Une Église en dialogue – L’Église catholique et le dialogue interreligieux

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L’environnement et la politique du dialogue

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Nous poursuivons aujourd’hui notre analyse de l’encyclique Laudato Sì du pape François sur le thème de l’écologie en nous arrêtant sur le chapitre 5. Dans ce chapitre, le Pape tente « de tracer les grandes lignes de dialogue à même de nous aider à sortir de la spirale d’autodestruction dans laquelle nous nous enfonçons » (no 163) et ainsi manifester que la « grandeur politique se révèle quand, dans les moments difficiles, on œuvre pour les grands principes et en pensant au bien commun à long terme » (178).

Ce que le pape François veut véritablement, c’est que le monde politique sorte de son actuelle logique égoïste. Pour lui, les politiciens ne devraient plus réduire leurs échéanciers au seul rythme des élections. En effet, le Bien commun ne peut plus se calculer en terme de trimestre ou de quinquennat mais en terme de siècle. En ce sens, François n’invite-t-il pas les décideurs à entrer dans le « temps de l’Église » ? N’invite-t-il pas tous les citoyens du monde à réfléchir sur l’histoire de « l’époque post-industrielle [et qui] sera peut-être considérée comme l’une des plus irresponsables de l’histoire » (no 165) pour, ensuite, faire en sorte de ne pas continuer dans cette direction ?

En ce sens, pour le Pape, il est non seulement irresponsable d’avoir une vision à court terme mais nous ne pouvons plus nous contenter de défendre uniquement nos intérêts nationaux. En un mot, devant la crise actuelle, un « consensus mondial devient indispensable » (no 164). Cette invitation arrive à point puisqu’aura lieu, à Paris du 30 novembre au 11 décembre prochain, la 21e conférence sur les changements climatiques. Dans ce contexte, le message du pape François pourra plus facilement rejoindre les consciences de tous les décideurs politiques de la planète.

La Conférence de Paris devra donc tenir compte des pays émergeants en évitant de leur imposer des décisions qui mettraient en péril leur propre développement. Ils doivent avoir leur « mot à dire ». Nous touchons ainsi un message central de l’encyclique du Pape. Ce devoir de justice envers la terre passe nécessairement par une justice envers les plus pauvres. Comme le dit le Pape lui-même : « Il s’agit simplement de redéfinir le progrès » (no 194).

Sans vouloir faire table rase de l’ensemble du monde industriel qui nous précède, le pape François désire ardemment que nous soyons capables d’une remise en cause de notre présent mode de vie et, ce, jusqu’à considérer « marquer une pause en mettant certaines limites raisonnables, voire à retourner en arrière avant qu’il ne soit trop tard » (no 193). Cette analyse (non exhaustive) du chapitre 5 de Laudato Si montre bien que les changements devront être fondamentaux si nous voulons vraiment faire face de manière réaliste à la crise des changements climatiques. La semaine prochaine, nous terminerons notre série d’articles de l’encyclique Laudato Si par une analyse du chapitre 6.

Le dialogue: un enrichissement mutuel

blog_1438954927 (Image: Courtoisie Catholic News Service)

Depuis maintenant plusieurs décennies, notre monde subit des changements inédits. En effet, à la grande mobilité que nous offrent les moyens modernes de transport tel que l’avion, viennent s’ajouter les technologies de communication qui nous permettent d’être en contact avec n’importe qui, n’importe où sur la planète. À ces deux modifications majeures s’ajoute la prise de conscience toujours plus accrue de notre commune humanité ainsi que de la nécessité de la coexistence. À l’instar des deux précédents millénaires, il n’est plus possible pour quiconque de se réfugier dans un milieu social et culturel homogène. Cette situation qui avait l’avantage d’être, à certains points de vue, plus « confortable », avait le fâcheux désavantage de nous priver du regard de l’autre qui est très souvent, facteur de progrès. De cette nouvelle réalité de la coexistence et des différents défis qui se présentent à nous Canadiens, la Conférence des évêques catholiques du Canada a pris l’initiative de publier un document intitulé « Catholiques et musulmans au Canada : croyants et citoyens dans la société ». Enfin, ce document me semble être un instrument incontournable pour relever ce que le Cardinal Tauran a appelé les trois défis du dialogue islamo chrétien: le défi de l’identité, le défi de l’altérité et le défi de la sincérité.

