Pape à Cuba: rencontre avec les familles à la cathédrale « Nuestra Señora de la Asunción » à Santiago

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Ce matin à 11h, le pape François a rencontré les familles réunies à la cathédrale de Santiago. Après le mot de bienvenue de S.E. Mgr Dionisio Guillermo García Ibáñez et le témoignage d’une famille cubaine, le Pape a prononcé le discours que vous trouvez ci-dessous:

Nous sommes en famille. Et lorsqu’on est en famille, on se sent chez soi. Merci, familles cubaines, merci, Cubains, de faire que je me sens tous les jours en famille, de faire que je me sens chez moi. Cette rencontre avec vous est comme la ‘‘cerise sur le gâteau’’. Terminer ma visite par cette rencontre en famille est un motif de rendre grâce à Dieu pour la ‘‘chaleur’’ qui émane de personnes qui savent recevoir, qui savent accueillir, qui savent faire sentir qu’on est chez soi. Merci.

Je remercie Monseigneur Dionisio García, archevêque de Santiago, pour les salutations qu’il m’a adressées au nom de vous tous, ainsi que le couple qui a eu le courage de partager avec nous leurs aspirations et leurs efforts pour faire de leur foyer une ‘‘Eglise domestique’’. L’Evangile de Jean nous présente comme premier événement public de Jésus les noces de Cana, à l’occasion de la fête d’une famille. Il s’y trouve avec Marie, sa mère, et certains de ses disciples, partageant la fête de famille.

Les noces sont des moments particuliers dans la vie de beaucoup de personnes. Pour les ‘‘plus âgés’’, parents, grands-parents, c’est une occasion pour recueillir le fruit de la semence. Cela réjouit le cœur de voir les enfants grandir et de voir qu’ils peuvent fonder un foyer. C’est l’occasion de voir, tout d’un coup, que tout ce pour quoi on a lutté valait la peine. Accompagner les enfants, les soutenir, les stimuler pour qu’ils puissent avoir le courage de construire leurs vies, de former leurs familles, est un grand défi pour tous les parents. D’autre part, la joie des jeunes époux. Tout un avenir qui commence, tout a la ‘‘saveur’’ d’une chose nouvelle, d’une espérance. Lors des mariages, le passé dont nous héritons et l’avenir qui nous attend s’unissent toujours. L’occasion s’y présente toujours de remercier de tout ce qui nous a permis d’arriver jusqu’à ce jour, grâce au même amour reçu.

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Pape à Cuba: homélie au sanctuaire de la Vierge de la « Caridad del Cobre », Santiago

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Mardi, 22 septembre 2015, le pape François a célébré la Messe en la basilique mineure du sanctuaire Notre Dame de la Charité de El Cobre. Ci-dessous vous trouverez le texte complet de cette homélie:

L’évangile que nous venons d’écouter nous place devant le mouvement que provoque le Seigneur chaque fois qu’il nous visite : il nous fait sortir de chez nous. Ce sont des images qu’une fois ou l’autre nous sommes invités à contempler. La présence de Dieu dans notre vie ne nous laisse jamais immobiles ; elle nous pousse à nous mettre en mouvement. Quand Dieu nous visite, il nous fait toujours sortir de chez nous. Visités pour visiter, rencontrés pour rencontrer, aimés pour aimer.

Là, nous voyons Marie, la première disciple. Une jeune ayant peut-être entre 15 et 17 ans, qui, dans un village de Palestine, a été visitée par le Seigneur lui annonçant qu’elle serait la mère du Sauveur. Loin de ‘‘s’enorgueillir’’ et de penser que tout le village devait venir s’occuper d’elle et la servir, elle sort de chez elle et va servir. Elle va aider sa cousine Elisabeth. La joie qui jaillit de savoir que Dieu est avec nous, avec notre peuple, réveille le cœur, nous met en mouvement, ‘‘nous fait aller dehors’’, nous conduit à partager la joie reçue comme service, comme don dans toutes ces situations ‘‘embarrassantes’’ que nos voisins ou parents peuvent être en train de vivre. L’Evangile nous dit que Marie est partie avec empressement, d’un pas lent mais constant, des pas qui savent où ils vont, des pas qui ne courent pas pour ‘‘arriver’’ rapidement, ou bien vont trop lentement comme pour ne jamais ‘‘arriver’’. Ni agitée ni endormie, Marie va avec empressement, afin d’accompagner sa cousine enceinte dans sa vieillesse. Marie, la première disciple, visitée, est sortie pour visiter. Et depuis ce premier jour, cela a toujours été sa caractéristique particulière. Elle a été la femme qui a visité tant d’hommes et de femmes, d’enfants et de personnes âgées, de jeunes. Elle a su visiter et accompagner la gestation dramatique de beaucoup de nos peuples ; elle a protégé la lutte de tous les peuples qui ont souffert pour défendre les droits de leurs fils. Et aujourd’hui encore, elle continue de nous apporter la Parole de Vie, son Fils notre Seigneur.

Ce pays a été aussi visité par sa maternelle présence. La patrie cubaine est née et a grandi dans la chaleur de la dévotion à la Vierge de la Charité. « Elle a donné une forme propre et spéciale à l’âme cubaine, écrivaient les Evêques de ce pays, en suscitant les meilleurs idéaux d’amour de Dieu, de la famille et de la Patrie dans le cœur des cubains’’.

