Chemin de Croix avec les jeunes au « Parque Eduardo VII » : Allocution du Saint-Père | Journées Mondiales de la Jeunesse à Lisbonne 2023

Vendredi, le 4 août 2023
Le quatrième jour des Journées Mondiales de la Jeunesse à Lisbonne, le pape François a prononcé une allocution lors du chemin de Croix au « Parque Eduardo VII ».

Voici le texte intégral :

ALLOCUTION DU PAPE FRANÇOIS

Chemin de Croix avec les jeunes
Parque Eduardo VII, Lisbonne
Vendredi, le 4 août 2023

Aujourd’hui, vous allez marcher avec Jésus. Jésus est le Chemin et nous marcherons avec Lui, parce que Lui a marché. Lorsqu’Il était parmi nous, Jésus a marché, Il a marché en guérissant les malades, en prenant soin des pauvres, en rendant la justice… Il a marché en prêchant, en enseignant. Jésus marche, mais le chemin le plus gravé dans nos cœurs est le chemin du Calvaire, le chemin de la Croix. Et aujourd’hui, vous, nous, moi aussi, nous renouvellerons par la prière le chemin de la Croix. Nous regarderons Jésus passer et nous marcherons avec Lui.

Le chemin de Jésus, c’est Dieu qui sort de lui-même, Il sort de Lui-même pour marcher parmi nous. Ce que nous entendons si souvent à la messe : « Et le Verbe s’est fait chair et a marché parmi nous ». Vous vous souvenez ? Le Verbe s’est fait homme et a marché parmi nous. Et cela, Il le fait par amour. Il le fait par amour. Et la croix qui accompagne toutes les Journées Mondiales de la Jeunesse est l’icône, la figure de cette marche. La Croix est le signe le plus grand du plus grand amour, l’amour avec lequel Jésus veut étreindre notre vie. La nôtre ? Oui, la tienne, la tienne, la tienne, celle de chacun de nous. Jésus marche pour moi. Nous devons tous le dire. Jésus entreprend ce chemin pour moi, pour donner sa vie pour moi. Et personne n’a plus d’amour que celui qui donne sa vie pour ses amis, celui qui donne sa vie pour les autres. N’oubliez pas ceci : personne n’a plus d’amour que celui qui donne sa vie, c’est ce que Jésus a enseigné. C’est pourquoi, lorsque nous regardons la Croix, qui est si douloureuse, si dure, nous voyons la beauté de l’amour qui donne sa vie pour chacun de nous.

Une personne très croyante a dit une phrase qui m’a beaucoup frappé. Elle a dit : « Seigneur, par ton ineffable agonie, je peux croire en l’amour. Seigneur, par ton ineffable agonie, je peux croire en l’amour ».

Et Jésus marche, mais Il attend quelque chose, Il attend notre compagnie, Il attend que nous regardions… je ne sais pas, Il attend d’ouvrir les fenêtres de mon âme, de ton âme, de l’âme de chacun de nous. Qu’elles sont laides les âmes fermées, qui sèment à l’intérieur et sourient à l’intérieur ! Elles n’ont pas de sens. Jésus marche et attend avec son amour, attend avec sa tendresse, pour nous consoler, pour sécher nos larmes.

Maintenant je vous pose une question, mais ne répondez pas à haute voix : chacun répond en lui-même. Est-ce que je pleure parfois ? Y a-t-il des choses dans la vie qui me font pleurer ? Nous avons tous pleuré dans la vie, et nous pleurons encore. Et Jésus est là avec nous, Il pleure avec nous, parce qu’Il nous accompagne dans l’obscurité qui provoque nos pleurs.

Maintenant je ferai un peu silence, et que chacun dise à Jésus ce qui le fait pleurer dans la vie ; chacun de nous le lui dit à présent, en silence.

[moment de silence].

Jésus, avec sa tendresse, essuie nos larmes cachées. Jésus veut combler de sa proximité notre solitude. Que les moments de solitude sont tristes ! Et Lui il est là, Il veut combler cette solitude. Jésus veut combler nos peurs, tes peurs, mes peurs. Ces sombres peurs, Il veut les remplir de sa consolation ; et Il attend de nous pousser à prendre le risque d’aimer. Parce que, vous le savez, vous le savez mieux que moi: aimer est risqué. Il faut prendre le risque d’aimer. C’est un risque, mais il vaut la peine d’être pris, et Il nous accompagne en cela. Toujours Il nous accompagne. Toujours Il marche. Toujours, durant la vie, Il est avec nous.

Je ne veux pas dire beaucoup plus de choses. Aujourd’hui, nous ferons le chemin avec Lui, le chemin de sa souffrance, le chemin de nos soucis, le chemin de nos solitudes.

Maintenant, un moment de silence, et que chacun pense à sa souffrance, à son souci, à ses misères. N’ayez pas peur, pensez-y, et pensez aussi au désir de l’âme de retrouver le sourire.

[moment de silence].

Et Jésus marche jusqu’à la Croix, Il meurt sur la Croix, pour que notre âme puisse sourire. Amen.

Texte reproduit avec l’aimable autorisation de la Libreria Editrice Vaticana

Chemin de Croix du Vendredi Saint avec le pape François : Méditations

(CNS photo/Paul Haring)

Vendredi Saint
La Passion du Seigneur

 

Chemin de Croix
Présidé par le pape François

 

Colisée de Rome, 19 avril 2019 

 

Médiations par Sœur Eugenia Bonetti
« Avec le Christ et avec les femmes sur le chemin de la croix »

40 jours sont maintenant passés depuis que, avec l’imposition des cendres, nous avons débuté le parcours du carême. Nous avons revécu aujourd’hui les dernières heures de la vie terrestre du Seigneur Jésus, jusqu’au moment où, suspendu sur la croix, il a crié son : « consummatum est », « tout est accompli ». Rassemblés en ce lieu, dans lequel des milliers de personnes ont subi dans le passé le martyre pour être restées fidèles au Christ, nous voulons maintenant parcourir ce « chemin douloureux » unis à tous les pauvres, aux exclus de la société et aux nouveaux crucifiés de l’histoire d’aujourd’hui, victimes de nos fermetures, des pouvoirs et des législations, de l’aveuglement et de l’égoïsme, mais surtout de notre cœur endurci par l’indifférence. Cette dernière, une maladie dont nous aussi, chrétiens, nous souffrons. Puisse la Croix du Christ, instrument de mort mais aussi de vie nouvelle, qui tient unis dans une étreinte terre et ciel, Nord et Sud, Est et Ouest, illuminer les consciences des citoyens, de l’Église, des législateurs et de tous ceux qui se réclament disciples du Christ, afin que la Bonne Nouvelle de la rédemption parvienne à tous.