Le défi de l’altérité : nos différences sont sources d’enrichissement

Ce court document de huit pages présente les grandes lignes du nécessaire « pas en avant » en matière de connaissance religieuse des catholiques sur la foi de nos frères et sœurs musulmans. Citant un texte rédigé par des savants de l’Islam affirmant que « l’avenir du monde dépend de la paix entre musulmans et chrétiens », la CECC propose d’abord des informations générales sur cette « religion du livre ». Retraçant les grandes lignes de l’histoire religieuse musulmane qui est centrée sur la personnalité de son fondateur Muhammad qui « en méditant dans une caverne sur le mont Hira, reçut ce qu’il crut être des révélations divines »[4], le document donne de l’information sur ses concepts religieux fondamentaux et ce qu’il est convenu d’appeler les « cinq piliers de l’Islam »[5]. Cette partie informative ne serait pas complète sans ces importantes indications sur les subdivisions majeures de l’Islam que sont le Sunnisme, le Chiisme et le Soufisme.

Le défi de l’identité : savoir et accepter ce que nous sommes

Après ce regard sur le contenu de la foi islamique, le document explore les similitudes qu’elle peut avoir avec la foi catholique comme par exemple, la croyance en un seul Dieu, créateur et miséricordieux. Prendre conscience des éléments communs entre nous peut être l’occasion d’une redécouverte de sa propre foi, du bien fondée de cette dernière et des fruits que cette vérité a pu produire de beau dans d’autres contextes. Par exemple, s’interroger sur la façon dont les musulmans comprennent et vivent la miséricorde de Dieu pourrait éclairer notre propre expérience. [Read more…]

La racine humaine de la crise écologique

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Pour nous qui sommes habitués à vivre à des températures froides une bonne partie de l’année, l’été est une occasion de reprendre contact avec la nature. Nous fuyons le plus possible les endroits clos et recherchons le « grand air ». Cette attitude est d’autant plus intense lorsque l’hiver s’est allongé et a semblé ne plus vouloir finir. Ce retour annuel aux sources devrait nous encourager à accueillir l’invitation du pape François à reconsidérer notre relation à la nature, à vérifier si notre mode de vie au quotidien, notre « métro-boulot-dodo » ne s’est pas éloigné quelque peu de notre propre nature. C’est ce qu’il propose dans le troisième chapitre de son encyclique Laudato Si.

Intitulé « Racine humaine de la crise écologique », ce chapitre propose une réflexion en profondeur sur notre relation avec la technologie. Puisque « l’analyse des problèmes environnementaux est inséparable de l’analyse des contextes humains » (no110), il est important de comprendre que la réflexion écologique ne peut plus se passer d’inclure l’homme. En effet, dans les débats actuels sur la protection de l’environnement, une constante émerge : la technique. Tandis que chez certains elle est parfois présentée comme la source de tous les maux, chez d’autres, elle est l’unique solution d’avenir. Devant ce paradoxe, François nous invite à nous éloigner des simplifications et à nous pencher sur les bons et mauvais côtés de la technique.

La technologie est une merveille et nous en sommes tous les bénéficiaires, moi le premier ! Comme le dit le pape : « La technologie a porté remède à d’innombrables maux qui nuisaient à l’être humain et le limitaient. Nous ne pouvons pas ne pas valoriser ni apprécier le progrès technique, surtout dans la médecine, l’ingénierie et les communications. » (no102). Par exemple, le pape fait mention de l’intérêt autour des OGM. Pour lui: « Il est difficile d’émettre un jugement général sur les développements de transgéniques (OMG) […] les risques ne sont pas toujours dus à la technique en soi, mais à son application inadaptée ou excessive » (no 133). Il ne convient donc pas d’accuser directement la technique mais bien notre rapport à elle.