Vos compatriotes l’ont également exprimé, il y a cent ans, lorsqu’ils demandaient au Pape Benoît XV de déclarer la Vierge de la Charité Patronne de Cuba, en écrivant :

« Ni les malheurs ni les pénuries n’ont réussi à ‘‘éteindre’’ la foi et l’amour que notre peuple catholique professe à cette Vierge, mais plutôt, aux étapes majeures de la vie, lorsque plus proche était la mort ou plus proche le désespoir, a toujours surgi, comme lumière qui dissipe tout danger, comme la rosée consolatrice…, la vision de cette Vierge bénie, cubaine par excellence… parce qu’ainsi l’ont aimée nos mères inoubliables, ainsi la bénissent nos épouses ».

Dans ce sanctuaire, qui garde la mémoire du saint peuple fidèle de Dieu en marche à Cuba, Marie est vénérée comme Mère de la Charité. D’ici, elle protège nos racines, notre identité pour que nous ne nous perdions pas sur les chemins du désespoir. L’âme du peuple cubain, comme nous venons d’entendre, a été forgée dans les douleurs et les privations qui n’ont pas réussi à éteindre la foi, cette foi qui s’est maintenue vivante grâce à tant de grand-mères qui ont continué à rendre possible, au quotidien dans leur foyer, la présence vivante de Dieu ; la présence du Père qui libère, fortifie, guérit, donne du courage, et qui est un refuge sûr comme signe de nouvelle résurrection.

Des grand-mères, des mères, et tant d’autres qui, avec tendresse et affection, ont été des signes de visitation, de courage, de foi pour leurs petits-fils, dans leurs familles. Elles ont maintenu ouverte une fente petite comme un grain de sénevé à travers laquelle l’Esprit Saint continuait d’accompagner les palpitations de la vie de ce peuple.

Et « chaque fois que nous regardons Marie nous voulons croire en la force révolutionnaire de la tendresse et de l’affection » (Evangelii gaudium, n. 288).

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Pape à Cuba: Rencontre avec les jeunes de la Havane

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Rencontre avec les étudiants – Adresse du Saint-Père
Centre Culturel P. Félix Varela,  La Havane – Dimanche, 20 septembre 2015

Chers amis,

J’éprouve une grande joie de pouvoir me retrouver avec vous ici dans ce Centre culturel, si significatif dans l’histoire de Cuba. Je rends grâce à Dieu de m’avoir offert l’occasion de cette rencontre avec tant de jeunes qui, par leur travail, leurs études et leur préparation, rêvent du Cuba de demain et, déjà, en font aussi une réalité.

Je remercie Leonardo pour ses paroles de salutation, et spécialement parce que, ayant la possibilité de parler de nombreuses autres choses, certainement importantes et concrètes, telles que les peurs, les doutes – si réels et humains – il nous a parlé d’espérance, de ces rêves et aspirations qui s’ancrent avec force dans le cœur des jeunes cubains, au-delà de leurs différences de formation, de culture, de croyance ou d’idées. Merci Leonardo parce moi aussi, quand je vous vois, la première chose qui me vient à l’esprit et au cœur, c’est le mot espérance. Je ne peux pas concevoir un jeune qui ne bouge pas, qui est paralysé, qui n’a pas de rêves ni d’idéaux, qui n’aspire pas à quelque chose de plus.

Mais, quelle est l’espérance d’un jeune cubain à cette époque de l’histoire ? Ni plus ni moins que l’espérance d’un jeune de n’importe quelle autre partie du monde. Car l’espérance nous parle d’une réalité qui est enracinée au plus profond de l’être humain, indépendamment des circonstances concrètes et des conditionnements historiques dans lesquels il vit. Elle nous parle d’une soif, d’une aspiration, d’un désir de plénitude, de vie réussie, d’une volonté de toucher ce qui est grand, ce qui remplit le cœur et élève l’esprit vers les grandes choses, comme la vérité, la bonté et la beauté, la justice et l’amour. Toutefois, cela comporte un risque. Cela demande d’être disposé à ne pas se laisser séduire par ce qui est passager et caduc, par de fausses promesses de bonheur vide, de plaisir immédiat et égoïste, d’une vie médiocre, centrée sur soi-même, et qui laisse derrière soi uniquement tristesse et amertume dans le cœur. Non, l’espérance est audace, elle sait regarder au-delà du confort personnel, des petites sécurités et des compensations qui rétrécissent l’horizon, pour s’ouvrir à de grands idéaux qui rendent la vie plus belle et plus digne. Je demanderais à chacun d’entre vous : qu’est-ce qui donne de l’élan à ta vie ? Qu’il y a-t-il dans ton cœur, en quoi consistent tes aspirations ? Es-tu disposé à toujours prendre des risques pour quelque chose de plus grand ?

Peut-être me diriez-vous : ‘‘Oui, Père, l’attrait de ces idéaux est grand. Je sens leur appel, leur beauté, la splendeur de leur lumière dans mon âme. Mais, en même temps, la réalité de ma faiblesse et de mes forces limitées est trop forte pour que je me décide à parcourir le chemin de l’espérance. L’objectif est très haut et mes forces sont limitées. Mieux vaut me contenter de peu, de choses peut-être moins grandes mais plus réalistes, plus à la portée de mes possibilités’’. Je comprends cette réaction, il est normal de sentir le poids de ce qui est ardu et difficile, toutefois, attention à ne pas tomber dans la tentation de la désillusion, qui paralyse l’intelligence et la volonté, et à ne pas nous laisser gagner par la résignation, qui est un pessimisme radical face à toute possibilité d’atteindre ce dont on a rêvé. Ces attitudes, en fin de compte, finissent ou bien en une fuite de la réalité vers des paradis artificiels ou bien dans l’enfermement dans l’égoïsme personnel, dans une espèce de cynisme, qui ne veut pas écouter le cri de la justice, de la vérité et de l’humanité qui se lève autour de nous et en nous.