 

Première station
Jésus est condamné à mort 

« Ce n’est pas en me disant : “Seigneur, Seigneur !” qu’on entrera dans le royaume des Cieux, mais c’est en faisant la volonté de mon Père qui est aux cieux » (Mt 7, 21) 

Réflexion : 

Seigneur, qui, plus que Marie ta Mère, a su être ton disciple ? Elle a accepté la volonté du Père même dans le moment le plus sombre de sa vie et, avec le cœur meurtri, elle est restée à tes côtés. Celle qui t’a engendré, porté dans son sein, accueilli dans les bras, nourri avec amour et accompagné durant ta vie terrestre, ne pouvait pas ne pas parcourir le même chemin du Calvaire et partager avec Toi le moment le plus dramatique et le plus douloureux de ton existence ainsi que de la sienne. 

Prière : 

Seigneur, combien de mamans encore aujourd’hui vivent l’expérience de ta Mère et pleurent pour le sort de leurs filles et de leurs fils ? Combien, après les avoir engendrés et leur avoir donné la vie, les voient souffrir et mourir de maladies, de manque de nourriture, d’eau, de soins médicaux et d’opportunités de vie et d’avenir ? Nous te prions pour ceux qui assument des rôles de responsabilité, afin qu’ils écoutent le cri des pauvres qui monte vers toi de toutes les parties du globe. Cri de toutes ces jeunes vies, qui, de diverses manières, sont condamnées à mort par l’indifférence engendrée par des politiques exclusives et égoïstes. Qu’à aucun de tes enfants ne manquent le travail et le nécessaire pour une vie honnête et digne. 

Prions ensemble en disant…
“ Seigneur, aide-nous à faire ta volonté ” :
Dans les moments de difficulté et d’abattement,
Dans les moments de souffrance physique et morale,
Dans les moments d’obscurité et de solitude. 

 

Deuxième station
Jésus prend la croix

 « Celui qui veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix chaque jour et qu’il me suive »(Lc 9, 23) 

Réflexion : 

Seigneur Jésus, il est facile de porter le crucifix au cou ou de l’accrocher comme ornement sur les murs de nos belles cathédrales ou de nos maisons, mais il n’est pas aussi facile de rencontrer et de reconnaître les nouveaux crucifiés d’aujourd’hui : les sans domicile fixe, les jeunes sans espérance, sans travail et sans perspective, les immigrants contraints à vivre dans les baraques aux confins de nos sociétés, après avoir affronté des souffrances inouïes. Malheureusement ces campements, sans sécurité, sont brûlés et rasés, ainsi que les rêves et les espérances de milliers de femmes et d’hommes marginalisés, exploités, oubliés. Combien d’enfants subissent la discrimination à cause de leur provenance, de la couleur de leur peau ou de leur classe sociale ! Combien de mamans endurent l’humiliation de voir leurs enfants ridiculisés et exclus des opportunités de ceux qui ont le même âge et leurs compagnons d’école. 

Prière : 

Nous te rendons grâce, Seigneur, parce que tu nous donné l’exemple par ta vie de la façon dont se manifeste l’amour vrai et désintéressé pour le prochain, particulièrement pour les ennemis ou simplement pour celui qui n’est pas comme nous. Seigneur Jésus, combien de fois, nous aussi, comme tes disciples, nous nous sommes déclarés ouvertement tes adeptes durant le temps où tu faisais des guérisons et des prodiges, quand tu nourrissais la foule et pardonnais les péchés. Mais cela n’a pas été aussi facile de te comprendre quand tu parlais de service et de pardon, de renoncement et de souffrance. Aide-nous à savoir mettre toujours notre vie au service des autres. 

Prions ensemble en disant…
“ Seigneur, aide-nous à espérer ” :
Quand nous nous sentons abandonnés et seuls,
Quand il est difficile de suivre tes pas,
Quand le service des autres devient difficile. 

 

Troisième station
Jésus tombe pour la première fois 

« En fait, c’étaient nos souffrances qu’il portait, nos douleurs dont il était chargé » (Is 53,4).

Réflexion : 

Seigneur Jésus, sur la route escarpée qui conduit au Calvaire, tu as voulu expérimenter la fragilité et la faiblesse humaine. Que serait l’Église aujourd’hui sans la présence et la générosité de tant de volontaires, les nouveaux samaritains du troisième millénaire ? Dans une nuit glaciale de janvier, sur une route, à la périphérie de Rome, trois Africaines, un peu plus grandes que des enfants, blotties à même le sol, réchauffaient leurs jeunes corps à moitié nus autour d’un brasier. Quelques jeunes adolescents, pour s’amuser, passant en voiture, ont jeté des matériaux inflammables sur le feu, les brûlant gravement. Au même moment, l’une des nombreuses unités routières de volontaires est passée par là et est venue à leur secours en les transportant à l’hôpital, pour ensuite les accueillir dans une maison de famille. Combien de temps a-t-il été et sera-t-il nécessaire pour que ces filles guérissent non seulement des brûlures de leurs membres, mais aussi de la douleur et de l’humiliation de se retrouver avec un corps mutilé et défiguré pour toujours ? 

