Synthèse de présentation de l’exhortation apostolique « Amoris Laetitia » sur l’amour et la famille

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Vous trouverez ci-dessous le texte de synthèse présenté lors de la conférence de Presse de présentation de l’exhortation apostolique Amoris Laetitia sur l’amour dans la famille:

« Amoris Laetitia » (AL – « La joie dans l’amour »), l’Exhortation apostolique post-synodale « sur l’amour dans la famille » qui ne porte pas par hasard la date du 19 mars, jour de la Solennité de Saint Joseph, rassemble les résultats des deux Synodes sur la famille convoqués par le Pape François en 2014 et 2015. Les Relations conclusives des deux Synodes y sont largement citées, ainsi que d’autres documents et enseignements des prédécesseurs du Pape François et des nombreuses catéchèses qu’il a prononcé sur la famille. Comme cela est déjà arrivé avec d’autres documents magistériels, le Pape puise également dans des documents de différentes Conférences épiscopales du monde (Kenya, Australie, Argentine…) et cite des personnalités bien connues telles que Martin Luther King ou Erich Fromm. A noter, une citation du film « Le Festin de Babette », que le Pape a souhaité évoquer pour expliquer le concept de gratuité.

Préambule

L’Exhortation apostolique frappe par son amplitude et son articulation. Elle est divisée en neuf chapitres et plus de 300 paragraphes. Elle s’ouvre avec sept paragraphes introductifs qui révèlent la conscience de la complexité du thème et de l’approfondissement qu’il requiert. Il y est dit que les interventions des Pères du Synode ont composé un « magnifique polyèdre » (AL 4) qui doit être préservé. En ce sens, le Pape écrit que « tous les débats doctrinaux, moraux ou pastoraux ne doivent pas être tranchés par des interventions magistérielles ». Ainsi concernant certaines questions, « dans chaque pays ou région, peuvent être cherchées des solutions plus inculturées, attentives aux traditions et aux défis locaux. Car “les cultures sont très diverses entre elles et chaque principe général […] a besoin d’être inculturé, s’il veut être observé et appliqué ” » (AL 3). Ce principe d’inculturation se révèle très important jusque dans la manière de formuler et de comprendre les problèmes qui, au-delà des questions dogmatiques bien définies par le Magistère de l’Eglise, ne peuvent être « mondialisées ».

Mais surtout, le Pape affirme d’emblée et avec clarté qu’il faut sortir de l’opposition stérile entre l’angoisse du changement et l’application pure et simple de normes abstraites. Il écrit : « Les débats qui se déroulent dans les moyens de communication ou bien dans les publications et même entre les ministres de l’Eglise, vont d’un désir effréné de tout changer sans une réflexion suffisante ou sans fondement, à la prétention de tout résoudre en appliquant des normes générales ou bien en tirant des conclusions excessives de certaines réflexions théologiques » (AL 2) .

Chapitre premier : « A la lumière de la Parole »

Ce préambule étant posé, le Pape articule sa réflexion à partir des Saintes Ecritures dans ce premier chapitre qui se développe comme une méditation sur le psaume 128, caractéristique tant de la liturgie nuptiale hébraïque que chrétienne. La Bible « abonde en familles, en générations, en histoires d’amour et en crises familiales » (AL 8) et à partir de cet état de fait, on peut méditer sur la manière dont la famille n’est pas un idéal abstrait, mais une « œuvre artisanale » (AL 16) qui s’exprime avec tendresse (AL 28) mais qui s’est confrontée aussi et dès le début au péché, quand la relation d’amour s’est transformée en une domination (cfr AL 19). Alors la Parole de Dieu « ne se révèle pas comme une séquence de thèses abstraites, mais comme une compagne de voyage, y compris pour les familles qui sont en crise ou sont confrontées à une souffrance ou à une autre, et leur montre le but du chemin » (AL 22).

Chapitre deux : « La réalité et les défis de la famille »

A partir du terrain biblique, le Pape considère, dans le deuxième chapitre, la situation actuelle des familles, en gardant « les pieds sur terre » (AL 6), en puisant amplement dans les Relations conclusives des deux Synodes, et en affrontant de nombreux défis : du phénomène migratoire aux négations idéologiques de la différence des sexes (idéologie du genre) ; de la culture du provisoire à la mentalité antinataliste et à l’impact des biotechnologies dans le domaine de la procréation ; du manque de logements et de travail à la pornographie et aux abus sur mineurs ; de l’attention aux handicapés, au respect des personnes âgées ; de la déconstruction juridique de la famille aux violences à l’encontre des femmes. Le Pape insiste sur le caractère concret qui est une donnée fondamentale de l’Exhortation. Le caractère concret et le réalisme établissent une différence essentielle entre la « théorie » d’interprétation de la réalité, et les « idéologies ».

Citant Familiaris consortio, le Pape François affirme qu’il « convient de prêter attention à la réalité concrète, parce que “les exigences, les appels de l’Esprit se font entendre aussi à travers les événements de l’histoire”, à travers lesquels “ l’Église peut être amenée à une compréhension plus profonde de l’inépuisable mystère du mariage et de la famille”» (AL 31). Sans écouter la réalité, il est impossible de comprendre aussi bien les exigences du présent, que les appels de l’Esprit. Le Pape note qu’en raison de l’individualisme exaspéré, il est aujourd’hui difficile de se donner avec générosité à une autre personne (cfr AL 33). Voilà une description intéressante de la situation : « On craint la solitude, on désire un milieu de protection et de fidélité, mais en même temps grandit la crainte d’être piégé dans une relation qui peut retarder la réalisation des aspirations personnelles » (AL 34).

L’humilité du réalisme aide à ne pas présenter « un idéal théologique du mariage trop abstrait, presqu’artificiellement construit, loin de la situation concrète et des possibilités effectives des familles réelles » (AL36). L’idéalisme nous empêche de prendre le mariage pour ce qu’il est, c’est-à-dire « un chemin dynamique de développement et d’épanouissement ». Pour cette raison, il ne faut pas croire que pour défendre la famille, il suffise d’insister « seulement sur des questions doctrinales, bioéthiques et morales, sans encourager l’ouverture à la grâce » (AL 37). Le Pape invite à l’autocritique face à une présentation inadéquate de la réalité matrimoniale et familiale et il insiste sur le fait qu’il est nécessaire d’accorder de la place à la formation des consciences des fidèles : « Nous sommes appelés à former les consciences, mais non à prétendre nous substituer à elles » (AL 37). Jésus proposait un idéal exigeant mais « ne renonçait jamais à une proximité compatissante avec les personnes fragiles comme la samaritaine ou la femme adultère » (AL 38).

