L’archidiocèse de Montréal au front contre les abus

(Image: Image by kisistvan77 from Pixabay)

Mercredi, le 25 novembre 2020, lors d’une conférence de presse virtuelle, l’archidiocèse de Montréal rendait public le « Rapport de l’enquête relative à la carrière de Brian Boucher au sein de l’Église catholique ». Long de quelque 270 pages (incluant les annexes), ce rapport rédigé par l’honorable Pepita G. Capriolo est le fruit d’un travail indépendant d’investigation et d’évaluation générales des pratiques de l’archidiocèse en se basant sur le traitement du cas de l’ancien prêtre Brian Boucher. Par son travail rigoureux, l’ancienne juge à la Cour supérieure du Québec Pepita G. Caprioloa décelé plusieurs lacunes dans les processus archidiocésains tant à l’accueil qu’au traitement des plaintes qui, dans ce cas particulier, ont mené à de graves injustices.

Une Église à la hauteur des exigences de transparence

Cette enquête était d’abord un devoir de justice envers les victimes et l’ensemble du corps ecclésial, profondément choqués et humiliés par les actes odieux perpétrés par l’ancien clerc. Ne pouvant ici entrer dans les détails, ce rapport manifeste plusieurs déficiences des processus archidiocésains.  Échec à reconnaître le danger (p.176); culture du secret et disparition de documents (p.177-180); dépendance au modèle thérapeutique (p.181); cléricalisme (p. 183); problème d’imputabilité (p.184); et autres problèmes structurel (p.188) sont les principaux aspects relevés par la juge Capriolo qui ont amené les personnes impliquées à ne pas traiter convenablement le cas de Brian Boucher. Cet exercice, bien que pénible, devait être fait par souci de transparence intra-ecclésiale. La transmission du rapport aux plus hautes autorités de la Congrégation de la doctrine de la Foi et de la congrégation pour les évêques est un signe qui va en ce sens.

La divulgation publique des conclusions du Rapport Capriolo est également un geste courageux dont l’ensemble de notre société pourra bénéficier. En effet, cela est toujours plus manifeste, aucune institution n’est à l’abri de toutes les formes d’abus. Religion, club sportif, entreprise, agence médiatique, école, etc. tout regroupement est susceptible d’attirer des personnes aux comportements déviants. En ce sens, il est un devoir pour chaque institution d’établir un état de sa propre situation devant ce phénomène et bâtir un protocole d’accueil et de traitement des cas rapportés. Or, nous le savons désormais depuis la crise des abus sexuels, l’Église n’a malheureusement pas été épargnée. C’est la raison pour laquelle il est primordiale qu’elle fasse d’elle-même un exemple de lutte interne à toute forme d’abus. En identifiant ses erreurs, l’Église pourra apprendre de ces celles-ci, fixer de nouvelles normes, raffermir la sécurité des personnes qui font appel à ses services, rétablir sa crédibilité et ainsi, montrer que toute institution ne peut que bénéficier des efforts de vérité et de transparence. En autant qu’il y ait véritablement volonté de changer les choses.

Un rapport qui ne risque pas d’être tabletté

On le sait, trop souvent les rapports, tant gouvernementaux que juridiques, voient leurs diagnostics et recommandations ignorés par les personnes en position de responsabilité. Cela ne risque pas d’arriver dans ce cas-ci. D’abord, l’affirmation de Mgr Lépine selon laquelle  « Pour guérir, il faut prendre la mesure de la maladie qui nous frappe » manifeste l’aspect prioritaire que revêt, pour lui, l’accueil des victimes et la lutte contre les abus au sein de l’archidiocèse de Montréal. Prenant les devants par la conduite, puis la publication de ce rapport par une juge aussi compétente qu’indépendante, ne peut qu’être le signe d’un souci véritable de mise en application imminente.

Au-delà de cette intention louable de la part de l’archevêque, nous pouvons aussi compter sur la juge elle-même puisque, lors de la conférence de presse, fut également annoncée la création d’un nouveau Comité archidiocésain responsable de la mise en application des recommandations de ce rapport, comité co-présidé par Mgr Christian Lépine et la juge Pepita Capriolo elle-même. Aucun doute que celle qui a émis ces recommandations n’aura aucun scrupule à les appliquer et, ce, afin de les rendre le plus efficace possible.

Une Église à la hauteur de ses prétentions

L’Église catholique, dépositaire du dépôt de la foi, des instruments de salut et surtout, témoin de la Présence indéfectible du Christ parmi les hommes, a le devoir d’avoir des standards et des pratiques internes à la fine pointe des recherches en science de l’administration et de gestion des ressources humaines. Plus que toute autre, elle doit montrer l’exemple par des pratiques efficaces d’accueil des victimes mais également de prévention, détection, traitement des cas en collaboration avec les autorités policière et judiciaire et, finalement, de sanctions canoniques proportionnelles à la gravité des crimes commis en son sein et en son nom. En ce sens, la publication du rapport Capriolo est plus qu’un pas dans la bonne direction. Nous assistons à un changement de cap, un tournant vient d’être pris. Sous leur leadership commun, nous pouvons vraiment affirmer que l’Église catholique à Montréal est pleinement orientée dans l’esprit réformateur du pape François.

Secured By miniOrange