Prière : 

Seigneur, nous te rendons grâce pour la présence de tant de nouveaux samaritains du troisième millénaire qui, encore aujourd’hui, vivent l’expérience de la rue, se penchant avec amour et compassion sur les nombreuses blessures physiques et morales de celui qui, chaque nuit, vit la peur et la terreur de l’obscurité, de la solitude et de l’indifférence. Seigneur, malheureusement, tant de fois aujourd’hui, nous ne savons plus percevoir celui qui est dans le besoin, voir celui qui est blessé et humilié. Souvent, nous revendiquons nos droits et nos intérêts, mais nous oublions ceux des pauvres et ceux des derniers de la file. Seigneur, fais- nous la grâce de ne pas rester insensibles à leurs pleurs, à leurs souffrances, à leur cri de douleur pour que, à travers eux, nous puissions te rencontrer.  

Prions ensemble en disant…
“Seigneur, aide-nous à aimer ” :
Quand il est difficile d’être des samaritains,
Quand nous avons du mal à pardonner,
Quand nous ne voulons pas voir les souffrances des autres. 

 

Quatrième station
Jésus rencontre Marie Sa Mère 

« Et toi, ton âme sera traversée d’un glaive – : ainsi seront dévoilées les pensées qui viennent du cœur d’un grand nombre » (cf. Lc 2, 35) 

Réflexion : 

Marie, le vieux Syméon t’avait prédit, quand tu as présenté le petit Jésus au temple pour le rite de la purification, qu’une épée transpercerait ton cœur. Maintenant, c’est le moment de renouveler ton fiat, ton adhésion à la volonté du Père même si accompagner un fils au supplice, traité comme un malfaiteur, provoque une douleur insupportable. Seigneur, prends pitié des nombreuses, trop nombreuses mamans qui ont laissé partir leurs jeunes filles vers l’Europe dans l’espérance d’aider leurs familles vivant dans la pauvreté extrême, alors qu’elles ont trouvé humiliations, mépris et parfois aussi la mort. Comme la jeune Tina[1], tuée d’une manière barbare sur la route à seulement 20 ans, laissant une fillette de quelques mois. 

Prière : 

Marie, en ce moment, tu vis le même drame de nombreuses mères qui souffrent pour leurs enfants qui sont partis vers d’autres pays dans l’espérance de trouver des opportunités pour un avenir meilleur pour eux et leurs familles, mais qui, malheureusement, sont confrontés à l’humiliation, au mépris, à la violence, à l’indifférence, à la solitude et même à la mort. Donne-leur force et courage. 

Prions ensemble en disant…
“Seigneur, fais que nous sachions donner toujours soutien et réconfort, et être présents pour offrir un appui ” :
Pour consoler les mamans qui pleurent le sort de leurs enfants,
Pour celui qui, dans la vie, a perdu toute espérance,
Pour celui qui, chaque jour, subit violence et mépris. 

 

Cinquième station
Le Cyrénéen aide Jésus à porter la croix 

« Portez les fardeaux les uns des autres : ainsi vous accomplirez la loi du Christ » (Ga 6, 2) 

Réflexion : 

Seigneur Jésus, sur le chemin du Calvaire, tu as ressenti le poids et la fatigue de porter cette rugueuse croix de bois. En vain, tu as espéré le geste d’aide de la part d’un ami, de l’un de tes disciples, de l’une des nombreuses personnes dont tu as soulagé les souffrances. Malheureusement, seulement un inconnu, Simon de Cyrène, par obligation, t’a donné un coup de main. Où sont-ils aujourd’hui les nouveaux cyrénéens du troisième millénaire ? Où les trouvons-nous ? Je voudrais rappeler l’expérience d’un groupe de religieuses de différentes nationalités, provenances et appartenances avec lesquelles, depuis plus de dix-sept années, chaque samedi, nous visitons à Rome un centre pour femmes immigrées dépourvues de papiers, des femmes, souvent jeunes, dans l’attente de connaître leur destin, un équilibre instable entre expulsion et possibilité de rester. Que de souffrances nous rencontrons, mais aussi que de joies chez ces femmes se trouvant devant des religieuses provenant de leurs pays, qui parlent leurs langues, qui essuient leurs larmes, qui partagent des moments de prière et de fête, qui rendent moins durs les longs mois vécus entre barres de fer et asphaltes en béton ! 

Prière : 

Pour tous les cyrénéens de notre histoire. Afin que ne diminue jamais en eux le désir de t’accueillir sous l’apparence des derniers de la terre, conscients qu’en accueillant les derniers de notre société, nous t’accueillons. Que ces samaritains soit porte-paroles des sans-voix. 

Prions ensemble en disant…
“Seigneur, aide-nous à porter notre croix ” :
Quand nous sommes fatigués et découragés,
Quand nous ressentons le poids de nos faiblesses,
Quand tu nous demandes de partager les souffrances des autres. 

 

Sixième station
Véronique essuie le visage de Jésus 

« Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » (Mt 25, 40) 

Réflexion : 

Pensons aux enfants, dans plusieurs parties du monde, qui ne peuvent pas aller à l’école et qui sont, au contraire, exploités dans les mines, les plantations, la pêche, vendus et achetés par les trafiquants de chair humaine, pour les transplantations d’organes, mais aussi utilisés et exploités sur nos routes par plusieurs, chrétiens y compris, qui ont perdu le sens du caractère sacré des autres et d’eux-mêmes. Comme une mineure au petit corps gracieux, rencontrée une nuit à Rome, que des hommes à bord de voitures luxueuses, exploitaient à tour de rôle. Et pourtant, elle pouvait avoir l’âge de leurs filles… Quel déséquilibre peut créer cette violence dans la vie de nombreuses jeunes filles qui expérimentent seulement l’abus, l’arrogance et l’indifférence de celui qui, nuit et jour, les cherche, les utilisent, les exploitent pour ensuite les jeter de nouveau sur la route en proie au prochain marchand de vies ! 

Prière : 

Seigneur Jésus, rends limpides nos yeux pour que nous sachions découvrir ton visage dans nos frères et sœurs, en particulier dans tous ces enfants qui, dans plusieurs parties du monde, vivent dans l’indigence et dans le délabrement. Enfants privés de la possibilité du droit à une enfance heureuse, à une éducation scolaire, à l’innocence. Créatures utilisées comme des marchandises de peu de valeur, vendues et achetées à volonté. Seigneur, nous te prions d’avoir pitié et compassion de ce monde malade et de nous aider à redécouvrir la beauté de notre dignité et de celle des autres comme êtres humains, créés à Ton image et ressemblance. 