Chapitre trois : « L’amour dans le mariage »

Le troisième chapitre est consacré à un certain nombre d’éléments essentiels de l’enseignement de l’Eglise concernant le mariage et la famille. L’existence de ce chapitre est important parce qu’il présente de manière synthétique, en 30 paragraphes, la vocation de la famille selon l’Evangile et la manière dont elle a été reçue par l’Eglise à travers les époques, surtout sur le thème de l’indissolubilité, du caractère sacramentel du mariage, de la transmission de la vie et de l’éducation des enfants. La constitution pastorale Gaudium et Spes du Concile Vatican II, l’Encyclique Humanae vitae de Paul VI et l’Exhortation apostolique Familiaris consortio de Jean-Paul II sont amplement citées.

Le regard est vaste et inclut aussi les « situations imparfaites ». On peut lire en effet : « “Le discernement de la présence des semina Verbi dans les autres cultures (cf. Ad Gentes, n. 11) peut être appliqué aussi à la réalité conjugale et familiale. Outre le véritable mariage naturel, il existe des éléments positifs présents dans les formes matrimoniales d’autres traditions religieuses”, même si les ombres ne manquent pas non plus » (AL 77). La réflexion inclut aussi «  les familles blessées » devant lesquelles le Pape affirme, en citant la Relatio finalis du Synode de 2015 – qu’« il faut toujours rappeler un principe général : ‘‘Les pasteurs doivent savoir que, par amour de la vérité, ils ont l’obligation de bien discerner les diverses situations’’ (Familiaris consortio, n. 84). Le degré de responsabilité n’est pas le même dans tous les cas et il peut exister des facteurs qui limitent la capacité de décision. C’est pourquoi, tout en exprimant clairement la doctrine, il faut éviter les jugements qui ne tiendraient pas compte de la complexité des diverses situations ; il est également nécessaire d’être attentif à la façon dont les personnes vivent et souffrent à cause de leur condition » (AL 79).

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Homélie du pape François lors de la Messe du dimanche de la Divine Miséricorde

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« Il y a encore beaucoup d’autres signes que Jésus a faits en présence des disciples et qui ne sont pas écrits dans ce livre » (Jn 20, 30). L’Évangile est le livre de la miséricorde de Dieu, à lire et à relire, parce que tout ce que Jésus a dit et accompli est une expression de la miséricorde du Père. Toutefois, tout n’a pas été écrit ; l’Évangile de la miséricorde demeure un livre ouvert, où continuer à écrire les signes des disciples du Christ, gestes concrets d’amour, qui sont le meilleur témoignage de la miséricorde. Nous sommes tous appelés à devenir écrivains vivants de l’Évangile, porteurs de la Bonne Nouvelle à tout homme et à toute femme d’aujourd’hui. Nous pouvons le faire en mettant en pratique les œuvres de miséricorde corporelles et spirituelles, qui sont le style de vie du chrétien. Par ces gestes simples et forts, parfois même invisibles, nous pouvons visiter tous ceux qui sont dans le besoin, portant la tendresse et la consolation de Dieu. On poursuit ainsi ce que Jésus a accompli le jour de Pâques, quand il a répandu dans les cœurs des disciples effrayés la miséricorde du Père, soufflant sur eux l’Esprit Saint qui pardonne les péchés et donne la joie.

Toutefois, dans le récit que nous avons écouté émerge un contraste évident : il y a la crainte des disciples, qui ferment les portes de la maison ; de l’autre, il y a la mission de la part de Jésus, qui les envoie dans le monde porter l’annonce du pardon. Il peut y avoir aussi en nous ce contraste, une lutte intérieure entre la fermeture du cœur et l’appel de l’amour à ouvrir les portes closes et à sortir de nous-mêmes. Le Christ, qui par amour est passé à travers les portes closes du péché, de la mort et des enfers, désire entrer aussi chez chacun pour ouvrir tout grand les portes closes du cœur. Lui, qui par la résurrection a vaincu la peur et la crainte qui nous emprisonnent, veut ouvrir tout grand nos portes closes et nous envoyer. La route que le Maître ressuscité nous indique est à sens unique, elle avance dans une seule direction : sortir de nous-mêmes, sortir pour témoigner de la force de guérison de l’amour qui nous a conquis. Nous voyons devant nous une humanité souvent blessée et craintive, qui porte les cicatrices de la douleur et de l’incertitude. Face à l’implorationCapture d’écran 2016-04-03 à 10.04.46 douloureuse de miséricorde et de paix, nous entendons, aujourd’hui adressée à chacun de nous, l’invitation confiante de Jésus : « De même que le Père m’a envoyé, moi aussi, je vous envoie » (v. 21).

Chaque infirmité peut trouver dans la miséricorde de Dieu un secours efficace. Sa miséricorde, en effet, ne s’arrête pas à distance : il désire venir à la rencontre de toutes les pauvretés et libérer des nombreuses formes d’esclavage qui affligent notre monde. Il veut rejoindre les blessures de chacun, pour les soigner. Être apôtres de miséricorde signifie toucher et caresser ses plaies, présentes aussi aujourd’hui dans le corps et dans l’âme de tant de ses frères et sœurs. En soignant ces plaies nous professons Jésus, nous le rendons présent et vivant ; nous permettons à d’autres, de toucher de la main sa miséricorde, de le reconnaître « Seigneur et Dieu » (cf. v. 28), comme fit l’Apôtre Thomas. C’est cela la mission qui nous a été confiée. Tant de personnes demandent d’être écoutées et comprises. L’Évangile de la miséricorde, à annoncer et à écrire dans la vie, cherche des personnes au cœur patient et ouvert, « bons samaritains » qui connaissent la compassion et le silence face au mystère du frère et de la sœur ; il demande des serviteurs généreux et joyeux, qui aiment gratuitement sans rien exiger en échange.