Mais que faire ? Comment trouver des chemins d’espérance dans la situation dans laquelle nous vivons ? Que faire pour que ces rêves de plénitude, de vie authentique, de justice et de vérité soient une réalité dans notre vie personnelle, dans notre pays et dans le monde ? Je pense qu’il y a trois idées qui peuvent être utiles pour maintenir vivante l’espérance.

L’espérance, un chemin fait de mémoire et de discernement. L’espérance est la vertu de celui qui est en chemin et se dirige vers une destination. Elle n’est pas, par conséquent, le simple fait de marcher pour le plaisir de marcher, mais a plutôt une finalité, un but, qui donne sens et illumine le sentier. En même temps, l’espérance s’alimente de la mémoire, elle embrasse de son regard non seulement l’avenir mais aussi le passé et le présent. Pour marcher dans la vie, en plus de savoir où nous voulons aller, il est important de savoir aussi qui nous sommes et d’où nous venons. Une personne ou un peuple qui n’a pas de mémoire et efface son passé court le risque de perdre son identité et de ruiner son avenir. On a besoin, par conséquent, de la mémoire de ce que nous  sommes, de ce qui constitue notre patrimoine spirituel et moral. Je crois que c’est cela l’expérience et l’enseignement de ce grand Cubain que fut le Père Félix Varela. Et on a besoin aussi du discernement, parce qu’il est essentiel de s’ouvrir à la réalité et de savoir la lire sans peurs ni préjugés. Les lectures partielles et idéologiques ne sont pas utiles, qui déforment la réalité pour qu’elle rentre dans nos petits schémas préconçus, en provoquant toujours la désillusion et désespoir. Discernement et mémoire, parce que le discernement n’est pas aveugle, mais se réalise sur la base de solides critères éthiques, moraux, qui aident à discerner ce qui est bon et juste.

L’espérance, un chemin d’accompagnement. Un proverbe africain dit : ‘‘Si tu veux aller vite, sois seul ; si tu veux aller loin, sois accompagné’’. L’isolement ou l’enfermement sur soi-même ne génèrent jamais l’espérance ; au contraire, la proximité et la rencontre avec l’autre, oui. Seuls, nous n’arrivons nulle part. Avec l’exclusion, on ne construit non plus un avenir pour personne, même pas pour soi-même. Un chemin d’espérance requiert une culture de la rencontre, du dialogue, qui surmonte les contrastes et l’affrontement stérile. Pour cela, il est fondamental de considérer les différences dans la manière de penser non comme un risque, mais comme une richesse et un facteur de croissance. Le monde a besoin de cette culture de la rencontre, il a besoin de jeunes qui veulent se connaître, qui veulent s’aimer, qui veulent cheminer ensemble et construire un pays comme en rêvait José Martí : « Avec tous et pour le bien de tous ».

L’espérance, un chemin solidaire. La culture de la rencontre doit conduire naturellement à une culture de la solidarité. J’apprécie beaucoup ce qu’a dit Leonardo au début lorsqu’il a parlé de la solidarité comme force qui aide à surmonter tout obstacle. Effectivement, s’il n’y a pas de solidarité, il n’y a d’avenir pour aucun pays. Au-dessus de toute considération ou intérêt, doit se trouver la préoccupation concrète et réelle pour l’être humain, qui peut être mon ami, mon compagnon ou bien aussi quelqu’un qui pense différemment, qui a ses idées, mais qui est autant être humain, autant cubain que moi-même. La simple tolérance ne suffit pas, il faut aller au-delà et passer d’une attitude craintive et défensive à une attitude d’accueil, de collaboration, de service concret et d’aide efficace. N’ayez pas peur de la solidarité, du service, de donner la main à l’autre pour que personne ne soit laissé de côté en chemin.

Ce chemin de la vie est illuminé par une espérance plus élevée : celle qui nous vient de la foi en Christ. Il s’est fait notre compagnon de route, et non seulement il nous encourage mais aussi il nous accompagne, il est à nos côtés et nous tend sa main d’ami. Lui, le Fils de Dieu, a voulu se faire l’un de nous, pour parcourir aussi notre chemin. La foi en sa présence, son amour et son amitié allument et illuminent toutes nos espérances et aspirations. Avec lui, nous apprenons à discerner la réalité, à vivre la rencontre, à servir les autres et à marcher dans la solidarité.

Chers jeunes cubains, si Dieu même est entré dans notre histoire et s’est fait homme en Jésus, s’il a chargé sur ses épaules notre faiblesse et notre péché, n’ayez pas peur de l’espérance, n’ayez pas peur de l’avenir, parce que Dieu compte sur vous, croit en vous, espère en vous.

Chers amis, merci pour cette rencontre. Que l’espérance dans le Christ, votre ami, vous guide toujours dans votre vie. Et, s’il vous plaît, n’oubliez pas de prier pour moi. Que le Seigneur vous bénisse !

Pape à Cuba: vêpres avec les prêtres, religieux et séminaristes de la Havane

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Homélie du Saint-Père
Cathédrale de la Havane – Dimanche, 20 septembre 2015

Nous sommes réunis dans cette cathédrale historique de La Havane pour chanter avec les psaumes la fidélité de Dieu à son peuple, afin de rendre grâce pour sa présence, pour son infinie miséricorde. Fidélité et miséricorde dont font mémoire non seulement les murs de cet édifice, mais aussi certains « cheveux blancs », rappel vivant, actualisé, que « sa miséricorde est infinie, et [que] sa fidélité demeure pour les âges ». Frères, rendons grâce ensemble !

