Le Saint-Père a rencontré aujourd’hui au grand séminaire d’Ouidah des séminaristes, ainsi que des religieux et des religieuses. Voici le discours du Saint-Père dans son intégralité :
Messieurs les Cardinaux,
Monseigneur N’Koué, responsable de la formation sacerdotale,
chers frères dans l’épiscopat et le sacerdoce,
chers religieux et religieuses,
chers séminaristes et chers fidèles laïcs,Merci Monseigneur N’Koué pour vos belles paroles, et merci cher séminariste pour les vôtres qui sont si accueillantes et déférentes. C’est une grande joie pour moi de me retrouver au milieu de vous ici, à Ouidah, et plus particulièrement dans ce séminaire mis sous la protection de sainte Jeanne d’Arc et dédié à saint Gall, homme aux vertus éclatantes, moine désireux de perfection, pasteur plein de douceur et d’humilité. Quoi de plus noble que d’avoir comme modèle sa figure, ainsi que celle de Monseigneur Louis Parisot, apôtre infatigable des pauvres et promoteur du clergé local, celle du Père Thomas Moulero, premier prêtre du Dahomey d’antan, et celle du Cardinal Bernardin Gantin, fils éminent de votre terre et humble serviteur de l’Église ?
Notre rencontre de ce matin me donne l’occasion de vous exprimer directement ma gratitude pour votre engagement pastoral. Je rends grâce à Dieu pour votre zèle, malgré les conditions parfois difficiles dans lesquelles vous êtes appelés à témoigner de son amour. Je le remercie pour tant d’hommes et de femmes qui ont annoncé l’Évangile en terre béninoise, comme dans toute l’Afrique.
Tout à l’heure, je vais signer l’Exhortation apostolique post-synodale Africae munus. Il y sera question de paix, de justice et de réconciliation. Ces trois valeurs s’imposent comme un idéal évangélique fondamental à la vie baptismale et elles requièrent une saine acceptation de votre identité de prêtre, de personne consacrée et de fidèle laïc.
Chers prêtres, la responsabilité de la promotion de la paix, de la justice et de la réconciliation, vous incombe d’une manière toute particulière. À cause de l’Ordre sacré reçu et des Sacrements célébrés, vous êtes appelés en effet à être des hommes de communion. De même que le cristal ne retient pas la lumière, mais la réfléchit et la redonne, de même le prêtre doit laisser transparaître ce qu’il célèbre et ce qu’il reçoit. Je vous encourage donc à laisser transparaître le Christ dans votre vie par une vraie communion avec l’Évêque, par une réelle bonté pour vos confrères, par une profonde sollicitude pour chaque baptisé et par une grande attention pour toute personne. En vous laissant modeler par le Christ, vous ne substituerez jamais à la beauté de votre être sacerdotal des réalités éphémères parfois malsaines que la mentalité contemporaine tente d’imposer à toutes les cultures. Je vous exhorte, chers prêtres, à ne pas sous-estimer la grandeur insondable de la grâce divine déposée en vous et qui vous habilite à vivre au service de la paix, de la justice et de la réconciliation.
Chers religieux et religieuses, de vie active ou contemplative, la vie consacrée est une suite radicale de Jésus. Que votre choix inconditionnel du Christ vous conduise à un amour sans frontière pour le prochain! La pauvreté et la chasteté vous rendent vraiment libres pour obéir inconditionnellement au seul Amour qui, quand il vous saisit, vous porte à le répandre partout. Pauvreté, obéissance et chasteté creusent en vous la soif de Dieu et la faim de sa Parole, qui, en grandissant, se muent en faim et soif pour servir le prochain en mal de justice, de paix et de réconciliation. Fidèlement vécus, les conseils évangéliques vous transforment en frère universel ou en sœur de tous, et vous aident à marcher résolument sur la voie de la sainteté. Vous y arriverez si, convaincus que, pour vous, vivre, c’est le Christ (cf. Ph 1, 21), vous faites de vos communautés des reflets de la gloire de Dieu et des lieux où vous n’avez de dettes envers personne, sinon celle de l’amour mutuel (cf. Rm 13, 8). Par vos charismes propres vécus avec un esprit d’ouverture à la catholicité de l’Église, vous pourrez contribuer à une expression harmonieuse de l’immensité des dons divins au service de toute l’humanité !