En ce sens, le Pape souligne que le principal défi pour sauvegarder l’environnement est de convertir le cœur humain. En effet, c’est l’esprit de domination (no 108) qui a mené à la présente crise c’est-à-dire cette idée que l’homme n’a aucune limite. En d’autres termes « l’idée d’une croissance infinie ou illimitée » (no 106) doit être soumise à la critique. N’avons-nous pas nous-mêmes cette volonté de « dépasser toutes les limites » ou tous les « tabous » ?

Pour y faire face, le pape scientifique avance une série de propositions dont la principale est de favoriser une éducation intégrale (no 120) permettant à l’être humain de se situer dans le plan de Dieu sur sa création et ainsi « ralentir la marche pour regarder la réalité d’une autre manière, recueillir les avancées positives et durables, et en même temps récupérer les valeurs et les grandes finalités qui ont été détruites par une frénésie mégalomane. » (no 114).

La semaine prochaine, nous poursuivrons notre analyse de l’encyclique Laudato Si du pape François en examinant le quatrième chapitre intitulé « Une écologie intégrale », le cœur de l’encyclique.

« Laudato Si » ou la refondation de l’écologie

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Poursuivons notre réflexion estivale sur l’environnement en explorant le deuxième chapitre de l’encyclique du pape François sur l’écologie Laudato Si. Comme nous l’avons vu la semaine dernière, l’intention du Pape est d’offrir à toute l’humanité la contribution de la riche tradition chrétienne à la lutte pour la protection de l’environnement.

Dans ce deuxième chapitre, le pape François cherche à faire reconnaître l’importance du dialogue pour la résolution de la présente crise. En effet, il écrit : « Si nous cherchons vraiment à construire une écologie qui nous permette de restaurer tout ce que nous avons détruit, alors aucune branche des sciences et aucune forme de sagesse ne peut être laissée de côté, la sagesse religieuse non plus, avec son langage propre. » (no63). Ainsi le pape François invite gouvernants et citoyens du monde à reconnaître que la foi chrétienne est une alliée de poids sur la route du respect de l’environnement. Cette invitation prend encore plus d’importance lorsque l’on considère l’atmosphère souvent fermée à la spiritualité des grandes conférences et débats actuels sur l’environnement. Au contraire, cette méfiance devrait se transformer en confiance, en ouverture vis-à-vis de ceux qui ont « la merveilleuse certitude de savoir que la vie de toute personne ne se perd pas dans un chaos désespérant, dans un monde gouverné par le pur hasard ou par des cycles qui se répètent de manière absurde! » (no65).

Après avoir souligné l’apport de la pensée chrétienne aux débats sur l’écologie, le pape amorce une profonde réflexion sur la Création selon une perspective unique et surprenante. En effet, il présente la place de l’homme dans l’univers selon une perspective relationnelle. De fait, selon le Pape, « les récits de la création […] suggèrent que l’existence humaine repose sur trois relations fondamentales intimement liées : la relation avec Dieu, avec le prochain, et avec la terre » (no66). Ainsi, de la relation fondamentale avec Dieu découle l’harmonie entre les hommes et avec, par le fait même, avec la création. Cette véritable « déclinaison » relationnelle se porterait à merveille si un incident historique n’était pas venu « détruire par le fait d’avoir prétendu prendre la place de Dieu » (no 66). De ce péché originel, découle cette prétention qu’ont les hommes à vouloir se dominer les uns et les autres et, par conséquent, dominer la terre. En ce sens, l’accusation souvent lancée contre les chrétiens selon laquelle le commandement originel de « dominer et de soumettre la terre » (Gn1, 28) serait une des sources de l’exploitation irresponsable des ressources naturelles ne tient pas compte du jugement de l’Église stipulant qu’il « ne s’agit pas d’une interprétation correcte de la Bible » (no67). Prendre en compte la révélation chrétienne dans cette lutte en faveur de l’environnement consistera donc à prendre au sérieux cette invitation à une triple réconciliation : avec Dieu, l’homme et la création.