Rendons grâce pour la présence de l’Esprit à travers la richesse des divers charismes sur les visages de tant de missionnaires qui sont venus sur ces terres, parvenant à devenir Cubains parmi les Cubains, signe que sa miséricorde est éternelle.

L’Évangile nous présente Jésus en dialogue avec son Père, il nous met au centre de l’intimité faite prière entre le Père et le Fils. Quand approchait son heure, Jésus a prié le Père pour ses disciples, pour ceux qui étaient avec lui et pour ceux qui viendraient (cf. Jn 17, 20). Cela nous fait penser qu’à son heure cruciale, Jésus met dans sa prière la vie des siens, notre vie. Et il demande à son Père de les garder dans l’unité et dans la joie. Jésus connaissait bien le cœur des siens, il connaît bien notre cœur. C’est pourquoi il prie, il demande au Père que ne les gagne pas une conscience qui tend à s’isoler, à se réfugier dans ses propres certitudes, sécurités, espaces ; à se désintéresser de la vie des autres en s’installant dans de petites «fermes » qui brisent le visage multiforme de l’Eglise. Situations qui débouchent sur une tristesse individualiste, sur une tristesse faisant peu à peu place au ressentiment, à la plainte continuelle, à la monotonie ; « ce n’est pas le désir de Dieu pour nous, ce n’est pas la vie dans l’Esprit » (Evangelii Gaudium, n. 2) à laquelle il les a invités, à laquelle il nous invite. C’est pourquoi Jésus prie, il demande que la tristesse et l’isolement ne gagnent pas notre cœur. Nous voulons faire de même, nous voulons nous unir à la prière de Jésus, à ses paroles, pour dire ensemble : « Père, garde-les unis dans ton nom… pour qu’ils soient un comme nous-mêmes » (Jn 17, 11) « et que leur joie soit parfaite » (Jn 15, 11).

Jésus prie et nous invite à prier parce qu’il sait qu’il y a des choses que nous pouvons recevoir seulement comme un don, il y a des choses que nous pouvons vivre seulement comme un don. L’unité est une grâce que seul l’Esprit Saint peut nous donner, il nous revient de la demander et de donner le meilleur de nous-mêmes pour être transformés par ce don.

Il est fréquent de confondre l’unité avec l’uniformité, avec le fait que tous font, sentent et disent la même chose. Cela n’est pas l’unité, c’est l’homogénéité. C’est tuer la vie de l’Esprit, c’est tuer les charismes qu’il a distribués pour le bien de son peuple. L’unité se trouve menacée chaque fois que nous voulons faire les autres à notre image et ressemblance. C’est pourquoi l’unité est un don, ce n’est pas quelque chose que l’on peut imposer de force ou par décret. Je me réjouis de vous voir ici, hommes et femmes de différentes générations, milieux, parcours personnels, unis par la prière en commun. Prions Dieu de faire croître en nous le désir de la proximité. Que nous puissions être des prochains, être proches, avec nos différences, nos habitudes, nos styles, mais proches. Avec nos discussions, nos luttes, en nous parlant en face, et non par derrière. Que nous soyons des pasteurs proches de notre peuple, que nous nous laissions questionner, interroger par nos gens. Les conflits, les discussions dans l’Église sont normales, et j’ose même dire nécessaires ; ils sont des signes que l’Église est vivante et que l’Esprit continue d’agir, continue de la dynamiser. Malheur à ces communautés où il n’y a ni un ‘oui’, ni un ‘non’ ! Elles sont comme ces mariages où on ne discute plus, parce qu’on a perdu l’intérêt, on a perdu l’amour.

En second lieu, le Seigneur prie pour que nous soyons remplis de « la même joie parfaite » qu’il possède (cf. Jn 17, 13). La joie des chrétiens, et spécialement celle des consacrés, est un signe très clair de la présence du Christ dans leurs vies. Quand il y a des visages attristés c’est un signal d’alerte, quelque chose ne va pas bien. Et Jésus demande cela à son Père, juste avant d’aller au jardin, lorsqu’il doit renouveler son « fiat ». Je ne doute pas que vous deviez tous vous charger du poids de nombreux sacrifices, et que pour certains d’entre vous,  depuis des décennies, les sacrifices auront été durs. Par son sacrifice, Jésus prie aussi pour que nous ne perdions pas la joie de savoir qu’il est vainqueur du monde. Cette certitude nous pousse chaque matin à réaffirmer notre foi. A travers sa prière, dans le visage de notre peuple, « il nous permet de relever la tête et de recommencer, avec une tendresse qui ne nous déçoit jamais et qui peut toujours nous rendre la joie » (Evangelii Gaudium, n.  3).

Que c’est important ! Quel témoignage si précieux, pour la vie du peuple cubain, que celui de rayonner toujours et partout de cette joie, malgré les fatigues, les scepticismes, y compris malgré le désespoir qui est une tentation très dangereuse qui mine l’âme !

Frères, Jésus prie pour que nous soyons un et pour que sa joie demeure en nous ; faisons de même, unissons-nous les uns aux autres dans la prière.

