Benoît XVI a rencontré ce matin élèves et étudiants, professeurs et bien-pensants de l’éducation catholique au Royaume-Uni. Cette très belle rencontre a permis au Pape d’aborder le thème de l’éducation catholique et du rôle de l’école qui se dit catholique. Un heureux rappel pour les protagonistes des écoles catholiques, spécialement celles de l’Ontario, qui sont entièrement financées par l’État. Ainsi, le slogan d’une prochaine campagne pour ces écoles pourrait être « l’école catholique: pour former les saints du nouveau millénaire! » Benoît XVI a rappellé ce matin que l’éducation n’a pas une simple fin utilitaire, elle vise à former toute la personne, à lui transmettre la sagesse. Ci-desous les deux messages de Benoît XVI, d’abord aux élèves puis aux professeurs et aux religieux.
Célébration au Collège universitaire
d’éducation catholique Sainte Marie, Twickenham
Discours du Saint-Père aux élèves
Chers Frères et Sœurs en Christ,
Chers jeunes amis,
Je désire tout d’abord vous dire combien je suis heureux d’être ici avec vous aujourd’hui. Je vous salue très chaleureusement, vous qui êtes venus ici, à l’Université Sainte-Marie, des écoles catholiques et collèges de tout le Royaume-Uni, et tous ceux qui regardent à la télévision ou par internet. Je remercie Monseigneur McMahon de son chaleureux accueil. Je remercie les membres de la chorale et de l’ensemble orchestral pour l’agréable musique qui a introduit notre célébration, et je remercie Mademoiselle Bellot pour ses aimables paroles au nom de tous les jeunes présents. Dans le contexte préparatoire des Jeux Olympiques de Londres, cela a été un plaisir d’inaugurer cette Sports Foundation, nommé ainsi en l’honneur du pape Jean-Paul II, et je prie afin que ceux qui viendront ici, rendent gloire à Dieu par leurs activités sportives, tout en procurant satisfaction à eux-mêmes et aux autres.Il n’arrive pas souvent qu’un Pape, ou même une autre personne, ait la possibilité de parler à des étudiants de toutes les écoles catholiques d’Angleterre, du Pays de Galles et d’Écosse à la fois. Et puisque j’ai cette chance en ce moment, j’aimerais beaucoup vous dire une chose. J’espère que parmi ceux d’entre vous qui m’écoutent aujourd’hui, se trouvent des futurs saints du vingt-et-unième siècle. Ce que Dieu veut plus que tout pour chacun de vous c’est que vous deveniez des saints. Il vous aime beaucoup plus que vous ne pourrez jamais l’imaginer, et il veut ce qu’il y a de meilleur pour vous. Et de loin, la meilleure chose pour vous c’est de grandir en sainteté.
Il se peut que certains d’entre vous n’aient jamais pensé à cela auparavant. Il se peut que certains d’entre vous pensent qu’être un saint ce n’est pas pour eux. Permettez-moi vous expliquer ce que je veux dire. Quand nous sommes jeunes, nous pensons facilement aux personnes que nous respectons, aux personnes que nous admirons, aux personnes à qui nous voulons ressembler. Ce peut être quelqu’un que nous rencontrons dans notre vie de tous les jours et que nous tenons en grande estime. Ou cela pourrait être quelqu’un de connu. Nous vivons dans une culture de la célébrité, et les jeunes sont souvent encouragés à se modeler sur des personnalités du monde du sport ou du spectacle. La question que je vous pose est celle-ci : quelles sont les qualités que vous percevez dans d’autres personnes et que vous souhaiteriez beaucoup avoir vous-mêmes ? Quel type de personne aimeriez-vous être réellement ?Quand je vous invite à devenir des saints, je vous demande de ne pas vous contenter de la seconde place. Je vous demande de ne pas poursuivre un but limité en ignorant tous les autres. L’argent permet d’être généreux et de faire du bien dans le monde, mais à lui seul, il ne suffit pas à nous rendre heureux. La haute qualification dans l’activité professionnelle est une bonne chose, mais elle ne nous satisfait pas si nous n’avons pas en vue quelque chose de bien plus grand. Elle peut nous rendre célèbre, mais elle ne nous rendra pas heureux. Le bonheur est quelque chose que nous voulons tous, mais un des grands drames de ce monde est que tant de personnes ne le trouvent jamais, parce qu’elles le cherchent là où il n’est pas. La clef du bonheur est très simple – le vrai bonheur se trouve en Dieu. Nous devons avoir le courage de mettre nos espérances les plus profondes en Dieu seul, non pas dans l’argent, dans la carrière, dans les succès de ce monde, ou dans nos relations avec d’autres personnes, mais en Dieu.
