenir « Église en sortie » avec l’AECQ

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Le 26 janvier dernier, le Conseil Communauté et Ministère de l’Assemblée des évêques catholiques du Québec publiait un document intitulé « Le tournant missionnaire des communautés chrétiennes. Devenir une « Église en sortie » à la suite de La Joie de l’Évangile ». Comme son nom l’indique, ce document offre une réflexion détaillée sur les modalités particulières de la conversion missionnaire de l’Église au Québec. Ainsi, le document, fruit d’une session d’étude et de réflexion qui a eu lieu à Trois-Rivières les 12 et 13 mars 2014, invite le lecteur à s’interroger sur les différents niveaux de changement qu’une telle conversion implique.

Ce document disponible sur le site de l’AECQ propose d’abord une relecture de l’exhortation apostolique du pape François Evangelii Gaudium afin d’y puiser les intuitions fondamentales qui doivent guider notre réflexion. Cette section un peu plus « théorique » nous invite donc à une démarche de « purification » au sens où nous devons sortir du « pessimisme, du fatalisme et de la méfiance. [En effet] certaines personnes ne se donnent pas à la mission, car elles croient que rien ne peut changer et pour elles, il est alors inutile de fournir des efforts » (EG no 175). Accepter d’être missionnaire signifie accepter de nous donner sans compter, offrir nos services au Seigneur sans s’attendre à trop de reconnaissance et sachant que les résultats ne seront peut-être jamais visibles pour nous. Cette conversion intérieure, qui manifeste pleinement que nous avons accepté d’être les instruments de l’Esprit Saint c’est-à-dire de Celui qui ne cherche pas à attirer l’attention, ne doit cependant pas se limiter à notre vie spirituelle. Elle doit aussi prendre forme dans notre propre conception de nous-mêmes comme Église.

Le document propose dans un deuxième temps une réflexion sur le constat de l’Église et de la société québécoise dans son ensemble. Comme on le dit souvent : « pour savoir où l’on va il faut savoir d’où on vient ». Bien qu’il est évident que l’histoire du Québec et l’histoire de l’Église sont intimement liées, il est également évident que les 50 dernières années ont été marquées par une fracture de plus en plus grande entre l’Église et la société québécoise. Ce passé de « chrétienté » étant bel et bien derrière nous, il est nécessaire de, non pas nous jeter dans le vide spirituel actuel, mais de revisiter nos fondateurs. En effet, comme l’a dit le pape François lors de la Messe d’action de Grâce pour la canonisation de Sainte Marie de l’Incarnation et Saint François de Laval, il est essentiel qu’aujourd’hui nous fassions :

« Mémoire de ceux qui nous ont précédés, de ceux qui ont fondé notre Église. Église féconde que celle du Québec ! Féconde de nombreux missionnaires qui sont allés partout. Le monde a été rempli de missionnaires canadiens comme ces deux-ci. Maintenant un conseil : que cette mémoire ne nous conduise pas à abandonner la franchise et le courage. Peut-être – ou plutôt non,  sans peut-être ! – le diable est jaloux et il ne tolère pas qu’une terre soit ainsi féconde de missionnaires. Prions le Seigneur pour que le Québec revienne sur ce chemin de la fécondité, pour donner au monde de nombreux missionnaires. Que ces deux-ci qui ont – pour ainsi dire – fondé l’Église du Québec, nous aident comme intercesseurs. Que la graine semée croisse et donne comme fruit de nouveaux hommes et femmes courageux, clairvoyants, avec le cœur ouvert à l’appel du Seigneur. Aujourd’hui, on doit demander cela pour votre pays. Eux, du ciel, seront nos intercesseurs. Que le Québec redevienne cette source de bons et de saints missionnaires. »

Revisiter nos fondateurs afin de nous laisser inspirer et, je dirais même, imbiber de leur zèle missionnaire. Seulement ainsi serons-nous en mesure d’effectuer cette transition douloureuse qu’impose la situation actuelle puisque nous garderons en tête que « le salut des âmes est, dans l’Église, la loi suprême »(no1752) qui doit guider notre agir.