Prions ensemble en disant…
“Seigneur, aide-nous à voir ” :
Le visage des enfants innocents qui demandent de l’aide,
Les injustices sociales,
La dignité que chaque personne porte en soi et qui est piétinée. 

 

Septième station
Jésus tombe pour la deuxième fois 

« Insulté, il ne rendait pas l’insulte, dans la souffrance, il ne menaçait pas, mais il s’abandonnait à Celui qui juge avec justice » (1P 2, 23) 

Réflexion : 

Combien de vengeances dans notre temps ! La société actuelle a perdu la grande valeur du pardon, don par excellence, soin pour les blessures, fondement de la paix et de la coexistence humaine. Dans une société où le pardon est vécu comme une faiblesse, Toi, Seigneur, tu nous demandes de ne pas nous arrêter à l’apparence. Et tu ne le fais pas avec les paroles, mais plutôt par l’exemple. A celui qui te harcèle, tu réponds : « Pourquoi me persécutes-tu ? », sachant bien que la justice vraie ne peut jamais se baser sur la haine et sur la vengeance. Rends-nous capables de demander et de donner le pardon. 

Prière : 

« Père, pardonne-leur parce qu’ils ne savent pas ce qu’ils font » (Lc 23,34). Seigneur, Toi aussi, tu as ressenti le poids de la condamnation, du refus, de l’abandon, de la souffrance infligée par des personnes qui t’avaient rencontré, accueilli et suivi. Dans la certitude que le Père ne t’avait pas abandonné, tu as trouvé la force d’accepter sa volonté en pardonnant, en aimant et en offrant espérance à celui qui, comme Toi aujourd’hui, marche sur la même route de l’insulte, du mépris, de la dérision, de l’abandon, de la trahison et de la solitude. 

Prions ensemble en disant…
“Seigneur, aide-nous à réconforter ” :
Celui qui se sent offensé et insulté,
Celui se sent trahi et humilié,
Celui qui se sent jugé et condamné. 

 

Huitième station
Jésus rencontre les femmes 

« Filles de Jérusalem, ne pleurez pas sur moi ! Pleurez plutôt sur vous-mêmes et sur vos enfants ! » (Lc 23, 28). 

Réflexion : 

La situation sociale, économique et politique des migrants et des victimes de la traite d’êtres humains nous interpelle et nous secoue. Nous devons avoir le courage, comme l’affirme avec force le Pape François, de dénoncer la traite d’êtres humains comme un crime contre l’humanité. Nous tous, surtout les chrétiens, nous devons grandir dans la conscience que nous sommes tous responsables du problème et que nous pouvons et devons tous faire partie de la solution. À tous, mais surtout à nous les femmes, il faut le défi du courage. Le courage de savoir voir et d’agir, individuellement et collectivement. Ce n’est qu’en unissant nos pauvretés qu’elles pourront devenir une grande richesse, capable de changer la mentalité et de soulager les souffrances de l’humanité. Le pauvre, l’étranger, celui qui est différent ne doit pas être vu comme un ennemi à repousser ou à combattre mais, plutôt, comme un frère ou une sœur à accueillir et à aider. Ils ne sont pas un problème, mais au contraire une précieuse ressource pour nos villes fermées où le bien-être et la consommation n’allègent pas la lassitude et la fatigue croissantes. 

Prière : 

Seigneur, apprends-nous à avoir ton regard. Ce regard d’accueil et de miséricorde avec lequel tu vois nos limites et nos peurs. Aide-nous à regarder ainsi les divergences d’idées, d’habitudes, de vues. Aide-nous à reconnaître que nous faisons partie de la même humanité et à promouvoir des chemins audacieux et nouveaux d’accueil de la différence, pour faire ensemble communauté, famille, paroisse et société civile. 

Prions ensemble en disant…
“Aide-nous à partager la souffrance des autres” :
De celui qui souffre à cause de la mort de personnes chères.
De celui qui peine plus à demander de l’aide et du réconfort.
De celui qui a subi des abus et des violences. 

 

Neuvième station
Jésus tombe la troisième fois 

« Maltraité, il s’humilie, il n’ouvre pas la bouche : comme un agneau conduit à l’abattoir, comme une brebis muette devant les tondeurs, il n’ouvre pas la bouche » (Is 53, 7). 

Réflexion : 

Seigneur, pour la troisième fois tu es tombé, épuisé et humilié, sous le poids de ta croix. Exactement comme beaucoup de jeunes filles, contraintes sur les routes par des groupes de trafiquants d’esclaves, qui ne résistent pas à la fatigue et à l’humiliation de voir leur propre corps jeune manipulé, abusé, détruit, avec leurs rêves. Ces jeunes femmes se sentent comme fragmentées : d’une part recherchées et utilisées, d’autre part repoussées et condamnées par une société qui refuse de voir ce type d’exploitation, causé par l’affirmation de la culture du jetable. Au cours de l’une des nombreuses nuits passées dans les rues de Rome, je cherchais une jeune récemment arrivée en Italie. Ne la voyant pas dans son groupe, je l’appelais avec insistance par son nom : ‘‘Mercy’’. Dans l’obscurité, je l’ai aperçue accroupie et endormie au bord de la route. À mon appel, elle s’est réveillée et m’a dit qu’elle n’en pouvait plus. ‘‘Je suis épuisée’’, répétait-elle… J’ai pensé à sa mère : si elle savait ce qui est arrivé à sa fille, elle pleurerait toutes ses larmes. 

Prière : 

Seigneur, que de fois nous as-tu adressé cette question gênante : ‘‘Où est ton frère ? Où est ta sœur ? ». Que de fois, nous as-tu rappelé que leur cri poignant était parvenu jusqu’à Toi ? Aide-nous à partager la souffrance et l’humiliation de tant de personnes traitées comme un rebut. C’est trop facile de condamner des êtres humains et des situations embarrassantes qui humilient notre fausse pudeur, mais il n’est pas si facile d’assumer nos responsabilités en tant qu’individus, gouvernements et aussi en tant que communautés chrétiennes. 

