Allocution du pape François au personnel de l’ONU

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Vous trouvez ci-dessous l’adresse du Pape François au Personnel du Quartier général de l’Organisation des Nations Unies, New York. Vendredi, 25 septembre 2015

Chers amis,

À l’occasion de ma visite aux Nations Unies, je suis heureux de vous rencontrer, vous les hommes et les femmes qui êtes, de maintes manières, la colonne vertébrale de cette Organisation. Je vous remercie pour votre accueil, et je suis reconnaissant pour tout ce que vous avez fait afin de préparer ma visite. Je voudrais vous demander aussi de transmettre mes salutations aux membres de vos familles et à vos collègues qui n’ont pas pu être avec nous aujourd’hui.

La majeure partie du travail fait ici n’est pas du genre à faire les nouvelles. Derrière la scène, vos efforts quotidiens rendent possibles beaucoup d’initiatives diplomatiques, culturelles, économiques et politiques des Nations Unies, qui sont si importantes pour satisfaire l’espoir et les attentes des peuples qui composent notre famille humaine. Vous êtes des experts et des personnes de terrain expérimentées, des officiels et des secrétaires, des traducteurs et des interprètes, des agents d’entretien et des cuisiniers, personnel de maintenance et de sécurité. Capture d’écran 2015-09-25 à 08.30.25

Merci pour tout ce que vous faites !

Votre travail discret et dévoué non seulement contribue à l’amélioration des Nations Unies, mais a aussi une grande portée pour vous personnellement. Car la façon dont nous travaillons exprime notre dignité et le genre de personne que nous sommes.

Beaucoup d’entre vous sont venus dans cette ville, de pays du monde entier. Comme tels, vous constituez un microcosme des peuples que cette Organisation représente et cherche à servir. Comme tant d’autres personnes à travers le monde, vous êtes préoccupés par le bien-être et l’éducation de vos enfants. Vous portez le souci de l’avenir de notre planète, et du genre de monde que nous allons laisser aux futures générations. Mais aujourd’hui, et chaque jour, je voudrais demander à chacun de vous, quelle que soit sa capacité, de prendre soin l’un de l’autre. Soyez proches les uns des autres, respectez-vous les uns les autres, et donnez ainsi corps entre vous à l’idéal de cette Organisation d’une famille humaine unie, vivant en harmonie, travaillant non seulement pour la paix, mais dans la paix ; travaillant non seulement pour la justice, mais dans un esprit de justice.

Chers amis, je bénis chacun de vous du fond du cœur. Je prierai pour vous et pour vos familles, et je demande à chacun de vous, s’il vous plaît, de ne pas oublier de prier pour moi. Et si certains d’entre vous n’étaient pas croyants, je leur demande de me souhaiter du bien. Que Dieu vous bénisse tous !

Merci.

Homélie du pape François lors des vêpres avec les prêtres, religieux et religieuses de New York

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Vous trouverez ci-dessous l’homélie de Sainteté le Pape François lors des vêpres avec les prêtres et les religieux à la cathédrale Saint Patrick de New York le 24 Septembre 2015:

Deux sentiments m’habitent aujourd’hui à l’égard de mes frères musulmans. D’abord, je leur adresse mes salutations en cette journée du sacrifice. J’aurais voulu que mes salutations fussent plus chaleureuses. Mon deuxième sentiment est celui de ma proximité devant la tragédie que votre peuple a souffert aujourd’hui à la Mecque. En ce moment de prière, je m’unis à vous, nous nous unissons dans l’invocation de Dieu, notre Père tout-puissant et miséricordieux.

« Aussi vous exultez de joie, même s’il faut que vous soyez affligés, pour un peu temps encore, par toutes sortes d’épreuves » (1P 1, 6). Ces paroles de l’Apôtre nous rappellent une chose essentielle. Notre vocation est à vivre dans la joie.

Cette magnifique Cathédrale Saint Patrick, construite durant des années grâce aux sacrifices de nombreux hommes et femmes, peut servir de symbole du travail des générations de prêtres, religieux et laïcs américains, qui ont aidé à bâtir l’Eglise aux Etats-Unis. Rien que dans le domaine de l’éducation, que de prêtres et de religieux dans ce pays ont joué un rôle central, en aidant les parents à donner à leurs enfants l’aliment qui les nourrit pour la vie ! Beaucoup l’ont fait au prix d’un sacrifice extraordinaire et avec une charité héroïque. Je pense par exemple à Sainte Elisabeth Anne Seton, qui a fondé la première Ecole Catholique gratuite pour les filles en Amérique, ou bien à Saint Jean Neumann, le fondateur du premier système de l’Education Catholique aux Etats-Unis.

Ce soir, chers frères et sœurs, je suis venu me joindre à vous pour prier afin que toutes nos vocations continuent de construire le grand édifice du Royaume de Dieu dans ce pays. Je sais que, en tant que presbyterium au sein du peuple de Dieu, vous avez beaucoup souffert dans un passé récent, en prenant sur vous la honte de certains de vos frères qui ont porté préjudice à l’Eglise et l’ont scandalisée dans les plus vulnérables de ses membres…. Pour emprunter les paroles du livre de l’Apocalypse, je sais bien que vous « venez de la grande épreuve » (Ap 7, 14). Je vous accompagne en ce moment de peine et de difficulté, et je remercie Dieu pour votre Capture d’écran 2015-09-24 à 19.11.08
service fidèle de son peuple. En espérant vous aider à persévérer sur le chemin de la fidélité à Jésus Christ, je voudrais vous offrir deux brèves réflexions.