Pour ce faire, nous devons prendre conscience d’un élément fondamental soit que : « Tout est lié » (no 92). En effet, «  la négligence dans la charge de cultiver et de garder une relation adéquate avec le voisin, envers lequel j’ai le devoir d’attention et de protection, détruit ma relation intérieure avec moi-même, avec les autres, avec Dieu et avec la terre » (no 70). Ainsi, rétablir notre relation avec la création passera par le rétablissement simultané de ces trois relations fondamentales. C’est en ce sens que l’on a qualifié l’encyclique « d’écologie intégrale ». En échangeant notre microscope pour un télescope, nous pourrons avoir une vision d’ensemble et, ainsi, cesser de prétendre sauver la planète sans considérer ce qui est défaillant en l’homme même.

Voilà le genre de réflexion auquel nous convie le pape François dans son encyclique « Laudato Si ». La semaine prochaine nous poursuivrons notre réflexion par une analyse du chapitre trois de l’encyclique.

L’écologie intégrale du pape François: une analyse de l’encyclique « Laudato Si » (1ère partie)

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Le 18 juin dernier, le pape François publiait la très attendue encyclique « Laudato Si » sur des questions primordiales liées à l’environnement et à la pauvreté. Ce texte, long de 192 pages, est un document accessible, tant par son langage que du publique auquel il est adressé, l’environnement nous concernant tous. Dans les prochaines semaines, je vous propose de parcourir ce document phare qui permet, à la fois, de mieux comprendre l’actuel phénomène climatique mais également d’y apporter des solutions appropriées.

Qu’est-ce qui se passe?

Pour le pape François, il ne fait aucun doute que notre environnement actuel subit des mutations d’une gravité sans précédent. Il l’exprime ainsi : « Il existe un consensus scientifique très solide qui indique que nous sommes en présence d’un réchauffement préoccupant du système climatique » (no 23). À partir de cet état de fait, nous sommes invités à prendre conscience de notre responsabilité individuelle et collective et à accepter de modifier certaines de nos habitudes concrètes de tous les jours. De plus, le pape nous invite également à jeter un regard sur notre vision du monde. Plus particulièrement, selon François et ses prédécesseurs, le problème provient d’une certaine vision de l’être humain.

En effet, le texte a ceci de significatif, qu’il invite à une réflexion en profondeur des fondements philosophiques et culturels (no 17-18) qui nous ont amenés à la présente crise. Selon le Pape :

« L’humanité est appelée à prendre conscience de la nécessité de réaliser des changements de style de vie, de production et de consommation, pour combattre ce réchauffement ou, tout au moins, les causes humaines qui le provoquent ou l’accentuent [puisque] la plus grande partie du réchauffement global des dernières décennies est due à la grande concentration de gaz à effet de serre (dioxyde de carbone, méthane, oxyde de nitrogène et autres) émis surtout à cause de l’activité humaine » (no 23).

C’est en ce sens que le premier chapitre de ce document magistral se penche d’abord sur les conséquences concrètes que ces changements peuvent avoir sur les êtres humains. Le Pape souligne la question de l’eau. En effet, « l’accès à l’eau potable et sûre est un droit humain primordial, fondamental et universel, parce qu’il détermine la survie des personnes, et, par conséquent, il est une condition pour l’exercice des autres droits humains. » (no 30). Parallèlement à cette question de l’eau se trouve celle de la préservation de la biodiversité. Celle-ci tendant de plus en plus à disparaître au profit de l’uniformité de l’agriculture et de la détérioration des espaces verts comme l’Amazonie, le Pape presse les autorités de procéder à un changement de vision en passant de la considération des différentes espèces comme de simples « “ressources” exploitables » à celle de la prise en compte  « qu’elles ont une valeur en elles-mêmes » (no 33). Ce dernier point manifeste bien que les changements d’attitudes et de comportements envers l’environnement ne passera que par une conception renouvelée de l’être humain et de son rôle dans la création.

