Le 11 septembre ou comment distinguer le vrai sens du martyre

par le père Thomas Rosica, c.s.b.,
p.-d.g. Télévision Sel + Lumière

Le 11 septembre marque le septième anniversaire des attentats terroristes de New York, Washington et de la Pennsylvanie. Alors que l’attention des médias se penche de nouveau sur ses journées terribles et sur les cerveaux de tels actes de terreur et de violence qui ont plongé le monde dans l’état de guerre et de peur actuel, je partage ici quelques considérations sur le sens du martyre, un mot commun de notre vocabulaire, mais un mot mal compris, surtout à la lumière de ce qui s’est passé il y a de cela sept ans.

Ceux qui ont perpétré les attentats de 2001 affirmaient le faire ‘au nom de Allah’ et se déclaraient martyrs au nom d’une juste cause qui les conduirait à la gloire. Ici, le point n’est pas que des kamikazes ‘soient’ ou ‘ne soient pas’ vraiment des martyrs, mais bien que des gens les adulent comme tels… qu’ils soient autoproclamés ou publicisés, pour une cause qui est loin d’être sainte.

Dans l’Islam, les récits de martyrs datent des carnages alors que la foi prenait racine au septième siècle. Au cours du vingtième siècle, ces récits devinrent associés de plus en plus à des mouvements radicaux qui lançaient des appels au martyre, comme la fraternité musulmane égyptienne, des groupes militants palestiniens et des groupes terroristes. La fin de la Guerre froide a mis à l’avant scène les tensions entre chrétiens et musulmans, y compris des face-à-face interreligieux et l’assassinat de sept moines Français par des militants islamistes en Algérie en 1996. Bien que de tels cas soient toujours choquants, nous chrétiens devons faire attention que notre conception du martyre chrétien n’évolue pas en contre-attaque envers les islamistes radicaux.

Un martyr (un témoin en grec) est une personne qui, au nom de la foi chrétienne, souffre librement et patiemment la mort aux mains de persécuteurs. Les martyrs choisissent de mourir au lieu de renier leur foi par des gestes ou des paroles. Ils souffrent patiemment à l’exemple du Christ, ils ne résistent pas à leur tortionnaires, ils souffrent leur mort entre les mains de gens qui, affirmant que leurs motifs sont autres, agissent vraiment par haine envers la religion chrétienne ou certaines de ces vertus. Le martyr chrétien ne désire pas la mort ni ne la recherche pour d’autres. Le nom martyr, qui, au début de l’ère chrétienne, signifiait un témoin du Christ, était par la suite donné seulement à ceux qui ont souffert la  mort au nom de leur foi.

Dans les théologies des dernières décennies, le prophète, le radical et le libérationniste étaient de toutes  les tribunes. Par exemple, des prêtres et des religieuses catholiques tués pour leur engagement dans diverses luttes liées à la justice sociale ont eu énormément d’attention. Toutefois, lorsque les luttes au nom de la justice sociale deviennent le test idéologique pour la vénération de martyrs et de saint, il nous faut pauser des questions plus importantes. Nous courrons le risque de dire que la martyrologie du vingtième et vingt-et-unième siècle est une apologie du politiquement correct : il y a des martyrs, puis il y a des martyrs ‘politiquement intéressés’. Une telle vision manifeste une certaine arrogance et de la condescendance envers ceux et celles qui meurent simplement pour la proclamation et la défense de leur foi, sans la rédemption de quelque mérite politique.

L’ère du martyre chrétien n’est pas révolue. Plus que tout autre, le vingtième siècle fut celui du martyre chrétien. Et le phénomène se poursuit dans notre siècle. Néanmoins, nous voyons une radicalisation de ce que signifie le martyre pour certains groupes chrétiens. La lutte de l’Occident contre l’Islam radical tend vers des visions de martyre religieux. Certains chrétiens semblent prêts à embrasser les connotations de ‘victime’ ou ‘héros’ qui ont teintées des déclarations musulmanes extrémistes, et chaque parti représente l’autre religion comme un persécuteur.

Nous vivons dans un climat empoisonné où plusieurs voient un siège islamique sur l’ensemble du monde chrétien. Il est beaucoup trop facile de tomber dans le piège de la ‘guerre des civilisations’ et de déformer le sens du martyre. En bout ligne, cela fait du tort à ceux et celles qui sont vraiment morts en rendant témoignage au Christ et à la foi chrétienne.

PRIÈRE DU PAPE BENOÎT XVI

Ground Zero, New York
Dimanche 20 avril 2008

O Dieu d’amour, de compassion, et de guérison,
regarde vers nous, peuple aux différentes fois et traditions,
qui nous rassemblons aujourd’hui en ce lieu,
théâtre d’une violence et d’une douleur indicibles.
Nous te demandons, dans ta bonté,
d’accorder la lumière et la paix éternelles
à tous ceux qui sont morts ici
– les héroïques secours d’urgence: 
nos pompiers, les agents de police,
les travailleurs du Samu, et le personnel de l’Autorité portuaire,
ainsi que les innocents, hommes et femmes,
qui ont été victimes de cette tragédie,
simplement parce que leur travail ou leur service
les a conduits ici le 11 septembre 2001.

Nous te demandons, dans ta miséricorde,
d’apporter la guérison à ceux qui,
à cause de leur présence ici ce jour-là,
souffrent de blessures et de maladies.
Guéris aussi la douleur des familles encore en deuil,
et tous ceux qui ont perdu des personnes chères dans cette tragédie.
Donne-leur la force de continuer à vivre avec courage et espérance.

Nous pensons aussi
à ceux qui sont morts, ont été blessés et ont perdu des proches,
le même jour au Pentagone
et à Shanksville, en Pennsylvanie. Nos cœurs sont unis aux leurs,
tandis que nos prières
embrassent leur douleur et leur souffrance.

Dieu de paix, apporte ta paix
à notre monde violent: 
paix dans le cœur de tous les hommes et de toutes les femmes,
et paix aux Nations de la terre.
Conduis à tes voies d’amour
ceux dont le cœur et l’esprit
sont consumés par la haine.

Dieu de compréhension,
submergés par l’ampleur de cette tragédie,
nous cherchons ta lumière et tes conseils
alors que nous sommes face à ces événements terribles.
Accorde à ceux dont la vie a été épargnée
de vivre en sorte que les vies perdues
n’aient pas été perdues en vain.
Réconforte-nous, console-nous,
fortifie-nous dans l’espérance,
et donne-nous la sagesse et le courage
de travailler inlassablement pour un monde
où règnent la paix et l’amour véritables,
dans les Nations et dans le cœur de chacun.

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