Je vous invite à lire et méditer ce document du Conseil Communautés et Ministères de l’Assemblée des évêques catholiques du Québec. Tant par sa réflexion fondamentale que par son souci de trouver des solutions aux problèmes concrets qui affectent l’Église de chez nous, ce document vous permettra d’approfondir votre réflexion sur la conversion missionnaire de l’Église tout en vous donnant des pistes pour mettre cette dernière en pratique. D’ici là, sachez que nous avons reçu Mgr Alain Faubert en studio et nous serons en mesure de vous présenter cette entrevue dans les semaines à venir dans le cadre de notre nouvelle émission « Église en Sortie ».

Évangile. Prophétie. Espérance.

C’est le thème de l’année de la vie consacrée que l’Église vient de célébrée. Lancée en novembre 2014, elle s’est achevée le 2 février 2016 par un Jubilé des consacrés au Vatican et présidé par le pape François. Au-dessus de 6000 hommes et femmes étaient à Rome pour cet événement majeur qui marquait en même temps la fête de la Présentation de Jésus au Temple, connu aussi en Orient comme la fête de la rencontre. C’est d’ailleurs à partir de cette thématique que le Pape a construit son homélie. « [Jésus] se présente à nous comme la surprise éternelle de Dieu; en cet enfant né pour tous se rencontrent le passé, fait de mémoire et de promesse, et l’avenir, plein d’espérance ».

C’est cela la vie consacrée. Elle commence par une rencontre avec Jésus qui change tout. L’appel est une grâce de Dieu. Elle permet à ceux et celles qui la reçoivent d’aller à la rencontre des autres. « Hommes et femmes consacrés sont appelés à être un signe concret et prophétique de cette proximité de Dieu » affirmait le Pape dans cette même homélie. En effet, les hommes et femmes consacrés sont au front de la « fragilité et du péché » de l’humanité. Leur vie pointe vers Dieu et indique le chemin de la sainteté. Ils sont une voix prophétique dans un monde qui aujourd’hui perd son sens de Dieu et ils défient les normes culturelles de notre temps et nous présentent une alternative, qu’il est possible de vivre une vie ordonnée au Christ.

C’est pourquoi le Pape a déclaré une année pour la vie consacrée. Pour mettre les projecteurs sur la place indispensable des personnes consacrées dans la vie et la mission de l’Église. Lui-même religieux, un jésuite, le Pape a senti l’urgence de raviver la vocation des consacrés, une vocation qui est menacée dans plusieurs parties du monde. La crise vocationnelle est particulièrement évidente en Amérique du Nord, en Europe et en Amérique latine. Mais sur ce point, le Saint Père invite les personnes à ne pas désespérer. « Il ne faut pas se décourager quand les résultats ne correspondent pas aux attentes » (Discours du pape François aux formateurs de personnes consacrées, 11 avril 2015, Vatican). Il ne faut pas se décourager, mais leur demander de prier beaucoup et d’avoir toujours un discernement aiguisé. À l’opposé, l’Asie et l’Afrique font aujourd’hui l’expérience d’une hausse dans le nombre des vocations. Puis à l’heure actuelle, on compte environ 900 000 hommes et femmes consacrés dans le monde. Soit presque le double du nombre de prêtres. De ces quelques milliers de personnes consacrées, 75 à 80% sont des femmes.

Grâce à l’amitié de quelques religieuses dans ma propre vie, j’ai gouté un peu plus à l’amour de Dieu et à son immense bienveillance. Elles m’ont permis d’avoir un endroit où m’arrêter, me reposer et prier. Ce sont souvent elles qui me ramenaient à la terre et au devoir du moment quand je voulais m’enfuir de mes responsabilités. Elles m’ont appris à ne jamais oublier cette première rencontre avec le Christ, de ne jamais se fatiguer de s’étonner devant Lui.

