Ci-dessous le discours du pape François lors de la rencontre œcuménique et interreligieuse pour la paix, ce vendredi 1er décembre, dans le jardin de l’archevêché de Dacca
Illustres Hôtes, Chers amis,
Notre rencontre qui rassemble les représentants des diverses communautés religieuses de ce pays représente un moment très significatif de ma visite au Bangladesh. Nous sommes réunis pour approfondir notre amitié et pour exprimer notre désir commun du don d’une paix authentique et durable. Ma reconnaissance va au Cardinal D’Rozario pour ses aimables paroles de bienvenue et à ceux qui m’ont accueilli chaleureusement au nom des communautés musulmanes, hindoues et bouddhistes, et aussi des autorités civiles. Je suis reconnaissant à l’Évêque anglican de Dhaka pour sa présence, aux diverses communautés chrétiennes et à ceux qui ont contribué à rendre possible cette réunion.
Les paroles que nous avons écoutées, mais aussi les chants et les danses qui ont animé notre assemblée, nous ont parlé de manière éloquente du désir d’harmonie, de fraternité et de paix incarnés dans les enseignements des religions du monde. Puisse notre rencontre de cet après-midi être un signe clair des efforts des leaders et des adeptes des religions présentes dans ce pays pour vivre ensemble dans le respect réciproque et la bonne volonté. Au Bangladesh, où le droit à la liberté religieuse est un principe fondamental, que cet engagement soit un appel respectueux mais ferme à qui cherchera à fomenter des divisions, de la haine et de la violence au nom de la religion. C’est un signe particulièrement réconfortant de notre temps que les croyants et les personnes de bonne volonté se sentent toujours plus appelés à coopérer à la formation d’une culture de la rencontre, du dialogue et de la collaboration au service de la famille humaine. Cela requiert plus qu’une simple tolérance. Cela nous stimule à tendre la main à l’autre dans une attitude de confiance réciproque et de compréhension, pour construire une unité qui intègre la diversité non comme une menace, mais comme une source potentielle d’enrichissement et de croissance. Cela nous incite à nous exercer à l’ouverture du cœur, de manière à voir les autres comme un chemin, non pas comme un obstacle.
Permettez-moi d’explorer brièvement quelques caractéristiques essentielles de cette “ouverture du cœur” qui est la condition pour une culture de la rencontre. En premier lieu, celle-ci est une porte. Ce n’est pas une théorie abstraite, mais une expérience vécue. Cela nous permet d’entreprendre un dialogue de vie, non pas un simple échange d’idées. Cela demande de la bonne volonté et de l’accueil, mais ne doit pas être confondu avec l’indifférence ou la réticence à exprimer nos convictions les plus profondes. S’engager fructueusement avec l’autre signifie partager nos identités religieuses et culturelles distinctes, mais toujours avec humilité, honnêteté et respect. L’ouverture du cœur est aussi semblable à une échelle qui rejoint l’Absolu. En rappelant cette dimension transcendante de notre activité, nous nous rendons compte de la nécessité de purifier nos cœurs, de manière à pouvoir voir toutes choses dans leur perspective la plus vraie. À chaque pas, notre vue deviendra plus claire et nous recevrons la force de persévérer dans l’engagement à comprendre et à valoriser les autres et leur point de vue. De cette façon, nous trouverons la sagesse et la force nécessaires pour tendre à tous la main de l’amitié. L’ouverture du cœur est aussi un chemin qui conduit à la recherche de la bonté, de la justice et de la solidarité.
Cela incite à rechercher le bien de nos proches. Dans sa lettre aux chrétiens de Rome, Saint Paul les a exhortés ainsi : « Ne te laisse pas vaincre par le mal, mais combats le mal par le bien» (Rm 12,21). C’est un sentiment que tous nous pouvons imiter. La sollicitude religieuse pour le bien de notre prochain, qui provient d’un cœur ouvert, coule comme un vaste fleuve, en irriguant les terres arides et désertes de la haine, de la corruption, de la pauvreté et de la violence qui dégrade tellement les vies humaines, divise les familles et défigure le don de la création. Les diverses communautés religieuses du Bangladesh ont embrassé cette route d’une manière particulière dans l’engagement à prendre soin de la terre, notre maison commune, et dans la réponse aux catastrophes naturelles qui ont affligé la nation au cours de ces dernières années. Je pense aussi à la manifestation commune de douleur, de prière et de solidarité qui a accompagné le tragique écroulement du Rana Plaza, qui demeure imprimé dans l’esprit de tous. Dans ces diverses expressions, nous voyons combien le chemin de la bonté conduit à la coopération au service des autres.
Un esprit d’ouverture, d’acceptation et de coopération entre les croyants ne contribue pas simplement à une culture d’harmonie et de paix ; celui-ci est son cœur battant. Comme notre monde a besoin de ce cœur qui bat avec force, pour contrer le virus de la corruption politique, les idéologies religieuses destructrices, la tentation de fermer les yeux face aux besoins des pauvres, des réfugiés, des minorités persécutées et des plus vulnérables ! Cette ouverture est nécessaire pour accueillir les personnes de notre monde, spécialement les jeunes, qui parfois se sentent seuls et déconcertés dans la recherche du sens de la vie !
Chers amis, je vous remercie pour vos efforts à promouvoir la culture de la rencontre, et je prie pour qu’avec la démonstration de l’engagement commun des adeptes des religions à discerner le bien et à le mettre en pratique, nous aidions tous les croyants à grandir dans la sagesse et dans la sainteté, et à coopérer pour construire un monde toujours plus humain, uni et pacifique. J’ouvre mon cœur à vous tous et je vous remercie encore une fois de votre accueil. Souvenons-nous les uns des autres dans nos prières.