M’adressant maintenant à vous, chers séminaristes, je vous encourage à vous mettre à l’école du Christ pour acquérir les vertus qui vous aideront à vivre le sacerdoce ministériel comme le lieu de votre sanctification. Sans la logique de la sainteté, le ministère n’est qu’une simple fonction sociale. La qualité de votre vie future dépend de la qualité de votre relation personnelle avec Dieu en Jésus-Christ, de vos sacrifices, de l’heureuse intégration des exigences de votre formation actuelle. Face aux défis de l’existence humaine, le prêtre d’aujourd’hui comme celui de demain – s’il veut être un témoin crédible au service de la paix, de la justice et de la réconciliation – doit être un homme humble et équilibré, sage et magnanime. Après 60 ans de vie sacerdotale, je peux vous confier, chers séminaristes, que vous ne regretterez pas d’avoir accumulé durant votre formation des trésors intellectuels, spirituels et pastoraux.
Quant à vous, chers fidèles laïcs qui, au cœur des réalités quotidiennes de la vie, êtes appelés à être le sel de la terre et la lumière du monde, je vous exhorte à renouveler vous aussi votre engagement pour la justice, la paix et la réconciliation. Cette mission requiert d’abord une foi en la famille bâtie selon le dessein de Dieu et une fidélité à l’essence même du mariage chrétien. Elle exige aussi que vos familles soient comme de véritables « églises domestiques ». Grâce à la force de la prière, « la vie personnelle et familiale se transforme et s’améliore, le dialogue s’enrichit, la foi se transmet aux enfants, la joie d’être ensemble s’amplifie, le foyer se rassemble et se consolide sans cesse » (Message pour la rencontre mondiale des familles à Mexico, le 17 janvier 2009, n. 3). En faisant régner dans vos familles l’amour et le pardon, vous contribuerez à l’édification d’une Église belle et forte, et à l’avènement de plus de justice et de paix dans la société entière. En ce sens, je vous encourage, chers parents, à avoir un respect profond pour la vie et à témoigner devant vos enfants de valeurs humaines et spirituelles. Et il me plaît de rappeler ici que, voici 10 ans, le Pape Jean-Paul II a fondé à Cotonou une section pour l’Afrique francophone de l’Institut qui porte son nom, afin de contribuer à la réflexion théologique et pastorale sur le mariage et la famille. Enfin, j’exhorte spécialement les catéchistes, ces vaillants missionnaires au cœur des réalités les plus humbles, à offrir toujours, avec une espérance et une détermination indéfectibles, leur aide singulière et absolument nécessaire à l’expansion de la foi dans la fidélité à l’enseignement de l’Église (cf. Ad gentes, n. 17).
Pour conclure mon entretien avec vous, je voudrais vous exhorter tous à une foi authentique et vivante, fondement inébranlable d’une vie chrétienne sainte et au service de l’édification d’un monde nouveau. L’amour pour le Dieu révélé et pour sa Parole, l’amour pour les sacrements et pour l’Église, sont un antidote efficace contre des syncrétismes qui égarent. Cet amour favorise une juste intégration des valeurs authentiques des cultures dans la foi chrétienne. Il libère de l’occultisme et vainc les esprits maléfiques, car il est mû par la puissance même de la Sainte Trinité. Vécu profondément, cet amour est aussi un ferment de communion qui brise toute barrière, favorisant ainsi l’édification d’une Église dans laquelle il n’y a pas de ségrégation entre les baptisés, car tous ne font qu’un dans le Christ Jésus (cf. Ga 3, 28). Avec grande confiance, je compte sur chacun de vous, prêtres, religieux et religieuses, séminaristes et fidèles laïcs, pour faire vivre une telle Église. En gage de ma proximité spirituelle et paternelle, et vous confiant à la Vierge Marie, j’invoque sur vous tous, sur vos familles, les jeunes et les malades, l’abondance des Bénédictions divines !
Photo courtoisie de CNS