La première concerne l’esprit de gratitude. La joie des hommes et des femmes qui aiment Dieu attire d’autres ; les prêtres et les religieux sont appelés à trouver et à rayonner d’une satisfaction durable dans leur vocation. La joie jaillit d’un cœur reconnaissant. En vérité, nous avons beaucoup reçu, tant de grâces, tant de bénédictions, et nous nous en réjouissons. Cela nous fera du bien de penser à nos vies avec la grâce de la mémoire. Mémoire du moment où nous avons reçu le premier appel, mémoire du chemin parcouru, mémoire des grâces reçues… et, par-dessus tout, mémoire de notre rencontre avec Jésus Christ si souvent au long du parcours. Mémoire de l’émerveillement que notre rencontre avec Jésus suscite dans nos cœurs. Chercher la grâce de la mémoire de manière à grandir dans l’esprit de gratitude. Peut-être avons-nous besoin de nous demander : sommes-nous bons pour compter les bénédictions reçues ?

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Rencontre au centre caritatif de la paroisse Saint Patrick, Washington

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Rencontre avec les sans domicile fixe
Saint Patrick, Washington
Jeudi, 24 septembre 2015

Chers amis,

La première parole que je vous voudrais vous adresser, c’est merci.  Merci de me recevoir et de l’effort que vous avez réalisé afin que cette rencontre puisse avoir lieu.

Ici, je me rappelle une personne que j’aime, qui est et qui a été très importante tout au long de ma vie. Elle a été un soutien et une source d’inspiration. C’est à elle que je recours lorsque je suis un peu ‘‘à l’étroit’’. Vous me rappelez  saint Joseph. Vos visages me parlent de son visage.

Dans la vie de Joseph, il y a eu des situations difficiles à affronter. L’une d’elles, ce fut quand Marie était sur le point d’accoucher, d’avoir Jésus. La Bible dit : « Pendant qu’ils étaient à Bethléem, le temps où elle devait enfanter fut accompli. Et elle mit au monde son fils premier-né ; elle l’emmaillota et le coucha dans une mangeoire, car il n’y avait pas de place pour eux dans la salle commune » (Lc 2, 6-7). La Bible est très claire, il n’y avait pas de logement pour eux. J’imagine Joseph, avec son épouse sur le point d’avoir un enfant, sans toit, sans maison, sans logement. Le Fils de Dieu est entré dans ce monde comme quelqu’un qui n’a pas de maison. Le Fils de Dieu a su ce que c’est que de commencer la vie sans un toit. Imaginons les questions de Joseph à ce moment-là : comment se fait-il que le Fils de Dieu n’ait pas un toit pour vivre ? Pourquoi sommes-nous  sans foyer,  pourquoi sommes-nous sans toit ? Ce sont des questions que beaucoup parmi vous peuvent se poser chaque jour.  Comme Joseph, vous vous demandez : pourquoi sommes-nous sans toit, sans foyer ? Ce sont des questions qu’il nous ferait du bien de nous poser tous : pourquoi ces frères sont-ils sans foyer, pourquoi ces frèresCapture d’écran 2015-09-24 à 11.42.22 n’ont-ils pas un toit ?

Les questions de Joseph sont actuelles ; elles habitent tous ceux qui, au long de l’histoire, ont vécu et sont sans un foyer.

Joseph était un homme qui se posait des questions, mais surtout, il était un homme de foi. C’est la foi qui a permis à Joseph de trouver la lumière à ce moment qui paraissait tout obscur ; c’est la foi qui l’a soutenu dans les difficultés de sa vie. Par la foi, Joseph a su aller de l’avant quand tout paraissait s’arrêter.

Face à des situations injustes, douloureuses, la foi nous apporte cette lumière qui dissipe l’obscurité.  Tout comme à Joseph, la foi nous ouvre à la présence silencieuse de Dieu dans toute vie, dans toute personne, dans toute situation.  Il est présent en chacun de vous, en chacun de nous.

Nous ne trouvons aucun genre de justification sociale, morale, ni de n’importe quelle espèce, pour accepter le manque de logement. Ce sont des situations injustes, mais nous savons que Dieu les souffre avec nous, il les vit à nos côtés. Il ne nous laisse pas seuls.

Nous savons que Jésus non seulement a voulu se solidariser avec chaque personne, non seulement il n’a voulu que personne se sente ou soit privé de sa compagnie, de son aide, de son amour, mais encore il s’est identifié à ceux qui souffrent, qui pleurent, qui subissent une quelconque forme d’injustice. Il nous le dit clairement : « J’avais faim, et vous m’avez donné à manger ; j’avais soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais un étranger, et vous m’avez accueilli » (Mt 25, 35).

C’est la foi qui nous fait savoir que Dieu est avec vous, Dieu est parmi nous et sa présence nous incite à la charité. Cette charité qui naît de l’appel d’un Dieu  qui continue de frapper à notre porte, à la porte de tous, pour nous inviter à l’amour, à la compassion, au don des uns pour les autres.