Le pape Jean Paul II a publié une exhortation apostolique, Vita Consecrata, en 1996, deux ans après le synode sur la vie consacrée. Il soutenait que celle-ci est « une partie intégrante de la vie de l’Église ». Prions pour toutes ces personnes et disons merci pour ce qu’elles sont. Nous venons de les fêter pendant une année entière. Pourtant, leur consécration est pour la vie et l’Église aura toujours besoin de ces hommes et femmes amoureux de Dieu et de ses enfants.

Le pape François, un jésuite profondément ignatien

PopeJesuit

Par le père Schineller, s.j.                                                                               Photo : CNS/Paul Haring

Un premier Pape jésuite ! Maintenant que nous nous sommes remis de la surprise et de l’onde de choc que cette nouvelle a suscitées, qu’est-ce que cela signifie ? De quelle façon pouvons-nous dire que le pape François est, à la fois, profondément ignatien et jésuite ? Je vois un lien entre François et Saint Ignace, un lien que François lui-même a reconnu publiquement. On trouve son affirmation originale dans la phrase latine, difficilement traduisible, et que le Pape a utilisée à plusieurs reprises : « Non coerceri maximo, contineri tamen a minimo, divinum est » ce qui signifie « Être contenu par le plus petit, c’est cela qui est divin ».

Cette maxime fut composée en 1640 dans le but de décrire le mieux possible le génie de Saint Ignace, sa capacité à garder ensemble le petit et le grand, le global et le local dans une tension qui, à première vue, les opposent. Saint Ignace, dans sa vision globale et son désir de mettre le feu au monde, a pu passer les seize dernières années de sa vie à travailler dans sa chambre de Rome à écrire la constitution des Jésuites. En ce sens, le spécialiste de la pensée ignatienne Hugo Rahner a écrit à propos de cette maxime « qu’aucune description d’Ignace n’a jamais égalé ces mots ».

Le fait que le pape François cite cette maxime manifeste, je crois, la manière dont il perçoit lui-même sa relation avec l’esprit et le cœur de Saint Ignace. Le pape essaie de garder à l’esprit, à la fois, une vision d’ensemble et des rêves grandioses avec une attention particulière pour les pauvres et ceux qui sont dans les périphéries en étant au service des plus vulnérables et ceux qui sont dans le besoin. Ainsi, dans un essai de 1981 intitulé « Leadership, les petits détails d’une vision globale », Bergoglio écrit que, dans cette même maxime « « Non coerceri maximo, contineri tamen a minimo, divinum est », on trouve un heureux équilibre dans l’attitude à avoir devant les petites et les grandes choses ». Il explique que Saint Ignace était en mesure de combiner la sévérité et la douceur, la rigueur et la gentillesse. Il a toujours été prêt à faire des exceptions. La clef de ce discernement était, dans un premier temps, de savoir juger ce qui est grand et ce qui est petit pour ensuite corriger le grand et le brillant pour qu’il n’oublie pas le petit. C’est de cette façon qu’il est possible de garder à l’esprit le tout, la vision globale.

Dans son livre « Esprit ouvert, cœurs fidèles », écrit alors qu’il était encore Archevêque, Bergoglio parle ainsi contre l’aphasie : «  Occasionnellement, cette attitude se révèle en ceux qui élaborent de magnifiques plans sans se soucier des moyens concrets pour les réaliser. De la même manière, on voit cela chez ceux qui deviennent tellement accaparés par les petits détails de chaque moment qu’ils ne peuvent plus voir au-delà de ces derniers et contempler le grand plan de Dieu. Nous faisons bien de rappeler l’épigraphe attribuée à Saint Ignace : « ne pas être accaparé par ce qui est le plus grand alors que nous devons être attentif à ce qui est le plus petit, voilà ce qui est divin ». [Read more…]

Message du pape François pour le Carême 2016

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«C’est la miséricorde que je veux, et non les sacrifices»(Mt 9,13) Les œuvres de miséricorde dans le parcours jubilaire

