« La dernière chose que l’on perd c’est l’espoir »

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Image: Courtoisie de CNS

Comme tous les voyages pontificaux, les voyages du pape François sont riches en enseignements et ils nous aident à mieux comprendre notre foi et les grandes orientations que l’évêque de Rome veut implanter dans l’Église universelle. Le voyage du Pape en Corée ne fait pas exception et peut donc faire l’objet d’une analyse. Selon moi, la spécificité de ce voyage du Pape se trouve dans la mise en pratique de la réorientation missionnaire de l’Église. En effet, l’enseignement et les actions du pape François en Corée ont mis en évidence quatre éléments : la paix, l’espérance, l’évangélisation et le dialogue avec les cultures. J’offre ici ma contribution en présentant deux articles relatant ces quatre points fondamentaux de ce voyage et en montrant comment François, par son voyage même, a mis en pratique ces points fondamentaux de l’enseignement de Paul VI sur l’évangélisation.

La Paix

Comme l’affirme Evangelii Nuntiandi: « il est impossible d’accepter que l’œuvre d’évangélisation puisse ou doive négliger les questions extrêmement graves, tellement agitées aujourd’hui, concernant la justice, la libération, le développement et la paix dans le monde.» (no. 31). Pour le Pape François, il était impossible de ne pas faire référence à l’histoire de la Corée et à ses blessures passées. De fait, dès son arrivée en Corée, le Souverain Pontife a voulu montrer aux autorités de la Corée qu’il venait comme un émissaire de la paix, quelqu’un qui avait à cœur la réconciliation des cœurs. Toutefois, ce message ne s’adressait pas seulement aux Coréens mais également à toute l’Église et à l’humanité. En effet, d’une part, nous savons à quel point notre monde connaît des tensions et, d’autre part, la division de la grande famille coréenne en deux clans hermétiques représente bien les blessures dont souffrent les familles d’aujourd’hui et sur lesquelles se penchera le prochain Synode des Évêques.

Après cette allusion au passé de la Corée, le Pape a continué en montrant comment « la paix n’est pas simplement l’absence de guerre, mais « l’œuvre de la justice » (cf. Is 32, 17). Et la justice, comme vertu, appelle la ténacité de la patience, elle demande que Young woman smiles prior to closing Mass of sixth Asian Youth Day at Haemi Castle in Haemi, South Koreanous n’oubliions pas les injustices du passé mais que nous les surpassions par le pardon, la tolérance et la coopération »[2]. Selon le Pape François, la paix ne peut pas se limiter à être un simple travail diplomatique d’équilibre des forces où l’on attaque pas le voisin simplement parce qu’il est en mesure de se défendre. La paix est quelque chose de beaucoup plus profond et se comprend plutôt dans une soumission commune à la vérité. Dans cette perspective, les injustices héritées de l’histoire comprennent, dans un premier temps, la reconnaissance des fautes et le pardon pour que les hostilités prennent fin et, dans un deuxième temps, l’acceptation du processus de paix par amour de cette même vérité. Dans ce contexte, l’Église « est appelée à être semence d’unité pour la famille humaine toute entière »[3] puisqu’elle enseigne et pratique cet amour de la vérité où chacun reconnaît, à la fois, sa part de responsabilité dans le drame du péché et du mal et la présence de la Miséricorde de Dieu. Miséricorde qui nous montre, à son tour, comment le pardon est plus grand que la justice et, ainsi, que la réconciliation est possible. La paix est donc, d’abord et avant tout, un don de Dieu qui doit être demandé ardemment et continuellement et c’est par l’acte même de prier que le pape François aura été le plus efficace : « ma visite culmine avec cette célébration de la Messe, au cours de laquelle nous implorons de Dieu la grâce de la paix et de la réconciliation. Cette prière a une résonnance particulière dans la péninsule coréenne. La messe d’aujourd’hui est surtout et principalement une prière pour la réconciliation de cette famille coréenne. » (4)