Jésus continue de frapper à nos portes,  aux portes de notre vie. Il ne le fait pas de façon magique, il ne le fait pas avec des attirails, avec des affiches lumineuses ou des feux d’artifice. Jésus continue de frapper à notre porte à travers le visage du frère, à travers le visage du voisin,
à travers le visage de celui qui se trouve à nos côtés.Capture d’écran 2015-09-24 à 11.41.49

Chers amis, l’une des manières les plus efficaces d’aider à notre portée, nous la trouvons dans la prière. La prière nous unit, nous rend frères et sœurs, elle nous ouvre le cœur et nous rappelle une belle vérité que parfois nous oublions. Dans la prière, nous apprenons tous à dire Père, papa, et à travers elle, nous nous rencontrons comme frères. Dans la prière, il n’y a ni riches ni pauvres, il y a des fils et des frères. Dans la prière, il n’y a pas de personnes de première ou de seconde catégorie, il y a la fraternité.

C’est dans la prière que notre cœur trouve la force de ne pas devenir insensible, froid devant les situations d’injustice. Dans la prière, Dieu continue d’appeler à la charité et de la susciter.

Que cela nous fait du bien de prier ensemble ! Que cela nous fait du bien de nous retrouver dans cet espace où nous nous regardons comme frères et où nous reconnaissons avoir besoin les uns de l’appui des autres ! Aujourd’hui, je voudrais m’unir à vous, j’ai besoin de votre soutien, de votre proximité. Je voudrais vous inviter à prier ensemble, les uns pour les autres, les uns avec les autres. Ainsi, nous pourrons garder ce soutien qui nous aide à vivre la joie de savoir que Jésus est toujours au milieu de nous. Le voulez-vous ? Notre Père qui es aux cieux….

Avant de prendre congé de vous, je voudrais vous donner la bénédiction de Dieu :

Que le Seigneur vous bénisse et vous protège ;
Que le Seigneur fasse briller sur vous son visage et vous prenne en grâce ;
Que le Seigneur tourne vers vous son visage et qu’il vous apporte la paix.

Et n’oubliez pas de prier pour moi.

Discours du pape François au Congrès des États-Unis

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Vous trouverez ci-dessous le texte complet du discours du pape François lors de la Session conjointe du Congrès des États-Unis.

Monsieur le Vice-Président,
Monsieur le Président,
Honorables Membres du Congrès,
Chers amis,

Je suis très reconnaissant pour votre invitation à m’adresser à cette Session conjointe du Congrès dans « le pays des hommes libres et dans la maison des hommes courageux ». Je crois que la raison de cette invitation est que, moi aussi, je suis fils de ce grand continent, dont nous avons tous tant reçu et vis-à-vis duquel nous partageons une responsabilité commune.

Chaque fils ou fille d’un pays a une mission, une responsabilité personnelle et sociale. Votre responsabilité en tant que membres du Congrès est de permettre à ce pays, à travers votre activité législative, de prospérer en tant que nation. Vous êtes le visage de ce peuple, ses représentants. Vous êtes appelés à défendre et à préserver la dignité de vos concitoyens dans la recherche inlassable et exigeante du bien commun, car c’est le principal objectif de toute politique. Une société politique perdure, si elle cherche, comme vocation, à satisfaire les besoins communs en stimulant la croissance de tous ses membres, spécialement ceux qui sont en Capture d’écran 2015-09-24 à 10.33.28situation de plus grande vulnérabilité ou de risque. L’activité législative est toujours fondée sur la protection du peuple. C’est à cela que vous avez été invités, appelés et convoqués par ceux qui vous ont élus.

Votre tâche est un travail qui m’inspire une double réflexion sur la figure de Moïse. D’une part, le patriarche et législateur du peuple d’Israël symbolise le besoin des peuples de maintenir vivant leur sens d’unité au moyen d’une juste législation. D’autre part, la figure de Moïse nous conduit directement à Dieu et ainsi à la dignité transcendante de l’être humain. Moïse nous donne une bonne synthèse de votre travail : vous êtes chargés de protéger, à travers la loi, l’image et la ressemblance de Dieu façonnées en chaque visage humain.

Aujourd’hui, je ne voudrais pas seulement m’adresser à vous, mais à travers vous, au peuple des Etats-Unis tout entier. Ici, avec ses représentants, je voudrais saisir cette occasion pour dialoguer avec les milliers d’hommes et de femmes qui s’efforcent chaque jour d’accomplir un honnête travail, pour apporter à la maison le pain quotidien, pour épargner de l’argent et – étape par étape – bâtir une vie meilleure pour leurs familles. Ce sont des hommes et des femmes qui ne sont pas concernés simplement par le paiement de leurs impôts, mais qui,  individuellement, de façon discrète, soutiennent la vie de la société. Ils génèrent la solidarité par leurs actions, et ils créent des organisations qui tendent une main secourable à ceux qui sont le plus dans le besoin.

Je voudrais aussi entrer en dialogue avec les nombreuses personnes âgées qui sont un dépôt de sagesse forgée par l’expérience, et qui cherchent de diverses façons, spécialement à travers le travail bénévole, à partager leurs histoires et leurs visions. Je sais que beaucoup d’entre elles, bien qu’étant à la retraite, sont encore actives ; elles continuent de travailler pour  construire ce pays. Je voudrais aussi dialoguer avec tous les jeunes qui travaillent pour réaliser leurs grandes et nobles aspirations, et qui ne se laissent pas séduire par la facilité. Ces jeunes affrontent des situations difficiles, résultant souvent de l’immaturité de beaucoup d’adultes. Je voudrais dialoguer avec vous tous, et je voudrais le faire à travers la mémoire historique de votre peuple.