« La paix soit avec vous ! » (v. 21) : c’est le salut que le Christ adresse à ses disciples ; c’est la même paix qu’attendent les hommes de notre temps. Ce n’est pas une paix négociée, ce n’est pas l’arrêt de quelque chose qui ne va pas : c’est sa paix, la paix qui vient du cœur du Ressuscité, la paix qui a vaincu le péché, la mort et la peur. C’est la paix qui ne divise pas, mais unit ; c’est la paix qui ne laisse pas seuls, mais nous fait sentir accueillis et aimés ; c’est la paix qui demeure dans la douleur et fait fleurir l’espérance. Cette paix, comme le jour de Pâques, naît et renaît toujours du pardon de Dieu, qui enlève l’inquiétude du cœur. Être porteuse de sa paix : c’est la mission confiée à l’Église le jour de Pâques. Nous sommes nés dans le Christ comme instruments de réconciliation, pour porter à tous le pardon du Père, pour révéler son visage de seul amour dans les signes de la miséricorde.

Dans le Psaume responsorial il a été proclamé : « Son amour est pour toujours » (117/118, 2). C’est vrai, la miséricorde de Dieu est éternelle ; elle ne finit pas, elle ne s’épuise pas, elle ne se rend pas face aux fermetures, et elle ne se fatigue jamais. Dans ce « pour toujours » nous trouvons un soutien dans les moments d’épreuve et de faiblesse, parce que nous sommes certains que Dieu ne nous abandonne pas : il demeure avec nous pour toujours. Remercions pour son si grand amour, qu’il nous est impossible de comprendre : il si grand ! Demandons la grâce de ne jamais nous fatiguer de puiser la miséricorde du Père et de la porter dans le monde : demandons d’être nous-mêmes miséricordieux, pour répandre partout la force de l’Évangile, pour écrire ces pages de l’Évangile que l’apôtre Jean n’a pas écrites.

[00502-FR.01] [Texte original: Italien]

Message de Pâques du pape François durant la bénédiction « Ubi et Orbi »

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Vous trouverez ci-dessous le texte du pape François prononcé avant la bénédiction Ubi et Orbi:

« Rendez grâce au Seigneur : il est bon, éternel est son amour» (Ps 135, 1).

Chers frères et sœurs, bonnes fêtes de Pâques.
Jésus-Christ, incarnation de la miséricorde de Dieu, est mort par amour sur la croix, et, par
amour, est ressuscité. C’est pourquoi nous proclamons aujourd’hui : Jésus est le Seigneur !

Sa résurrection accomplit pleinement la prophétie du Psaume : la miséricorde de Dieu est éternelle, son amour est pour toujours, il ne mourra jamais. Nous pouvons nous confier totalement à lui, et nous lui rendons grâces parce qu’il est descendu pour nous jusqu’au fond de l’abîme.

Face aux gouffres spirituels et moraux de l’humanité, face aux vides qui s’ouvrent dans les cœurs et qui provoquent la haine et la mort, seule une miséricorde infinie peut nous donner le salut. Seul Dieu peut remplir de son amour ces vides, ces abîmes, et nous permettre de ne pas nous écrouler, mais de continuer à marcher ensemble vers le Terre de la liberté et de la vie.

L’annonce joyeuse de Pâques : Jésus, le crucifié, n’est pas ici, il est ressuscité (cf. Mt 28, 5- 6), nous offre la consolante certitude que l’abîme de la mort a été traversé et, avec lui, le deuil, la plainte et l’angoisse (cf. Ap 21, 4) ont été vaincus. Le Seigneur, qui a souffert l’abandon de ses disciples, le poids d’une condamnation injuste, et la honte d’une mort infâmante, nous rend maintenant participants de sa vie immortelle, et il nous donne son regard de tendresse et de compassion envers les affamés et les assoiffés, les étrangers et les prisonniers, les marginaux et les exclus, les victimes des abus et de la violence. Le monde est rempli de personnes qui souffrent dans leur corps et dans leur esprit, et chaque jour les journaux sont pleins de nouvelles de crimes atroces, commis souvent dans les murs du foyer domestique, et de conflits armés, à grande échelle, qui soumettent des populations entières à des épreuves indicibles.

Que le Christ ressuscité ouvre des chemins d’espérance à la Syrie bien aimée, pays déchiqueté par un long conflit, avec son triste cortège de destructions, de mort, de mépris du droit humanitaire et de décomposition de la cohabitation civile. Nous confions à la puissance du Seigneur ressuscité les discussions en cours, pour que, grâce à la bonne volonté et à la collaboration de tous, on puisse recueillir des fruits de paix et engager la construction d’une société fraternelle, respectueuse de la dignité et des droits de tout citoyen. Que le message de vie, qui a retenti dans la bouche de l’Ange près de la pierre basculée du tombeau, soit victorieux de la dureté des cœurs et promeuve une rencontre féconde des peuples et desCapture d’écran 2016-03-27 à 09.40.03 cultures dans les autres zones du bassin méditerranéen et du Moyen Orient, en particulier en Irak, au Yémen et en Lybie.

Que l’image de l’homme nouveau qui resplendit sur le visage du Christ favorise la cohabitation entre Israéliens et Palestiniens en Terre Sainte, ainsi que la disponibilité patiente et l’engagement quotidien à se dévouer pour construire les bases d’une paix juste et durable, par le moyen de négociations directes et sincères. Que le Seigneur de la vie accompagne aussi les efforts visant à trouver une solution définitive à la guerre en Ukraine, en inspirant et en soutenant également les initiatives d’aide humanitaire, parmi lesquelles la libération des personnes détenues.

Que le Seigneur Jésus, notre Paix (cf. Ep. 2, 14), qui par sa résurrection a vaincu le mal et le péché, stimule en cette fête de Pâques notre proximité aux victimes du terrorisme, forme aveugle et atroce de violence qui ne cesse pas de répandre le sang innocent en diverses parties du monde, comme cela s’est produit dans les récents attentats en Belgique, en Turquie, au Nigéria, au Tchad, au Cameroun et en Côte d’Ivoire. Que les ferments d’espérance et les perspectives de paix en Afrique aboutissent; je pense en particulier au Burundi, au Mozambique, à la République Démocratique du Congo et au Sud Soudan, marqués par des tensions politiques et sociales.