Angelus du pape François à la Place de la Révolution à Cuba (20 septembre 2015)

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La Havane, Place de la Révolution
Dimanche, 20 septembre 2015

Je remercie le Cardinal Jaime Ortega y Alamino, Archevêque de la Havane, pour ses aimables paroles, ainsi que mes frères évêques, prêtres, religieux et fidèles laïcs. Je salue aussi Monsieur le Président et toutes les Autorités présentes.

Nous avons écouté dans l’évangile comment les disciples avaient peur d’interroger Jésus lorsqu’il leur parlait de sa passion et de sa mort. L’idée de voir Jésus souffrir sur la croix les effrayait et ils ne pouvaient pas la comprendre. Nous aussi nous avons la tentation de fuir nos croix personnelles et celles des autres, de nous éloigner de celui qui souffre. En concluant la Sainte Messe, au cours de laquelle Jésus s’est offert à nous de nouveau par son corps et son sang, élevons à présent les yeux vers la Vierge, notre Mère. Et nous lui demandons de nous enseigner à nous tenir proche de la croix du frère qui souffre. Que nous apprenions à voir Jésus en chaque homme prostré sur le chemin de la vie ; en chaque frère qui a faim ou soif, qui est nu ou en prison, ou malade. Près de sa Mère, par la croix, nous pouvons comprendre qui est vraiment « le plus important » et ce que signifie être près du Seigneur et participer à sa gloire.

Apprenons de Marie à avoir le cœur éveillé et attentif aux besoins des autres. Comme elle nous l’a enseigné aux Noces de Cana, soyons pleins de sollicitude dans les petites choses de la vie, et ne faiblissons pas dans la prière les uns pour les autres, pour qu’à personne ne manque le vin de l’amour nouveau, de la joie que Jésus nous apporte.

A présent, je sens le devoir de tourner ma pensée vers la chère terre de Colombie, ‘‘conscient de l’importance cruciale du moment présent, où, avec un effort renouvelé, et animés par l’espérance, ses enfants cherchent à construire une société en paix’’. Que le sang versé par des milliers d’innocents durant de nombreuses décennies de conflit armé, sang uni à celui du Seigneur Jésus Christ sur la Croix, soutienne tous les efforts actuellement en cours, y compris en cette belle Ile, en vue d’une réconciliation définitive, de sorte que la longue nuit de douleur et de violence, grâce à la volonté de tous les Colombiens, puisse se transformer en un jour sans déclin de concorde, de justice, de fraternité et d’amour, dans le respect des institutions comme du droit national et international, pour une paix durable. S’il vous plaît, nous n’avons pas le droit de nous permettre un échec de plus sur ce chemin de paix et de réconciliation.

Je vous demande à présent de vous unir à moi dans la prière à Marie pour déposer toutes nos préoccupations et nos aspirations près du Cœur du Christ. Et nous la prions de manière spéciale pour tous ceux qui ont perdu l’espérance et ne trouvent pas de motifs pour continuer à lutter ; pour ceux qui souffrent d’injustice, d’abandon et de solitude ; nous prions pour les personnes âgées, les malades, les enfants et les jeunes, pour toutes les familles en difficulté, afin que Marie leur essuie les larmes, les console par son amour de Mère, leur redonne l’espérance et la joie. Mère sainte, je te recommande tes fils de Cuba : ne les abandonne jamais !

Homélie du Saint-Père durant la Sainte Messe à la Havane, dimanche 20 septembre

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Sainte Messe à la Havane
Homélie du Saint-Père
Place de la Révolution
Dimanche, 20 septembre 2015

L’Evangile nous présente Jésus posant une question apparemment indiscrète à ses disciples : « De quoi discutiez-vous en chemin ? » Une question qu’il pourrait nous poser aujourd’hui à nous aussi : De quoi parlez-vous chaque jour ? Quelles sont vos aspirations ? « Ils se taisaient, dit l’Evangile, car, en chemin, ils avaient discuté entre eux pour savoir qui était le plus grand ». Les disciples avaient honte de dire à Jésus ce dont ils parlaient. Chez les disciples d’hier, comme en nous aujourd’hui, peut se retrouver la même discussion : Qui est le plus important ?

Jésus n’insiste pas sur la question, il ne les oblige pas à lui dire de quoi ils parlaient en chemin, mais la question demeure non seulement dans l’esprit, mais aussi dans le cœur des disciples.

Qui est le plus important ? Une question qui nous accompagnera tout au long de la vie et aux différentes étapes nous serons confrontés au défi d’y répondre. Nous ne pouvons pas échapper à cette question gravée dans le cœur. Je me rappelle avoir entendu plus d’une fois, au cours de réunions de famille demander aux enfants : qui aimes-tu le plus ? papa ou maman ? C’est comme vous demander : qui est le plus important pour vous ? Cette question est-elle seulement un simple jeu d’enfants ? L’histoire de l’humanité a été marquée par la manière de répondre à cette question.

Jésus ne craint pas ces questions des hommes ; il ne craint pas l’humanité ni les différentes recherches qu’elle effectue. Au contraire, il connaît les ‘‘recoins’’ du cœur humain, et en bon pédagogue, il est disposé à nous accompagner toujours. Fidèle à lui-même, il assume nos recherches, nos aspirations et leur donne un nouvel horizon. Fidèle à lui-même, il réussit à donner une réponse capable de proposer un nouveau défi, en déplaçant ‘‘les réponses attendues’’ ou ce qui apparemment relève de l’ordre établi. Fidèle à lui-même, Jésus propose toujours la logique de l’amour. Une logique capable d’être vécue par tous, parce qu’elle est pour tous.