Une vision de l’homme en jeu

De mon point de vue, la plus grande nouveauté de l’encyclique Laudato Si est qu’elle réintègre l’homme dans les débats en cours sur l’écologie. En effet, depuis quelques années, les questions environnementales sont souvent considérées comme indépendantes des questions liées à la pauvreté dans le monde et aux différents systèmes politiques et économiques qui entretiennent cet état de fait. Or pour le Pape, la pauvreté et la crise environnementale sont liées au point que l’on pourrait considérer qu’il ne s’agit que d’un seul et même problème. En effet, « l’environnement humain et l’environnement naturel se dégradent ensemble, et nous ne pourrons pas affronter adéquatement la dégradation de l’environnement si nous ne prêtons pas attention aux causes qui sont en rapport avec la dégradation humaine et sociale » (no 48). [Read more…]

Homélie du pape François lors de la Messe au parc « Ñu Guazú » d’Asunción, Paraguay

« Le Seigneur donnera ses bienfaits, et notre terre donnera son fruit », ainsi dit le Psaume (84, 13). Nous sommes invités à célébrer cela, cette mystérieuse communion entre Dieu et son Peuple, entre Dieu et nous. La pluie est le signe de sa présence dans la terre travaillée de nos mains. Une communion qui donne toujours du fruit, qui donne toujours la vie. Cette confiance jaillit de la foi, savoir que nous pouvons compter sur sa grâce, qui toujours transformera et irriguera notre terre.

Une confiance qui s’apprend, qui s’éduque. Une confiance qui se forme progressivement au sein d’une communauté, dans la vie d’une famille. Une confiance qui devient témoignage sur les visages de tous ceux qui nous stimulent à suivre Jésus, à être disciples de Celui qui ne déçoit jamais. Le disciple se sent invité à faire confiance, se sent invité par Jésus à être son ami, à partager son destin, à partager sa vie. « Je ne vous appelle plus serviteurs, car le serviteur ne sait pas ce que fait son maître ; je vous appelle mes amis, car tout ce que j’ai appris de mon Père, je vous l’ai fait connaître » (Jn 15,15). Les disciples sont ceux qui apprennent à vivre dans la confiance de l’amitié.Capture d’écran 2015-07-12 à 10.21.02

L’Évangile nous parle de ce fait d’être disciple. Il nous présente la carte d’identité du chrétien. Sa lettre de présentation, ses lettres de Créances.

Jésus appelle ses disciples et il les envoie en leur donnant des règles claires et précises. Il les place face à des défis avec une série d’attitudes, de comportements qu’ils doivent avoir. Elles ne sont pas rares les fois où elles peuvent nous paraître exagérées ou absurde ; des attitudes qu’il serait plus facile de lire symboliquement ou “spirituellement”. Mais Jésus est très précis, il est très clair. Il ne leur dit pas : « Faites en sorte que » ou « faites ce que vous pouvez ».

Rappelons-les ensemble : « Ne prenez rien pour la route, mais seulement un bâton ; pas de pain, pas de sac, pas de pièces de monnaie… Quand vous avez trouvé l’hospitalité dans une maison, restez-y » (cf. Mc 6, 8-11). Cela semblerait quelque chose d’impossible.

Nous pourrions nous concentrer sur les paroles ‘‘pain’’, ‘‘argent’’, ‘‘sac’’, ‘‘bâtons’’, ‘‘sandales’’, ‘‘tunique’’. Et ce serait légitime. Mais il me semble qu’il y a une parole-clé, qui pourrait passer inaperçue. Une parole centrale dans la spiritualité chrétienne, dans l’expérience du fait d’être disciple : l’hospitalité. Jésus, en bon maître, pédagogue, les envoie pour vivre l’hospitalité. Il leur dit : « Restez là où l’on vous accueillera ». Il les envoie pour apprendre une des caractéristiques fondamentales de la communauté croyante. Nous pourrions dire que le chrétien est celui qui a appris à recevoir, à accueillir.

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Homélie du pape François lors de la célébration des vêpres à la Cathédrale d’Asunción

Qu’il est beau de prier tous ensemble les Vêpres ! Comment ne pas rêver une Église qui reflète et répète l’harmonie des voix et du chant dans la vie quotidienne ? Et nous le faisons dans cette Cathédrale, qui tant de fois a dû être reconstruite ; cette Cathédrale est signe de l’Église et de chacun de nous : parfois, les tempêtes du dehors et du dedans nous obligent à abattre ce qui a été construit et à recommencer, mais toujours avec l’espérance placée en Dieu ; et si nous regardons cet édifice, sans doute il n’a pas déçu les Paraguayens, parce que Dieu ne déçoit jamais et pour cela nous le louons avec gratitude.

