La tombe du père Jacques Hamel, assassiné par des terroristes le 26 juillet 2016. Crédit photo : Gérard sur Wikimedia Commons, recadré et utilisé selon les termes de la licence CC BY-SA 4.0
Il y a cinq ans aujourd’hui, le prêtre catholique français Jacques Hamel est assassiné en pleine messe par deux jeunes terroristes. Sa mise à mort s’est inscrite dans un contexte de violences religieuses et communautaires ayant frappé la France en particulier, mais de manière plus générale l’Europe occidentale, durant la seconde moitié de la décennie 2010.
Une vague de violence
On se rappellera évidemment les attentats contre Charlie Hebdo, survenus le 7 janvier 2015, ou encore ceux du 13 novembre suivant, ayant notamment frappé le Bataclan. L’expérience de cette violence avait alors suscité à l’égard de la France une vague de soutien de la part de la communauté internationale, mais aussi d’importantes réflexions sur les moyens de construire un monde commun dans une société se diversifiant sur les plans culturels, linguistiques et religieux.
Pour comprendre cette situation, les explications se sont multipliées. À juste titre, le contexte géopolitique international, notamment lié à la Guerre civile syrienne, mais également la réalité des inégalités économiques et l’ampleur des revendications politiques et sociales dans le monde arabo-musulman ont été évoqués.
De même, dans la foulée de ces conflits politiques et religieux complexes, on a intelligemment insisté sur l’importance d’une interprétation sobre et prudente des faits en cause et sur la nécessité de reconnaître qu’en dépit de ces violences, l’immense majorité des musulmans, qu’ils se trouvent en Occident ou ailleurs, partagent un idéal de paix profondément enraciné dans le cœur de l’Homme.
Mourir dans la haine de la foi
L’attentat de l’église Saint-Étienne-du-Rouvray du 26 juillet 2016, au cours duquel le père Jacques Hamel fut assassiné, a naturellement lui aussi fait l’objet d’explications diverses, liées aux lunettes interprétatives à travers lesquelles on a pu contempler l’événement. Si l’on peut convenir du caractère obscène et tout à fait erratique de l’acte meurtrier en tant que tel, il convient hautement de le comprendre à la lumière du cadre symbolique à l’intérieur duquel il a eu lieu.
C’est en tant que prêtre célébrant le sacrement de l’Eucharistie, « source et sommet de toute la vie chrétienne » nous enseigne notre sainte mère l’Église, que Jacques Hamel fut mis à mort, à genoux devant l’autel, par deux jeunes hommes revendiquant leur appartenance au soi-disant État islamique, depuis considérablement affaibli.
À ce titre, on peut raisonnablement comprendre que le meurtre de Jacques Hamel est lié à sa foi et qu’en ce sens, il est mort in odium fidei, c’est-à-dire dans la haine de la foi. Ses dernières paroles (« Va-t’en Satan »), l’indiquent tout à fait. Le Pape François, réagissant aux circonstances de la mort du père Jacques Hamel, a soutenu que le fait de « tuer au nom de Dieu est satanique », ciblant ainsi le vrai coupable de cet acte de persécution.
Le martyr : un témoignage de l’espérance chrétienne
Devant l’éternité, la mort du père Hamel a fait de lui un martyr. S’il a ainsi emprunté la voie royale, au soir de sa vie, c’est du fait de la haine religieuse qui corrompt le cœur de ceux qui en sont faits prisonniers. Or, le témoignage du père Jacques Hamel n’aura pas été vain, ayant suscité l’attention et le soutien de centaines de milliers de personnes de par le monde.
Des appels à la reconnaissance officielle de son sacrifice ultime par l’Église se sont rapidement déployés, si bien que le Pape François aura rapidement levé le délai, autrement obligatoire, de cinq années avant la mise en place d’une procédure en vue de son éventuelle canonisation. Jacques Hamel est ainsi reconnu par l’Église comme un serviteur de Dieu, et son histoire – son martyr – et la profondeur de sa lucidité devant l’action du Mal continuent d’émouvoir, mais aussi de faire réfléchir croyants et incroyants de part le monde.
Nous qui vivons dans des sociétés occidentales pacifiées, confortables, et de surcroît héritières d’une civilisation chrétienne, n’avons pas spontanément le sens du sacrifice. C’est un état d’esprit qu’il faut cultiver pour comprendre la vraie nature du martyr, témoignage ultime de foi, parfois même désiré à l’excès chez les premiers chrétiens. Ce sens du sacrifice, qui s’impose à ceux qui doivent l’expérimenter, est l’expression la plus éloquente du caractère tragique de notre existence : à travers l’épreuve – parfois ultime – se trouve l’espérance du Salut.