Avec les armes de l’amour, Dieu a vaincu l’égoïsme et la mort ; son Fils Jésus est la porte de la miséricorde grand ouverte à tous. Que son message pascal se projette de plus en plus sur le peuple vénézuélien, qui se trouve dans des conditions difficiles pour vivre, et sur tous ceux qui ont en main les destinées du pays, afin que l’on puisse travailler en vue du bien commun, en cherchant des espaces de dialogue et de collaboration avec tous. Que partout on se dévoue Capture d’écran 2016-03-27 à 09.54.29pour favoriser la culture de la rencontre, la justice et le respect réciproque, qui seuls peuvent garantir le bien être spirituel et matériel des citoyens.

Le Christ ressuscité, annonce de vie pour toute l’humanité, se prolonge au long des siècles, et nous invite à ne pas oublier les hommes et les femmes en chemin, dans la recherche d’un avenir meilleur, file toujours plus nombreuse de migrants et de réfugiés – parmi lesquels de nombreux enfants – fuyant la guerre, la faim, la pauvreté et l’injustice sociale. Ces frères et sœurs rencontrent trop souvent en chemin la mort ou du moins le refus de ceux qui pourraient leur offrir un accueil et de l’aide. Que le rendez-vous du prochain Sommet Humanitaire Mondial n’oublie pas de mettre au centre la personne humaine avec sa dignité et d’élaborer des politiques capables d’assister et de protéger les victimes des conflits et des autres situations d’urgence, surtout les plus vulnérables et tous ceux qui sont persécutés pour des raisons ethniques et religieuses.

En ce jour glorieux, « que notre terre soit heureuse, irradiée de tant de feux » (cf. Exultet ), terre qui est pourtant tellement maltraitée et vilipendée par une exploitation avide de gain qui altère les équilibres de la nature. Je pense en particulier à ces zones touchées par les effets des changements climatiques, qui provoquent souvent la sécheresse ou de violentes inondations, avec, en conséquence, des crises alimentaires en plusieurs endroits de la planète.

Avec nos frères et sœurs qui sont persécutés pour la foi et pour leur fidélité au nom du Christ, et face au mal qui semble avoir le dessus dans la vie de beaucoup de personnes, réécoutons la consolante parole du Seigneur : « Courage ! Moi, je suis vainqueur du monde » (Jn 16, 33). C’est aujourd’hui le jour resplendissant de cette victoire, parce que le Christ a foulé aux pieds la mort, et par sa résurrection il a fait resplendir la vie et l’immortalité (cf. 2Tm 1, 10). « Il nous fait passer de l’esclavage à la liberté, de la tristesse à la joie, du deuil à la fête, des ténèbres à la lumière, de l’esclavage à la rédemption. Disons-lui : Alléluia ! » (Méliton de Sardes, Homélie de Pâques).

A tous ceux qui, dans nos sociétés, ont perdu toute espérance et le goût de vivre, aux personnes âgées écrasées qui, dans la solitude, sentent leur forces diminuer, aux jeunes qui pensent ne pas avoir d’avenir, à tous j’adresse encore une fois les paroles du Ressuscité : « Voici que je fais toutes choses nouvelles…A celui qui a soif, moi, je donnerai l’eau de la source de vie, gratuitement (Ap 21, 5-6).

Que le message rassurant de Jésus nous aide chacun à repartir avec plus de courage pour construire des chemins de réconciliations avec Dieu et avec les frères.
[00469-FR.01] [Texte original: Italien]

Église en sortie 4 mars 2016

Cette semaine à l’émission Église en Sortie, Francis Denis reçoit Carl Hétu, directeur national de l’Association catholique d’aide à l’Orient (CNEWA) dans un reportage sur la Messe pour les chrétiens persécutés du Moyen-Orient. En deuxième partie de l’émission, nous vous présentons une entrevue avec Marie-Claude Lalonde, directrice nationale de l’organisme Aide à l’Église en Détresse (AED). Elle nous en parle à travers la situation des chrétiens persécutés partout dans le monde.

Vers une conversion missionnaire de l’œcuménisme?

blog_1457123346 Photo: Courtoisie Catholic News Service

Il a deux semaines, alors que le pape François se rendait au Mexique pour une visite apostolique, une rencontre historique avait été organisée à Cuba avec le Patriarche orthodoxe russe Kyrill. Lors de cet entretien, les deux évêques chrétiens ont discuté à huis clos pendant plus d’une heure et ont signé une Déclaration commune que d’aucuns ont appelé programme de l’engagement prophétique des églises en ce début de XXIe siècle. En effet, ce document, en 30 points, fait à la fois, état des relations œcuméniques actuelles et des problèmes centraux de notre monde contemporain tout en ouvrant de nouvelles perspectives de solutions à ces deux niveaux.

Un regard tourné vers l’avant

Dans un premier temps, le lieu choisi pour la rencontre avait une valeur symbolique forte. Pour les deux chefs d’église chrétienne, le choix de Cuba soulignait symboliquement que les événements sombres qui entachent l’histoire et qui ont résulté dans le « scandale des divisions entre les chrétiens » ne doivent plus être l’objet principal de l’attention. En effet, « loin des vieilles querelles de l’« Ancien Monde », nous sentons avec une force particulière la nécessité d’un labeur commun des catholiques et des orthodoxes, appelés, avec douceur et respect, à rendre compte au monde de l’espérance qui est en nous (cf. 1 P 3, 15) » (no3). Lieu symbolique s’il en est un, Cuba ne fut pas d’abord choisi pour son caractère politiquement « neutre » mais parce que, même 524 ans après la découverte de Christophe Colomb, l’Amérique est encore le symbole d’un lieu de tous les possibles, d’un lieu où l’on peut croire en la sincérité de l’autre et reconstruire sur le socle solide d’une miséricorde réciproque.

