« Ils nous ont dit que nous devions être massacrés parce que nous étions chrétiens. Mais nous avons prié, et nous avons été épargnés ». C’est le récit d’une irakienne qui a survécu à la barbarie de l’État Islamique. Réfugiée aujourd’hui en Jordanie, elle se rappelle le son du haut-parleur dans la nuit du 18 juillet 2014 : « vous chrétiens vous devez choisir entre l’islam, être tués, payer la taxe, ou quitter vos maisons ». « Nous sommes restés fermes dans notre foi en Jésus-Christ, explique-t-elle au Franciscan Media Center, alors nous avons tout quitté, et nous avons pris la route avec quelques vêtements et très peu d’affaires ».
Comme elle, plus de deux millions d’irakiens ont quitté leur maison pour se réfugier dans les régions voisines. Il y a six mois, les chrétiens, mais aussi des milliers de yézidis, tentaient de fuir la mort, sous la chaleur écrasante de l’été. Aujourd’hui, ils doivent affronter la rigueur de l’hiver, avec très peu de ressources, et une aide internationale insuffisante pour subvenir à leurs besoins les plus élémentaires.
Le temps passe, donc, mais la situation ne s’améliore pas. C’est le constat de Carl Hétu, directeur national de l’Association catholique d’aide à l’Orient (CNEWA). Tout juste rentré d’une visite au Moyen-Orient, il déplore une situation qui s’aggrave : « il y a plus de souffrance humaine, plus de désespoir, plus de réfugiés, plus d’homicides, plus de problèmes sociaux, plus de récession économique ». « Mais malgré tout, nuance-t-il, les gens gardent espoir ».
« Si ce n’était pas à cause de notre foi, nous n’aurions pas tout quitté pour venir ici. C’est au nom du Christ que nous l’avons fait, et nous sommes fiers de son nom et de ce qu’il a fait pour nous », témoigne encore une réfugiée, dont le sort a été comparé par le Pape à celui de Jésus. « Vous êtes comme Jésus la nuit de sa nativité : il n’y avait pas de place pour lui, il a été chassé et il a dû fuir pour se sauver » a dit le Pape aux réfugiés irakiens du camp d’Ankawa, en banlieue d’Erbil, lors d’un appel téléphonique la veille de Noël.
En Jordanie, où sont réfugiés selon Caritas près de 7000 chrétiens d’Irak, 18 paroisses ont ouvert leurs portes pour venir en aide aux déplacés. La paroisse catholique Marie Mère de l’Église, à Amman, est pour ainsi dire une vraie mère pour de nombreux chrétiens. « Les gens arrivés ici ne possédaient plus rien. Voilà pourquoi ils ont besoin d’urgence de tout ce qui pourrait leur être d’une quelconque utilité, comme des chaussures, des vêtements, des couvertures et des médicaments. Viennent s’y ajouter les repas quotidiens pour 200 familles » raconte le curé de la paroisse, le père Khalil Jaar.
« Il nous donne tout : la nourriture, l’eau. Il a même ouvert une école pour nos enfants en âge d’être scolarisés. C’est une bonne chose » se félicite un homme, réfugié dans la paroisse avec sa famille. « Mais jusqu’à quand allons-nous rester comme ça ? » S’interroge-t-il.
Dans cette même paroisse, témoins de l’horreur, et confrontés à la misère qui les entoure, les réfugiés n’ont qu’une seule envie, celle de commencer une nouvelle vie. « Je suis prêt à aller ici ou là, mais pas retourner en Irak. Je veux retrouver du travail, envoyer mes filles à l’école, et leur offrir un avenir » confie avec émotion un autre père de famille.
C’est dans ce bien triste contexte qu’une milice chrétienne, de plus de 3000 soldats, est actuellement constituée pour faire face aux djihadistes de l’État Islamique. Les assyriens, avec l’aide de yézidis, veulent ainsi récupérer le territoire qui leur a été volé. Une terre chrétienne depuis des milliers d’années, qui comptait il y a dix ans plus d’un million de chrétiens, et qui aujourd’hui n’en compte plus que 400 000.