1. Marie, icône d’une Eglise qui évangélise parce qu’elle a été évangélisée

Dans la Bulle d’indiction du Jubilé, j’ai invité à faire en sorte que « le Carême de cette Année Jubilaire [soit] vécu plus intensément comme un temps fort pour célébrer et expérimenter la miséricorde de Dieu » ( Misericordiae vultus, n. 17). Par le rappel de l’écoute de la Parole de Dieu et l’initiative « 24 heures pour le Seigneur », j’ai voulu souligner la primauté de l’écoute priante de la Parole, plus particulièrement de la Parole prophétique. La miséricorde de Dieu est certes une annonce faite au monde: cependant chaque chrétien est appelé à en faire l’expérience personnellement. C’est pourquoi, en ce temps de Carême, j’enverrai les Missionnaires de la

Miséricorde afin qu’ils soient pour tous un signe concret de la proximité et du pardon de Dieu. Parce qu’elle a accueilli la Bonne Nouvelle annoncée par l’archange Gabriel, Marie chante prophétiquement dans son Magnificat la miséricorde par laquelle Dieu l’a choisie. La Vierge de Nazareth, promise comme épouse à Joseph, devient ainsi l’icône parfaite de l’Eglise qui évangélise car elle a été et demeure constamment évangélisée par l’œuvre de l’Esprit Saint qui a fécondé son sein virginal. Dans la tradition prophétique – et déjà au niveau étymologique – la miséricorde est étroitement liée aux entrailles maternelles (rahamim) et à une bonté généreuse, fidèle et compatissante (hesed) qui s’exerce dans les relations conjugales et parentales.

2. L’alliance de Dieu avec les hommes : une histoire de miséricorde

Le mystère de la miséricorde divine se dévoile au cours de l’histoire de l’alliance entre Dieu et son peuple Israël. Dieu, en effet, se montre toujours riche en miséricorde, prêt à reverser sur lui en toutes circonstances une tendresse et une compassion viscérales, particulièrement dans les moments les plus dramatiques, lorsque l’infidélité brise le lien du pacte et que l’alliance requiert d’être ratifiée de façon plus stable dans la justice et dans la vérité. Nous nous trouvons ici face à un véritable drame d’amour où Dieu joue le rôle du père et du mari trompé, et Israël celui du fils ou de la fille, et de l’épouse infidèles. Ce sont les images familières, comme nous le voyons avec Osée (cf. Os 1-2), qui expriment jusqu’à quel point Dieu veut se lier à son peuple.

Ce drame d’amour atteint son point culminant dans le Fils qui s’est fait homme. Dieu répand en lui sa miséricorde sans limites, au point d’en faire la « Miséricorde incarnée » (Misericordiae Vultus, n. 8). En tant qu’homme, Jésus de Nazareth est fils d’Israël dans le plein sens du terme. Il l’est au point d’incarner cette écoute parfaite de Dieu demandée à tout Juif par le Shemà qui constitue, aujourd’hui encore, le cœur de l’alliance de Dieu avec Israël : « Ecoute, Israël : le Seigneur notre Dieu est le seul Seigneur. Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de toutes tes forces » (Dt 6, 4-5). Le Fils de Dieu est l’Epoux qui met tout en œuvre pour conquérir l’amour de son Epouse. Il lui est lié par son amour inconditionnel qui se manifeste dans les noces éternelles avec elle.

Ceci constitue le cœur vibrant du kérygme apostolique où la miséricorde divine tient une place centrale et fondamentale. Il est « la beauté de l’amour salvifique de Dieu manifesté en Jésus-Christ, mort et ressuscité » (Exhort. apost. Evangelii gaudium, n. 36), cette première annonce « que l’on doit toujours écouter de nouveau de différentes façons, et que l’on doit toujours annoncer de nouveau durant la catéchèse » (Ibid., n. 164). La miséricorde alors « illustre le comportement de Dieu envers le pécheur, lui offrant une nouvelle possibilité de se repentir, de se convertir et de croire » (Misericordiae vultus, n. 21), restaurant vraiment ainsi la relation avec Lui. En Jésus Crucifié, Dieu veut rejoindre l’homme pécheur jusque dans son éloignement le plus extrême, précisément là où il s’est égaré et éloigné de Lui. Et ceci, il le fait dans l’espoir de réussir finalement à toucher le cœur endurci de son Épouse.

