Élisabeth Turgeon: Bienheureuse de Québec à Rimouski

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Il y a deux semaines, l’équipe de S+L s’est rendue à Rimouski pour couvrir la béatification d’Élisabeth Turgeon. À notre arrivée dans cette magnifique ville du Bas Saint-Laurent, on était en fête depuis déjà une semaine puisque les célébrations entourant la béatification s’étalaient du dimanche 19 au dimanche 26 avril 2015. Si je pouvais trouver un mot pour qualifier notre brève escapade rimouskoise, je dirais l’accueil. Tant du côté de l’archidiocèse de Rimouski que des sœurs de la Congrégation de Notre-Dame du Saint-Rosaire, nous avons été accueillis à bras ouverts. Comme l’enseigne Jésus : « on juge un arbre à ses fruits » (Mt 7,16). Eh, bien je me considère un témoin oculaire de la sainteté de la fondatrice de cette congrégation qui fut élevée à la Gloire des autels dimanche dernier.

Bienheureuse de Québec à Rimouski

Comme l’affirmait le Cardinal Gérald Cyprien Lacroix dans l’homélie de béatification d’Élisabeth Turgeon, c’est dans le diocèse de Québec et plus particulièrement à Beaumont qu’Élisabeth a vu le jour le 7 février 1840. Appelée par l’évêque de Rimouski en 1875 pour s’occuper de l’éducation des plus pauvres du diocèse, elle fait profession de vie religieuse, le 12 septembre 1879, et est nommée première supérieure de sa Congrégation le même jour !

Sa promptitude à accepter cette lourde charge ne doit pas être confondue avec un manque de prudence. Elle était en effet convaincue que les moyens humains, comme la vie communautaire, étaient essentiels à cette tâche titanesque qu’était l’éducation à cette époque de l’histoire du Québec. Malgré un talent naturel pour les choses de l’esprit ainsi qu’une capacité hors norme d’organisation et de gouvernement, les défis n’ont pas manqué. Le plus grand de ceux-ci fut évidemment la pauvreté. Cette indigence que la nouvelle congrégation combattait d’arrache-pied en instruisant les enfants pauvres, les religieuses allaient y goûter elles-mêmes. Peut-être est-ce le signe de cette véritable abnégation caractéristique des saints qui consiste à suivre l’humilité du Christ : « lui qui est riche, il s’est fait pauvre à cause de vous, pour que vous deveniez riches par sa pauvreté » (2 Cor 8,9) ? En tout cas, c’était l’opinion du père rédemptoriste Tielen qui témoignait « qu’une œuvre bâtie sur une telle pauvreté ne peut être que l’œuvre de Dieu ».

Ce don total d’Élisabeth pour l’instruction des enfants les plus pauvres, nous en voyons non seulement les traces en contemplant l’immense couvent juché en haut de la colline de Rimouski mais également sur chacun des visages des centaines de religieuses de la Congrégation qu’elle a fondée. Comme me disait en entrevue le maire de Rimouski : « le couvent des sœurs est un élément central et incontournable de la vie économique et culturel si l’on veut comprendre la réalité de notre ville ».

Faire mémoire pour préparer l’avenir

Comme l’affirmait le pape François dans son homélie d’action de Grâce pour la canonisation de François de Laval et Marie de l’Incarnation :

« La mémoire de ceux qui nous ont précédés, de ceux qui ont fondé notre Église. Quelle Église féconde que celle du Québec ! […]Maintenant un conseil : que cette mémoire ne vous amène pas à abandonner la franchise. N’abandonnez pas le courage ! Peut-être… Non, non, pas de peut-être : c’est vrai ! Le diable est envieux et ne tolère pas qu’une terre soit aussi féconde de missionnaires. Prions le Seigneur pour que le Québec revienne sur cette route de la fécondité, pour donner au monde tant de missionnaires. »

C’est pour cela que je suis allé à Rimouski en fin de semaine dernière. Je voulais m’imprégner de la vie de cette religieuse pour qui le pape lui-même avait tenu à être présent par l’entremise d’un légat,le Cardinal Angelo Amato. Mon expérience personnelle fut celle d’une rencontre. Rencontre non seulement avec une pionnière de l’éducation trop méconnue encore dans l’histoire du Québec mais également la vie d’Élisabeth qui, à l’exemple de Saint-Paul, a pu affirmer « je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi » (Ga 2,20). Ce devoir de mémoire des catholiques du Québec auquel nous invite le souverain pontife doit maintenant passer par Rimouski ; par ce lieu touché par la Grâce, par la Présence incarnée du Christ dans la vie de tant de religieuses dédiées à la charité de l’éducation.

La vie de la Bienheureuse Élisabeth Turgeon est une source d’inspiration à la fois pour notre vie spirituelle à tous puisqu’elle fut un exemple parfait de don de soi par amour de Dieu et du prochain mais également pour orienter notre nouvel élan missionnaire. De fait, son dévouement pour la cause de l’éducation au Québec dans un moment difficile de notre histoire, devrait nous stimuler à redécouvrir la dimension charitable de l’instruction, de l’importance de la transmission des connaissances dans la construction d’un monde plus juste et plus équitable. En ce sens, le souci pour l’éducation de sœur Élisabeth Turgeon et de la Congrégation dont elle fut la fondatrice, devrait inspirer aux catholiques et à tous les hommes et femmes de bonne volonté une vision éducative selon une vision intégrale de la personne humaine tenant compte de cette dimension spirituelle qui est aussi centrale que négligée. Quelle belle invitation de Dieu à son peuple que cette béatification ! Soyons certains que la nouvelle Bienheureuse sera une alliée de taille pour le nouvel archevêque de Rimouski, Mgr Denis Grondin. Quel beau témoignage pour nous lancer avec plus de ferveur dans la conversion missionnaire de l’Église voulue par le pape François et selon laquelle :

« Le chantier de l’éducation est grand ouvert et l’Église y a toujours été présente à travers ses institutions et ses projets. Aujourd’hui, il faut stimuler encore davantage cet engagement à tous les niveaux et renouveler la tâche de tous les sujets qui y sont engagés, dans la perspective de la nouvelle évangélisation. »[2]

 

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