Loin de tout type d’élitisme, l’horizon de Jésus n’est pas pour quelques privilégiés capables d’arriver ‘‘à la connaissance désirée’’ ou à divers niveaux de spiritualité. L’horizon de Jésus est toujours une offre pour la vie quotidienne également ici sur ‘‘notre île’’ ; une offre qui fait toujours que la vie quotidienne a une saveur d’éternité.

Qui est le plus important ? Jésus est simple dans sa réponse : « Si quelqu’un veut être le premier, qu’il soit le dernier de tous et le serviteur de tous ». Si quelqu’un veut être grand, qu’il serve, qu’il ne se serve pas.

Voilà le grand paradoxe de Jésus. Les disciples discutaient de celui qui occuperait la place la plus importante, celui qui serait choisi comme le privilégié, qui serait exempté de la loi commune, de la norme générale, pour se faire remarquer dans une soif de supériorité sur les autres. Celui qui gravirait les échelons le plus rapidement pour occuper les charges qui confèreraient certains avantages.

Jésus perturbe leur logique en leur disant simplement que la vie authentique se vit à travers l’engagement concret pour le prochain.

L’invitation au service possède une particularité à laquelle nous devons être attentifs. Servir signifie, en grande partie, prendre soin de la fragilité. Prendre soin des membres fragiles de nos familles, de notre société, de notre peuple. Ce sont les visages souffrants, les personnes sans protection et angoissées que Jésus propose de regarder et invite concrètement à aimer. Amour qui se transforme en actions et en décisions. Amour qui se manifeste à travers les diverses tâches qu’en tant que citoyens, nous sommes invités à accomplir. Les personnes en chair et en os, avec leur vie, leur histoire et spécialement leur fragilité, sont celles que nous sommes invités par Jésus à défendre, à protéger, à servir. En effet, être chrétien implique servir la dignité de vos frères, lutter pour la dignité de vos frères et vivre pour la dignité de vos frères. C’est pourquoi le chrétien est toujours invité à laisser de côté, ses aspirations, ses envies, ses désirs de toute puissance, en voyant concrètement les plus fragiles.

Il y a un ‘‘service’’ qui sert ; mais nous devons nous prémunir contre l’autre service, contre la tentation du ‘‘service’’ qui ‘‘se’’ sert. Il y a une façon d’exercer le service qui vise comme intérêt le bénéfice des ‘‘miens’’, au nom de ce qui est ‘‘nôtre’’. Ce service laisse toujours les ‘‘tiens’’ dehors, en générant une dynamique d’exclusion.

Nous sommes tous appelés par vocation chrétienne au service qui sert et à nous aider mutuellement à ne pas tomber dans les tentations du ‘‘service qui se sert’’. Nous sommes tous invités, stimulés par Jésus, à nous prendre en charge les uns les autres par amour. Et cela, sans regarder de côté pour voir ce que le voisin fait ou a manqué de faire. Jésus nous dit : ‘‘Si quelqu’un veut être le premier, qu’il soit le dernier et le serviteur de tous’’. Il ne dit pas, si ton voisin veut être le premier, qu’il serve. Nous devons nous prémunir contre le regard accusateur et avoir le courage de croire dans le regard, qui transforme, auquel nous invite Jésus.

Cette prise en charge mutuelle par amour ne vise pas à asservir, au contraire, elle met le frère au centre la question : le service vise toujours le visage du frère, il touche sa chair, il sent sa proximité et même dans certains cas la ‘‘souffre’’ et cherche sa promotion. Voilà pourquoi, le service n’est jamais idéologique, puisqu’il ne sert pas les idées, mais les personnes.

Le saint peuple fidèle de Dieu en marche à Cuba est un peuple qui a le sens de la fête, de l’amitié, de la beauté. C’est un peuple qui marche, qui chante et loue. C’est un peuple qui a des blessures, comme tout peuple, mais qui sait ouvrir les bras, qui marche avec espérance, parce que sa vocation a de la grandeur. Aujourd’hui, je vous invite à préserver cette vocation, à préserver ces dons que Dieu vous a faits, mais spécialement je veux vous inviter à prendre soin de la fragilité de vos frères et à les servir. Ne les négligez pas pour des projets qui peuvent être séduisants, mais qui se désintéressent du visage de celui qui est à côté de vous. Nous connaissons, nous en sommes témoins de la force imparable de la résurrection qui suscite partout des germes de ce monde nouveau (cf. Evangelii gaudium, n. 276.278).

N’oublions pas la Bonne Nouvelle d’aujourd’hui : l’importance d’un peuple, d’une nation, l’importance d’une personne se fonde toujours sur la façon dont elle sert la fragilité de ses frères. En cela, nous trouvons l’un des fruits d’une vraie humanité.

‘‘La vie de celui qui ne vit pas pour servir ne vaut pas la peine d’être vécue’’.

Cérémonie d’accueil du pape François à l’aéroport international « José Marti » de La Havane, Cuba

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Monsieur le Président, Distinguées autorités,
Chers frères dans l’Episcopat, Mesdames et Messieurs,

Je vous remercie vivement, Monsieur le Président, pour votre accueil et pour vos aimables paroles de bienvenue au nom du Gouvernement et de tout le peuple cubain. Mes salutations s’adressent aussi aux Autorités et aux membres du Corps diplomatique qui ont eu l’amabilité d’être présents à cette cérémonie.

Au Cardinal Jaime Ortega et Alamino, Archevêque de la Havane, à Monseigneur Dionisio Guillermo García Ibáñez, Archevêque de Santiago de Cuba et Président de la Conférence Episcopale, aux autres Evêques et à tout le peuple cubain, j’exprime ma gratitude pour leur accueil fraternel.