3. Les œuvres de miséricorde

La miséricorde de Dieu transforme le cœur de l’homme et lui fait expérimenter un amour fidèle qui le rend capable d’être, à son tour, miséricordieux. C’est à chaque fois un miracle que la miséricorde divine puisse se répandre dans la vie de chacun de nous, en nous incitant à l’amour du prochain et en suscitant ce que la tradition de l’Eglise nomme les œuvres de miséricorde corporelles et spirituelles. Elles nous rappellent que notre foi se traduit par des actes concrets et quotidiens, destinés à aider notre prochain corporellement et spirituellement, et sur lesquels nous serons jugés : le nourrir, le visiter, le réconforter, l’éduquer. C’est pourquoi j’ai souhaité que « le peuple chrétien réfléchisse durant le Jubilé sur les œuvres de miséricorde corporelles et spirituelles. Ce sera une façon de réveiller notre conscience souvent endormie face au drame de la pauvreté, et de pénétrer toujours davantage le cœur de l’Evangile, où les pauvres sont les destinataires privilégiés de la miséricorde divine » (Ibid., n. 15). Dans la personne du pauvre, en effet, la chair du Christ « devient de nouveau visible en tant que corps torturé, blessé, flagellé, affamé, égaré… pour être reconnu par nous, touché et assisté avec soin » (Ibid.). Inouï et scandaleux mystère qui prolonge dans l’Histoire la souffrance de l’Agneau innocent, buisson ardent brûlant d’un amour gratuit, et devant lequel nous ne pouvons, à la suite de Moïse, qu’ôter nos sandales (cf. Ex 3,5) ; et ceci plus encore quand ce pauvre est notre frère ou notre sœur en Christ qui souffre à cause de sa foi.

Face à cet amour, fort comme la mort (cf. Ct 8,6), le pauvre le plus misérable est celui qui n’accepte pas de se reconnaître comme tel. Il croit être riche mais, en réalité, il est le plus pauvre des pauvres. Et s’il est tel, c’est parce qu’il est esclave du péché qui le pousse à user de la richesse et du pouvoir non pas pour servir Dieu et les autres, mais pour étouffer en lui l’intime conviction de n’être, lui aussi, rien d’autre qu’un pauvre mendiant. D’autant plus grands sont le pouvoir et les richesses dont il dispose, d’autant plus grand est le risque que cet aveuglement devienne mensonger. Il en vient à ne même plus vouloir voir le pauvre Lazare qui mendie à la porte de sa maison (cf. Lc 16, 20-21), figure du Christ qui, dans les pauvres, mendie notre conversion. Lazare est cette opportunité de nous convertir que Dieu nous offre et que peut-être nous ne voyons pas. Cet aveuglement est accompagné d’un délire orgueilleux de toute-puissance, dans lequel résonne, de manière sinistre, ce démoniaque « vous serez comme des dieux » (Gn 3,5), qui est à la racine de tout péché. Un tel délire peut également devenir un phénomène social et politique, comme l’ont montré les totalitarismes du XXème siècle, et comme le montrent actuellement les idéologies de la pensée unique et celles de la technoscience qui prétendent réduire Dieu à l’insignifiance et les hommes à des masses qu’on peut manipuler. Ceci, de nos jours, peut être également illustré par les structures de péché liées à un modèle erroné de développement fondé sur l’idolâtrie de l’argent qui rend indifférentes au destin des pauvres les personnes et les sociétés les plus riches, qui leur ferment les portes, refusant même de les voir.