Prions ensemble en disant…
“Seigneur donne-nous force et courage pour dénoncer” :
Face à l’exploitation et à l’humiliation vécues par tant de jeunes,
Face à l’indifférence et au silence de beaucoup de chrétiens,
Face à des lois injustes et dénuées d’humanité et de solidarité. 

 

Dixième station
Jésus est dépouillé de ses vêtements 

« Revêtez-vous de tendresse et de compassion, de bonté, d’humilité, de douceur et de patience » (Col 3, 12). 

Réflexion :

Argent, bien-être, pouvoir. Ce sont les idoles de tous temps, également et surtout du nôtre, qui se vante d’énormes progrès dans la reconnaissance des droits de la personne. Tout peut s’acquérir, y compris le corps des mineurs, privés de leur dignité et de leur avenir. Nous avons oublié la centralité de l’être humain, sa dignité, sa beauté, sa force. Tandis que dans le monde s’élèvent des murs et des barrières, nous voulons rappeler et remercier ceux qui, dans divers rôles, ces derniers mois, ont risqué leur propre vie, surtout en Mer Méditerranée, pour sauver celle de nombreuses familles à la recherche de sécurité et d’opportunités : des êtres humains fuyant la pauvreté, les dictatures, la corruption, l’esclavage. 

Prière :

Aide-nous, Seigneur, à redécouvrir la beauté et la richesse que chaque personne et chaque peuple possèdent comme un don unique et irremplaçable provenant de Toi, à mettre au service de la société tout entière et non pour poursuivre des intérêts personnels. Nous te prions, Jésus, afin que ton exemple et ton enseignement de miséricorde et de pardon, d’humilité et de patience nous rendent un peu plus humains et, donc, plus chrétiens. 

Prions ensemble en disant…
“Seigneur, donne-nous un cœur débordant de miséricorde” :
Face à l’avidité du plaisir, du pouvoir et de l’argent,
Face aux injustices infligées aux pauvres et aux plus faibles,
Face au mirage d’intérêts personnels. 

 

Onzième station
Jésus est cloué sur la croix 

« Père, pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu’ils font » (Lc 23, 34). 

Réflexion : 

Notre société proclame l’égalité en droits et en dignité de tous les êtres humains. Mais elle pratique et tolère l’inégalité. Elle en accepte même les formes les plus extrêmes. Des hommes, des femmes et des enfants sont achetés et vendus comme des esclaves par de nouveaux marchands d’êtres humains. Les victimes de la traite sont ensuite exploitées par d’autres individus, et finalement, jetées, comme des marchandises sans valeur. Que de personnes s’enrichissent en dévorant la chair et le sang des pauvres ! 

Prière : 

Seigneur, que de personnes sont aujourd’hui encore clouées sur une croix, victimes d’une exploitation inhumaine, privées de dignité, de liberté, d’avenir. Leur appel au secours nous interpelle comme hommes et femmes, comme gouvernements, comme société et comme Église. Comment est-il possible que nous continuions à te crucifier, en nous rendant complices de la traite d’êtres humains ? Donne-nous des yeux pour voir et un cœur pour sentir les souffrances de tant de personnes qui aujourd’hui encore sont clouées sur la croix par nos styles de vie et de consommation. 

Prions ensemble en disant…
“Seigneur, prends pitié” :
Des nouveaux crucifiés d’aujourd’hui répandus sur toute la terre,
Des puissants et des législateurs de notre société,
De celui qui ne sait pas pardonner et ne sait pas aimer. 

 

Douzième station
Jésus meurt sur la croix 

« Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Mc 15, 34). 

Réflexion : 

Même toi, Seigneur, tu as senti sur la croix, le poids de la moquerie, de la dérision, des insultes, des violences, de l’abandon, de l’indifférence. Seule Marie, ta mère, et quelques autres femmes sont restées là, témoins de ta souffrance et de ta mort. Leur exemple nous inspire à nous engager à ne pas laisser seuls ceux qui sont en agonie aujourd’hui sur trop de calvaires répandus dans le monde, parmi lesquels figurent les camps d’hébergement semblables à des camps de concentration dans les pays de transit, les navires auxquels est refusé un port sûr, les longues négociations bureaucratiques concernant la destination finale, les centres de permanence, les points d’accès, les camps des travailleurs saisonniers. 

Prière : 

Seigneur, nous te prions : aide-nous à nous faire les prochains des nouveaux crucifiés et désespérés de notre temps. Apprends-nous à essuyer leurs larmes, à les réconforter comme ont su le faire Marie et les autres femmes au pied de ta croix. 

Prions ensemble en disant…
“Seigneur, aide-nous à donner notre vie” :
À ceux qui ont subi des injustices, la haine et la vengeance,
À ceux qui ont été injustement calomniés et condamnés,
À ceux qui se sentent seuls, abandonnés et humiliés. 

 

Treizième station
Jésus est descendu de la croix 

« Si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul ; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit » (Jn 12, 24). 

Réflexion : 

Qui se rappelle, en cette époque de nouvelles rapidement consumées, ces vingt- six nigérianes, englouties par les vagues, dont les funérailles ont été célébrées à Salerne. Leur calvaire a été dur et long. D’abord la traversée dans le désert du Sahara, entassées dans des bus de fortune. Ensuite, le séjour forcé dans les horribles centres d’hébergement en Libye. Enfin le saut en mer, où elles ont trouvé la mort aux portes de la ‘‘terre promise’’. Deux d’entre elles portaient dans leur sein le don d’une nouvelle vie, des enfants qui ne verront jamais le jour. Mais leur mort, comme celle de Jésus descendu de la croix n’a pas été vaine. Nous confions toutes ces vies à la miséricorde de notre Père et Père de tous, mais surtout Père des pauvres, des désespérés et des humiliés. 