Ce regard renouvelé doit donc permettre non pas de lire le passé dans le but d’alimenter les divisions mais plutôt dans le but de se rendre disponible au projet de Dieu sur nos deux églises. Suivant cette logique, ce nouvel élan devra donc davantage se concentrer sur le présent et, ce, dans le but d’aboutir à un meilleur futur. Ce nouveau regard n’est cependant pas des plus reluisants. Selon les deux chefs d’église, la « civilisation humaine est entrée dans un moment de changement d’époque. Notre conscience chrétienne et notre responsabilité pastorale ne nous permettent pas de rester inactifs face aux défis exigeant une réponse commune. » (no7). Ce tournant de civilisation, accéléré par une nouvelle proximité entre les peuples causée par des moyens de communications toujours

plus performants et une mobilité des populations s’accroissant sans cesse, ne peut plus tolérer une attitude de repli sur soi. On ne peut plus aujourd’hui se conforter dans nos apriori et nos préjugés réciproques. Un dialogue franc et sincère est donc l’unique option pour toutes les institutions, y compris les organisations religieuses. Cela, Kirill et François l’ont mis en pratique par cette rencontre. En ce sens, les deux chefs chrétiens ont donc, à la fois, donné l’exemple à tous ceux qui seraient tentés de se refermer sur eux-mêmes d’une possibilité de rapprochement de ce qui s’était éloigner depuis longtemps (dans ce cas on parle de presque mille ans !) mais ont également manifesté la force sous-jacente à toute réconciliation.

Un programme chargé

Comme je le disais plus tôt, notre monde a de nombreux défis qui nécessitent l’implication et la coopération de tous les acteurs civils et religieux. En effet, les bouleversements environnementaux, la lutte contre les structures de péchés, la pauvreté endémique, les persécutions visant majoritairement aujourd’hui les chrétiens ainsi que le terrorisme international ne sont pas des problèmes isolés. Ainsi, « En cette époque préoccupante est indispensable le dialogue interreligieux. » (no 13). De plus, «  Les communautés chrétiennes mènent une large activité caritative et sociale, apportant une aide diversifiée aux nécessiteux. Orthodoxes et catholiques œuvrent souvent côte à côte. Ils attestent des fondements spirituels communs de la convivance humaine, en témoignant des valeurs évangéliques » (no 14). Cette contribution des chrétiens dans le monde doit donc être mieux appréciée par tous, de ceux qui considère les chrétiens comme des ennemies comme les chrétiens eux-mêmes qui devront retrouver ou intensifier leur engagement social missionnaire.

Cette nouvelle coopération catholique-orthodoxe permettra aussi de manifester que ce travail d’éducation à la vertu est indispensable à toute société digne de ce nom. En ce sens, il est important souligner bon nombre de « limitations actuelles des droits des chrétiens, voire de leur discrimination, lorsque certaines forces politiques, guidées par l’idéologie d’un sécularisme si souvent agressif, s’efforcent de les pousser aux marges de la vie publique » (no 15).

Comme on le dit souvent « L’union fait la force » ! Les circonstances actuelles ne permettent plus que nous restions isolés les uns des autres. Tous les problèmes mentionnés dans cette Déclaration, signée par le Pape et le Patriarche, doivent nous convaincre de la centralité et de la nouvelle pertinence de l’œcuménisme aujourd’hui. Puisse cette rencontre historique être l’occasion d’un nouvel engagement commun entre catholiques et orthodoxes sur les nombreux chantiers spirituels et temporels qui s’imposent à nous en ce moment crucial de l’histoire humaine.

 

Église en sortie (26 février 2016)

Cette semaine à l’émission Église en Sortie, Francis Denis reçoit Mgr Daniel Jodoin, évêque de Bathurst au Nouveau-Brunswick. Dans cette entrevue, Mgr Jodoin parle de la réalité de son diocèse ainsi que des projets pour l’année de la Miséricorde. Dans la deuxième partie de l’émission, nous vous présentons une entrevue réalisée avec Mgr Paul Lortie, évêque de Mont-Laurier et président de l’Association des évêques catholiques du Québec. Il nous parle de la lettre pastorale « Approcher de la mort avec le Christ » et du parcours de réflexion intitulé Les soins de fin de vie à la lumière de la Parole de Dieu.

Discours final du pape François à Ciudad Juarez

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Ci-dessous le discours final du Pape à la Foire de Ciudad Juarez, mercredi 17 février 2016

Monseigneur José Guadalupe Torres Campos, Evêque de Ciudad Juárez, Chers frères dans l’Episcopat, Distinguées Autorités, Mesdames et Messieurs,

Vous tous, chers amis,

Merci beaucoup, Monseigneur, pour votre aimable adresse d’au revoir ; c’est le moment de remercier le Seigneur pour m’avoir permis cette visite au Mexique. Je ne voudrais pas m’en aller sans remercier pour l’effort de ceux qui ont rendu possible ce pèlerinage. Je remercie toutes les autorités fédérales et locales, pour l’intérêt et l’aide prévenante avec lesquels vous avez contribué au bon déroulement de cette initiative. En même temps, je voudrais remercier de grand cœur tous ceux qui ont collaboré de diverses manières à cette visite pastorale.Capture d’écran 2016-02-17 à 19.47.05

Merci à tant de serviteurs anonymes qui, dans le silence, ont donné le meilleur d’eux-mêmes pour que ces jours soient une fête de famille ! Je me suis senti accueilli, reçu par l’affection, par la fête, par l’espérance de cette grande famille mexicaine ; merci de m’avoir ouvert les portes de vos vies, de votre Nation.

L’écrivain mexicain Octavio Paz dit dans son poème Hermandad : « Je suis un homme : je dure peu et la nuit est immense. Mais je regarde vers le haut : les étoiles écrivent. Sans saisir, je comprends : je suis également écriture et à l’instant même quelqu’un m’épelle » (Un sol más vivo. Antología poética, Ediciones Era, México 2014, p. 268).

Empruntant ces belles expressions, j’ose dire que ce qui nous épelle et nous trace le chemin est la présence mystérieuse mais réelle de Dieu dans la chair concrète de toutes les personnes, surtout les plus pauvres et les plus nécessiteux du Mexique. La nuit peut nous sembler immense et très obscure, mais ces jours-ci j’ai pu constater qu’il y a dans ce peuple beaucoup de lumières qui annoncent l’espérance ; j’ai pu voir à travers beaucoup de vos témoignages, à travers beaucoup de vos visages, la présence de Dieu qui continue de marcher sur cette terre en vous guidant et en soutenant l’espérance ; de nombreux hommes et femmes, par leur effort quotidien, permettent à cette société mexicaine de ne pas rester dans le noir. Ils sont les prophètes de l’avenir, ils sont le signe d’une aube nouvelle.