La prière liturgique, avec sa structure et sa forme rythmée, veut exprimer toute l’Église, épouse du Christ, qui essaie de se conformer à son Seigneur. Chacun de nous dans notre prière, nous voulons progressivement ressembler à Jésus.

La prière fait émerger ce que nous vivons ou que nous devrions vivre dans la vie quotidienne, au moins la prière qui ne veut pas être aliénante ou seulement décorative. La prière nous donne impulsion pour agir ou nous examiner dans ce que nous récitions dans les Psaumes : nous sommes les mains de Dieu qui « du fumier retire le pauvre » (Ps 112, 7) et c’est à nous de travailler afin que la tristesse de la stérilité se transforme en un champ fertile. Nous qui chantons qu’« il en coûte au Seigneur de voir mourir les siens » (Ps 115, 15), nous sommes ceux qui luttons, qui nous donnons du mal, nous défendons la valeur de toute vie humaine, de la naissance jusqu’à ce que le nombre des années s’accroisse et que la force se réduise. La prière est reflet de l’amour que nous ressentons pour Dieu, pour les autres, pour le monde créé ; le commandement de l’amour est la meilleure configuration à Jésus du disciple missionnaire. Être attachés à Jésus donne profondeur à la vocation chrétienne ; cette vocation liée au « faire » de Jésus – qui est beaucoup plus que des activités –, cherche à lui faire ressembler en tout ce qu’il a accompli. La beauté de la communauté ecclésiale naît de l’adhésion de chacun de ses membres à la personne de Jésus, formant un ‘‘ensemble vocationnel’’ dans la richesse de la variété harmonique.AFP4342153_LancioGrande

Les antiennes des cantiques évangéliques de cette fin de semaine nous rappellent l’envoi des Douze par Jésus. Il est toujours bien de grandir dans cette conscience du travail apostolique en communion. Il est beau de vous voir collaborer pastoralement, toujours à partir de la nature et de la fonction ecclésiale de chaque vocation et de chaque charisme. Je désire vous exhorter tous, prêtres, religieux et religieuses, laïcs et séminaristes à vous engager dans cette collaboration ecclésiale, spécialement autour des plans pastoraux des diocèses et de la mission continentale, en coopérant avec toute votre disponibilité au bien commun. Si la division entre nous provoque la stérilité (cf. Evangelii gaudium, nn. 98-101), il n’y a pas de doute que de la communion et de l’harmonie naît la fécondité, parce qu’elles sont profondément consonantes avec l’Esprit Saint.

Nous avons tous des limites, et personne ne peut reproduire Jésus Christ dans sa totalité, et bien que chaque vocation se configure principalement avec certains traits de la vie et de l’œuvre de Jésus, il y en a quelques-uns qui sont communs et inaliénables. Nous venons de louer le Seigneur parce qu’il « ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu » (Ph 2, 6), et cela est une caractéristique de toute vocation chrétienne : celui qui est appelé par Dieu ne se vante pas, ne va pas à la recherche de reconnaissances ni d’applaudissements éphémères, ne croit pas avoir monté en grade et ne traite pas les autres comme s’il était sur un piédestal.

Le primat du Christ est décrit clairement dans la liturgie de la Lettre aux Hébreux ; nous venons de lire presque la fin de cette Lettre : ‘‘Qu’il vous forme en tout ce qui est bon comme le berger des brebis, le Pasteur par excellence’’ (cf. 13, 20-21)  et cela suppose de reconnaître que chaque consacré se configure à Celui qui dans sa vie terrestre, ‘‘avec un grand cri et dans les larmes, des prières et des supplications’’ (cf. He 5, 7), a atteint la perfection quand il a appris, en souffrant, ce que signifiait obéir ; et cela fait aussi partie de notre appel.

Terminons de réciter nos Vêpres ; le campanile de cette cathédrale a été refait plusieurs fois ; le son des cloches précède et accompagne en de nombreuses occasions notre prière liturgique : refaits par Dieu chaque fois que nous prions, solides comme un campanile, joyeux d’annoncer les merveilles de Dieu, partageons le Magnificat et laissons le Seigneur accomplir, à travers notre vie consacrée, de grandes choses au Paraguay.