Prière : 

Seigneur, en ce moment, nous entendons retentir encore une fois le cri que le Pape François a lancé à Lampedusa, destination de son premier voyage apostolique : « Qui a pleuré » ? Et maintenant, après d’innombrables naufrages, nous continuons de crier : « Qui a pleuré ? ». Qui a pleuré ?, nous demandons-nous face à ces vingt-six cercueils alignés et sur lesquels reposait une rose blanche ? Seules cinq parmi elles ont été identifiées. Avec ou sans nom, toutes, cependant sont nos filles et nos sœurs. Elles méritent toutes respect et mémoire. Elles nous demandent toutes de nous sentir responsables : institutions, autorités et nous aussi, dans notre silence et notre indifférence. 

Prions ensemble en disant…
“Seigneur, aide-nous à partager les pleurs” :
Face aux souffrances des autres,
Face à tous les cercueils sans nom,
Face aux pleurs de tant de mères

 

Quatorzième station
Jésus est mis au tombeau 

« Tout est accompli » (Jn 19, 30). 

Réflexion : 

Le désert et les mers sont devenus les nouveaux cimetières d’aujourd’hui. Face à ces morts, il n’y a pas de réponses. Il y a cependant des responsabilités. Des frères qui laissent d’autres frères mourir. Des hommes, des femmes, des enfants que nous n’avons pas pu ou voulu sauver. Tandis que les gouvernements discutent, enfermés dans les palais du pouvoir, le Sahara se remplit de cadavres de personnes qui n’ont pas résisté à la fatigue, à la faim, à la soif. Que de souffrance coûtent les nouveaux exodes ! Que de cruauté s’abat sur celui qui fuit : les voyages du désespoir, les extorsions et les tortures, la mer transformée en tombe d’eau. 

Prière : 

Seigneur, fais-nous comprendre que nous sommes tous enfants du même Père. Puisse la mort de ton Fils Jésus faire prendre conscience aux Chefs des nations et aux responsables des législations de leur rôle dans la défense de chaque personne créée à ton image et à ta ressemblance. 

CONCLUSION :

Nous voudrions nous rappeler l’histoire de la petite Favour, âgée de 9 mois, partie du Nigéria avec ses jeunes parents à la recherche d’un avenir meilleur en Europe. Durant le long et dangereux voyage en Méditerranée, sa maman et son papa sont décédés ainsi qu’une centaine de personnes qui avaient mis leur confiance en des trafiquants sans scrupules pour pouvoir parvenir à la “terre promise”. Seule Favour a survécu ; comme Moïse, elle a été, elle aussi, sauvée des eaux. Que sa vie devienne une lumière d’espérance sur le chemin vers une humanité plus fraternelle ! 

Prière : 

Au terme de ta Via Crucis, nous te prions, Seigneur, de nous apprendre à veiller, avec ta mère et les femmes qui t’ont accompagné au Calvaire, dans l’attente de ta résurrection. Qu’elle soit une lumière d’espérance, de joie, de vie nouvelle, de fraternité, d’accueil et de communion entre les peuples, les religions et les lois, afin que tous les fils et les filles de l’homme soient vraiment reconnus dans leur dignité de fils et filles de Dieu et ne soient plus jamais traités comme des esclaves.
Amen! 

Allocution du Saint-Père lors du Chemin de Croix JMJ Panama 2019

Vous trouverez ci-dessous le texte complet de l’allocution du pape François telle que prononcée lors du Chemin de Croix des JMJ 2019 au Panama:

Seigneur, Père de miséricorde, sur cette Bande Côtière, aux côtés d’un grand nombre de jeunes venus du monde entier, nous avons accompagné ton Fils sur le chemin de la croix ; ce chemin qu’il a voulu parcourir pour nous montrer combien tu nous aimes et à quel point tu es engagé pour nos vies.

Le chemin de Jésus vers le Calvaire est un chemin de souffrance et de solitude qui se poursuit de nos jours. Il marche et il souffre en tant de visages qui souffrent de l’indifférence satisfaite et anesthésiante de notre société qui consomme et se consume, qui ignore et néglige la douleur de ses frères.

Nous aussi, tes amis Seigneur, nous nous laissons prendre par l’indifférence et l’immobilisme. Les fois ne manquent pas où le conformisme nous a gagnés et nous a paralysés. Il a été difficile de te reconnaître dans le frère souffrant : nous avons détourné le regard, pour ne pas le voir ; nous avons trouvé refuge dans le bruit, pour ne pas l’entendre ; nous avons fermé la bouche, pour ne pas crier.

Toujours la même tentation. Il est plus facile et plus « payant » d’être amis dans les victoires et dans la gloire, dans le succès et sous les applaudissements ; il est plus facile d’être proche de celui qui est considéré comme populaire et vainqueur.

Comme il est facile de tomber dans la culture du bullying, du harcèlement et de l’intimidation.

Pour toi ce n’est pas comme ça Seigneur, sur la croix tu t’identifies à toutes les souffrances, à tous ceux qui se sentent oubliés.

Pour toi ce n’est pas ainsi Seigneur, tu as voulu embrasser tous ceux que nous considérons souvent ne pas être dignes d’une embrassade, d’une caresse, d’une bénédiction ; ou, plus grave encore, ceux dont nous ne réalisons pas qu’ils en ont besoin.

Pour toi ce n’est pas ainsi Seigneur, sur la croix tu rejoins le chemin de croix de chaque jeune, de chaque situation pour la transformer en chemin de résurrection.

Père, aujourd’hui le chemin de croix de ton Fils se prolonge : dans le cri étouffé des enfants que l’on empêche de naître, de tant d’autres qui se voient refuser le droit d’avoir une enfance, une famille, une éducation ; de ceux qui ne peuvent pas jouer, chanter, rêver… dans les femmes maltraitées, exploitées et abandonnées, dépossédées et niées dans leur dignité; dans les yeux tristes des jeunes qui voient leurs espérances d’avenir confisquées par le manque d’éducation et de travail digne ; dans la détresse des visages de jeunes, nos amis qui tombent dans les réseaux de personnes sans scrupules – et parmi elles se trouvent également des personnes qui disent te servir, Seigneur – réseaux d’exploitation, de criminalité et d’abus, qui se nourrissent de leurs vies.