Que Marie, la Mère de Guadalupe, continue de vous visiter, qu’elle continue de parcourir ce pays, en vous aidant à être des missionnaires ainsi que des témoins de miséricorde et de réconciliation.

De nouveau, merci beaucoup !

Discours du pape François lors de la Rencontre avec les familles à Tuxla Gutiérrez

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Vous trouverez ci-dessous le texte du discours du pape François à l’occasion de la Rencontre avec les familles au Stade «Víctor Manuel Reyna»de Tuxla Gutiérrez (lundi 15 février 2016).

Chers frères et sœurs,

Je voudrais rendre grâce de me trouver sur cette terre du Chiapas. Il est bon de se trouver sur ce sol, il est bon de se trouver sur cette terre, il est bon se trouver en ce lieu qui, avec vous, a un goût de famille, de foyer. Je rends grâce à Dieu pour vos visages et votre présence, je rends grâce à Dieu pour son émouvante présence dans vos familles. Merci également à vous, familles et amis, qui nous avez offert vos témoignages, qui nous avez ouvert les portes de vos maisons, de vos vies ; vous nous avez permis d’être à vos ‘‘tables’’ partageant le pain qui vous nourrit et la sueur face aux difficultés quotidiennes. Le pain des joies, de l’espérance, des rêves et la sueur face aux amertumes, face à la désillusion et aux chutes. Merci de nous permettre d’accéder à vos familles, à votre table, à votre foyer.

Manuel, merci pour ton témoignage et surtout pour ton exemple. L’expression que tu as utilisée m’a plu : ‘‘y mettre de l’enthousiasme’’ tout comme l’attitude que tu as adoptée après t’être entretenu avec tes parents. Tu as commencé à mettre de l’enthousiasme dans ta vie, à mettre de l’enthousiasme dans ta famille, à mettre de l’enthousiasme dans les rangs de tes amis et tu nous communiques de l’enthousiasme à nous ici réunis. Je crois que c’est ce que l’Esprit Saint veut toujours faire au milieu de nous : nous donner de l’enthousiasme, nous faire don de raisons de continuer à risquer, à rêver, et à construire une vie qui ait un goût de foyer, de famille.

Et c’est ce que Dieu le Père a toujours rêvé et ce pour quoi depuis longtemps il a lutté. Lorsque tout semblait perdu, cet après-midi-là, au jardin d’Eden, Dieu le Père a suscité l’enthousiasme chez ce jeune couple et lui a dit que tout n’était pas perdu. Lorsque le peuple d’Israël sentait qu’il n’en pouvait plus sur le chemin à travers le désert, Dieu le Père lui a donné de l’enthousiasme par la manne. Lorsqu’est arrivée la plénitude des temps, Dieu le Père a donnéCapture d’écran 2016-02-15 à 17.30.44 pour toujours de l’enthousiasme à l’humanité en nous envoyant son Fils.

De la même manière, nous tous ici présents, nous avons fait cette expérience, à bien des moments et sous diverse formes, Dieu le Père a donné de l’enthousiasme à notre vie. Pouvons-nous nous demander pourquoi ?  

Parce qu’il ne sait pas faire autrement. Il sait nous donner de l’enthousiasme, pourquoi ? Parce que son nom est amour, son nom est don, son nom est don de soi, son nom est miséricorde. Il nous l’a manifesté avec force et clarté en Jésus, son Fils qui a tout donné jusqu’à l’extrême pour rendre possible le Royaume de Dieu. Un Royaume qui nous invite à entrer dans cette nouvelle logique, qui suscite une dynamique capable d’ouvrir les cieux, capable d’ouvrir nos cœurs, nos esprits, nos mains et de nous stimuler par de nouveaux horizons. Un Royaume qui sait ce qu’est la famille, qui sait ce qu’est la vie partagée. En Jésus et avec Jésus, ce Royaume est possible. Il est capable de transformer nos regards, nos attitudes, nos sentiments souvent fades en vin de fête. Il est capable de guérir nos cœurs et de nous inviter sans cesse, soixante-dix fois sept fois à recommencer. Il est capable de toujours renouveler toute chose.

Tu m’as demandé, Manuel, de prier pour de nombreux adolescents découragés et en situations difficiles. De nombreux adolescents démoralisés, sans force, sans enthousiasme. Et comme tu l’as si bien dit, bien des fois cette attitude naît du fait qu’ils se sentent seuls, parce qu’ils n’ont pas avec qui parler. Et cela m’a rappelé le témoignage de Beatriz. Si je me souviens bien, Beatriz, vous avez dit : ‘‘le combat a été toujours difficile à cause de la précarité et de la solitude’’. La précarité, la pénurie, le manque fréquent du minimum peuvent nous désespérer, peuvent nous faire sentir une forte angoisse, puisque nous ne savons comment faire pour aller de l’avant et d’autant plus que nous avons des enfants à notre charge. La précarité non seulement menace l’estomac (et c’est déjà beaucoup), mais elle peut aussi menacer l’âme, elle peut démotiver, ôter la force et tenter avec des parcours ou des alternatives de solution apparente mais qui, en définitive, ne résolvent rien. Il existe une précarité qui peut être très dangereuse, qui peut se coller à nous sans que nous ne nous en rendions compte, c’est la précarité qui naît de la solitude et de l’isolement. Et l’isolement est toujours mauvais conseiller.

Tous deux, sans vous en rendre compte, vous avez utilisé la même expression, tous deux vous nous montrez comment souvent la plus grande tentation à laquelle nous sommes confrontés est Capture d’écran 2016-02-15 à 17.33.10de ‘‘nous enfermer’’ et loin de ‘‘mettre de l’enthousiasme’’, cette attitude, comme la mite, nous dessèche l’âme peu à peu.