Espérance

L’espérance est le deuxième thème important de la visite du Pape en Corée. En effet, puisque, « l’évangélisation contient aussi la prédication de l’espérance dans les promesses faites par Dieu dans la nouvelle alliance en Jésus-Christ »[5], le Pape François n’a pas manqué d’y faire référence en s’exclamant : « Quel grand don que l’espérance !»[6]. Une des raisons pour lesquelles les chrétiens doivent mettre en avant l’espérance lorsqu’ils évangélisent, c’est parce qu’annoncer Jésus-Christ c’est annoncer une bonne nouvelle. Une Bonne nouvelle dans le flot de mauvaises nouvelles qui nous assaillent. Jésus-Christ vient nous porter dès maintenant la victoire sur le mal, une victoire à laquelle nous devons nous associer par le don de nous-mêmes au Christ dans l’Eucharistie. Ce don de nous-mêmes et cette paix déjà présente peut toutefois pas nous faire perdre de vue que la paix est un don de Dieu et que notre condition présente, la marche de l’humanité dans l’histoire, est celle d’une attente patiente. Cesser d’attendre la paix de Dieu revient à éteindre l’espérance qui est en nous et sombrer « dans l’esprit de désespoir qui semble croître, tel un cancer dans la société qui extérieurement est nantie mais qui souvent fait l’expérience de la tristesse intérieure et du vide »[7].

L’espérance est également la preuve que Dieu ne nous abandonne pas à nos misères et à nos péchés. Par sa division, le nord et le Pope Francis blesses girl after praying at the birthplace St. Andrew Kim Taegonsud de la péninsule coréenne manifestent que la famille humaine, malgré les progrès dans certains domaines, a toujours besoin du don de la réconciliation. En effet, les divisions entre les hommes ne sont pas seulement des offenses d’homme à homme mais surtout des offenses envers Dieu. Dieu est le premier offensé lorsque ses enfants créés par Amour et pour l’Amour en viennent à vivre et à structurer leur société sur la haine et le mépris de l’autre. Dans ce contexte, « l’espérance offerte par l’Évangile de la grâce et de la miséricorde de Dieu en Jésus-Christ »[8] est aussi la preuve de la Présence de Dieu qui ne nous abandonne pas, qui peut nous délivrer du péché et de la mort.

En ce sens, le message du Pape aux religieux de Corée est très riche de conseils pratiques permettant de mettre de l’avant l’espérance théologale dans l’œuvre de réception du don de la paix. En effet, pour l’évêque de Rome, témoigner de l’Évangile aujourd’hui signifie « être un signe tangible de la présence du Royaume de Dieu, une anticipation de la joie éternelle du ciel »[9]. Cela signifie pour les religieux, être déjà maintenant une sorte de garantie que la vie des béatitudes est crédible et qu’elle peut être réellement mise en pratique. Devant les nombreux risques que représente aujourd’hui « la tentation d’adopter une mentalité purement fonctionnelle et mondaine, qui conduit à mettre notre espérance seulement dans les moyens humains », le Pape a exhorté les religieux à prendre au sérieux leurs vœux d’obéissance et de chasteté et a insisté sur la pauvreté qui « est autant un « mur » qu’une « mère ». Elle est un « mur » parce qu’elle protège la vie consacrée, elle est une « mère » parce qu’elle aide la vie consacrée à grandir et la conduit sur le juste chemin »[10].

Prions pour que le peuple coréen, et avec lui l’Église entière ne perdent jamais l’espérance qui en fait un signe de l’unité et de la sublimité de la vocation humaine à l’amour. Bien que notre monde soit parfois victime de mal si grand que certains en viennent à perdre tout espoir. « La dernière chose que l’on perd c’est l’espoir » [11] confiait la présidente coréenne Geun-Hye Park au pape François. Prions pour que les chrétiens du monde soit un signe d’espérance empêchant leurs frères et sœurs en humanité de se rendre jusque là.

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