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Homélie du Pape de la Messe de canonisation du Père Junípero Serra

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Sainte Messe et canonisation du Père Junípero Serra, Homélie du Saint-Père
Basilique du Sanctuaire National de l’Immaculée  Conception de Washington
Mercredi, 23 septembre 2015

Réjouissez-vous toujours dans le Seigneur. Je le répète : Réjouissez-vous ! Une invitation qui secoue fortement notre vie. Réjouissez-vous, nous dit Paul avec une force presqu’impérative. Une invitation qui fait écho au désir d’une vie pleine, d’une vie ayant un sens, d’une vie joyeuse, que tous nous nourrissons. C’est comme si Paul avait la capacité d’entendre chacun de nos cœurs et prêtait sa voix à ce que nous sentons, à ce que nous vivons. Il y a quelque chose en nous qui nous invite à la joie et à ne pas nous satisfaire de placébos qui simplement veulent nous apaiser.

Mais d’autre part, nous vivons les tensions de la vie quotidienne. Les situations qui semblent remettre en cause cette invitation sont nombreuses. La dynamique même à laquelle souvent nous sommes soumis semble nous conduire à une résignation triste qui peu à peu se transforme
en accoutumance, avec une conséquence fatale : l’anesthésie du cœur.

Voulons-nous, oui ou non, que la résignation soit le moteur de notre vie ?  Voulons-nous, oui ou non, que l’accoutumance s’empare de nos vies ? Pour cela, nous pouvons nous demander : comment faire pour que notre cœur ne s’anesthésie pas ? Comment approfondir la joie de Capture d’écran 2015-09-23 à 19.57.50l’Evangile dans les différentes situations de notre vie ?

Jésus l’a dit aux disciples d’hier et il nous le dit aujourd’hui : allez, annoncez ! La joie de l’Evangile, on l’expérimente, on la connaît et on la vit uniquement en la donnant, en se donnant.

L’esprit du monde nous invite au conformisme, au confort ; face à cet esprit humain, « il faut reprendre conscience que nous avons besoin les uns des autres, que nous avons une responsabilité vis-à-vis des autres et du monde » (Laudato si’, n. 229). La responsabilité d’annoncer le message de Jésus. En effet, la source de notre joie naît de ce désir inépuisable d’offrir la miséricorde, fruit de l’expérience de l’infinie miséricorde du Père et de sa force communicative (cf. Evangelii gaudium, n. 24). Allez annoncer à tous en oignant et oindre en annonçant. C’est à cela que le Seigneur nous invite aujourd’hui, nous disant :

La joie, le chrétien l’expérimente dans la mission : allez vers les peuples de toutes les nations.

La joie, le chrétien la trouve dans une invitation : allez et annoncez.

La joie, le chrétien la renouvelle, l’actualise à travers un appel : allez et oignez. [Read more…]

Pape aux USA: Discours à la Maison Blanche

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Washington, Mercredi, 23 Septembre 2015

Monsieur le Président,

Je suis profondément reconnaissant pour votre accueil au nom de tous les Américains. Comme fils d’une famille d’immigrés, je suis heureux d’être un hôte en ce pays, qui a été en grande partie bâti par de semblables familles. J’attends avec impatience ces jours de rencontre et de dialogue, où j’espère écouter et partager nombre des espérances et des rêves du peuple américain.

Durant ma visite, j’aurai l’honneur de m’adresser au Congrès, où j’espère, en tant que frère de ce pays, offrir des paroles d’encouragement à ceux qui sont appelés à guider l’avenir politique de cette nation dans la fidélité à ses principes fondateurs. Je me rendrai aussi à Philadelphie pour la Huitième Rencontre Mondiale des Familles, afin de célébrer et de soutenir les institutions du mariage et de la famille en ce moment critique dans l’histoire de notre civilisation.

Monsieur le Président, avec leurs concitoyens, les catholiques américains sont engagés dans la construction d’une société qui soit véritablement tolérante et inclusive, dans la sauvegarde des droits des individus et des communautés, et dans le rejet de toute forme d’injuste discrimination. Avec d’innombrables autres personnes de bonne volonté, ils nourrissent également le souci que les efforts pour bâtir une société juste et ordonnée avec sagesse respectent leurs plus profondes préoccupations et leur droit à la liberté religieuse. Cette liberté demeure l’un des plus précieux acquis de l’Amérique. Et, comme mes frères, les Evêques des Etats-Unis, nous l’ont rappelé, tous sont appelés à être vigilants, précisément en tant que bons citoyens, pour préserver et défendre cette liberté de tout ce qui la menacerait ou la compromettrait.

Monsieur le Président, je trouve encourageant que vous promouviez une initiative pour la réduction de la pollution de l’air. En acceptant cette urgence, à moi également il semble clair que le changement climatique est un problème qui ne peut plus être laissé à la future génération. En ce qui concerne la sauvegarde de notre ‘‘maison commune’’, nous vivons un moment critique de l’histoire. Il est encore temps d’opérer les changements qui s’imposent en vue « d’un développement durable et intégral, car nous savons que les choses peuvent changer » (Laudato si’, n. 13). Un tel changement exige de notre part que, de manière sérieuse et responsable, nous prenions en considération, non seulement le genre de monde que nous pourrions léguer à nos enfants, mais aussi les millions de personnes vivant dans un système qui les a marginalisés. Notre maison commune fait partie de ce groupe d’exclus qui crient vers le ciel et qui aujourd’hui frappent avec force à la porte de nos maisons, de nos villes et de nos sociétés. Pour utiliser une expression imagée du Pasteur Martin Luther King, nous  pouvons dire que nous avons manqué d’honorer un billet à ordre et le moment est arrivé de le faire.

