
Buste de Saint John Henry Newman au Trinity College, Oxford. Wikimedia Commons.
Ce fut une expérience émouvante d’assister à la messe sur la place Saint-Pierre lorsque le Pape Léon XIV a déclaré Saint John Henry Newman docteur de l’Église le 1er novembre dernier, jour de la solennité de la Toussaint. John Henry Newman (1801-1890) avait été béatifié par Benoît XVI en 2010 et canonisé par le Pape François en 2019. Il est le plus récemment nommé des trente-huit docteurs de l’Église dans les deux millénaires d’histoire du christianisme.
Mais qui est Newman et quelle importance qu’il soit désormais docteur de l’Église ?
Les docteurs de l’Église sont avant tout des enseignants que l’Église offre à toutes les générations (le mot « docteur » vient ici du latin signifiant « enseignant »). Ce sont des hommes et des femmes reconnus dans toute l’Église universelle non seulement pour leur sainteté, mais aussi pour leur contribution exceptionnelle à la théologie chrétienne et à l’enseignement de l’Église. La pensée de Newman a eu un impact profond sur la doctrine catholique au cours du siècle dernier, et il a été l’une des figures intellectuelles les plus citées au Concile Vatican II. Sa pensée a particulièrement influencé la rédaction de la constitution dogmatique sur la révélation divine Dei Verbum, notamment sa notion du développement de la doctrine, ainsi que la déclaration sur la liberté religieuse Dignitatis humanae, en particulier sur le thème de la conscience. L’héritage de Newman comprend les Centres Newman, qui sont des communautés catholiques étudiantes sur les campus universitaires du monde entier. J’ai découvert Newman pour la première fois pendant mes études à l’Université McGill à Montréal, en vivant et en travaillant au Centre Newman qui se trouve sur la rue Peel. Newman a également influencé de manière significative le chemin de la synodalité que l’Église entreprend actuellement, car il encourageait la formation, la consultation et la collaboration avec les laïcs et il enseignait que la doctrine de l’Église évolue naturellement au fil du temps.
Newman avait un esprit brillant et était un écrivain prolifique. Il est peut-être le théologien le plus important du XIXe siècle, en tout cas dans le monde anglophone. Mais ce que j’admire le plus chez Newman, c’est la façon dont il a mis sa vie en jeu pour rester fidèle à sa foi, s’abandonnant avec une confiance radicale en Dieu.
Newman n’était pas un martyr au sens strict du terme. Il n’est pas mort pour sa foi. Pourtant, il était prêt à tout perdre pour rester fidèle à ses convictions. Le titre d’une de ses biographies résume bien cela : « Une vie sacrifiée ». En se convertissant de l’anglicanisme au catholicisme, Newman est passé du statut de professeur prestigieux à Oxford et de prêtre anglican très respecté à celui de paria, rejeté par la société. Il a perdu son emploi. Sa réputation a été détruite. Ses amis l’ont abandonné.
Les choix de vie dramatiques de Newman n’étaient pas le résultat d’une crise de la quarantaine, mais plutôt une réponse courageuse aux inspirations de Dieu dans son cœur. La devise de Newman était « Le cœur parle au cœur » (Cor ad cor loquitur), une citation tirée des écrits de Saint François de Sales. Dieu ne cesse jamais de parler à nos cœurs, et nous pouvons lui parler à partir des nôtres. Le dialogue d’amour permanent entre le cœur de Dieu et celui de Newman était le fondement de la vie et des décisions du saint anglais. C’était son ancrage dans les mers agitées, sa lumière au milieu des ténèbres environnantes et sa boussole lorsque la voie à suivre semblait incertaine.
La relation sincère que Newman entretenait avec Dieu se reflétait dans la manière dont il abordait ses relations avec les autres. Il laissait cette conversation permanente entre son cœur et Dieu résonner dans ses écrits, dans sa manière de servir les autres et dans les amitiés qu’il a nouées tout au long de sa vie.
Quelle leçon pouvons-nous tirer de Newman aujourd’hui ? Newman avait une intelligence phénoménale, mais il nous montre que ce qui importe le plus, ce n’est pas la connaissance intellectuelle, mais la connaissance du cœur. À une époque où il est de plus en plus courant de tenir des discours qui divisent et de prôner des idéologies polarisantes, Newman nous enseigne à parler avec notre cœur. Comme dans la vie de Newman, cela signifie non seulement laisser nos cœurs se parler, mais surtout laisser Dieu parler à nos cœurs et guider nos pas, afin que son amour et sa bonté puissent se répercuter dans nos vies et dans notre monde.
Saint John Henry Newman, maître de l’intelligence du cœur, priez pour nous.