Déclaration du Président de la CECC sur l’adoption récente du projet de loi C-14 qui légalise l’euthanasie et le suicide assisté

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L’adoption récente du projet de loi C-14, qui légalise l’euthanasie et le suicide assisté dans notre pays, est une décision historique déplorable qui atteste l’échec de notre gouvernement et, en effet, de notre société d’assurer une protection humaine authentique pour les personnes souffrantes et vulnérables parmi nous.

Nous vivons dans un pays où la grande majorité des mourants n’ont pas accès à des soins palliatifs ou des soins à domicile de qualité, où le taux de suicide dans plusieurs communautés autochtones atteint des niveaux alarmants, et où on suggère que la vie de personnes chroniquement malades, vulnérables ou handicapées ne mérite pas d’être vécue. Il est paradoxal et très malheureux que la loi de notre société consacre désormais l’homicide comme une manière acceptable de mettre fin à la souffrance. On ne peut qu’être stupéfait et profondément troublé de constater que notre pays est de moins en moins capable de reconnaître le caractère sacré de la vie humaine.

Nulle institution, nul individu, nulle idéologie, nulle législation n’ont le droit de menacer ou de miner le caractère sacré de la dignité de chaque personne et du don de la vie elle-même. Nous sommes appelés, en tant que société formée d’individus capables de compassion, à respecter et à protéger la vie humaine de la conception à la mort naturelle en honorant une vision de la personne humaine qui embrasse aussi bien son existence terrestre actuelle que la vie outre-tombe. Les catholiques, comme toutes les personnes de bonne volonté, ont le devoir moral et social de protéger les personnes vulnérables, de consoler celles qui souffrent et d’accompagner celles qui sont à l’article de la mort. Les évêques du Canada prient et espèrent qu’avec tous nos sœurs et frères catholiques et nos concitoyennes et concitoyens canadiens, chacune et chacun de nous et l’ensemble de notre société puissent vivre une profonde conversion du cœur et en viennent à reconnaître l’image de Dieu imprimée profondément en chaque vie humaine, quel que soit l’état de la personne, son niveau de confort, son degré de productivité ou sa contribution à la société.

La mise à mort intentionnelle d’une vie humaine – qu’il s’agisse d’une personne âgée, d’un enfant, d’un adulte vulnérable, d’un embryon ou d’une personne mourante – est un acte grave et moralement injustifiable. Notre société doit rejeter tout ce qui porte atteinte à la vie elle-même : le meurtre, le génocide, le suicide, l’avortement, l’euthanasie et l’aide médicale à mourir. La suppression délibérée de la vie humaine par une intervention directe n’a rien d’un geste humanitaire. Il faut plutôt chercher à réduire au minimum la douleur et la souffrance des personnes mourantes et de celles qui sont tentées de s’enlever la vie, et non à supprimer leur existence. Efforçons-nous d’aider les personnes malades et handicapées à trouver un sens à leur vie, même et surtout dans leur souffrance. Consolons ceux et celles qui vivent une maladie terminale ou une condition chronique par notre présence authentique, un amour humain et l’aide médicale. Comme société et en tant qu’individus, choisissons de cheminer avec eux dans leur souffrance et ne contribuons pas à mettre fin au don de la vie.

Faire de l’aide médicale au suicide un « droit » n’est ni un vrai soin ni un gage d’humanité. C’est fondamentalement une forme faussée de pitié, une déformation de la bonté envers nos frères et sœurs. La nouvelle loi laisse entendre qu’un être humain, une personne, cesse d’être une personne et perd sa dignité simplement en raison de la perte ou de la diminution de certaines capacités physiques et mentales. C’est faux. La vérité, c’est que notre propre humanité se détériore quand nous omettons de prendre soin des faibles et des mourants, et quand nous évitons délibérément de voir en eux, avec leurs maladies et leurs limites, des personnes dignes de vivre. La vraie compassion humaine consiste à partager la douleur de l’autre, à l’accompagner dans son cheminement – et non à s’en débarrasser. Le suicide assisté est une insulte à ce qu’il y a de plus noble et de plus précieux dans l’existence humaine, et constitue une injustice grave et une violation de la dignité de chaque personne humaine dont la tendance naturelle et intrinsèque est de préserver la vie. Il faut entourer nos personnes malades, mourantes, vulnérables et handicapées, d’amour et d’attention, de sollicitude et d’une compassion vraiment porteuse de vie. C’est pourquoi les soins palliatifs restent incontestablement le seul choix moral, efficace et indispensable, la seule option de vraie compassion, maintenant que notre pays s’est engagé sur ce chemin périlleux.

Saint Joseph, patron du Canada et patron de la bonne mort, priez pour nous.