Nous savons par la foi que le « Créateur ne nous abandonne pas, jamais il ne fait marche arrière dans son projet d’amour, il ne se repent pas de nous avoir créés. L’humanité possède encore la capacité de collaborer pour construire notre maison commune » (Laudato Si’, n. 13). En tant que chrétiens inspirés par cette certitude, nous voulons nous engager, de manière consciencieuse et responsable, pour la sauvegarde de notre maison commune.

Les efforts réalisés récemment afin d’amender les relations rompues et afin d’ouvrir de nouvelles portes à la coopération au sein de notre famille humaine sont des étapes positives sur le chemin de la réconciliation, de la justice et de la liberté. Je voudrais que tous les hommes et toutes les femmes de bonne volonté de cette grande nation soutiennent les efforts de la communauté internationale pour protéger les personnes vulnérables dans notre monde et pour encourager les modèles de développement intégral et inclusif, en sorte que nos frères et sœurs partout puissent connaître les bénédictions de paix et de prospérité que Dieu veut pour tous ses enfants.

Monsieur le Président, une fois encore, je vous remercie de votre accueil, et j’attends impatiemment ces jours à passer dans votre pays. Dieu bénisse l’Amérique !

Pape à Cuba: rencontre avec les familles à la cathédrale « Nuestra Señora de la Asunción » à Santiago

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Ce matin à 11h, le pape François a rencontré les familles réunies à la cathédrale de Santiago. Après le mot de bienvenue de S.E. Mgr Dionisio Guillermo García Ibáñez et le témoignage d’une famille cubaine, le Pape a prononcé le discours que vous trouvez ci-dessous:

Nous sommes en famille. Et lorsqu’on est en famille, on se sent chez soi. Merci, familles cubaines, merci, Cubains, de faire que je me sens tous les jours en famille, de faire que je me sens chez moi. Cette rencontre avec vous est comme la ‘‘cerise sur le gâteau’’. Terminer ma visite par cette rencontre en famille est un motif de rendre grâce à Dieu pour la ‘‘chaleur’’ qui émane de personnes qui savent recevoir, qui savent accueillir, qui savent faire sentir qu’on est chez soi. Merci.

Je remercie Monseigneur Dionisio García, archevêque de Santiago, pour les salutations qu’il m’a adressées au nom de vous tous, ainsi que le couple qui a eu le courage de partager avec nous leurs aspirations et leurs efforts pour faire de leur foyer une ‘‘Eglise domestique’’. L’Evangile de Jean nous présente comme premier événement public de Jésus les noces de Cana, à l’occasion de la fête d’une famille. Il s’y trouve avec Marie, sa mère, et certains de ses disciples, partageant la fête de famille.

Les noces sont des moments particuliers dans la vie de beaucoup de personnes. Pour les ‘‘plus âgés’’, parents, grands-parents, c’est une occasion pour recueillir le fruit de la semence. Cela réjouit le cœur de voir les enfants grandir et de voir qu’ils peuvent fonder un foyer. C’est l’occasion de voir, tout d’un coup, que tout ce pour quoi on a lutté valait la peine. Accompagner les enfants, les soutenir, les stimuler pour qu’ils puissent avoir le courage de construire leurs vies, de former leurs familles, est un grand défi pour tous les parents. D’autre part, la joie des jeunes époux. Tout un avenir qui commence, tout a la ‘‘saveur’’ d’une chose nouvelle, d’une espérance. Lors des mariages, le passé dont nous héritons et l’avenir qui nous attend s’unissent toujours. L’occasion s’y présente toujours de remercier de tout ce qui nous a permis d’arriver jusqu’à ce jour, grâce au même amour reçu.

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Pape à Cuba: Rencontre avec les jeunes de la Havane

PopeYouthPrepared

Rencontre avec les étudiants – Adresse du Saint-Père
Centre Culturel P. Félix Varela,  La Havane – Dimanche, 20 septembre 2015

Chers amis,

J’éprouve une grande joie de pouvoir me retrouver avec vous ici dans ce Centre culturel, si significatif dans l’histoire de Cuba. Je rends grâce à Dieu de m’avoir offert l’occasion de cette rencontre avec tant de jeunes qui, par leur travail, leurs études et leur préparation, rêvent du Cuba de demain et, déjà, en font aussi une réalité.

Je remercie Leonardo pour ses paroles de salutation, et spécialement parce que, ayant la possibilité de parler de nombreuses autres choses, certainement importantes et concrètes, telles que les peurs, les doutes – si réels et humains – il nous a parlé d’espérance, de ces rêves et aspirations qui s’ancrent avec force dans le cœur des jeunes cubains, au-delà de leurs différences de formation, de culture, de croyance ou d’idées. Merci Leonardo parce moi aussi, quand je vous vois, la première chose qui me vient à l’esprit et au cœur, c’est le mot espérance. Je ne peux pas concevoir un jeune qui ne bouge pas, qui est paralysé, qui n’a pas de rêves ni d’idéaux, qui n’aspire pas à quelque chose de plus.