Lui seul peut satisfaire les exigences profondes de nos cœurs.Non seulement Dieu nous aime avec une profondeur et une intensité que nous pouvons à peine essayer de commencer à comprendre, mais il nous invite à répondre à cet amour. Vous savez tous ce que c’est que de rencontrer quelqu’un d’intéressant et d’attirant, et de vouloir être son ami. Vous espérez toujours que cette personne va vous trouver intéressant et attirant, et qu’elle voudra devenir votre ami. Dieu veut votre amitié. Et dès que vous devenez l’ami de Dieu, tout commence à changer dans votre vie. Quand vous commencez à mieux le connaître, vous vous apercevez que vous voulez que votre vie reflète un peu de sa bonté infinie. Vous êtes attirés par la pratique des vertus. Vous commencez à considérer l’avidité et l’égoïsme et tous les autres péchés tels qu’ils sont réellement, des tendances destructrices et dangereuses qui provoquent de profondes souffrances et causent un grand préjudice, et vous voulez éviter de tomber vous-mêmes dans ce piège. Vous commencez à éprouver de la compassion pour les personnes en difficultés et vous désirez vivement faire quelque chose pour elles. Vous voulez aider les indigents et les affamés, vous voulez réconforter les personnes tristes, vous voulez être bons et généreux. Et si tout cela est important pour vous, alors vous êtes bien sur le chemin qui mène à la sainteté.
Dans vos écoles catholiques, il y a toujours un cadre plus grand qui dépasse les matières que vous étudiez, les différentes compétences que vous apprenez. Tout le travail que vous faites se situe dans le contexte de la croissance de cette amitié avec Dieu et de tout ce qui découle de cette amitié. Aussi vous n’étudiez pas seulement pour être de bons étudiants, mais de bons citoyens, de bonnes personnes. A mesure que vous progressez au sein de l’école, vous avez à faire des choix concernant les matières que vous étudiez, vous commencez à vous spécialiser en ayant une idée de ce que vous allez faire plus tard dans votre vie. Tout cela est juste et bien. Mais rappelez-vous toujours que chaque matière que vous étudiez fait partie d’un plus grand dessein. Ne vous enfermez jamais dans des limites étroites. Le monde a besoin de bons chercheurs, mais une perspective scientifique devient dangereusement étroite si elle ignore la dimension religieuse et éthique de la vie, tout comme la religion devient étriquée si elle rejette la légitime contribution de la science pour notre compréhension du monde. Nous avons besoin de bons historiens, philosophes, économistes, mais si la compréhension de la vie humaine à travers leur domaine particulier est trop étroitement polarisé, ils peuvent nous amener à nous égarer gravement.
Une bonne école pourvoit à une éducation complète de la personne tout entière. Et une bonne école catholique, en plus de cela, devrait aider tous ses élèves à devenir des saints. Je sais qu’il y a de nombreux étudiants non-catholiques dans les écoles catholiques en Grande-Bretagne, et je souhaite les inclure tous dans mes paroles aujourd’hui. Je prie pour que vous aussi vous vous sentiez encouragés à pratiquer les vertus et à grandir dans la connaissance et l’amitié avec Dieu aux côtés de vos camarades de classe catholiques. Vous leur rappelez par votre présence le plus grand dessein qui existe au-delà de l’école, et, de fait, il est absolument juste que le respect et l’amitié à l’égard des membres d’autres traditions religieuses doivent être parmi les vertus apprises à l’école catholique. J’espère également que vous voudrez partager avec tous ceux que vous rencontrez les valeurs et les intuitions que vous avez accueillies à travers l’éducation chrétienne que vous avez reçue.
Chers amis, je vous remercie de votre attention, je vous promets de prier pour vous, et je vous demande de prier pour moi. J’espère voir beaucoup d’entre vous au mois d’août prochain, à la Journée Mondiale de la Jeunesse à Madrid. D’ici là, que Dieu vous bénisse tous !