Pour tous, le Carême de cette Année jubilaire est donc un temps favorable qui permet finalement de sortir de notre aliénation existentielle grâce à l’écoute de la Parole et aux œuvres de miséricorde. Si à travers les œuvres corporelles nous touchons la chair du Christ dans nos frères et nos sœurs qui ont besoin d’être nourris, vêtus, hébergés, visités, les œuvres spirituelles, quant à elles, – conseiller, enseigner, pardonner, avertir, prier – touchent plus directement notre condition de pécheurs. C’est pourquoi les œuvres corporelles et les œuvres spirituelles ne doivent jamais être séparées. En effet, c’est justement en touchant la chair de Jésus Crucifié dans le plus nécessiteux que le pécheur peut recevoir en don la conscience de ne se savoir lui-même rien d’autre qu’un pauvre mendiant. Grâce à cette voie, « les hommes au cœur superbe », « les puissants » et « les riches », dont parle le Magnificat ont la possibilité de reconnaître qu’ils sont, eux aussi, aimés de façon imméritée par le Christ Crucifié, mort et ressuscité également pour eux. Cet amour constitue la seule réponse à cette soif de bonheur et d’amour infinis que l’homme croit à tort pouvoir combler au moyen des idoles du savoir, du pouvoir et de l’avoir. Mais il existe toujours le danger qu’à cause d’une fermeture toujours plus hermétique à l’égard du Christ, qui dans la personne du pauvre continue à frapper à la porte de leur cœur, les hommes au cœur superbe, les riches et les puissants finissent par se condamner eux-mêmes à sombrer dans cet abîme éternel de solitude qu’est l’enfer. C’est alors que résonnent à nouveau, pour eux comme pour nous tous, les paroles ardentes d’Abraham : « Ils ont Moïse et les Prophètes, qu’ils les écoutent ! » (Lc 16,29). Cette écoute agissante nous préparera le mieux à fêter la victoire définitive sur le péché et sur la mort de l’Epoux qui est désormais ressuscité, et qui désire purifier sa future Épouse dans l’attente de son retour.

Ne laissons pas passer en vain ce temps de Carême favorable à la conversion ! Nous le demandons par l’intercession maternelle de la Vierge Marie, qui, la première, face à la grandeur de la miséricorde divine dont elle a bénéficié gratuitement, a reconnu sa propre petitesse (cf. Lc 1,48) en se reconnaissant comme l’humble Servante du Seigneur (cf. Lc 1,38).

FRANCISCUS

Du Vatican, 4 octobre 2015

Fête de Saint-François d’Assise

Conclusion de la Semaine de prière pour l’Unité des chrétiens

Texte en provenance du site français de Radio Vatican:

(RV) Le Pape François a présidé ce lundi soir, 25 janvier 2016, en la basilique de Saint-Paul-Hors-les-Murs, une célébration œcuménique pour conclure la Semaine de prière pour l’Unité des chrétiens.

Le Pape a traversé la Porte Sainte (ouverte officiellement le 13 décembre dernier) avec le métropolite Gennadios, représentant du Patriarcat œcuménique d Constantinople, et avec Sir David Moxon, évêque anglican néo-zélandais, représentant personnel à Rome de l’archevêque de Canterbury, «pour rappeler que l’unique porte qui nous conduit au salut est Jésus-Christ notre Seigneur, le visage miséricordieux du Père.»

Dans son homélie, en ce 25 janvier qui marque la commémoration liturgique de la Conversion de Saint Paul, François s’est appuyé sur l’expérience de Paul sur le chemin de Damas pour rappeler que ce bouleversement «n’était pas d’abord un changement moral, mais une expérience transformante de la grâce de Dieu, et en même temps l’appel à une nouvelle mission, celle d’annoncer à tous ce Jésus qu’avant il persécutait en persécutant ses disciples». Une mission qui ne se fondait donc pas sur ses mérites, mais sur «la bonté de Dieu».

«Pour les premiers chrétiens, comme aujourd’hui pour nous tous, baptisés, c’est un motif de réconfort et de constante stupeur de savoir avoir été choisis pour faire partie du dessein de salut de Dieu, acté en Jésus-Christ et dans l’Église», a rappelé le Pape. Tout repose donc sur l’appel de Dieu : «Nous pouvons progresser sur la voie de la pleine communion visible entre les chrétiens, pas seulement quand nous nous rapprochons les uns des autres, mais surtout dans la mesure à laquelle nous nous convertissons au Seigneur, qui par sa grâce nous choisit et nous appelle à être ses disciples.»