Mais, quelle est l’espérance d’un jeune cubain à cette époque de l’histoire ? Ni plus ni moins que l’espérance d’un jeune de n’importe quelle autre partie du monde. Car l’espérance nous parle d’une réalité qui est enracinée au plus profond de l’être humain, indépendamment des circonstances concrètes et des conditionnements historiques dans lesquels il vit. Elle nous parle d’une soif, d’une aspiration, d’un désir de plénitude, de vie réussie, d’une volonté de toucher ce qui est grand, ce qui remplit le cœur et élève l’esprit vers les grandes choses, comme la vérité, la bonté et la beauté, la justice et l’amour. Toutefois, cela comporte un risque. Cela demande d’être disposé à ne pas se laisser séduire par ce qui est passager et caduc, par de fausses promesses de bonheur vide, de plaisir immédiat et égoïste, d’une vie médiocre, centrée sur soi-même, et qui laisse derrière soi uniquement tristesse et amertume dans le cœur. Non, l’espérance est audace, elle sait regarder au-delà du confort personnel, des petites sécurités et des compensations qui rétrécissent l’horizon, pour s’ouvrir à de grands idéaux qui rendent la vie plus belle et plus digne. Je demanderais à chacun d’entre vous : qu’est-ce qui donne de l’élan à ta vie ? Qu’il y a-t-il dans ton cœur, en quoi consistent tes aspirations ? Es-tu disposé à toujours prendre des risques pour quelque chose de plus grand ?

Peut-être me diriez-vous : ‘‘Oui, Père, l’attrait de ces idéaux est grand. Je sens leur appel, leur beauté, la splendeur de leur lumière dans mon âme. Mais, en même temps, la réalité de ma faiblesse et de mes forces limitées est trop forte pour que je me décide à parcourir le chemin de l’espérance. L’objectif est très haut et mes forces sont limitées. Mieux vaut me contenter de peu, de choses peut-être moins grandes mais plus réalistes, plus à la portée de mes possibilités’’. Je comprends cette réaction, il est normal de sentir le poids de ce qui est ardu et difficile, toutefois, attention à ne pas tomber dans la tentation de la désillusion, qui paralyse l’intelligence et la volonté, et à ne pas nous laisser gagner par la résignation, qui est un pessimisme radical face à toute possibilité d’atteindre ce dont on a rêvé. Ces attitudes, en fin de compte, finissent ou bien en une fuite de la réalité vers des paradis artificiels ou bien dans l’enfermement dans l’égoïsme personnel, dans une espèce de cynisme, qui ne veut pas écouter le cri de la justice, de la vérité et de l’humanité qui se lève autour de nous et en nous.

Mais que faire ? Comment trouver des chemins d’espérance dans la situation dans laquelle nous vivons ? Que faire pour que ces rêves de plénitude, de vie authentique, de justice et de vérité soient une réalité dans notre vie personnelle, dans notre pays et dans le monde ? Je pense qu’il y a trois idées qui peuvent être utiles pour maintenir vivante l’espérance.

L’espérance, un chemin fait de mémoire et de discernement. L’espérance est la vertu de celui qui est en chemin et se dirige vers une destination. Elle n’est pas, par conséquent, le simple fait de marcher pour le plaisir de marcher, mais a plutôt une finalité, un but, qui donne sens et illumine le sentier. En même temps, l’espérance s’alimente de la mémoire, elle embrasse de son regard non seulement l’avenir mais aussi le passé et le présent. Pour marcher dans la vie, en plus de savoir où nous voulons aller, il est important de savoir aussi qui nous sommes et d’où nous venons. Une personne ou un peuple qui n’a pas de mémoire et efface son passé court le risque de perdre son identité et de ruiner son avenir. On a besoin, par conséquent, de la mémoire de ce que nous  sommes, de ce qui constitue notre patrimoine spirituel et moral. Je crois que c’est cela l’expérience et l’enseignement de ce grand Cubain que fut le Père Félix Varela. Et on a besoin aussi du discernement, parce qu’il est essentiel de s’ouvrir à la réalité et de savoir la lire sans peurs ni préjugés. Les lectures partielles et idéologiques ne sont pas utiles, qui déforment la réalité pour qu’elle rentre dans nos petits schémas préconçus, en provoquant toujours la désillusion et désespoir. Discernement et mémoire, parce que le discernement n’est pas aveugle, mais se réalise sur la base de solides critères éthiques, moraux, qui aident à discerner ce qui est bon et juste.

L’espérance, un chemin d’accompagnement. Un proverbe africain dit : ‘‘Si tu veux aller vite, sois seul ; si tu veux aller loin, sois accompagné’’. L’isolement ou l’enfermement sur soi-même ne génèrent jamais l’espérance ; au contraire, la proximité et la rencontre avec l’autre, oui. Seuls, nous n’arrivons nulle part. Avec l’exclusion, on ne construit non plus un avenir pour personne, même pas pour soi-même. Un chemin d’espérance requiert une culture de la rencontre, du dialogue, qui surmonte les contrastes et l’affrontement stérile. Pour cela, il est fondamental de considérer les différences dans la manière de penser non comme un risque, mais comme une richesse et un facteur de croissance. Le monde a besoin de cette culture de la rencontre, il a besoin de jeunes qui veulent se connaître, qui veulent s’aimer, qui veulent cheminer ensemble et construire un pays comme en rêvait José Martí : « Avec tous et pour le bien de tous ».