Merci à tous ceux qui se sont dépensés afin de préparer cette visite pastorale. Je voudrais vous demander, Monsieur le Président, de transmettre mes sentiments de considération spéciale et de respect à votre frère Fidel. Je voudrais aussi que mes salutations arrivent, en particulier, à toutes ces personnes que, pour divers motifs, je ne pourrai pas rencontrer et à tous les Cubains dispersés à travers le monde.

En cette année 2015, se célèbre le 80ème anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre la République de Cuba et le Saint-Siège. La Providence me permet d’arriver aujourd’hui dans cette chère Nation, en suivant les traces indélébiles du chemin ouvert par les inoubliables voyages apostoliques qu’ont réalisés en cette Île mes deux prédécesseurs, saint Jean- Paul II et Benoît XVI. Je sais que leur souvenir suscite gratitude et affection dans le peuple et chez les autorités de Cuba. Aujourd’hui, nous voulons renouveler ces liens de coopération et d’amitié pour que l’Eglise continue d’accompagner et d’encourager le peuple cubain dans ses espérances et dans ses préoccupations, dans la liberté ainsi que par les moyens et dans les conditions nécessaires pour l’annonce du Royaume jusqu’aux périphéries existentielles de la société.

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Nous nous souvenons – Documentaire de S+L sur Vatican II et les évêques du Canada

Durant la l’assemblée plénière de la Conférence des évêques catholiques du Canada à Cornwall en Ontario, les évêques du Canada et leurs invités ont pu regarder ce vidéo spécial produit par télévision Sel et Lumière pour la commémoration de la fermeture du Concile Vatican II il y a 50 ans. Ce vidéo de 38 minutes vise à manifester la contribution de l’Église au Canada durant le Concile. Produit par télévision catholique Sel et Lumière et le père Thomas Rosica c.s.b. le vidéo donne la parole aux évêques qui ont participé au Concile ainsi qu’au Cardinal Gérald Cyprien Lacroix (Québec, le Cardinal Thomas Collins (Toronto), l’Archevêque de Paul-André Durocher (Gatineau).

CECC- Une Église en quête de justice : le pape François interpelle l’Église au Canada

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Présentation d’un nouveau document de la CECC sur la justice sociale:

La Commission épiscopale pour la justice et la paix de la Conférence des évêques catholiques du Canada (CECC) a publié une nouvelle ressource intitulée Une Église en quête de justice : le pape François interpelle l’Église au Canada. Depuis son élection comme évêque de Rome, le Saint-Père « confère à l’enseignement social catholique une précision et une urgence qui en font l’un des points forts de son pontificat jusqu’ici », écrit la Commission dans son texte publié aujourd’hui. Traitant largement de sujets liés à la dignité humaine et aux normes du travail, à la guerre et à la paix, ainsi qu’à l’exclusion et à l’isolement, ce document souligne l’intérêt et l’appel du pape François à lutter pour la justice, et offre des questions de réflexions adaptées au contexte canadien.

Lettre du Souverain Pontife à Mgr Rino Fisichella

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Lettre du Souverain Pontife au président du Conseil pontifical pour la promotion de la nouvelle évangélisation, Mgr Rino Fisichella, chargé de l’organisation du Jubilé extraordinaire de la Miséricorde:

A mon vénéré frère
Mgr Rino Fisichella
président du Conseil pontifical
pour la promotion de la nouvelle évangélisation

L’approche du Jubilé extraordinaire de la Miséricorde me permet de me concentrer sur certains points sur lesquels je considère qu’il est important d’intervenir afin de permettre que la célébration de l’Année Sainte soit pour tous les croyants un véritable moment de rencontre avec la miséricorde de Dieu. Je désire en effet que le Jubilé soit une expérience vivante de la proximité du Père, permettant presque de toucher du doigt sa tendresse, afin que la foi de chaque croyant se renforce et que le témoignage devienne ainsi toujours plus efficace.

Ma pensée va, en premier lieu, à tous les fidèles qui, dans chaque diocèse ou comme pèlerins à Rome, vivront la grâce du Jubilé. Je désire que l’indulgence jubilaire soit pour chacun une expérience authentique de la miséricorde de Dieu, qui va à la rencontre de tous avec le visage du Père qui accueille et pardonne, oubliant entièrement le péché commis. Pour vivre et obtenir l’indulgence, les fidèles sont appelés à accomplir un bref pèlerinage vers la Porte Sainte, ouverte dans chaque Cathédrale ou dans les églises établies par l’évêque diocésain, ainsi que dans les quatre basiliques papales à Rome, comme signe du désir profond de véritable conversion. De même, j’établis que l’on puisse obtenir l’indulgence  dans les sanctuaires où est ouverte la Porte de la Miséricorde et dans les églises qui sont traditionnellement identifiées comme jubilaires. Il est important que ce moment soit uni, avant tout, au Sacrement de la Réconciliation et à la célébration de la sainte Eucharistie par une réflexion sur la miséricorde. Il sera nécessaire d’accompagner ces célébrations par la profession de foi et par la prière pour ma personne et pour les intentions que je porte dans mon cœur pour le bien de l’Eglise et du monde entier.