«L’unité se fait en chemin», a lancé le Pape en sortant de son texte, en appelant que les chrétiens des différentes Églises travaillent ensemble à la diffusion de l’Évangile.

Un appel au pardon et à la miséricorde

Le Pape François a voulu situer ce temps de prière dans la démarche du Jubilé de la Miséricorde et dans une demande de pardon, utilisant des termes proches de ceux utilisés par Saint Jean-Paul II lors du Jubilé de l’an 2000 : «comme évêque de Rome et pasteur de l’Église catholique, je veux invoquer miséricorde et pardon pour les comportements non évangéliques tenus de la part de catholiques dans les confrontations avec des chrétiens d’autres Églises, a déclaré le Pape François. Dans le même temps, j’invite tous les frères et sœurs catholiques à pardonner si, aujourd’hui ou dans le passé, ils ont subi des offenses d’autres chrétiens. Nous ne pouvons pas annuler ce qui s’est passé, mais nous ne voulons pas permettre que le poids des fautes passées continue à falsifier nos rapports. La miséricorde de Dieu renouvellera nos relations.»

Le Pape a aussi évoqué les martyrs communs aux différentes communautés chrétiennes : «Ici devant la tombe de Saint Pierre, apôtre et martyr, (…) nous sentons que notre humble requête est soutenus par l’intercession de la multitude des martyrs chrétiens d’hier et d’aujourd’hui. Ils ont répondu avec générosité à l’appel du Seigneur, ils ont donné un témoignage fidèle, avec leur vie, des œuvres merveilleuses que Dieu a accompli pour nous, et expérimentent déjà la pleine communion à la présence de Dieu le Père». Un exemple qui manifeste «l’œcuménisme du sang», a rappelé le Pape, sortantde son texte pour reprendre une expression qu’il utilise régulièrement.

Dans un geste improvisé, à la fin de la cérémonie, le Pape a demandé aux deux représentants des Églises sœurs de venir à ses côtés pour qu’ils puissent donner ensemble la bénédiction finale.

(CV)

Message du pape François pour la 50e journée des communications sociales

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(Photo: Courtoisie Catholic News Service)

Vous trouverez ci-dessous le texte complet du message du pape François pour la 50e journée des communications sociales:

Communication et miséricorde: une rencontre féconde

Chers frères et sœurs,

L’Année Sainte de la Miséricorde nous invite à réfléchir sur le rapport entre communication et miséricorde. En effet l’Église, unie au Christ, incarnation vivante de Dieu Miséricordieux, est appelée à vivre la miséricorde comme un trait distinctif de tout son être et de tout son agir. Ce que nous disons et la manière dont nous le disons, chaque parole et chaque geste, devrait pouvoir exprimer la compassion, la tendresse et le pardon de Dieu pour tous. L’amour, par nature, est communication, il conduit à s’ouvrir et non pas à s’isoler. Et si notre cœur et nos gestes sont animés par la charité, par l’amour divin, notre communication sera porteuse de la force de Dieu.

En tant qu’enfants de Dieu, nous sommes appelés à communiquer avec tous, sans exclusion. En particulier, c’est le propre du langage et des actions de l’Église que de transmettre la miséricorde, en sorte de toucher les cœurs des personnes et de les soutenir sur le chemin vers la plénitude de la vie que Jésus Christ, envoyé par le Père, est venu apporter à tous. Il s’agit d’accueillir en nous et de répandre autour de nous la chaleur de l’Église Mère, pour que Jésus soit connu et aimé ; cette chaleur qui donne consistance aux paroles de la foi et qui allume dans la prédication et dans le témoignage l’ « étincelle » qui les rend vivantes.