Mgr Douglas Crosby, OMI
Évêque de Hamilton
Président de la Conférence des évêques catholiques du Canada

Le 27 juin 2016

Déclaration de la CECC sur la question de l’aide au suicide

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Déclaration émise par l’Assemblée plénière 2015 de la Conférence des évêques catholiques du Canada 

Hier, nous nous sommes retrouvés à l’Oratoire Saint-Joseph de Montréal pour célébrer l’Année de la vie consacrée. L’Oratoire est un lieu de prière spéciale, inspiré par le montréalais saint Frère André Bessette qui offrait espoir et guérison aux personnes dans le besoin. L’Oratoire rend hommage à Joseph, époux de Marie, mère de Jésus. Nous vénérons saint Joseph comme patron du Canada, et aussi comme patron de la bonne mort parce que Jésus et Marie étaient à ses côtés et l’ont réconforté dans les derniers moments de sa vie. Là, dans ce sanctuaire, où plusieurs ont trouvé réconfort et guérison, nous avons rendu grâce pour les milliers d’hommes et de femmes de partout au pays qui ont donné leur vie pour leurs frères et leurs sœurs par la prière, les soins de santé, l’éducation, et par d’autres formes de service et de solidarité avec les pauvres et les marginalisés.

Touchés par leur générosité exemplaire, et la façon dont ils ont protégé et promu la dignité humaine dans les nombreux secteurs de notre société, nous affirmons la longue tradition de notre pays de prendre soin des malades et des vulnérables. Nous ne pouvons pas nous retenir d’exprimer notre indignation devant la décision de la Cour suprême du Canada de créer un nouveau « droit constitutionnel » au Canada, le prétendu « droit » au suicide. Nous ne pouvons taire notre profonde consternation et déception, ni notre plein désaccord avec la décision de la Cour. Le jugement légaliserait un geste qui, depuis les temps immémoriaux, a été jugé immoral : celui d’enlever une vie innocente. De plus, il met à risque la vie des personnes vulnérables, déprimées, celles souffrant de maladie physique ou mentale, et celles ayant un handicap.

Devant la terrible souffrance que peut engendrer la maladie ou la dépression, la vraie réponse humaine devrait être de soigner, et non de tuer. Dans la même veine, la réponse à l’angoisse et à la peur qu’éprouvent les gens à la fin de la vie c’est de les accompagner, de leur offrir des soins palliatifs, et non de causer leur mort intentionnellement. Les besoins en soins palliatifs devraient préoccuper au plus haut point notre pays et ses institutions. Voilà où nos élus devraient diriger leurs énergies et leurs efforts. Voilà pourquoi nous plaidons pour que des soins de longue durée, des soins à domicile et des soins palliatifs de grande qualité soient accessibles à tous les Canadiens et Canadiennes.

Au milieu d’une campagne électorale fédérale, le silence des candidats face à la question du suicide assisté nous étonne. C’est une question si fondamentale pour notre société et son avenir. Avons-nous perdu la capacité de débattre des questions profondes de la vie qui nous touchent tous? Nos politiciens ont-ils peur d’un mot mal placé, d’un message mal interprété ou de la fluctuation d’un sondage public? Nous exhortons les citoyens de notre pays de soulever ces questions de vie et de mort avec les candidats, de provoquer un vrai débat digne de notre grand pays.

Le délai d’un an prévu par la Cour suprême est beaucoup trop court pour que ce changement fondamental dans nos lois entre en vigueur. Nous exhortons le gouvernement qui sera élu le 19 octobre à invoquer la clause nonobstant et de prolonger ce délai à cinq ans. Si jamais une décision juridique devait justifier le recours à cette clause de notre constitution, c’est celle-ci. Nous devons nous donner le temps de réfléchir avant d’agir, de considérer sérieusement les conséquences de nos gestes avant de traiter de cette question cruciale et morale.

Par ailleurs, nous devons à tout prix défendre et protéger le droit de la conscience des hommes et des femmes engagés dans les professions aidantes. Exiger d’un médecin qu’il tue un patient est toujours inacceptable. C’est un affront à la conscience et à la vocation des travailleurs de la santé que de leur demander de collaborer à la mise à mort intentionnelle d’un patient, même en le référant à un collègue. Le respect que l’on doit à nos médecins à cet égard doit s’étendre à toute personne engagée dans les soins de santé et qui travaille dans les établissements de notre société.

À titre d’évêques catholiques, notre discours est animé par la raison, le dialogue éthique, nos convictions religieuses et notre respect profond de la dignité de la personne humaine. Notre position est inspirée par des milliers d’années de réflexions et par nos actions en tant que chrétiens à la suite de Jésus, qui a manifesté ce que veut dire aimer, servir et accompagner les autres. Sa réponse à la souffrance d’autrui a été de souffrir avec l’autre, non pas de le tuer. Lui-même a accueilli la souffrance dans sa vie comme un chemin de don, de générosité, de miséricorde. Il n’est pas nécessaire d’être croyant pour reconnaître en sa vie et en ses gestes un exemple insigne d’humanité. Les valeurs de Jésus de Nazareth sont à la base de notre position en ce qui concerne la question du suicide assisté. Le Canada n’a rien à craindre en faisant siennes ces valeurs profondément humaines et vivifiantes.

C’est dans cet esprit de collaboration pour bâtir une société plus compatissante, plus respectueuse de la dignité de la vie humaine, plus juste et plus généreuse que nous lançons ce cri du cœur. À l’exemple de l’humble témoignage du saint Frère André, nous invitons tous les Canadiens et Canadiennes à bâtir une société qui respecte la dignité de chaque personne. Puisse notre appel être écouté avec respect, attention et ouverture.

Les évêques catholiques du Canada
Le 18 septembre 2015

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