Vers une encyclique sur l’écologie

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Image: Courtoisie de CNS

Le 5 mars 2015, le cardinal Peter Turkson, président du Conseil Pontifical Justice et Paix, prononçait un discours au Trócaire 2015 (l’Agence irlandaise catholique d’aide pour le développement international) à l’Université pontificale Saint-Patrick à Maynooth en Irlande. Ce discours était d’une importance capitale puisqu’il est considéré par plusieurs comme étant un prélude à la prochaine encyclique du pape François qui portera sur l’écologie. Dans ce discours prononcé en langue anglaise, le cardinal Turkson explique ce que l’Église entend lorsqu’elle parle d’écologie. La formule à retenir est celle « d’écologie globale ». En fait, cette expression vise à mettre sous un même toit certaines problématiques qui sont parfois considérées séparément, ce qui nuit à leur résolution. En effet, l’originalité de l’Église est qu’elle voit la racine commune des problèmes liés au soin de l’environnement, au développement des pays et à « l’écologie humaine ». Pour le cardinal Turkson, le pape François cherche avant tout à apporter la « chaleur de l’espoir ». Sa prochaine encyclique montrera donc le rôle bénéfique de la foi catholique dans la résolution de problèmes dont « les régulations, les politiques et les orientations sont nécessaires pour faire face à la pauvreté et aux changements climatiques mais peuvent rester sans effet si elles ne sont pas accompagnées d’une conversion morale et d’un changement du cœur »[2]. Tout cela en plus d’apporter des principes clairs qui peuvent orienter les décideurs politiques et ceux du monde des affaires. Pour ce faire, le Cardinal guinéen a voulu expliciter 4 principes fondamentaux à prendre en compte et à respecter pour un juste
souci de la création.

Un appel universel

Reprenant les grandes orientations formulé par Benoît XVI, c’est-à-dire de celui que l’on a appelé le « pape vert », le cardinal Turkson a mentionné que le souci pour l’environnement n’est pas réservé à une catégorie de personnes ou de pays mais nous concerne tous. Ce qui implique qu’aucun organisme et aucune personnalité ne peut monopoliser le discours et le souci de l’environnement. Prendre soin de la création est une responsabilité qui incombe à tous. De plus, s’il veut prendre soin de la nature qui est hors de lui, il doit prendre soin de sa propre nature. En d’autres termes, protéger la nature implique de protéger la nature humaine contre ce qui la rend malade. Comme le disait Benoît XVI :

« L’Église ne peut pas et ne doit pas se limiter à transmettre à ses fidèles uniquement le message du salut. Elle a une responsabilité à l’égard de la création et doit faire valoir cette responsabilité également en public. Et en le faisant, elle ne doit pas seulement défendre la terre, l’eau et l’air comme des dons de la création appartenant à tous. Elle doit également protéger l’homme contre la destruction de lui-même. Il est nécessaire qu’il existe quelque chose comme une écologie de l’homme, entendue d’une juste manière. »[4].

Le souci de l’environnement est une vertu par elle-même 

Pour le Cardinal Turkson, le deuxième principe d’une écologie globale se trouve dans le fait de considérer le soin de la création comme une vertu morale. Cette affirmation, qui peut paraître banale à première vue, rend un grand service à ceux qui souhaitent respecter l’environnement mais sont parfois choqués par certaines actions faites au nom de la protection de celui-ci. La polémique entourant le présent conflit entre Green Peace et la Ville de Saguenay en est un bon exemple. Ainsi, considérer le souci de la création comme une vertu évite le piège de la politique partisane ou, pire encore, de l’idéologie. En ce sens, le souci de l’environnement pourra se manifester dans tous les domaines de la vie sociale et politique sans avoir à être associé à aucun groupe d’intérêt particulier, ce qui est très avantageux pour son efficacité. On peut voir cette vertu en action en regardant le pape François qui ne désire pas entrer dans les débats scientifiques comme, par exemple, celui de l’IPCC à savoir « si le réchauffement climatique est un phénomène cyclique
de la nature elle-même ou s’il est dû à l’activité humaine ou même les deux »[6] mais qui veut plutôt susciter chez les croyants et chez les hommes et les femmes de bonne volonté une attitude morale respectueuse de tout l’ordre créé.

Une conversion intérieure nécessaire

Le troisième principe détaillé par le Cardinal Turkson s’occupe de savoir comment réaliser correctement ce monde plus juste envers l’environnent. Comme on dit, la fin ne justifie pas les moyens. En effet, « en présentant Saint François d’Assise comme un modèle, le pape François tient une approche pratique intégrale et durable puisqu’il suscite une crainte révérencielle, de l’émerveillement ainsi qu’un sentiment de fraternité » [7] envers le monde créé. Pour qu’une telle transformation soit possible, il est essentiel que la « tendance culturelle actuelle qui tend à reléguer le langage, les motivations et les différentes fois religieuses à la sphère strictement privée mine une source vitale et puissante de sens et d’action dans l’activité commune pour faire face aux changements climatiques et au développement durable »[8]. En ce sens, retirer la religion des écoles et ne pas avoir le réflexe d’inviter sur la place publique les différents acteurs religieux est une attitude à changer si nous voulons être cohérents avec notre engagement pour la défense de l’environnement.

Une responsabilité qui dépasse les frontières

Comme nous venons de le mentionner, l’environnement étant une réalité supranationale, tous doivent faire preuve d’ouverture et de dialogue. Cela impliquent un rejet de l’individualisme égoïste tant dans notre vie personnelle que sociale. L’ouverture et le dialogue permettront à tous les pays de s’établir sur les fondements solides que sont : « le respect de la vie, la famille, l’éducation intégrale qui ne peut se réduire à la simple transmission d’informations dans le but de générer du profit, la santé « qui comprend la dimension spirituelle du bien-être, et la sécurité, qui ne peut s’établir que par « la conversion des cœurs ». Il n’est pas rare de voir les hommes se diviser entre eux, même lorsqu’ils cherchent à rejoindre le même but. La lutte pour le respect de l’environnement doit donc éviter ce genre de division et rassembler tous les acteurs sans exclusion.

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Comme vous avez pu le constater, le discours du Cardinal Peter Turkson, président du Conseil Pontifical Justice et Paix, a voulu synthétiser la pensée du pape François sur les défis auxquels fait face l’instauration d’une « écologie globale ». En effet, les problèmes liés au développement, au soin de l’environnement et au respect de la nature humaine, doivent être perçus comme ayant une racine commune et ainsi, avoir des solutions communes. Des solutions qui ne prennent pas en compte ces trois aspects ne sont donc pas des pas dans la bonne direction. Comme nous l’avons vu, le respect de la nature ne pourra s’améliorer sans la prise en considération de la nature externe et interne à l’homme. Voilà le projet qui nous attend dans la prochaine encyclique du pape François, élargir le domaine de l’écologie pour y inclure le respect de la nature humaine et son développement intégral.

[5] Panel intergouvernemental des Nations Unis sur les changements climatiques.

 

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