Le chemin de croix de ton Fils se prolonge dans de nombreux jeunes et de nombreuses familles qui, engloutis par une spirale de mort à cause de la drogue, de l’alcool, de la prostitution et du trafic, sont privés non seulement d’avenir mais aussi de présent. Et, comme ont été partagés tes vêtements, Seigneur, leur dignité s’est retrouvé éparpillée et maltraitée.

Le chemin de croix de ton Fils se prolonge dans les jeunes aux visages renfrognés qui ont perdu la capacité de rêver, de créer et d’inventer les lendemains et qui « prennent leur retraite » avec l’ennui de la résignation et le conformisme, une des drogues les plus consommées de notre temps.

Il se prolonge dans la souffrance cachée et révoltante de ceux qui, au lieu de la solidarité de la part d’une société d’abondance, trouvent le rejet, la douleur et la misère, et en plus sont identifiés et traités comme les porteurs et les responsables de tout le mal social.

Il se prolonge dans la solitude résignée des personnes âgées, abandonnées et rejetées.

Il se prolonge dans les peuples autochtones, que l’on prive de leurs terres, de leurs racines et de leur culture, en réduisant au silence et en éteignant toute la sagesse qu’ils pourraient apporter.

Le chemin de croix de ton Fils se prolonge dans le cri de notre mère la terre, qui est blessée dans ses entrailles par la pollution de son ciel, par la stérilité de ses champs, par la saleté de ses eaux, et qui se voit bafouée par l’indifférence et la consommation effrénée qui dépasse toute raison. Il se prolonge dans une société qui a perdu la capacité de pleurer et de s’émouvoir face à la souffrance.

Oui, Père, Jésus continue à marcher, portant tous ces visages et souffrant en eux, tandis que le monde, indifférent, consomme le drame de sa propre frivolité. Et nous, Seigneur, que faisons-nous ?

Comment réagissons-nous devant Jésus qui souffre, qui marche, qui émigre sur le visage de tant de nos amis, de tant d’étrangers que nous avons appris à rendre invisibles. Et nous, Père de miséricorde, Consolons-nous et accompagnons-nous le Seigneur, abandonné et souffrant, dans les plus petits et les plus délaissés ?

L’aidons-nous à porter le poids de la croix, comme le Cyrénéen, en étant acteurs de paix, créateurs d’alliances, ferments de fraternité ?

Restons-nous au pied de la croix comme Marie ?

Contemplons Marie, femme forte. D’elle nous voulons apprendre à rester debout à côté de la croix. Avec la même détermination et le même courage, sans dérobades et sans illusions. Elle a su accompagner la souffrance de son Fils, ton Fils ; le soutenir dans le regard et le protéger avec le cœur. Douleur qu’elle a subie, mais qui ne lui a pas fait baisser les bras. Elle a été la femme forte du « oui », qui soutient et accompagne, protège et prend dans ses bras. Elle est la grande gardienne de l’espérance.

Nous aussi, nous voulons être une Église qui soutient et qui accompagne, qui sait dire : « Je suis ici ! » dans la vie et dans les croix de tant de christs qui marchent à nos côtés.

De Marie nous apprenons à dire « oui » à la patience endurante et constante de tant de mères, de pères, de grands-parents qui n’arrêtent pas de soutenir et d’accompagner leurs enfants et leurs petits- enfants quand « ils ne vont pas dans la bonne direction ».

D’elle nous apprenons à dire « oui » à la patience obstinée et à la créativité de ceux qui ne sont pas affaiblis et qui recommencent dans des situations où il semble que tout est perdu, en cherchant à créer des espaces, des foyers, des centres d’attention qui soient une main tendue dans la difficulté.

En Marie nous apprenons la force de dire « oui » à ceux qui ne se sont pas tus et qui ne se taisent pas face à une culture de la maltraitance et de l’abus, du dénigrement et de l’agression et qui travaillent pour offrir des possibilités et des conditions de sécurité et de protection.

En Marie nous apprenons à recevoir et à accueillir tous ceux qui ont souffert de l’abandon, qui ont dû quitter ou perdre leur terre, leurs racines, leurs familles et leur travail.

Comme Marie nous voulons être l’Église qui favorise une culture qui sait accueillir, protéger, promouvoir et intégrer ; qui ne stigmatise pas et surtout qui ne généralise pas, par la condamnation la plus absurde et la plus irresponsable, en identifiant tout migrant comme porteur de mal social.

D’elle nous voulons apprendre à rester debout à côté de la croix, non pas avec un cœur blindé et fermé, mais avec un cœur qui sait accompagner, qui connaît la tendresse et le dévouement ; qui comprend ce qu’est la miséricorde en abordant avec révérence, délicatesse et compréhension. Nous voulons être une Eglise de la mémoire qui respecte et valorise les anciens et qui défend leur place.

Comme Marie nous voulons apprendre à « être là ».

Enseigne-nous Seigneur à être présent au pied de la croix, au pied des croix ; réveille cette nuit nos yeux, notre cœur ; sauve-nous de la paralysie et de la confusion, de la peur et du désespoir. Apprends- nous à dire : ici je suis avec ton Fils, avec Marie et avec tant de disciples aimés qui veulent accueillir ton Règne dans leur cœur.

Discours du pape François lors de la Via Crucis des JMJ au Parc Jordan à Błonia, Cracovie

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Vous trouverez ci-dessous le texte complet du discours du pape François lors de la Via Crucis des JMJ au Parc Jordan à Błonia, Cracovie:

« J’avais faim, et vous m’avez donné à manger ;
j’avais soif, et vous m’avez donné à boire ;
j’étais un étranger, et vous m’avez accueilli ;
j’étais nu, et vous m’avez habillé ;
j’étais malade, et vous m’avez visité ;
j’étais en prison, et vous êtes venus jusqu’à moi. » (Mt 25, 35-36).

