Réflexion biblique pour le 2e dimanche de l’Avent
par le père Thomas Rosica, c.s.b.
Evangile de Jésus Christ selon saint Marc (1, 1-8)
Commencement de la Bonne Nouvelle de Jésus Christ, le Fils de Dieu. Il était écrit dans le livre du prophète Isaïe :
Voici que j’envoie mon messager devant toi, pour préparer la route. A travers le désert, une voix crie :
Préparez le chemin du Seigneur, aplanissez sa route.
Et Jean le Baptiste parut dans le désert. Il proclamait un baptême de conversion pour le pardon des péchés. Toute la Judée, tout Jérusalem, venait à lui. Tous se faisaient baptiser par lui dans les eaux du Jourdain, en reconnaissant leurs péchés. Jean était vêtu de poil de chameau, avec une ceinture de cuir autour des reins, et il se nourrissait de sauterelles et de miel sauvage. Il proclamait : « Voici venir derrière moi celui qui est plus puissant que moi. Je ne suis pas digne de me courber à ses pieds pour défaire la courroie de ses sandales. Moi, je vous ai baptisés dans l’eau ; lui vous baptisera dans l’Esprit Saint. »
L’une des grandes vedettes des récits de l’Avent et du temps de noël, Jean le Baptiste, fait aujourd’hui son apparition sur la scène biblique. Considérons ensemble quelques détails de la vie de Jean et voyons à quel point il est un bon modèle pour nous. Jean Baptiste ne mâchait pas ses mots. Il allait droit au but et disait ce qu’il fallait dire. Il nous parlerait certainement avec des paroles aussi crues : avec des mots qui viseraient directement les points faibles de nos vies. Jean Baptiste prêchait le repentir avec crédibilité parce qu’il avait d’abord aimé les paroles de Dieu qu’il avait entendu au désert.
Il a écouté, expérimenté et vécu la parole libératrice de Dieu au désert. C’est parce que sa vie et son message ne faisait qu’un qu’il annonçait cette parole aux autres avec une telle efficacité. La duplicité est l’une des choses les plus décourageantes auxquelles il nous faut faire face. Combien de fois nos paroles, nos pensées et nos gestes ne sont pas cohérents. Le véritable prophète d’Israël nous aide dans notre lutte contre toute forme de duplicité.
À travers l’histoire biblique, des leaders et des visionnaires vont au désert pour voir plus clair, pour écouter intensément la voix de Dieu et découvrir d’autre voies, d’autres chemins. Le mot hébreu pour désert midvar, est dérivé d’une racine sémitique qui signifie « mener le troupeau au pâturage ». Eremos, le mot grec utilisé pour traduire midvar, dénote un endroit désolé et peu peuplé et, au sens plus strict, un désert.
Le terme désert a deux significations différentes mais inter reliées, en référant à quelque chose de sauvage et de perdu. C’est probablement ce caractère inconnu (perdu) et incontrôlable (sauvage) qui lui a valu le terme de désert. Il y a aussi une autre manière de comprendre le sens du mot désert.
Un regard attentif à la racine du mot midvar révèle le mot davar qui signifie parole ou message. La notion hébraïque de désert est donc un lieu saint où la parole de Dieu peut être entendu, expérimenté et vécu librement. Nous allons au désert pour entendre la parole de Dieu, détaché et complètement libre.
L’Esprit de Dieu a permis aux prophètes de vivre en Dieu. Ils étaient ainsi capables de partager les attitudes, les valeurs, les sentiments et les émotions de Dieu. Un tel don leur permettait de voir les événements de leur époque comme Dieu les voyait et de se sentir de la même manière face à ceux-ci. Ils partageaient la colère de Dieu, sa compassion, sa peine, sa déception, son dégoût, sa sensibilité pour les gens et son sérieux. Ils prenaient part à ces choses non pas de manière abstraite, mais en ressentant les sentiments de Dieu à propos des événements concrets de leur temps.
Jean Baptiste est LE prophète de l’avent. On le représente souvent avec le doigt qui pointe vers celui qui vient : Jésus-Christ. Si, à la suite de Jean, nous préparons le chemin du Seigneur dans le monde d’aujourd’hui, nos vies deviendrons aussi ces doigts de témoins vivants qu’il est possible de trouver Jésus, car il est proche. Jean a offert aux personnes de son époque une expérience de pardon et de salut en sachant très bien qu’il n’était pas le messie, celui qui pouvait sauver. Permettons-nous à d’autres de faire l’expérience de Dieu, du pardon et du salut ?
Jean le Baptiste est venu nous enseigner qu’il existe un autre chemin que les ténèbres et la tristesse du monde et que la condition humaine : ce chemin est Jésus lui-même. Le Messie vient nous sauver des forces des ténèbres et de la mort, et nous ramène sur le chemin de la paix et de la réconciliation afin que nous retrouvions notre voie vers Dieu.
Le théologien jésuite Karl Rahner, aujourd’hui décédé, a écrit un jour :
Nous devons écouter la voix de celui qui nous appelle dans le désert, même s’il avoue : je ne suis pas le messie. Vous ne pouvez pas choisir de ne pas écouter cette voix ‘parce qu’elle est seulement la voix d’un homme.’ Et, de même, vous ne pouvez pas laisser de côté le message de l’Église parce que l’Église ‘n’est pas digne de détacher les lacets de son Seigneur qui la précède.’ Après tout, nous sommes toujours dans l’avent.
Nous n’avons peut-être pas le luxe de voyager dans le désert de Judée, ni le privilège de faire une retraite de l’avent dans le désert du Sinaï. Toutefois, nous pouvons certainement découper un petit désert au milieu de nos activités et du brouhaha de la semaine. Allons vers ce lieu sacré et laissons la Parole de Dieu nous parler, nous guérir, nous réorienter, et nous mener au cœur du Christ, dont nous attendons la venue en cet avent.