L’espérance, un chemin solidaire. La culture de la rencontre doit conduire naturellement à une culture de la solidarité. J’apprécie beaucoup ce qu’a dit Leonardo au début lorsqu’il a parlé de la solidarité comme force qui aide à surmonter tout obstacle. Effectivement, s’il n’y a pas de solidarité, il n’y a d’avenir pour aucun pays. Au-dessus de toute considération ou intérêt, doit se trouver la préoccupation concrète et réelle pour l’être humain, qui peut être mon ami, mon compagnon ou bien aussi quelqu’un qui pense différemment, qui a ses idées, mais qui est autant être humain, autant cubain que moi-même. La simple tolérance ne suffit pas, il faut aller au-delà et passer d’une attitude craintive et défensive à une attitude d’accueil, de collaboration, de service concret et d’aide efficace. N’ayez pas peur de la solidarité, du service, de donner la main à l’autre pour que personne ne soit laissé de côté en chemin.

Ce chemin de la vie est illuminé par une espérance plus élevée : celle qui nous vient de la foi en Christ. Il s’est fait notre compagnon de route, et non seulement il nous encourage mais aussi il nous accompagne, il est à nos côtés et nous tend sa main d’ami. Lui, le Fils de Dieu, a voulu se faire l’un de nous, pour parcourir aussi notre chemin. La foi en sa présence, son amour et son amitié allument et illuminent toutes nos espérances et aspirations. Avec lui, nous apprenons à discerner la réalité, à vivre la rencontre, à servir les autres et à marcher dans la solidarité.

Chers jeunes cubains, si Dieu même est entré dans notre histoire et s’est fait homme en Jésus, s’il a chargé sur ses épaules notre faiblesse et notre péché, n’ayez pas peur de l’espérance, n’ayez pas peur de l’avenir, parce que Dieu compte sur vous, croit en vous, espère en vous.

Chers amis, merci pour cette rencontre. Que l’espérance dans le Christ, votre ami, vous guide toujours dans votre vie. Et, s’il vous plaît, n’oubliez pas de prier pour moi. Que le Seigneur vous bénisse !

Pape à Cuba: vêpres avec les prêtres, religieux et séminaristes de la Havane

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Homélie du Saint-Père
Cathédrale de la Havane – Dimanche, 20 septembre 2015

Nous sommes réunis dans cette cathédrale historique de La Havane pour chanter avec les psaumes la fidélité de Dieu à son peuple, afin de rendre grâce pour sa présence, pour son infinie miséricorde. Fidélité et miséricorde dont font mémoire non seulement les murs de cet édifice, mais aussi certains « cheveux blancs », rappel vivant, actualisé, que « sa miséricorde est infinie, et [que] sa fidélité demeure pour les âges ». Frères, rendons grâce ensemble !

Rendons grâce pour la présence de l’Esprit à travers la richesse des divers charismes sur les visages de tant de missionnaires qui sont venus sur ces terres, parvenant à devenir Cubains parmi les Cubains, signe que sa miséricorde est éternelle.

L’Évangile nous présente Jésus en dialogue avec son Père, il nous met au centre de l’intimité faite prière entre le Père et le Fils. Quand approchait son heure, Jésus a prié le Père pour ses disciples, pour ceux qui étaient avec lui et pour ceux qui viendraient (cf. Jn 17, 20). Cela nous fait penser qu’à son heure cruciale, Jésus met dans sa prière la vie des siens, notre vie. Et il demande à son Père de les garder dans l’unité et dans la joie. Jésus connaissait bien le cœur des siens, il connaît bien notre cœur. C’est pourquoi il prie, il demande au Père que ne les gagne pas une conscience qui tend à s’isoler, à se réfugier dans ses propres certitudes, sécurités, espaces ; à se désintéresser de la vie des autres en s’installant dans de petites «fermes » qui brisent le visage multiforme de l’Eglise. Situations qui débouchent sur une tristesse individualiste, sur une tristesse faisant peu à peu place au ressentiment, à la plainte continuelle, à la monotonie ; « ce n’est pas le désir de Dieu pour nous, ce n’est pas la vie dans l’Esprit » (Evangelii Gaudium, n. 2) à laquelle il les a invités, à laquelle il nous invite. C’est pourquoi Jésus prie, il demande que la tristesse et l’isolement ne gagnent pas notre cœur. Nous voulons faire de même, nous voulons nous unir à la prière de Jésus, à ses paroles, pour dire ensemble : « Père, garde-les unis dans ton nom… pour qu’ils soient un comme nous-mêmes » (Jn 17, 11) « et que leur joie soit parfaite » (Jn 15, 11).

Jésus prie et nous invite à prier parce qu’il sait qu’il y a des choses que nous pouvons recevoir seulement comme un don, il y a des choses que nous pouvons vivre seulement comme un don. L’unité est une grâce que seul l’Esprit Saint peut nous donner, il nous revient de la demander et de donner le meilleur de nous-mêmes pour être transformés par ce don.

Il est fréquent de confondre l’unité avec l’uniformité, avec le fait que tous font, sentent et disent la même chose. Cela n’est pas l’unité, c’est l’homogénéité. C’est tuer la vie de l’Esprit, c’est tuer les charismes qu’il a distribués pour le bien de son peuple. L’unité se trouve menacée chaque fois que nous voulons faire les autres à notre image et ressemblance. C’est pourquoi l’unité est un don, ce n’est pas quelque chose que l’on peut imposer de force ou par décret. Je me réjouis de vous voir ici, hommes et femmes de différentes générations, milieux, parcours personnels, unis par la prière en commun. Prions Dieu de faire croître en nous le désir de la proximité. Que nous puissions être des prochains, être proches, avec nos différences, nos habitudes, nos styles, mais proches. Avec nos discussions, nos luttes, en nous parlant en face, et non par derrière. Que nous soyons des pasteurs proches de notre peuple, que nous nous laissions questionner, interroger par nos gens. Les conflits, les discussions dans l’Église sont normales, et j’ose même dire nécessaires ; ils sont des signes que l’Église est vivante et que l’Esprit continue d’agir, continue de la dynamiser. Malheur à ces communautés où il n’y a ni un ‘oui’, ni un ‘non’ ! Elles sont comme ces mariages où on ne discute plus, parce qu’on a perdu l’intérêt, on a perdu l’amour.

