« On s’était dit rendez-vous dans 10 ans »


Article du père Serge Comeau, curé du diocèse de Bathurst, à paraître dans le journal « Acadie Nouvelle » le 28 juillet 2012. Le père Comeau fut directeur des Catéchèses pour les JMJ 2002 à Toronto.

Il y a 10 ans, jour pour jour, c’était la Journée Mondiale de la Jeunesse à Toronto. En y pensant, je sens encore le vent violent de ce matin du 28 juillet 2002. Avec une pluie torrentielle. Et je revois encore, du haut dupodium papal où la messe était célébrée, cette foule innombrable de pèlerins venus de partout pour se faire dire par un vieillard venu de l’Est : « Vous êtes le sel de la terre. Vous êtes la lumière du monde! »

Des centaines de milliers de jeunes s’étaient donnés rendez-vous chez-nous. Ils défiaient la peur au lendemain des attentats terroristes du World Trade Center. Cette rencontre des jeunes avec le pape s’inscrivait dans un mouvement historique non négligeable dans l’Église. Un mouvement qui dure depuis plus de 25 ans.

Fruits de la JMJ

Les JMJ permettent de donner un visage rafraîchissant de l’Église. Les reportages qui parlent des JMJ nous montrent des jeunes heureux, des jeunes qui font la fête, des jeunes épanouis! Cela est rafraîchissant alors que l’image de l’Église catholique dans l’imaginaire collectif est celle d’une vieille institution en agonie. Les JMJ montrent un autre côté de l’Église, tout aussi valable que celui qui crève l’écran.

Dans plusieurs pays, nous pouvons dire que les JMJ ont façonné le visage d’une nouvelle génération de catholiques. Lorsque les JMJ ont été créées, la toile ne reliait pas encore les jeunes entre eux. De telles rencontres ont permis aux jeunes de sortir de leur isolement et de prendre leur place dans la vie paroissiale et diocésaine.

En entendant le témoignage de jeunes engagés dans leur paroisse, il n’est pas rare de les entendre parler de telle ou telle JMJ qui a marqué un tournant dans leur vie spirituelle. La vie pastorale dans ces paroisses où les jeunes sont présents est articulée autour des piliers de toute JMJ : catéchèse, adoration eucharistique, fraternité et vie sacramentelle.

Et ici?

C’est une grâce pour un pays d’être l’hôte d’un tel événement. Ceux qui disent que les fruits espérés tardent à venir ignorent la conversion des cœurs qui échappent forcément à ce que nous voyons. Ils ignorent aussi la transformation des personnes qui pousse à un engagement social et humanitaire. En disant aux jeunes qu’ils étaient « sel de la terre et lumière du monde », le pape les invitait à se tourner vers l’extérieur et à mener les combats dont le monde a vraiment besoin.

Même sans voir les fruits, le geste large et généreux du semeur doit être repris. La tâche des responsables d’Église ressemble à celle des parents : semer avec générosité, sans toujours avoir la satisfaction de participer à la récolte.

Certains souhaitent que les JMJ fassent apparaître des mouvements et des groupes de jeunes. Certes, il y a des initiatives prometteuses. Dans les grandes agglomérations, des jeunes se retrouvent après l’événement et poursuivent la fraternité et la prière découvertes lors des JMJ. Des efforts portent du fruit en milieu urbain (nommons les Fraternités monastiques de Jérusalem, les groupes d’adoration et les mouvements de jeunes).

Or, dans nos « diocèses ruraux », nous n’avons pas toujours la masse critique nécessaire pour insuffler un nouveau mouvement, ou pour donner un nouvel élan. Ce qui manque à notre Église, c’est un saint Jean-Eudes préoccupé par l’évangélisation des « campagnes ». Mais l’Église ne se bâtit pas avec un seul : c’est ensemble qu’on avance.

Au nom de l’évangélisation, il faut prendre de nouveaux chemins avec un surcroît d’audace et de courage. Il faut changer nos logiciels et nos connexions pour se mettre en haute vitesse. L’avenir est à ce prix.

Reçu: une invitation pour les retrouvailles de l’équipe de préparation des JMJ 2002. Aujourd’hui, ceux et celles qui ont travaillé à l’organisation de l’événement à Toronto se retrouvent à Toronto pour une messe présidée par le Père Rosica et grand pique-nique familial. Les amitiés sont un bel héritage des JMJ.

Fêté: la bonne sainte Anne Madawaska cette année. Dans un sanctuaire situé au cœur d’une vallée bucolique. Avec des gens de partout : du Maine, du Québec et de la République! Il y a dans la diversité de la foule quelque chose qui parle de la beauté et de l’unité de l’Église.

Rencontré: des jeunes à Ste-Anne-du-Madawaska qui ont participé aux JMJ de Toronto. Ils disent aimer se retrouver dans un sanctuaire, de manière presqu’anonyme au milieu de la foule. De plus, ils recherchent l’intensité dans l’expérience de la foi. Cela correspond à la psychologie religieuse de notre monde et peut expliquer l’affluence dans les lieux de pèlerinage et le fort succès de l’événementiel.

Noté: que dans un an, jour pour jour, ce sera la JMJ à Rio de Janeiro. Dans ce premier pays catholique au monde (avec 123 millions de fidèles), les défis sont immenses alors que les pentecôtistes ont le vent dans les voile. L’Église catholique mise beaucoup sur l’évangélisation des jeunes par les jeunes eux-mêmes.

Souhaité: avoir le temps de regarder quelques moments des Jeux Olympiques à Londres. Ce qui m’émeut dans ces compétitions, c’est autant les exploits des athlètes que la fraternité universelle qui s’exprime. Les JMJ, ce sont nos Jeux Olympiques qui nous permettent de vivre un moment de grâce afin que, «soutenus par la foule de témoins, nous courrions jusqu’au bout l’épreuve qui nous est proposée »

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