La manière de combattre cette précarité et cet isolement, qui nous rendent vulnérables à tant de solutions apparentes, doit se situer à différents niveaux. D’une part, les législations, qui protègent et garantissent le minimum nécessaire pour que chaque famille et pour que chaque personne puisse se développer par la formation et un travail digne, représentent un niveau. D’autre part, comme le témoignage de Humberto et de Claudia l’ont si bien souligné, lorsqu’ils disaient qu’ils cherchaient la façon de communiquer l’amour de Dieu qu’ils avaient expérimenté dans le service et dans le don de soi aux autres. Des lois et un engagement personnel sont un bon binôme pour rompre la spirale de la précarité. 

De nos jours, nous voyons et nous expérimentons à travers différents visages comment la famille est affaiblie, remise en question. Comment on croit que c’est un modèle déjà dépassé et n’ayant plus de place dans nos sociétés qui, avec la prétention de la modernité, offrent toujours davantage un modèle fondé sur l’isolement.

Certes, vivre en famille n’est pas toujours facile, bien des fois c’est douloureux et fatiguant mais, comme je l’ai dit plus d’une fois de l’Eglise – je crois qu’on peut l’appliquer à la famille – : je préfère une famille blessée qui essaie tous les jours de vivre l’amour, à une société malade de l’enfermement et de la facilité de la peur d’aimer. Je préfère une famille qui essaie sans cesse de recommencer, à une société narcissiste et obnubilée par le luxe et le confort. Je préfère une famille au visage épuisé par le don de soi, aux visages maquillés qui n’ont pas su ce qu’est la tendresse et la compassion.

Vous m’avez demandé de prier pour vous et je voudrais commencer à le faire maintenant même, avec vous. Chers mexicains, vous avez un atout, vous avez un avantage. Vous avez une mère ; la Guadalupana a voulu visiter cette terre et cela nous donne la certitude de bénéficier de son intercession pour que ce rêve appelé famille ne se perde pas à cause de la précarité et de la solitude. Elle est toujours prête à défendre nos familles, notre avenir, elle est toujours prête à ‘‘mettre de l’enthousiasme’’, en nous donnant à son Fils. Voilà pourquoi je vous invite à nous tenir par les mains et à dire ensemble : Je vous salue Marie…

Homélie du pape François lors de la Messe à San Cristobal de las Casas, Mexique

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Vous trouverez l’homélie prononcée par le pape François lors de la Sainte Messe au Centre Sportif Municipal de San Cristobal de las Casas, Mexique (lundi 15 février 2016):

Li smantal Kajvaltike toj lek – La loi du Seigneur est parfaite qui redonne vie. Ainsi commence le psaume que nous avons écouté. La loi du Seigneur est parfaite ; et le psalmiste se charge d’énumérer tout ce que cette loi procure à celui qui l’écoute et qui l’observe : elle redonne vie, rend sage les simples, réjouit le cœur, clarifie le regard.

C’est cette loi que le Peuple d’Israël avait reçue des mains de Moïse, une loi qui devait aider le Peuple de Dieu à vivre dans la liberté à laquelle il avait été appelé. Une loi qui est destinée à êtrelumière sur le chemin du peuple et l’accompagner dans sa marche. Un peuple qui avait subi l’esclavage et le despotisme du Pharaon, qui avait expérimenté la souffrance et les abus, jusqu’à ce que Dieu dise : assez, jusqu’à ce que Dieu dise : ça suffit ! J’ai vu la misère, j’ai entendu les cris, je connais ses souffrances (cf. Ex 3, 9). Et là, le visage de notre Dieu se révèle, le visage du Père qui souffre devant la douleur, les abus, l’injustice subie par ses enfants ; et sa Parole, sa loi, devient symbole de liberté, symbole de joie, de sagesse et de lumière. Expérience, réalité qui trouve échodans cette expression qui naît de la sagesse bercée en ce pays depuis des temps lointains et qui, dans le Popol Vuh, dit ce qui suit : L’aube s’est levée sur toutes les tribus réunies. La face de la terre a tout de suite été assainie par le soleil. L’aube s’est levée pour les peuples qui ont sans cesse marché dans les diverses ténèbres de l’histoire. 

Dans cette expression, il y a une aspiration à vivre en liberté, il y a une aspiration qui a un goût de terre promise, où l’oppression, les mauvais traitements et la dégradation ne sont pas monnaie courante. Dans le cœur de l’homme, et dans la mémoire de beaucoup de nos peuples, est inscrit le désir d’une terre, d’un temps où le mépris sera vaincu par la fraternité, l’injusticeCapture d’écran 2016-02-15 à 11.22.18
par la solidarité, et où la violence sera 
réduite au silence par la paix. 

Notre Père non seulement partage ce désir, mais lui-même l’a aussi suscité et le suscite, en nous offrant son fils Jésus-Christ. En lui, nous trouvons la solidarité du Père qui marche à nos côtés. En lui, nous voyons comment cette loi parfaite prend chair, prend un visage, entre dans l’histoire pour accompagner et soutenir son peuple ; il se fait Chemin, il se fait Vérité, il se fait Vie pour que les ténèbres n’aient pas le dernier mot et que l’aube ne tarde pas à se lever sur la vie de ses enfants. 

De multiples façons et manières, on a voulu réduire au silence et taire ce désir ; de multiples façons, on a voulu anesthésier notre âme, de multiples manières on a essayé d’engourdir et d’endormir la vie de nos enfants et de nos jeunes par l’insinuation que rien ne peut changer ou que ce sont des rêves impossibles. Devant ces manières,  la création aussi sait élever sa voix, « cette sœur crie en raison des dégâts que nous lui causons par l’utilisation irresponsable et par l’abus des biens que Dieu a déposés en elle. Nous avons grandi en pensant que nous étions ses propriétaires et ses dominateurs, autorisés à l’exploiter. La violence qu’il y a dans le cœur humain blessé par le péché se manifeste aussi dans les symptômes de maladie que nous observons dans le sol, dans l’eau, dans l’air et dans les êtres vivants. C’est pourquoi, parmi les pauvres les plus abandonnés et maltraités, se trouve notre terre opprimée et dévastée, qui « gémit en travail d’enfantement » (Rm 8, 22) » (Laudato si’, n.  2).