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Discours aux professeurs et aux religieux
Excellence Monsieur le Secrétaire d’État pour l’Éducation,
Monseigneur Stack, Docteur Naylor,
Révérends Pères, frères et sœurs dans le Christ,Je me réjouis de l’opportunité qui m’est donnée de rendre hommage à l’exceptionnelle contribution apportée par les religieux et les religieuses dans ce pays à la noble tâche de l’éducation. Je remercie les jeunes pour leur beau chant, et je remercie Sœur Teresa pour ses paroles. À elle et à tous les hommes et femmes consacrés qui dédient leur vie à l’éducation des jeunes, j’exprime ma profonde reconnaissance. Vous formez les générations nouvelles non seulement à la connaissance de la foi, mais aussi dans tous les aspects d’une vie citoyenne mûre et responsable dans le monde d’aujourd’hui.
Comme vous le savez, le travail d’un professeur ne consiste pas seulement à transmettre des informations ou à enseigner des compétences pour procurer un profit économique à la société ; l’éducation n’est pas et ne doit jamais être considérée selon une optique purement utilitaire. Il s’agit de former la personne humaine, en lui donnant le bagage nécessaire pour vivre pleinement sa vie – en bref -, il s’agit de transmettre la sagesse. Et la vraie sagesse est inséparable de la connaissance du Créateur, car « nous sommes en effet dans sa main, et nous et nos paroles, et toute intelligence et tout savoir pratique » (Sg 7, 16).
Cette dimension transcendante des études et de l’enseignement a été clairement saisie par les moines qui contribuèrent beaucoup à l’évangélisation de ces îles. Je pense aux bénédictins qui ont accompagné saint Augustin dans sa mission en Angleterre, aux disciples de saint Colomba qui ont diffusé la foi en Ecosse et dans le nord de l’Angleterre, à saint David et ses compagnons au Pays de Galles. Puisque la recherche de Dieu, qui est au cœur de la vocation monastique, requiert un engagement actif selon les moyens par lesquels il se fait connaître lui-même : sa création et sa parole révélée, il était tout naturel que le monastère ait une bibliothèque et une école (cf. Discours au monde de la culture, Collège des Bernardins, Paris, 12 septembre 2008). En se consacrant à l’étude comme chemin pour rencontrer le Verbe incarné de Dieu, les moines ont contribué à poser les fondements de notre culture et de notre civilisation occidentale.Regardant aujourd’hui autour de moi, je vois un grand nombre de congrégations apostoliques qui ont un charisme pour l’éducation des jeunes. C’est l’occasion pour moi de rendre grâce à Dieu pour la vie et l’œuvre de la Vénérable Marie Ward, native de cette terre, dont la vision novatrice de la vie religieuse apostolique féminine a porté beaucoup de fruits. Moi-même, dans ma jeunesse, j’ai été enseigné par les « English Ladies » et je leur dois une profond gratitude. Beaucoup d’entre vous appartiennent à des ordres éducatifs qui ont porté, en des terres lointaines, la lumière de l’Evangile, participant à la grande œuvre missionnaire de l’Église, et pour cela aussi, je rends grâce et louanges à Dieu. Vous avez souvent posé les bases d’un système éducatif avant même que l’État n’assume sa responsabilité dans ce service vital des individus et de la société. Comme les rôles respectifs de l’Église et de l’État dans le domaine de l’éducation continuent d’évoluer, n’oubliez jamais que les religieux ont une contribution unique à donner à cet apostolat, par-dessus tout à cause de leurs vies consacrées à Dieu et du témoignage de fidélité et d’amour qu’ils rendent au Christ, le Maître suprême.
La présence de religieux dans les écoles catholiques est vraiment un puissant rappel de l’esprit catholique, souvent remis en cause, qui doit imprégner tous les aspects de la vie scolaire. Cela s’étend bien au-delà d’un enseignement dont le contenu devrait toujours être conforme à la doctrine de l’Église, exigence qui va de soit. Cela veut dire que la vie de foi doit être la force motrice qui sous-tend toute activité dans l’école, pour que la mission de l’Église puisse être accomplie avec efficacité, et que les jeunes puissent découvrir la joie d’appartenir à « l’être pour tous » du Christ (Spe Salvi, 28).
Avant de conclure, j’adresse une pensée particulière de gratitude à ceux dont la tâche consiste à assurer dans nos écoles un environnement sécurisant aux enfants et aux jeunes. Notre responsabilité envers ceux qui nous sont confiés pour leur formation chrétienne n’exige rien de moins. En effet, la vie de foi ne peut être éduquée avec efficacité que dans un climat de confiance respectueuse et affectueuse. Je prie pour que cela reste la marque des écoles catholiques dans ce pays.