La communication a le pouvoir de créer des ponts, de favoriser la rencontre et l’inclusion, enrichissant ainsi la société. Comme il est beau de voir des personnes engagées à choisir avec soin des paroles et des gestes pour dépasser les incompréhensions, guérir la mémoire blessée et construire la paix et l’harmonie. Les paroles peuvent jeter des ponts entre les personnes, les familles, les groupes sociaux, les peuples ; que ce soit dans le domaine physique ou dans le domaine numérique. Que les paroles et les actions soient donc telles qu’elles nous aident à sortir des cercles vicieux des condamnations et des vengeances, qui continuent à piéger les individus et les nations, et qui conduisent à s’exprimer avec des messages de haine. La parole du chrétien, au contraire, se propose de faire grandir la communion et, même quand il faut condamner le mal avec fermeté, elle cherche à ne jamais briser la relation et la communication.

Je voudrais donc inviter toutes les personnes de bonne volonté à redécouvrir le pouvoir de la miséricorde de guérir les relations déchirées, et de ramener la paix et l’harmonie entre les familles et dans les communautés. Nous savons tous de quelle manière les vieilles blessures et les ressentiments peuvent piéger les personnes et les empêcher de communiquer et de se réconcilier. Et ceci vaut aussi pour les relations entre les peuples. Dans tous ces cas, la miséricorde est capable de créer une nouvelle manière de parler et de dialoguer, comme l’a ainsi très bien exprimé Shakespeare : « La miséricorde n’est pas une obligation. Elle descend du ciel comme la fraîcheur de la pluie sur la terre. Elle est une double bénédiction : elle bénit celui qui la donne et celui qui la reçoit » (Le Marchand de Venise, Acte 4, Scène 1).

Il est souhaitable que le langage de la politique et de la diplomatie se laisse aussi inspirer par la miséricorde, qui ne donne jamais rien pour perdu. Je fais appel surtout à tous ceux qui ont des responsabilités institutionnelles, politiques et dans la formation de l’opinion publique, pour qu’ils soient toujours vigilants sur la manière de s’exprimer envers celui qui pense ou agit autrement, et aussi envers celui qui peut s’être trompé. Il est facile de céder à la tentation d’exploiter de semblables situations et d’alimenter ainsi les flammes de la défiance, de la peur, de la haine. Il faut au contraire du courage pour orienter les personnes dans des processus de réconciliation ; et c’est justement cette audace positive et créative qui offre de vraies solutions à de vieux conflits, et l’occasion de réaliser une paix durable. « Bienheureux les miséricordieux, parce qu’ils obtiendront miséricorde […] Bienheureux les artisans de paix, parce qu’ils seront appelés fils de Dieu » (Mt 5, 7.9).

Comme je voudrais que notre manière de communiquer, et aussi notre service de pasteurs dans l’Église, n’exprime jamais l’orgueil fier du triomphe sur un ennemi, ni n’humilie ceux que la mentalité du monde considère comme perdants et à rejeter ! La miséricorde peut aider à tempérer les adversités de la vie et à offrir de la chaleur à tous ceux qui ont seulement connu la froideur du jugement. Que le style de notre communication soit en mesure de dépasser la logique qui sépare nettement les pécheurs des justes. Nous pouvons et devons juger des situations de péché – violence, corruption, exploitation, etc. – mais nous ne pouvons pas juger les personnes, parce que seul Dieu peut lire en profondeur dans leur cœur. C’est notre devoir d’avertir celui qui se trompe, en dénonçant la méchanceté et l’injustice de certains comportements, afin de libérer les victimes et de soulager celui qui est tombé. L’Évangile de Jean nous rappelle que « La vérité vous rendra libres » (Jn 8, 32). Cette vérité est, en définitive, le Christ lui-même, dont la douce miséricorde est la mesure de notre manière d’annoncer la vérité et de condamner l’injustice. C’est notre principal devoir d’affirmer la vérité avec amour (Cf. Ep 4, 15). Seules les paroles prononcées avec amour et accompagnées de douceur et de miséricorde touchent les cœurs des pécheurs que nous sommes. Des paroles et des gestes durs ou moralisants risquent d’aliéner plus tard ceux que nous voudrions conduire à la conversion et à la liberté, en renforçant leur sens du refus et de la défense.

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