Ces paroles de Jésus répondent à l’interrogation qui résonne souvent dans notre esprit et dans notre cœur : « Où est Dieu ? ». Où est Dieu, si dans le monde il y a le mal, s’il y a des hommes qui ont faim, qui ont soif, sans toit, des déplacés, des réfugiés ? Où est Dieu, lorsque des personnes innocentes meurent à cause de la violence, du terrorisme, des guerres ? Où est Dieu, lorsque des maladies impitoyables rompent des liens de vie et d’affection ? Ou bien lorsque les enfants sont exploités, humiliés, et qu’eux aussi souffrent à cause de graves pathologies ? Où est Dieu, face à l’inquiétude de ceux qui doutent et de ceux qui sont affligés dans l’âme ? Il existe des interrogations auxquelles il n’y a pas de réponses humaines. Nous ne pouvons que regarder Jésus, et l’interroger lui. Et voici la réponse de Jésus : ‘‘Dieu est en eux’’, Jésus est en eux, il souffre en eux, profondément identifié à chacun. Il est si uni à eux, presqu’au point de former ‘‘un seul corps’’.

Jésus a choisi lui-même de s’identifier à ces frères et sœurs éprouvés par la douleur et par les angoisses, en acceptant de parcourir le chemin douloureux vers le calvaire. Lui, en mourant sur la croix, se remet entre les mains du Père et porte sur lui et en lui, avec un amour qui se donne, les plaies physiques, morales et spirituelles de l’humanité entière. En embrassant le bois de la croix, Jésus embrasse la nudité et la faim, la soif et la solitude, la douleur et la mort des Capture d’écran 2016-07-29 à 13.14.03hommes et des femmes de tous les temps. Ce soir, Jésus, et nous avec lui, embrasse avec un amour spécial nos frères syriens, qui ont fui la guerre. Nous les saluons et nous les accueillons avec une affection fraternelle et avec sympathie.

En parcourant de nouveau la Via Crucis de Jésus, nous avons redécouvert l’importance de nous configurer à lui, à travers les 14 œuvres de miséricorde. Elles nous aident à nous ouvrir à la miséricorde de Dieu, à demander la grâce de comprendre que sans miséricorde on ne peut rien faire, sans miséricorde, moi, toi, nous tous, nous ne pouvons rien faire. Regardons d’abord les sept œuvres de miséricorde corporelle: donner à manger à ceux qui ont faim ; donner à boire à ceux qui ont soif ; vêtir celui qui est nu ; offrir l’hospitalité aux pèlerins, visiter les malades ; visiter les détenus ; ensevelir les morts. Nous avons reçu gratuitement, donnons gratuitement. Nous sommes appelés à servir Jésus crucifié dans chaque personne marginalisée, à toucher sa chair bénie dans celui qui est exclu, qui a faim, qui a soif, qui est nu, détenu, malade, sans travail, persécuté, déplacé, migrant. Nous trouvons là notre Dieu, nous touchons là le Seigneur. Jésus lui-même nous l’a dit, en expliquant quel sera le ‘‘protocole’’ sur la base duquel  nous Capture d’écran 2016-07-29 à 13.22.56serons jugés : chaque fois que nous aurons fait cela au plus petit de nos frères, c’est à lui que nous l’aurons fait (cf. Mt 25, 31-46).

Les œuvres de miséricorde corporelle sont suivies des œuvres de miséricorde spirituelle : conseiller ceux qui sont dans le doute, instruire les ignorants, exhorter les pécheurs, consoler les affliger, pardonner les offenses, supporter avec patience les personnes ennuyeuses, prier Dieu pour les vivants et pour les morts. Dans l’accueil du marginalisé qui est blessé dans son corps, dans l’accueil du pécheur qui est blessé dans son âme, se joue notre crédibilité en tant que chrétiens.

Aujourd’hui, l’humanité a besoin d’hommes et de femmes, et de manière particulière de jeunes comme vous, qui ne veulent pas vivre leur vie ‘‘à moitié’’, des jeunes prêts à consacrer leur vie au service gratuit des frères les plus pauvres et les plus faibles, à imitation du Christ, qui s’est donné tout entier pour notre salut. Face au mal, à la souffrance, au péché, l’unique réponse possible pour le disciple de Jésus est le don de soi, y compris de la vie, à imitation du Christ ; c’est l’attitude du service. Si quelqu’un, qui se dit chrétien, ne vit pas pour servir, sa vie ne vaut pas la peine d’être vécue. Par sa vie, il renie Jésus Christ.

Ce soir, chers jeunes, le Seigneur vous renouvelle l’invitation à devenir des protagonistes dans le service ; il veut faire de vous une réponse concrète aux besoins et à la souffrance de l’humanité ; il veut que vous soyez un signe de son amour miséricordieux pour notre temps ! Pour accomplir cette mission, il vous indique le chemin de l’engagement personnel et du sacrifice de vous-mêmes : c’est le Chemin de la croix. Le Chemin de la croix est celui du bonheur de suivre le Christ jusqu’au bout, dans les circonstances souvent dramatiques de la vie quotidienne ; c’est le chemin qui ne craint pas les échecs, les marginalisations ou la solitude, parce qu’il remplit le cœur de l’homme de la plénitude de Jésus. Le Chemin de la croix est celui de la vie et du style de Dieu, que Jésus fait parcourir y compris par des sentiers d’une société parfois divisée, injuste et corrompue.

Le Chemin de la croix est l’unique qui vainc le péché, le mal et la mort, parce qu’il débouche sur la lumière radieuse de la résurrection du Christ, en ouvrant les horizons de la vie nouvelle et pleine. C’est le Chemin de l’espérance et de l’avenir. Celui qui le parcourt avec générosité et avec foi, donne espérance et avenir à l’humanité.

Chers jeunes, ce vendredi saint-là, beaucoup de disciples sont retournés tristes dans leurs maisons, d’autres ont préféré aller à la maison de campagne pour oublier la croix. Je vous pose la question : comment voulez-vous retourner ce soir dans vos maisons, dans vos lieux d’hébergement ? comment voulez-vous retourner ce soir pour vous rencontrer avec vous-mêmes ? Il revient à chacun de vous de répondre au défi de cette question.

Feuillet de prière pour le chemin de croix aux JMJ de Cracovie

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Vous trouverez ci-dessous le texte du chemin de Croix du pape François avec les jeunes des JMJ à Cracovie:

Chemin de Croix Cracovie 2016 fr

 

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