Journal du père Rosica au Synode des évêques
Suite à l’annonce surprenante d’hier dans la Salle du Synode nous informant qu’un des pères d’une Eglise orientale avait oublié sa mitre dans la basilique Saint-Paul-hors-les-Murs lors du concert de lundi après-midi, nous avons appris ce matin que l’un des pères du rite latin – probablement un archevêque — avait laissé sa croix pectorale dans la Salle du Synode.
Le propriétaire dut la récupérer avant que le Pape nous rejoigne plus tard dans la journée. Il va de soi que ces deux annonces ont contribué à alléger l’ambiance. Nous avons pu constater que l’oubli n’appartient pas qu’aux leaders de l’Église orientale…
Hier matin, nous avons écouté les dernières interventions des cardinaux et évêques participant au Synode. Je voudrais faire mention des deux discours de cinq minutes faits dans la congrégation de ce matin.
Culture de la sagesse
Le cardinal salésien Joseph Zen de Hong Kong a expliqué avec un italien impeccable comment la Parole de Dieu est semée parmi des personnes qui apprécient “la culture de la sagesse”. Le cardinal a parlé de l’harmonie qui existe parmi les six religions de son pays. Il a aussi affirmé que les groupes religieux travaillent ensemble, non pas tellement pour formaliser le dialogue interreligieux, mais plutôt pour unir et préserver l’héritage précieux de la sagesse chinoise.
“L’Eglise”, déclairait le cardinal Zen, a toujours trouvé un allié dans la sagesse de Confucius. Le prélat a donné ce sage conseil à son public international: “Si on est émus par la charité et qu’on arrive à transmettre les vertus chinoises […] de fidélité, honnêteté et d’humilité aux jeunes générations, nous les aurons aidées à faire de grands pas vers la sainteté.”
Quand ces vertus manquent dans la vie des personnes chinoises, a-t-il poursuivi, une chute impressionnante des valeurs sacrées de la vie, du mariage et de la famille a lieu.
Il a aussi souligné la croissance fulgurante de la corruption, le manque de conscience, et la chasse au profit à tout prix. Il a parlé du récent scandale à propos de la contamination laitière en Chine, qui a causé la mort de quatre enfants et en a rendu des dizaines de milliers d’autres malades.
Le cardinal italien Giovanni Battista Re, préfet de la Congrégation des Evêques, nous a offert une réflexion qui à mon avis devrait être envoyée aux évêques du monde entier. Présente dans la constitution dogmatique du concile Vatican II “Lumen Gentium,” le cardinal Re a parlé du rôle principal d’un évêque qui « sont les hérauts de la foi qui amènent au Christ de nouveaux disciples; ce sont des docteurs authentiques, revêtus de l’autorité du Christ, qui prêchent au peuple commis à leur soin les vérités de foi à croire et à appliquer dans la pratique de la vie ».
Le cardinal Re a terminé sa présentation en nous laissant avec une image très impressionnante. Il a évoqué le moment important, pendant la cérémonie de l’ordination épiscopale, au cours duquel le livre ouvert des Evangiles est tenu au-dessus de la tête du nouvel évêque, qui est agenouillé sous le livre ouvert. Le cardinal Re voilait ainsi dire que le ministère des évêques se situe sous la parole de Dieu, avec pour seul but l’annoncer de la Parole, la proclamant et la vivant avec fidélité.
Il nous a dit que l’image du livre ouvert des Evangiles évoque le toit de notre maison “La Parole de Dieu est pour (nous), les évêques, la maison que nous quittons chaque jour pour aller nous occuper du troupeau qui nous a été confié, et la maison où nous revenons chaque soir.
« La parole est ce toit sûr qui nous abrite pendant les tempêtes de la vie, cet endroit intime où nos rapports, nos souvenirs et nos sentiments, ainsi que nos angoisses et nos préoccupations pastorales s’entremêlent, nous permettant de trouver dans le Christ un rafraîchissement pour l’âme, et de la force pour faire face aux problèmes et aux défis qu’entraine notre ministère.”
Alors que le cardinal Re disait cela, j’ai remarqué plusieurs pères synodaux qui hochaient la tête en signe d’approbation.
De la haute couture
J’ai toujours eu un grand respect pour le cardinal Marc Ouellet, archevêque de Québec et rapporteur général de cette assemblée du Synode des évêques sur la Parole de Dieu. Aujourd’hui, en présence de toute l’assemblée synodale et de Benoît XVI, le cardinal a réalisé un véritable tour de force qui en a envoûté plusieurs.
Il avait déjà livré la conférence d’ouverture du Synode en latin lundi de la semaine dernière, indiquant ainsi les principaux thèmes et la direction du présent synode. Ce soir, il a présenté, dans un latin impeccable, une conférence de 70 minutes appelée la «Relatio post disceptationem», la conférence qui suit les discussions.
La plupart des gens auraient besoin d’un bon mois pour traiter tout ce qui a été entendu dans la salle du Synode. Certains évêques présents ont même dit ne pas pouvoir imaginer que l’on puisse synthétiser la multitudes d’idées et de suggestions qui ont émergé de ce groupe. Le prélat québécois et son équipe ont travaillé sans arrêt au cours des deux derniers jours pour consolider les éléments des quelques 200 interventions entendues.
Le résultat fut une présentation impressionnante et réfléchie qui a lancé la prochaine phase du Synode et la formulation de propositions qui seront présentées au pape la semaine prochaine. Ces propositions, dont l’une est chère à Benoît XVI, serviront à la rédaction de l’exhortation apostolique qui suivra le synode.
Parmi les éléments nouveaux qui sont ressortis de ce synode il y a les questions pour réflexion qui se trouvent à la fin de chacune des sections du rapport du cardinal Ouellet. Je vous parlerez de ces questions plus tard cette semaine.
Demain, le centre de presse du Vatican organise une conférence de presse spéciale pour présenter le «Relatio», et une équipe d’évêques ayant un rôle-clé au sein de l’assemblée synodale répondront aux questions de la presse internationale.
Parmi eux, le cardinal William Levada, préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la foi, le cardinal George Pell, archevêque de Sydney (et star des JMJ) et Mgr Luis Antonio Tagle, des Philippines, que plusieurs ont découvert au Congrès eucharistique à Québec.
Aux premières loges
Enfin, plusieurs d’entre vous m’avez écrit pour me dire à quel point ce petit journal vous permettait de vivre et de comprendre cette grande expérience de l’Église universelle. On ne cache pas la lumière sous le boisseau, comme nous le faisons avec trop de belles histoires en Église. Bien que le temps ne me permette pas de répondre à chacun de vous personnellement, sachez que vous êtes dans mon bon souvenir, lorsque je prie au tombeau de saint Pierre, et auprès de tant d’homme et de femmes qui sont présents dans cet espace sacré qu’est Saint-Pierre de Rome.