Discours du pape François lors de la rencontre avec les représentants de la société civile du Paraguay

Chers amis,

Je me réjouis de pouvoir être avec vous, les représentants de la société civile, pour partager des rêves et des espoirs d’un avenir meilleur. Je remercie Mgr Adalberto Martínez Flores, Secrétaire de la Conférence Épiscopale du Paraguay pour les paroles de bienvenue qu’il m’a adressées au nom de tous.

Vous voir tous, chacun provenant d’un secteur, d’une organisation de cette chère société paraguayenne, avec ses joies, ses préoccupations, ses luttes et ses recherches, m’amène à rendre grâce à Dieu. Un peuple qui ne maintient pas vivantes ses préoccupations, est peuple qui vit dans l’inertie de l’acceptation passive, c’est un peuple mort. Au contraire, je vois en vous la sève d’une vie qui court et qui veut germer. Cela, Dieu le bénit toujours. Dieu est toujours en faveur de tout ce qui aide à relever, à améliorer la vie de ses enfants. Il y a des choses qui sont mauvaises, certes ! Il y a des situations injustes, certes ! Mais de les voir et de les sentir, cela m’aide à renouveler l’espérance dans le Seigneur qui continue d’agir au milieu de son peuple. Vous venez de divers horizons, situations et recherches, tous ensemble vous formez la culture paraguayenne. Vous êtes tous nécessaires dans la recherche du bien commun. « Dans les conditions actuelles de la société mondiale, où il y a tant d’inégalités et où sont toujours plus nombreuses les personnes marginalisées » (Laudato si’, n. 158), vous voir ici est un cadeau.

Je voudrais remercier aussi les personnes qui ont posé des questions, puisqu’à travers elles, j’ai pu voir, avant tout, votre engagement à travailler unis et sans relâche pour le bien de la patrie.

1. Par rapport à la première question, cela m’a plu d’écouter de la bouche d’un jeune la préoccupation de faire en sorte que la société soit un espace de fraternité, de justice, de paix et de dignité pour tous. La jeunesse est le temps de grands idéaux. Comme c’est important que Capture d’écran 2015-07-11 à 23.39.11vous les jeunes, vous compreniez que le vrai bonheur passe par la lutte pour un monde plus fraternel ! Comme il est bon que vous les jeunes, vous voyiez que bonheur et plaisir ne sont pas synonymes, mais que le bonheur exige l’engagement et le dévouement. Vous êtes trop précieux pour parcourir le chemin de la vie comme des anesthésiés ! Le Paraguay a une population très jeune et c’est une grande richesse. C’est pourquoi je pense que la première chose à faire est d’éviter que cette force, cette lumière, s’éteigne dans vos cœurs et de contrecarrer la mentalité croissante qui considère qu’il est inutile et absurde d’aspirer à des choses qui valent la peine, d’aspirer à jouer pour quelque chose, à jouer pour quelqu’un. N’ayez pas peur de tout donner sur le terrain de jeu. N’ayez pas peur de donner le meilleur de vous-mêmes.

Mais ne le faites pas seuls. Cherchez à échanger, profitez-en  pour écouter la vie, les histoires, les contes de vos aînés, de vos grands-parents. Passez beaucoup de temps à écouter tout ce qu’ils ont de bon à enseigner. Ils sont les gardiens de ce patrimoine spirituel de foi et de valeurs qui définissent un peuple et éclairent son chemin. Trouvez aussi une consolation dans la force de la prière, en Jésus, dans sa présence quotidienne et constante. Il ne déçoit pas. Jésus, à travers la mémoire de votre peuple, est le secret pour que votre cœur se maintienne toujours en joie dans la recherche de fraternité, de justice, de paix et de dignité pour tous.

La poésie de Charles Miguel Giménez, que Mgr Adalberto Martínez a citée, m’a plu. Je crois qu’elle résume très bien ce que j’ai voulu dire : Je [rêve] d’un paradis sans guerre entre frères, riche d’hommes sains d’âme et de coeur….et d’un Dieu qui bénit sa nouvelle ascension. Oui, Dieu est la garantie de notre dignité d’hommes.