En second lieu, le Seigneur prie pour que nous soyons remplis de « la même joie parfaite » qu’il possède (cf. Jn 17, 13). La joie des chrétiens, et spécialement celle des consacrés, est un signe très clair de la présence du Christ dans leurs vies. Quand il y a des visages attristés c’est un signal d’alerte, quelque chose ne va pas bien. Et Jésus demande cela à son Père, juste avant d’aller au jardin, lorsqu’il doit renouveler son « fiat ». Je ne doute pas que vous deviez tous vous charger du poids de nombreux sacrifices, et que pour certains d’entre vous,  depuis des décennies, les sacrifices auront été durs. Par son sacrifice, Jésus prie aussi pour que nous ne perdions pas la joie de savoir qu’il est vainqueur du monde. Cette certitude nous pousse chaque matin à réaffirmer notre foi. A travers sa prière, dans le visage de notre peuple, « il nous permet de relever la tête et de recommencer, avec une tendresse qui ne nous déçoit jamais et qui peut toujours nous rendre la joie » (Evangelii Gaudium, n.  3).

Que c’est important ! Quel témoignage si précieux, pour la vie du peuple cubain, que celui de rayonner toujours et partout de cette joie, malgré les fatigues, les scepticismes, y compris malgré le désespoir qui est une tentation très dangereuse qui mine l’âme !

Frères, Jésus prie pour que nous soyons un et pour que sa joie demeure en nous ; faisons de même, unissons-nous les uns aux autres dans la prière.

Angelus du pape François à la Place de la Révolution à Cuba (20 septembre 2015)

PopeHavanaAngelus

ANGELUS
La Havane, Place de la Révolution
Dimanche, 20 septembre 2015

Je remercie le Cardinal Jaime Ortega y Alamino, Archevêque de la Havane, pour ses aimables paroles, ainsi que mes frères évêques, prêtres, religieux et fidèles laïcs. Je salue aussi Monsieur le Président et toutes les Autorités présentes.

Nous avons écouté dans l’évangile comment les disciples avaient peur d’interroger Jésus lorsqu’il leur parlait de sa passion et de sa mort. L’idée de voir Jésus souffrir sur la croix les effrayait et ils ne pouvaient pas la comprendre. Nous aussi nous avons la tentation de fuir nos croix personnelles et celles des autres, de nous éloigner de celui qui souffre. En concluant la Sainte Messe, au cours de laquelle Jésus s’est offert à nous de nouveau par son corps et son sang, élevons à présent les yeux vers la Vierge, notre Mère. Et nous lui demandons de nous enseigner à nous tenir proche de la croix du frère qui souffre. Que nous apprenions à voir Jésus en chaque homme prostré sur le chemin de la vie ; en chaque frère qui a faim ou soif, qui est nu ou en prison, ou malade. Près de sa Mère, par la croix, nous pouvons comprendre qui est vraiment « le plus important » et ce que signifie être près du Seigneur et participer à sa gloire.

Apprenons de Marie à avoir le cœur éveillé et attentif aux besoins des autres. Comme elle nous l’a enseigné aux Noces de Cana, soyons pleins de sollicitude dans les petites choses de la vie, et ne faiblissons pas dans la prière les uns pour les autres, pour qu’à personne ne manque le vin de l’amour nouveau, de la joie que Jésus nous apporte.

A présent, je sens le devoir de tourner ma pensée vers la chère terre de Colombie, ‘‘conscient de l’importance cruciale du moment présent, où, avec un effort renouvelé, et animés par l’espérance, ses enfants cherchent à construire une société en paix’’. Que le sang versé par des milliers d’innocents durant de nombreuses décennies de conflit armé, sang uni à celui du Seigneur Jésus Christ sur la Croix, soutienne tous les efforts actuellement en cours, y compris en cette belle Ile, en vue d’une réconciliation définitive, de sorte que la longue nuit de douleur et de violence, grâce à la volonté de tous les Colombiens, puisse se transformer en un jour sans déclin de concorde, de justice, de fraternité et d’amour, dans le respect des institutions comme du droit national et international, pour une paix durable. S’il vous plaît, nous n’avons pas le droit de nous permettre un échec de plus sur ce chemin de paix et de réconciliation.

Je vous demande à présent de vous unir à moi dans la prière à Marie pour déposer toutes nos préoccupations et nos aspirations près du Cœur du Christ. Et nous la prions de manière spéciale pour tous ceux qui ont perdu l’espérance et ne trouvent pas de motifs pour continuer à lutter ; pour ceux qui souffrent d’injustice, d’abandon et de solitude ; nous prions pour les personnes âgées, les malades, les enfants et les jeunes, pour toutes les familles en difficulté, afin que Marie leur essuie les larmes, les console par son amour de Mère, leur redonne l’espérance et la joie. Mère sainte, je te recommande tes fils de Cuba : ne les abandonne jamais !

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