Ces dernières semaines, j’ai eu la chance de me rendre, accompagnée de ma femme Valérie, dans ce magnifique et lointain pays qu’est l’Île Maurice. La mère de Valérie étant d’origine mauricienne, en tant que nouveaux mariés nous avons visité oncles, tante, grand-mère et grand-père. Outre les paysages merveilleux et des repas aussi copieux qu’épicés, j’ai pu être en contact avec une culture très différente de la mienne. Malgré un français compris et parlé par la majeure partie de la population, c’est surtout le créole qui y est parlé. Aussi non seulement mes repères linguistiques furent altérés mais également mes références religieuses. En effet, l’Île Maurice est composée de plusieurs appartenances religieuses comme l’Hindouisme, l’Islam, le culte Tamoul, etc. Je peux vous assurer qu’il est très dépaysant d’entendre le chant du coq le matin accompagné de l’appel à la prière musulmane suivi de chants hindous du temple du coin de la rue ! Ce paysage religieux très hétéroclite est heureusement vécu dans un esprit très paisible où la cohabitation ne pose pas de problème majeur.
De son côté, l’Église catholique regroupe une bonne partie de la population (environ 31%). On peut donc y voir une multitude d’églises parsemant tout le territoire mauricien. Ces dernières montrent aussi la riche tradition catholique de ce pays où la foi a fait son apparition il y a plusieurs siècles avec les colonisations successives des Hollandais, des Français et des Anglais. Cette riche présence chrétienne se manifeste aussi chez certains personnages qui ont marqué la vie des habitants de l’Île jusqu’à aujourd’hui. Le témoin du Christ le plus connu est sans aucun doute le bienheureux Père Jacques-Désiré Laval c.s.s. La famille de ma femme étant catholique- son grand-père était même l’horloger officiel de la
cathédrale Saint-Louis de Port Louis-, une visite au sanctuaire dédié au Père Laval était incontournable. C’est ainsi que j’ai fait la rencontre d’un personnage fascinant.
Il est né à Croth en France en 1803. Après des études de médecine, il décida d’entrer au séminaire et fut ainsi ordonné prêtre en 1838 dans la chapelle du Séminaire de Saint-Sulpice de Paris. Il fut ensuite rapidement envoyé comme desservant d’une petite paroisse à Pinterville. C’est dans ce lieu modeste qu’il appris l’amour des pauvres. Cela allait le préparer à répondre à l’appel à la vie missionnaire à l’intérieur de la Congrégation du Saint-Esprit. C’est ainsi que notre bienheureux père Laval s’embarqua sur un navire pour un voyage de cent jours qui l’amena de l’autre côté de l’Afrique au milieu de l’océan indien. Il arriva à l’Île Maurice en 1841, deux ans à peine après l’abolition de l’esclavage.
C’est là, qu’il voua toutes ses énergies à l’évangélisation de cette population, à la fois, marquée par tant de souffrances et à l’aube de l’apprentissage de cette liberté finalement retrouvée. C’est surtout à l’éducation et à la catéchèse qu’il consacra son attention. Il avait une conscience aigüe de la responsabilité qui incombe à celui qui devient chrétien. Il ne baptisait donc pas les gens à la légère mais seulement après une bonne préparation et lorsque les catéchumènes pouvaient démontrer qu’ils avaient bien assimilés les éléments essentiels de la Foi dans leurs vies. La célébration des sacrements était aussi au cœur de sa vie et de son ministère. Le père Laval passait effectivement plusieurs heures par jour à la prière. Il était conscient que la relation au Christ était le noyau d’où il tirait les forces nécessaires à cette
lourde tâche mais également la source d’où allait jaillir les nombreux fruits dont nous sommes toujours témoins aujourd’hui.
Les vertus héroïques de ce religieux sont aujourd’hui reconnues par l’Église universelle. C’est ainsi que Jean-Paul II allait présider la cérémonie qui allait faire de lui le premier Bienheureux de son pontificat le 29 avril 1979. Dans son homélie, nous voyons l’intérêt du saint Pape pour ce pauvre prêtre français qui rayonnait de la lumière du Christ au bout du monde par l’amour intense qu’il avait pour ceux que Dieu lui avait confiés. À nous qui sommes appelés, à l’invitation du pape François, à prendre de plus en plus conscience du caractère missionnaire de notre vocation chrétienne, le père Laval peut nous inspirer la même ardeur et la confiance que Dieu sera toujours à nos côtés. Comme le disait saint Jean-Paul II dans
son homélie à l’occasion de la béatification du père Jacques-Désiré Laval c.s.s. :
Voilà un modèle pour les évangélisateurs d’aujourd’hui. Qu’il inspire les missionnaires, et, j’ose dire, tous les prêtres, qui ont d’abord la sublime mission d’annoncer Jésus-Christ et de former à la vie chrétienne ! Qu’il soit, à un titre particulier, la joie et le stimulant de tous les religieux spiritains, qui n’ont cessé d’implanter l’Église, notamment en terre africaine, et y œuvrent avec tant de générosité. Que l’exemple de Père Laval encourage tous ceux qui, sur le continent africain et ailleurs, s’efforcent de bâtir un monde fraternel, exempt de préjugés raciaux ! Que le Bienheureux Laval soit aussi la fierté, l’idéal et le protecteur de la communauté chrétienne de l’Ile Maurice, si dynamique aujourd’hui, et de tous les Mauriciens !