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Homélie de la Messe au sanctuaire mariale de Caacupé, Paraguay

Me trouver avec vous, c’est me sentir à la maison, aux pieds de notre Mère, la Vierge des Miracles de Caacupé. Dans un sanctuaire nous, les enfants, nous rencontrons notre Mère et entre nous, nous nous rappelons que nous sommes frères. C’est un lieu de fête, de rencontre, de famille.

Nous venons présenter nos besoins, nous venons remercier, demander pardon et pour prendre un nouveau départ. Que de baptêmes, que de vocations sacerdotales et religieuses, que de fiançailles et de mariages sont nés aux pieds de notre Mère ! Que de larmes et que d’adieux ! Nous venons toujours avec notre vie, parce qu’ici, on est à la maison et la chose la meilleure est de savoir qu’il y a quelqu’un qui nous attend.

Comme tant d’autres fois, nous sommes venus parce que nous voulons renouveler notre enthousiasme pour vivre la joie de l’Évangile.

Comment ne pas reconnaître que ce sanctuaire est une part vitale du peuple paraguayen, de vous ? On le sent ainsi, on le prie ainsi, on le chante ainsi : « Dans ton Éden de Caacupé, Vierge de Caacupé, c’est ton peuple, Vierge pure, qui te donne son amour et sa foi ». Et aujourd’hui, nous sommes ici, comme peuple de Dieu, aux pieds de notre Mère, lui donnant notre amour et
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Dans l’Évangile, nous venons d’écouter l’annonce de l’Ange à Marie qui lui dit : « Réjouis- toi, comblée de grâce, le Seigneur est avec toi ». Réjouis-toi, Marie, réjouis-toi. Devant ce salut, elle est restée déconcertée et se demandait ce que cela voulait dire. Elle ne comprenait pas beaucoup ce qui était en train de se passer. Mais elle a compris que cela venait de Dieu et elle a dit : “oui”. Marie est la Mère du ‘‘oui’’. Oui au rêve de Dieu, oui au projet de Dieu, oui à la volonté de Dieu.

Un “oui” qui, comme nous le savons, ne fut en rien facile à vivre. Un “oui” qui ne la remplit pas de privilèges ou de distinctions, mais qui, comme le dira Siméon dans sa prophétie :

« Et toi-même une épée te transpercera l’âme ! » (Lc 2, 35). Et comment elle l’a transpercée ! Voilà pourquoi nous l’aimons tant et nous trouvons en elle une vraie mère qui nous aide à garder vivante la foi et l’espérance au milieu de situations compliquées. En suivant la prophétie de Siméon, cela nous fera du bien de parcourir à nouveau brièvement des moments difficiles dans la vie de Marie.

  1. La naissance de Jésus. Il n’y avait pas de place pour eux. Ils n’avaient pas de maison, d’habitation pour accueillir leur fils. Il n’y avait pas de place pour pouvoir le mettre au monde. Et pas de famille proche non plus, ils étaient seuls. L’unique place disponible était une étable d’animaux. Et dans sa mémoire résonnait sûrement les paroles de l’Ange : « Réjouis-toi, Marie, le Seigneur est avec toi ». Et il se peut qu’elle se soit demandé : Où est-il maintenant ?
  1. La fuite en Égypte. Ils durent partir, aller en exil. Là non seulement ils n’avaient pas de place, ni de famille, mais encore leurs vies étaient en danger. Ils durent se mettre en chemin et aller en terre étrangère. Ils ont été des migrants en raison de la convoitise et de l’avarice de l’empereur. Et là, il se peut qu’elle se soit demandé : Où est ce que m’a dit l’Ange ?
  1. La mort sur la croix. Il ne devait pas exister de situation plus difficile pour une mère que d’accompagner la mort d’un fils. Ce sont des moments déchirants. Là, nous voyons Marie au pied de la croix, comme toute mère, solide, sans faiblir, qui accompagne son Fils jusqu’à l’extrême de la mort et de la mort en croix. Et ensuite retenant et soutenant les disciples.

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