(Image: Courtoisie Catholic News Service)
Depuis maintenant plusieurs décennies, notre monde subit des changements inédits. En effet, à la grande mobilité que nous offrent les moyens modernes de transport tel que l’avion, viennent s’ajouter les technologies de communication qui nous permettent d’être en contact avec n’importe qui, n’importe où sur la planète. À ces deux modifications majeures s’ajoute la prise de conscience toujours plus accrue de notre commune humanité ainsi que de la nécessité de la coexistence. À l’instar des deux précédents millénaires, il n’est plus possible pour quiconque de se réfugier dans un milieu social et culturel homogène. Cette situation qui avait l’avantage d’être, à certains points de vue, plus « confortable », avait le fâcheux désavantage de nous priver du regard de l’autre qui est très souvent, facteur de progrès. De cette nouvelle réalité de la coexistence et des différents défis qui se présentent à nous Canadiens, la Conférence des évêques catholiques du Canada a pris l’initiative de publier un document intitulé « Catholiques et musulmans au Canada : croyants et citoyens dans la société ». Enfin, ce document me semble être un instrument incontournable pour relever ce que le Cardinal Tauran a appelé les trois défis du dialogue islamo chrétien: le défi de l’identité, le défi de l’altérité et le défi de la sincérité.
Le défi de l’altérité : nos différences sont sources d’enrichissement
Ce court document de huit pages présente les grandes lignes du nécessaire « pas en avant » en matière de connaissance religieuse des catholiques sur la foi de nos frères et sœurs musulmans. Citant un texte rédigé par des savants de l’Islam affirmant que « l’avenir du monde dépend de la paix entre musulmans et chrétiens », la CECC propose d’abord des informations générales sur cette « religion du livre ». Retraçant les grandes lignes de l’histoire religieuse musulmane qui est centrée sur la personnalité de son fondateur Muhammad qui « en méditant dans une caverne sur le mont Hira, reçut ce qu’il crut être des révélations divines »[4], le document donne de l’information sur ses concepts religieux fondamentaux et ce qu’il est convenu d’appeler les « cinq piliers de l’Islam »[5]. Cette partie informative ne serait pas complète sans ces importantes indications sur les subdivisions majeures de l’Islam que sont le Sunnisme, le Chiisme et le Soufisme.
Le défi de l’identité : savoir et accepter ce que nous sommes
Après ce regard sur le contenu de la foi islamique, le document explore les similitudes qu’elle peut avoir avec la foi catholique comme par exemple, la croyance en un seul Dieu, créateur et miséricordieux. Prendre conscience des éléments communs entre nous peut être l’occasion d’une redécouverte de sa propre foi, du bien fondée de cette dernière et des fruits que cette vérité a pu produire de beau dans d’autres contextes. Par exemple, s’interroger sur la façon dont les musulmans comprennent et vivent la miséricorde de Dieu pourrait éclairer notre propre expérience.
D’un autre côté, il est évident que l’Islam et le christianisme ne sont pas une même religion. En ce sens, le document de la CECC offre un portrait sommaire des grandes différences entre les deux. Prendre conscience de ces différences semble également bien répondre au défi de l’identité puisque, d’un côté, je suis en mesure de mieux comprendre les implications de ma propre foi mais également d’avoir les instruments essentiels pour vivre ma vocation missionnaire à l’intérieur du cadre du dialogue interreligieux. Tous étant appelés à connaître le Christ, connaître les pierres d’achoppement pourra me rendre plus efficace dans mon travail d’expansion du Royaume de Dieu.
Le défi de la sincérité
Selon le Cardinal Tauran, Président du conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, « les croyants ne peuvent pas renoncer à proposer leur foi, mais ils doivent le faire dans les limites du respect et de la dignité de chaque être humain ». Ce troisième défi auquel catholiques et musulmans font face nous montre la nécessité d’un dialogue constant entre nos deux communautés. En ce sens, le document Catholiques et musulmans au Canada : croyants et citoyens dans la société » propose un historique du dialogue institutionnel au niveau de l’Église universelle et de l’Église au Canada ainsi qu’une brève description théorique des buts de ce dialogue.
Proposer le dialogue avec les musulmans doit aujourd’hui porter sur ce qui, en théorie, est déjà censé être un élément commun de nos deux religions : « le caractère sacré de la dignité de la personne humaine »[8]. En ce sens, par le dialogue commun, nous devrions affirmer haut et fort que « la diffusion de la foi par la violence est contraire à la raison. Elle est contraire à la nature de Dieu et à la nature de l’âme »[9]. Selon moi, cela signifie concrètement un engagement commun en faveur des chrétiens d’Orient comme l’a fait le pape François encore cette semaine :
« J’ai souvent voulu faire entendre la voix des persécutions atroces, inhumaines et inexplicables de ceux qui – surtout parmi les chrétiens – sont victimes du fanatisme et de l’intolérance, souvent sous les yeux et dans le silence de tous ».
Je recommande grandement la lecture de ce nouveau document de la CECC sur les relations avec l’Islam. Tant par les informations fondamentales qu’il contient que par les grandes orientations qu’il propose pour l’avenir, ce document deviendra une référence que les catholiques pourront utiliser dès que le besoin se fera sentir.