Je pense, en outre, à ceux qui, pour divers motifs, n’auront pas la possibilité de se rendre à la Porte Sainte, en premier lieu les malades et les personnes âgées et seules, que leurs conditions empêchent souvent de sortir de chez eux. Pour ces personnes, il sera d’une grande aide de vivre la maladie et la souffrance comme expérience de proximité au Seigneur qui, dans le mystère de sa passion, mort et résurrection, indique la voie maîtresse pour donner un sens à la douleur et à la solitude. Vivre avec foi et espérance joyeuse ce moment d’épreuve, en recevant la communion ou en participant à la Messe et à la prière communautaire, également à travers les divers moyens de communication, sera pour elles la façon d’obtenir l’indulgence jubilaire. Ma pensée va aussi aux détenus, qui font l’expérience de la restriction de leur liberté. Le Jubilé a toujours constitué l’opportunité d’une grande amnistie, destinée à toucher de nombreuses personnes qui, bien que méritant une peine, ont toutefois pris conscience de l’injustice qu’elles ont commise, et désirent sincèrement s’insérer à nouveau dans la société  en apportant leur contribution honnête. Qu’à toutes ces personnes parvienne de façon concrète la miséricorde du Père qui désire être proche de ceux qui ont le plus besoin de son pardon. Dans les chapelles des prisons, elles pourront obtenir l’indulgence et, chaque fois qu’elles passeront par la porte de leur cellule, en adressant leur pensée et leur prière au Père, puisse ce geste signifier pour elles le passage de la Porte Sainte, car la miséricorde de Dieu, capable de transformer les cœurs, est également en mesure de transformer les barreaux en expérience de liberté.

J’ai demandé que l’Eglise redécouvre en ce temps jubilaire la richesse contenue dans les œuvres de miséricorde corporelle et spirituelle. L’expérience  de la miséricorde, en effet, devient visible dans le témoignage de signes concrets comme Jésus lui-même nous l’a enseigné. Chaque fois qu’un fidèle vivra l’une ou plusieurs de ces œuvres en première personne, il obtiendra certainement l’indulgence jubilaire. D’où l’engagement à vivre de la miséricorde pour obtenir la grâce du pardon complet et total en vertu de la force de l’amour du Père qui n’exclut personne. Il s’agira donc d’une indulgence jubilaire plénière, fruit de l’événement lui-même qui est célébré et vécu avec foi, espérance et charité.

Enfin, l’indulgence jubilaire peut être obtenue également pour les défunts. Nous sommes liés à eux par le témoignage de foi et de charité qu’ils nous ont laissé. De même que nous les rappelons dans la célébration eucharistique, ainsi, nous pouvons, dans le grand mystère de la communion des Saints, prier pour eux afin que le visage miséricordieux du Père les libère de tout résidu de faute et puisse les accueillir dans ses bras, dans la béatitude qui n’a pas de fin.

L’un des graves problèmes de notre temps est sans aucun doute le changement du rapport à la vie. Une mentalité très répandue a désormais fait perdre la sensibilité personnelle et sociale adéquate à l’égard de l’accueil d’une vie nouvelle. Le drame de l’avortement est vécu par certains avec une conscience superficielle, qui semble ne pas se rendre compte du mal très grave qu’un tel acte comporte. Beaucoup d’autres, en revanche, bien que vivant ce moment comme un échec, considèrent ne pas avoir d’autres voies à parcourir. Je pense, en particulier, à toutes les femmes qui ont eu recours à l’avortement. Je connais bien les conditionnements qui les ont conduites à cette décision. Je sais qu’il s’agit d’un drame existentiel et moral. J’ai rencontré de nombreuses femmes qui portaient dans leur cœur la cicatrice de ce choix difficile et douloureux. Ce qui a eu lieu est profondément injuste; pourtant, seule sa compréhension dans sa vérité peut permettre de ne pas perdre l’espérance. Le pardon de Dieu à quiconque s’est repenti ne peut être nié, en particulier lorsqu’avec un cœur sincère, cette personne s’approche du Sacrement de la Confession pour obtenir la réconciliation avec le Père. C’est également pour cette raison que j’ai décidé, nonobstant toute chose contraire, d’accorder à tous les prêtres, pour l’Année jubilaire, la faculté d’absoudre du péché d’avortement tous ceux qui l’ont provoqué et qui, le cœur repenti, en demandent pardon. Que les prêtres se préparent à cette tâche importante en sachant unir des paroles d’authentique accueil à une réflexion qui aide à comprendre le péché commis, et indiquer un itinéraire de conversion authentique pour pouvoir obtenir le pardon véritable et généreux du Père qui renouvelle tout par sa présence.

Une dernière considération s’adresse aux fidèles qui, pour diverses raisons, désirent fréquenter les églises où les offices sont célébrés par les prêtres de la Fraternité Saint Pie X. Cette Année jubilaire de la Miséricorde n’exclut personne. Certains confrères évêques m’ont fait part en plusieurs occasions de leur bonne foi et pratique sacramentelle, unie toutefois à la difficulté de vivre une situation pastorale difficile. J’espère que dans un proche avenir, l’on pourra trouver les solutions pour retrouver une pleine communion avec les prêtres et les supérieurs de la Fraternité. Entre temps, animé par l’exigence de répondre au bien de ces frères, j’établis, par ma propre disposition, que ceux qui, au cours de l’Année Sainte de la Miséricorde, s’approcheront, pour célébrer le Sacrement de la Réconciliation, des prêtres de la Fraternité Saint Pie X recevront une absolution valide et licite de leurs péchés.

M’en remettant à l’intercession de la Mère de la Miséricorde, je confie à sa protection la préparation de ce Jubilé extraordinaire.

Du Vatican, le 1er septembre 2015

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