Le défi environnemental que nous vivons et ses racines humaines nous touchent tous (cf. Laudato si’, n. 14) et nous interpellent. Nous ne pouvons plus faire la sourde oreille face à l’une des plus grandes crises environnementales de l’histoire.

En cela, vous avez beaucoup de choses à nous enseigner. Vos peuples, comme l’ont reconnu les Évêques de l’Amérique Latine, savent entrer en relation, d’une manière harmonieuse, avec la Capture d’écran 2016-02-15 à 11.18.32nature qu’ils respectent comme « source de subsistance, maison commune et autel du partage humain » (Document d’Aparecida, n. 472).

Cependant, souvent, de manière systématique et structurelle, vos peuples ont été incompris et exclus de la société. Certains ont jugé inférieures vos valeurs, votre culture et vos traditions. D’autres, étourdis par le pouvoir, l’argent et les lois du marché, vous ont dépossédés de vos terres ou ont posé des actes qui les polluent. C’est si triste ! Que cela nous ferait du bien, à tous, de faire un examen de conscience et d’apprendre à dire : pardon ! Le monde d’aujourd’hui, dépouillé par la culture du déchet, a besoin de vous !

Les jeunes d’aujourd’hui, exposés à une culture qui essaie de supprimer toutes les richesses et caractéristiques culturelles en vue d’un monde homogène, ont besoin que la sagesse de leurs anciens ne se perde pas ! 

Le monde d’aujourd’hui, pris par le pragmatisme, a besoin de réapprendre la valeur de la gratuité ! 

Nous célébrons la certitude que « le créateur ne nous abandonne pas, [que] jamais il ne fait marche arrière dans son projet d’amour, [qu’] il ne se repend pas de nous avoir créés » (Laudato si’, n. 13). Nous célébrons le fait que Jésus-Christ meurt encore et ressuscite en chaque geste que nous accomplissons envers le plus petit de ses frères. Ayons à cœur de continuer à être témoins de sa Passion, de sa Résurrection en donnant chair à Li smantal Kajvaltike toj lek – La loi du Seigneur est parfaite qui redonne vie.

Angelus du pape François à la fin de la Messe à Ecatepec, Mexique

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Chers frères,

Dans la première lecture de ce dimanche, Moïse fait une recommandation au peuple. Lors de la moisson, dans l’abondance, lors des prémices n’oublie pas tes origines. L’action de grâce naît et grandit chez une personne et dans un peuple qui est capable de faire mémoire. Elle a ses racines dans le passé, qui, entre ombres et lumière, a progressivement généré le présent. Au moment où nous pouvons rendre grâce à Dieu parce que la terre a donné son fruit et produire ainsi du pain, Moïse invite son peuple à se souvenir en énumérant les situations difficiles qu’il a dû traverser (cf. Dt 26, 5-11). 

En ce jour de fête, en ce jour nous pouvons célébrer la bonté du Seigneur envers nous. Nous rendons grâce pour l’opportunité d’être réunis afin de présenter au Père plein de bonté les prémices de nos enfants, petits-enfants, de nos rêves et de nos projets. Les prémices de nos cultures, de nos langues et traditions. Les prémices de nos soucis… 

Que cela a été difficile à chacun de vous pour arriver jusqu’ici ! Combien chacun a-t-il dû « marcher » pour faire de ce jour une fête, une action de grâces ! Que de chemin d’autres ont fait, qui n’ont pas pu arriver, mais grâce à eux, nous avons pu continuer à avancer !

Aujourd’hui, suivant l’invitation de Moïse, nous voulons en tant que peuple faire mémoire, nous voulons être le peuple de la mémoire vivante du passage de Dieu au milieu son peuple, dans son peuple. Nous voulons regarder nos enfants, en sachant qu’ils hériteront non seulement d’une terre, d’une langue, d’une culture et d’une tradition, mais aussi du fruit vivant de la foi qui rappelle le passage assuré de Dieu en ce pays. La certitude de sa proximité et de sa solidarité. Une certitude qui nous aide à lever la tête et à espérer avec enthousiasme l’aurore. 

Avec vous aussi je m’unis à cette mémoire reconnaissante. A ce souvenir vivant du passage de Dieu dans vos vies. Regardant vos enfants, je ne peux pas ne pas faire miennes les paroles qu’un jour le bienheureux Paul VI a adressées au peuple mexicain :

« Un chrétien ne peut pas [ne pas] démontrer sa propre solidarité et ne peut pas donner le meilleur de lui-même pour résoudre la situation de tous ceux qui n’ont pas encore le pain de la culture ou l’opportunité d’un travail  digne […] On ne peut pas rester insensible alors que les nouvelles générations ne trouvent pas le moyen de transformer en réalité [leurs] légitimes aspirations ». Et il continue par une invitation à « être toujours en première ligne dans tous les efforts pour améliorer la situation de ceux qui sont dans le besoin », et à voir « en chaque homme, un frère, et en chaque frère, le Christ » (Paul VI, Message radiotélévisé aux Catholiques du Mexique, à l’occasion du 75ème anniversaire du couronnement de Notre-Dame de Guadalupe (12 octobre 1970), L’Osservatore Romano, éd. en langue française (23 octobre 1970), p. 1).

Je voudrais vous inviter de nouveau à être en première ligne, à être les premiers dans toutes les initiatives qui aident à faire de cette terre mexicaine bénie une terre d’opportunités, où il ne sera pas nécessaire d’émigrer pour rêver ; où il ne sera pas nécessaire d’être exploité pour travailler ; où il ne sera pas nécessaire de faire du désespoir et de la pauvreté d’un grand nombre l’opportunité de quelques-uns ;  une terre qui ne devra pas pleurer des hommes et des femmes, des jeunes et des enfants qui finissent, détruits, dans la main des trafiquants de la mort. 

Cette terre a le goût de la Guadalupana ; elle qui nous a toujours devancés dans l’amour, disons-lui :

Vierge Sainte « aide-nous à rayonner par le témoignage de la communion, du service, de la foi ardente et généreuse, de la justice et de l’amour pour les pauvres, pour que la joie de l’Évangile parvienne jusqu’aux confins de la terre, et qu’aucune périphérie ne soit privée de sa lumière » (Evangelii gaudium, n. 288).

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